person:sylvain cypel

  • États-Unis. Fronde au parti démocrate contre l’influence israélienne
    Sylvain Cypel > 12 mars 2019
    https://orientxxi.info/magazine/etats-unis-insurrections-au-parti-democrate-contre-l-influence-israelien
    https://orientxxi.info/local/cache-vignettes/L800xH399/c7a654ae0af1b856b3a8bda6e905ea-e9adf.jpg?1552295653

    Rashida Tlaib fait partie de ce que l’on appelle aux États-Unis « l’escouade des 4 ». Quatre nouvelles élues, classées « progressistes », entrées à la Chambre des représentants à l’occasion de la vague démocrate qui a vu ce parti engranger son plus grand succès électoral depuis 1974 et reprendre aux républicains la majorité dont ils disposaient depuis 2010. Ces quatre femmes sont toutes jeunes, beaucoup plus à gauche que ne l’est l’appareil du parti, et issues des « minorités » : Rashida Tlaib est palestinienne (née à Detroit, au Michigan, un État qui regroupe la principale population d’origine syro-libano-palestinienne aux États-Unis) ; Ilhan Omar est une réfugiée somalienne ; Ayanna Pressley est une Afro-Américaine et Alexandria Ocasio-Cortez est portoricaine. Toutes partagent enfin un point commun peu fréquent dans le parti démocrate : elles défendent ardemment la cause palestinienne. (...)

    • L’évolution d’un David Rothkopf, ex-directeur de la revue Foreign Policy, est sur ce point très parlante. Longtemps supporteur d’Israël, il publiait il y a un an, après le vote à la Knesset de lois interdisant l’entrée du pays aux critiques de la politique coloniale israélienne, un article qu’il titrait : « Israël devient une voyoucratie illibérale et je ne parviens plus à le défendre ». « La rhétorique de la droite dure israélienne, qui se repaît de manière écœurante des souffrances qu’Israël inflige aux Palestiniens, de la mort d’une jeune fille de 16 ans et d’un paraplégique tués par les soldats israéliens, suggère qu’il faut désormais s’attendre au pire », écrivait-il. Et il concluait : « La politique que mène Israël a rendu beaucoup plus claire l’affaire que les Palestiniens proclament depuis des décennies quant au simulacre de démocratie israélienne. » Cela s’appelle un basculement. Rothkopf est un représentant typique des intellectuels juifs démocrates, de tout temps favorables à Israël et qui, comme lui, « n’y arrivent plus ». L’affaire Ilhan Omar, écrit-il, « a semé la panique à l’Aipac » ». La tentative d’assimiler toute critique d’Israël à de l’antisémitisme à échoué, et c’est heureux, ajoute-t-il. « Nous devons combattre l’antisémitisme, mais nous devons aussi combattre tous ceux qui n’ont aucun respect pour les pratiques démocratiques ».

      A mettre avec l’évolution de la situation aux États-Unis vis à vis de la Palestine :
      https://seenthis.net/messages/752002

      #Palestine #USA #BDS #Ilhan_Omar

  • Une affaire relativement petite et technique, mais qui démontre le recul des anti-BDS aux États-Unis, pourtant pays leader en la matière :

    Les sénateurs américains rejettent la loi anti-BDS et pro-Israël
    Maannews, le 10 janvier 2019
    http://www.agencemediapalestine.fr/blog/2019/01/14/les-senateurs-americains-rejettent-la-loi-anti-bds-et-pro-israe

    Traduction de :

    US Senators vote down anti-BDS, pro-Israeli bill
    Maannews, le 10 janvier 2019
    https://seenthis.net/messages/750837

    A regrouper avec un autre recul aux Etats-Unis :

    Former legislator in Maryland sues state over anti-BDS law
    Middle East Eye, le 9 janvier 2019
    https://seenthis.net/messages/750709

    #BDS #USA #Palestine

  • Nouvelles révélations sur les massacres de Sabra et Chatila
    26 octobre 2018
    https://orientxxi.info/lu-vu-entendu/nouvelles-revelations-sur-les-massacres-de-sabra-et-chatila,2688
    https://orientxxi.info/local/cache-vignettes/L800xH399/d892424cb0028bad9c9793b1b6c8b1-f34cc.jpg?1540487656

    Dans un livre sur la diplomatie américaine au Proche-Orient, le chercheur Seth Anziska revient sur les massacres de Sabra et Chatila (1982). Il apporte des éléments nouveaux sur l’implication du gouvernement israélien. Analyse de l’ouvrage et entretien avec l’auteur par Sylvain Cypel.
    (...)
    Orient XXI. — Sur la période que vous étudiez, il ressort de votre livre qu’empêcher la création d’un État palestinien a été l’objectif prioritaire constant des gouvernements israéliens, quels qu’ils soient.

    Seth Anzizka.— Absolument. Jusqu’aux années 1970, l’idée de souveraineté ou d’autodétermination palestinienne est totalement absente de la réflexion politique israélienne. Cela change lorsque le président américain Jimmy Carter parle d’une « patrie » (homeland) pour les Palestiniens. L’accord de Camp David entre l’Égypte et Israël en 1977 évoque une future « autonomie », pas un État. Mais à partir de là, les Israéliens font tout pour contrer la possibilité d’une autodétermination palestinienne. Même Yitzhak Rabin, contrairement à l’image bâtie après sa mort, était farouchement opposé à la création d’un État palestinien, y compris après Oslo. Son dernier discours à la Knesset est très clair : il ne veut pas d’un véritable État palestinien. Shimon Pérès y était encore plus hostile. Dans leur esprit, il ne pouvait s’agir que d’une vague autonomie sous contrôle israélien. Il en va de même aujourd’hui avec Benyamin Nétanyahou.

  • La jeunesse palestinienne ne s’avoue pas vaincue
    Akram Belkaïd & Olivier Pironet (@opironet), Le Monde Diplo, février 2018
    https://www.monde-diplomatique.fr/2018/02/BELKAID/58401

    La décision de M. Donald Trump de reconnaître Jérusalem en tant que capitale d’Israël, le 6 décembre dernier, a aggravé l’échec du « processus de paix » et provoqué d’importantes manifestations en Cisjordanie et à Gaza. Une contestation durement réprimée par Israël, qui multiplie les incursions militaires et les arrestations. Les jeunes Palestiniens, y compris des mineurs, sont les premiers visés. Nombre d’entre eux rompent avec les formes de militantisme de leurs aînés.

    Les drapeaux palestiniens claquent au vent sur l’allée principale de l’université de Birzeit, à la périphérie de Ramallah, ville où siège l’Autorité palestinienne. Non loin de la stèle qui honore les vingt-huit étudiants « martyrs » de l’établissement, tous tués par l’armée israélienne, un cortège se met en place. Un membre du service d’ordre va d’un carré à l’autre. Cagoulé sous son casque d’assaut et vêtu d’une tenue de camouflage avec grenades et ceinture d’explosif, il donne le tempo à de jeunes femmes et de jeunes hommes en treillis olive, le visage masqué par un keffieh. Tous scandent des slogans à la gloire de la résistance armée. Ils brandissent des bannières aux couleurs du Fatah rendant hommage au défunt président Yasser Arafat (1929-2004), et des banderoles saluant la mémoire de Cheikh Ahmed Yassine (1937-2004), le fondateur du Mouvement de la résistance islamique (Hamas). Les organisateurs de cette parade appartiennent au mouvement de la jeunesse du Fatah (Chabiba), le parti du président Mahmoud Abbas. Ils ont tenu à ce que le rassemblement célèbre les deux grandes factions politiques palestiniennes, qui peinent à mettre en œuvre leur accord de « réconciliation ». Signé en octobre 2017, celui-ci est censé tourner la page de plus de dix années de rivalité et d’affrontements fratricides.

    À l’écart, des étudiants en sociologie observent la scène d’un air sévère. « Ça n’est que du folklore, lâche Rami T. (1), 20 ans. Voilà ce que le Fatah et l’Autorité palestinienne proposent à la jeunesse : des gesticulations symboliques. C’est tout sauf de l’action politique sérieuse. Le régime n’entend pas impulser une mobilisation collective qui puisse réellement porter ses fruits. Il craint qu’une politisation des jeunes ne mène d’abord à une révolte contre lui. » Alors que 70 % de la population a moins de 30 ans, la politisation de la jeunesse constitue un sujet très délicat pour des dirigeants palestiniens à la légitimité de plus en plus contestée. Avant les accords d’Oslo, en 1993, et la création de l’Autorité, c’est le Haut-Conseil pour la jeunesse et les sports, une instance rattachée à l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), qui assurait la formation idéologique, notamment à travers l’organisation de camps de vacances et de volontariat. En 1993, un ministère de la jeunesse et des sports a vu le jour pour « donner aux jeunes le pouvoir d’agir sur le plan économique, social et politique ». Au fil du temps, les actions d’encadrement ont été abandonnées, et le ministère a été suspendu en 2013, le Haut-Conseil ayant repris du service sous l’égide de M. Abbas.

    Pour Youssef M., 22 ans, lui aussi étudiant en sociologie, « l’Autorité palestinienne veut éloigner les jeunes d’un militantisme authentique, présent sur le terrain, et les empêcher d’élaborer de nouvelles manières d’agir sur le plan politique. Or, depuis le début des années 2000 et l’échec du processus d’Oslo, la jeunesse est en manque de repères. Nous sommes en colère. Il n’y a eu aucun gain politique pour notre peuple. La division entre le Fatah et le Hamas nous indigne. L’occupation [israélienne] est une réalité permanente. Nous en vivons la violence au quotidien. Notre situation sociale et économique demeure précaire. Toutes les conditions sont réunies pour que naisse une mobilisation à grande échelle ».

    Quand l’Autorité veut museler la contestation

    Les jeunes sont « les premières victimes de la lutte contre l’occupation en termes de morts, de blessés, d’arrestations et de détentions », montre une récente étude (2), et, sur les 95 Palestiniens tués par l’armée israélienne ou les colons en 2017, une cinquantaine avaient moins de 25 ans (3). Mais ils sont aussi touchés de plein fouet par les difficultés que connaît l’économie, avec un taux de chômage estimé à 27 % (18 % en Cisjordanie, 42 % à Gaza), soit l’un des « plus élevés du monde », « d’une ampleur rarement atteinte (…) depuis la Grande Dépression », selon les Nations unies (4). Environ un tiers des 15-29 ans sont sans emploi en Cisjordanie (56 % à Gaza), et cette proportion augmente à près de la moitié pour les femmes, qui constituent la majorité des jeunes diplômés. À l’échelle nationale, seuls 40 % des jeunes Palestiniens sont intégrés au marché du travail. Si le taux de scolarisation universitaire est l’un des plus importants du monde arabe (44 % selon l’Unesco), les étudiants n’ont que très peu de débouchés professionnels une fois leur diplôme en poche. Un très grand nombre d’entre eux doivent se tourner vers le marché informel, où ils perçoivent bien souvent une rémunération inférieure au salaire minimum établi par l’Autorité palestinienne (2,40 dollars l’heure, soit 2 euros) et ne disposent d’aucune couverture sociale.

    Houda A., 20 ans, étudie le journalisme à l’université de Bethléem, un écrin de verdure perché sur les hauteurs d’une ville encombrée où affluent les cars de touristes venant d’Israël pour une brève visite de l’église de la Nativité. Cet établissement catholique accueille 3 500 étudiants, dont trois quarts sont de confession musulmane et environ 80 % de sexe féminin. Originaire de Jérusalem-Est, où les établissements supérieurs palestiniens sont interdits par Israël, Houda met trois heures chaque jour pour effectuer le trajet aller-retour entre l’université et la Ville sainte, pourtant distante de six kilomètres, en raison des barrages israéliens. Elle décrit une situation qui ne cesse de se détériorer : « L’occupation pèse sur nos vies d’étudiants. C’est elle qui dicte nos choix, comme celui de l’université où nous souhaitons étudier. Si on habite Jérusalem, on y réfléchira à deux fois avant de s’inscrire à Birzeit ou à Naplouse, ne serait-ce qu’en raison des restrictions à la liberté de mouvement imposées par Israël (5). Mais l’université demeure un cocon qui ne nous forme pas sur le plan politique pour faire face à cette situation. Pour nos aînés, y entrer signifiait choisir un parti et s’engager dans le militantisme. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. » De nombreux étudiants et enseignants rencontrés déplorent que ni le Fatah ni le Hamas n’aient un projet politique susceptible de mobiliser la jeunesse et de favoriser l’émergence d’élites capables de prendre le relais à la tête d’un mouvement national essoufflé.

    Ce reproche, nous l’entendrons à plusieurs reprises. À l’université de Bethléem, par exemple, où assister à une matinée d’activités libres permet de prendre la mesure de l’ambiguïté de la situation. D’un côté, dans une cour ombragée, près de deux cents étudiants joviaux et bruyants participent à un jeu de questions-réponses scandées au son de chansons occidentales ou de pop libanaise. De l’autre, dans un amphithéâtre clairsemé à l’ambiance studieuse, une trentaine de personnes suivent un débat à propos de la loi controversée sur la criminalité électronique, adoptée par l’Autorité palestinienne en juin 2017. Destiné officiellement à réglementer l’usage d’Internet et des réseaux sociaux, ce texte permet d’emprisonner tout citoyen dont les écrits portent atteinte « à l’intégrité de l’État, à l’ordre public ainsi qu’à la sécurité intérieure ou extérieure du pays », ou menacent « l’unité nationale et la paix sociale » (6). Jugée contraire aux droits fondamentaux par une large partie de la société civile, cette loi vise à faire taire et à punir les journalistes contempteurs du régime, les opposants, mais aussi les militants et les jeunes, très actifs sur les réseaux sociaux, où les critiques contre le pouvoir pleuvent. En témoigne l’interpellation par les services de sécurité palestiniens, en septembre dernier, de M. Issa Amro, responsable de La Jeunesse contre les colonies, un mouvement établi à Hébron (Al-Khalil), qui avait dénoncé sur Facebook l’arrestation d’un journaliste ayant appelé à la démission de M. Abbas. M. Amro avait déjà été arrêté par l’armée israélienne en février 2016, après avoir organisé une manifestation pacifique contre la colonisation (7).

    Nabd, mouvement contre l’occupation et la colonisation

    Yassir D., 23 ans, inscrit en cursus de journalisme, est l’un des initiateurs de ce débat. Il ne s’étonne ni du manque d’intérêt des étudiants pour un sujet qui les concerne pourtant au premier chef ni de l’absence de mobilisation populaire contre ce texte. « Nos parents sont incités par le gouvernement à s’endetter pour consommer (8) et hésitent de ce fait à contester l’ordre établi. Quant aux jeunes, leurs conditions de vie sont telles qu’ils veulent aussi s’amuser.. Alors, on leur offre l’illusion qu’ils peuvent le faire comme n’importe où ailleurs. Cela ne veut pas dire qu’ils n’ont pas de conscience politique ; c’est juste qu’ils ne se reconnaissent dans aucune des forces existantes. » Selon une étude de référence, 73 % des Palestiniens de 15 à 29 ans affirment n’être affiliés à aucun parti et expriment une grande méfiance à l’égard des institutions (9).

    Manal J., 22 ans, étudiante en sciences de la communication, a suivi tout le débat. Elle applaudit l’écrivain et chroniqueur Hamdi Faraj quand il dénonce une « loi liberticide visant à réduire au silence les voix dissidentes » et ne cache pas son agacement lorsqu’un avocat proche du pouvoir affirme que « la situation difficile [des Palestiniens] exige de la retenue et un sens des responsabilités, une liberté totale d’expression n’étant ni possible ni souhaitable ». Se sent-elle prête pour autant à s’engager sur le plan politique ? Elle livre une réponse gênée : « Je suis décidée à le faire, mais ce n’est pas simple. Il y a une règle que tous les jeunes connaissent : faire de la politique, c’est, tôt ou tard, aller en prison, qu’elle soit israélienne ou palestinienne. Pour une femme, cela peut avoir des effets dramatiques. Au-delà des conséquences physiques et morales de l’incarcération, on risque de ne jamais pouvoir trouver de mari, car notre société reste très conservatrice, et toutes sortes de rumeurs peuvent nuire à la réputation d’une femme qui a fait de la prison. » Toutes ces femmes arrêtées ne bénéficient pas de la même attention médiatique internationale qu’Ahed Tamimi, 16 ans, emprisonnée en décembre dernier pour avoir bousculé deux soldats israéliens. Depuis 1967, près de 800 000 Palestiniens des territoires occupés ont été incarcérés par les Israéliens, soit deux hommes adultes sur cinq — souvent sous le régime de la détention administrative, sans inculpation ni procès. Sur ce total, on compte quinze mille femmes.

    Proche de l’extrême gauche, Wissam J., 26 ans, en faculté de sociologie à Birzeit, a connu lui aussi la prison, au même titre que de nombreux étudiants de l’université, considérée comme l’un des creusets du militantisme en Palestine (près d’une soixantaine d’entre eux sont actuellement détenus par Israël, et environ huit cents ont été arrêtés par l’armée depuis une dizaine d’années). Il a été libéré en 2015, après avoir passé trois ans dans les geôles israéliennes — ce qui lui vaut autant de retard dans ses études. Pour quel motif a-t-il été emprisonné ? « J’ai été arrêté et condamné pour “militantisme” », nous répond-il avec un sourire pudique, sans entrer dans les détails. Comme ses camarades de bancs Rami et Youssef, Wissam milite au sein de Nabd (« battement » en arabe), un mouvement de jeunes en lutte contre l’occupation et la colonisation israéliennes, « mais aussi contre l’Autorité, la division politique interpalestinienne et la “normalisation” avec Tel-Aviv promue par certaines ONG [organisations non gouvernementales] et par des pontes du régime », assène Youssef. Né à Ramallah en 2011, dans le sillage du mouvement de contestation populaire lancé par le Collectif du 15 mars pour appeler à l’unité nationale face à Israël, Nabd se veut « indépendant des grands partis », nous explique-t-il, avant d’ajouter : « Mais nous n’agissons pas contre eux, même si nous nous situons en dehors du cadre politique traditionnel, qui a montré ses limites. »

    Marqué « à gauche », comme nous le confie Rami, le mouvement, dont certains membres sont également issus du courant islamiste, a essaimé dans plusieurs villes de Cisjordanie et tente de tisser des liens avec les jeunes de Gaza. Il met aussi l’accent sur l’éducation populaire et œuvre à la « réappropriation de l’identité, de l’histoire et de la mémoire collective palestiniennes, menacées par l’atomisation de la société que favorise la politique néolibérale de l’Autorité, sous l’influence de la Banque mondiale et des Occidentaux ». Les militants de Nabd entendent par ailleurs lutter contre la fragmentation du territoire et éviter que la séparation entre les grandes villes de Cisjordanie — sans oublier l’isolement de Gaza — n’ancre définitivement l’image d’un « archipel de cités autonomes » dans l’imaginaire palestinien. « Nous proposons également des activités culturelles et artistiques. Par exemple, une troupe de théâtre itinérante se produit dans les camps de réfugiés, pour redonner vie à la culture populaire du pays », ajoute Wissam.

    Offrir un horizon collectif à la « génération d’Oslo »

    « Ces militants veulent faire de la politique “autrement”, analyse Sbeih Sbeih, sociologue palestinien et chercheur à l’université Aix-Marseille, qui suit de près l’évolution de ce mouvement. Au discours de nos dirigeants sur le “développement de l’économie”, la “construction étatique” et la “paix”, ils opposent un modèle de résistance — contre Israël, mais aussi sur le plan économique, politique, éducatif et culturel — au nom d’un objectif suprême, la libération de toute la Palestine. C’est la raison pour laquelle ils sont à la fois dans le viseur des autorités israéliennes et dans celui des services de sécurité de l’Autorité, comme tous ceux qui remettent en question l’ordre établi. » Les Israéliens ne s’y sont pas trompés : l’un des fondateurs de Nabd, arrêté l’année dernière, est toujours sous les verrous, avec le statut de « détenu administratif ». Bassel Al-Araj, proche du mouvement, a quant à lui été abattu par l’armée israélienne à Al-Bireh (Ramallah) le 6 mars 2017, au terme d’une longue traque. Ce pharmacien de 33 ans originaire d’Al-Walajah (Bethléem), très présent sur le terrain de la contestation, mais aussi dans les ateliers d’éducation populaire, avait été relâché peu de temps auparavant par les forces de sécurité palestiniennes, qui l’avaient accusé en avril 2016 de « préparation d’une action terroriste », puis incarcéré pendant six mois. Pour beaucoup, sa mort est le fruit de la coordination sécuritaire entre les services de renseignement palestiniens et leurs homologues israéliens, très décriée par la population des territoires (10).

    Nabd est loin d’être la seule organisation de jeunes active en Palestine. Sans compter les affiliations à des associations classiques (sport, culture, solidarité...), près de 40 % des 15-29 ans font partie d’un mouvement semblable, et ces dernières années ont vu apparaître de nombreux collectifs, comités et associations dont le maître-mot est « l’unité du peuple palestinien », comme Gaza Youth Breaks Out (GYBO) ou Jabal Al-Mukabir Local Youth Initiative. Créé en 2010 par des blogueurs gazaouis, le premier dénonce en même temps l’occupation israélienne, la corruption des responsables politiques et l’incurie des principaux partis. Le second, installé à Jérusalem-Est, s’est illustré en organisant, le 16 mars 2014, une chaîne humaine autour des remparts de la Ville sainte pour protester contre la colonisation juive et réaffirmer l’identité palestinienne. « Notre génération veut innover. Elle entend repenser le discours politique traditionnel et cela explique le foisonnement d’initiatives qui mélangent culture, social, engagement politique et arts », analyse Karim Kattan, chercheur et écrivain originaire de Bethléem. Membre du projet El-Atlal (« les ruines »), qui invite de jeunes artistes, chercheurs et écrivains, palestiniens ou étrangers, à travailler en résidence à Jéricho, il est persuadé que le recours à la création « fait partie des nouveaux modes de mobilisation ». Cela permet aussi, selon lui, de repenser les liens de solidarité entre Occidentaux et Palestiniens. « Le temps des ONG qui viennent passer trois mois chez nous et qui repartent avec le sentiment du devoir accompli est révolu. Les étrangers — notamment les Français — ne doivent plus venir “s’occuper” de nous, mais travailler avec nous. Et apprendre de nous comme nous apprenons d’eux.. »

    Mais quel est le rayonnement de ces mouvements, leur poids dans la société ? D’après Abaher El-Sakka, professeur de sociologie à Birzeit, « il ne faut pas surestimer leur influence, relativement limitée étant donné l’espace restreint dans lequel ils peuvent agir, les blocages liés aux structures du pouvoir et, bien sûr, la répression israélienne. Mais des mouvements comme Nabd peuvent créer une dynamique et préparer le terrain, à terme, à d’importants changements sur le plan sociopolitique. Ce qui est sûr, c’est qu’ils offrent une solution en matière d’engagement collectif aux jeunes Palestiniens, en proie au désenchantement devant l’absence de perspectives et l’impossibilité de jouer un rôle décisionnel dans la société.. Beaucoup de ces jeunes, se sentant laissés pour compte, rejettent tous les partis en bloc et se replient sur eux-mêmes, avec le risque que certains se tournent vers l’action violente ». Ce fut le cas, notamment, lors du soulèvement de 2015-2016, qui a vu se multiplier les attaques isolées, souvent avec un simple couteau, contre les soldats israéliens et les colons dans les territoires occupés. Ces attaques ont été essentiellement le fait de jeunes de moins de 25 ans, indépendants des partis et sans revendication (11). Elles ont entraîné une répression féroce, avec 174 Palestiniens tués entre octobre 2015 et février 2016.

    Ces actes désespérés, beaucoup de nos interlocuteurs disent les comprendre et refusent de les condamner. Anissa D., 25 ans, vit dans le camp de réfugiés de Jénine, où 70 % des treize mille habitants sont au chômage. Enfant, elle a connu l’offensive israélienne d’avril 2002 contre le camp, qui fit officiellement cinquante-deux morts parmi les Palestiniens (au moins deux cents selon les habitants). Sans qualification, elle travaille comme femme de ménage dans un complexe hôtelier du nord de la ville dont la clientèle est essentiellement composée de Palestiniens d’Israël. Elle avoue penser souvent à recourir à la violence. « Je me raisonne, parce que je sais que les Israéliens puniront toute ma famille et que chacune de nos révoltes a été payée au prix fort. Mais je ne supporte pas le sort de mon peuple. Je ne peux pas me résigner. J’admire ceux qui ont donné leur vie pour notre cause. » Pour Houda, l’étudiante en journalisme à Bethléem, « les attaques individuelles menées contre les soldats aux barrages sont un moyen comme un autre de résister à l’occupation, d’opposer la force à la violence exercée par Israël ». Youssef, de Birzeit, estime de son côté que « ces actions extrêmes sont le fruit d’une immense frustration face à la perpétuation de la colonisation, aux vexations subies quotidiennement aux postes de contrôle et à un horizon complètement bouché ». Un point de vue qu’exprimera devant nous, de manière plus abrupte, Mohsen B., un commis d’une vingtaine d’années employé dans une épicerie de la vieille ville de Naplouse : « Depuis que je suis né, les Israéliens ne m’ont autorisé qu’une seule fois à me rendre à Jérusalem, et je me sens comme asphyxié ici, enfermé dans mon propre pays. Je n’ai pas d’économies, pas de femme, et je n’ai pas fait d’études supérieures. Je me suis sacrifié pour la patrie en restant ici, mais maintenant je ne souhaite qu’une chose : partir à l’étranger. C’est ça ou me jeter sur un soldat à un barrage... » Comme la majorité de nos interlocuteurs, Mohsen n’éprouve aucune sympathie pour des mouvements armés, tels qu’Al-Qaida ou l’Organisation de l’État islamique (OEI).

    à Hébron, murs de béton et portiques de détection

    Pour Majdi A., 28 ans, une figure du camp de réfugiés de Dheisheh, à Bethléem, l’exil n’est pas une option. Ce camp, l’un des plus importants de Cisjordanie, où vivent quinze mille personnes, permet de prendre toute la mesure du désœuvrement de la jeunesse. « Dheisheh est dans le collimateur de l’armée israélienne, qui l’envahit très souvent, comme la plupart des camps de réfugiés, nous explique Majdi. La majorité des personnes arrêtées sont des jeunes, accusés d’appeler à la violence sur Facebook ou de lancer des pierres contre les soldats. Plus d’une centaine ont été blessés dans des heurts au cours des six derniers mois. On compte par ailleurs deux morts de 21 et 18 ans [en 2017], et environ quatre-vingts gamins handicapés, sciemment visés aux jambes. » Lorsque nous l’interrogeons sur les menaces pesant sur les jeunes qui s’opposent à l’occupation ou à la politique de l’Autorité, il nous répond sans détour : « Nous ne pouvons pas protester ni avoir d’activités politiques autres que celles qui sont contrôlées par le pouvoir ; nous subissons des pressions de part et d’autre. La seule solution, c’est de s’engager pacifiquement. Moi, par exemple, j’ai choisi de rester ici, de ne pas partir à l’étranger et d’œuvrer en faveur de la communauté au travers d’actions sociales et culturelles. Je resterai ici pour défendre nos droits, même si je dois y laisser ma vie. »

    Si demeurer en Palestine est un acte de résistance relevant du soumoud (« ténacité » en arabe), y revenir l’est tout autant. C’est l’avis de Maher L., 26 ans, commerçant dans la vieille ville d’Hébron, à quelques encablures du caveau des Patriarches (ou mosquée Ibrahim). La population palestinienne du centre historique a diminué de moitié depuis vingt ans. Les six mille habitants qui restent sont soumis à la pression permanente de huit cents colons particulièrement agressifs et de quelque trois mille soldats. Murs de béton, points de contrôle, tourniquets pour filtrer les passages, caméras de surveillance et portiques de détection de métaux installés par l’armée israélienne, filets grillagés placés par les commerçants pour protéger les rares boutiques encore ouvertes des objets et des immondices lancés des étages par les colons, maisons palestiniennes dégradées par ces derniers : vivre ici est un enfer. Le visage marqué, Maher le reconnaît, mais dit ne plus vouloir quitter son pays après être parti à l’étranger pendant trois ans. « Je me suis exilé en Allemagne, mais l’appel de ma terre natale a été plus fort. Je pourrais repartir. Les colons et les organisations qui les soutiennent nous incitent à le faire ; certains offrent même un pécule. Ce serait une aubaine : mon commerce est moribond, car rares sont les téméraires qui prennent le risque de venir faire leurs courses chez nous. Mais je ne vendrai jamais et je resterai ici, quoi qu’il advienne. J’attends. Le temps n’est pas notre ennemi. »

    Akram Belkaïd & Olivier Pironet

    (1) Tous les noms de nos interlocuteurs ont été modifiés, à l’exception de ceux des deux sociologues et de l’écrivain.

    (2) « Palestinian Youth » (PDF), Palestinian Academic Society for the Study of International Affairs (Passia), Jérusalem, avril 2017.

    (3) Cf. « Deaths in 2017 », Israel-Palestine Timeline.

    (4) « Rapport sur l’assistance de la Cnuced au peuple palestinien. Évolution de l’économie du territoire palestinien occupé » (PDF), Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced), Genève, 10 juillet 2017.

    (5) Sur les atteintes à la liberté de mouvement des Palestiniens en Cisjordanie, cf. la carte-affiche insérée dans « Palestine. Un peuple, une colonisation », Manière de voir, n° 157, février-mars 2018 (en kiosques).

    (6) Presidential Decree N° 16 of 2017 Regarding Cybercrime, articles 20 et 51, Ramallah, 24 juin 2017. Le Parlement israélien a de son côté adopté en première lecture, début 2017, une loi permettant d’obliger Facebook à supprimer tout texte incitant à la « violence » ou au « terrorisme ».

    (7) Cf. « Farid Al-Atrash et Issa Amro », La Chronique d’Amnesty, Paris, novembre 2017.

    (8) M. Salam Fayyad, premier ministre de l’Autorité palestinienne de 2007 à 2013, a mis en place en 2008 des mesures facilitant les prêts à la consommation. On estime par exemple que deux tiers des foyers de Ramallah sont endettés. Cf. « Palestinian workers campaign for social justice », Middle East Report, Richmond (Virginie), vol. 46, n° 281, hiver 2016.

    (9) « The status of youth in Palestine 2013 », Sharek Youth Forum, Ramallah, 2013.

    (10) Cf. Shatha Hammad et Zena Tahhan, « “Basil Al-Araj was a beacon for palestinian youth” », Al-Jazira, 7 mars 2017. Sur la coopération sécuritaire israélo-palestinienne, lire « En Cisjordanie, le spectre de l’Intifada », Le Monde diplomatique, octobre 2014.

    (11) Cf. Sylvain Cypel, « Pourquoi l’“Intifada des couteaux” continue », Orient XXI, 24 février 2016.

    #Palestine

  • Jérusalem. Donald Trump rompt avec cinquante ans de politique américaine | Sylvain Cypel
    http://orientxxi.info/magazine/jerusalem-donald-trump-rompt-avec-cinquante-ans-de-politique-americaine,

    Donald Trump a annoncé mercredi 6 décembre la reconnaissance par les États-Unis de Jérusalem comme capitale de l’État d’Israël. Rompant ainsi avec cinquante ans de politique américaine et avec le consensus international, le président américain contribue à la déstabilisation du Proche-Orient. Donald Trump, le prince du chaos, a de nouveau frappé. Il a annoncé, mercredi 6 décembre, la reconnaissance officielle par les États-Unis de Jérusalem comme capitale de l’État d’Israël, ce à quoi de nombreux candidats (...) Source : Orient XXI

  • Les détentions administratives, un Guantanamo israélien | Sylvain Cypel
    http://orientxxi.info/magazine/les-detentions-administratives-un-guantanamo-israelien,2039

    Le Franco-Palestinien Salah Hamouri est incarcéré en Israël en vertu des ordonnances sur l’état d’urgence. Imposées par la puissance occupante britannique, elles étaient appliquées avant 1948 pour réprimer certains groupes sionistes, dont les dirigeants s’appelaient Menahem Begin ou Ytzhak Shamir, futurs premiers ministres d’Israël. Et étaient alors dénoncées par les juifs de Palestine comme « une violation flagrante des principes fondamentaux de la légalité et de la justice ». Pourtant, dès la création de (...) Source : Orient XXI

  • Non, l’antisionisme n’est pas un antisémitisme réinventé - RipouxBlique des CumulardsVentrusGrosQ
    http://slisel.over-blog.com/2017/07/non-l-antisionisme-n-est-pas-un-antisemitisme-reinvente.html
    http://orientxxi.info/plugins/auto/image_responsive/v7.3.0/rien.gif?1439988222

    « Nous ne céderons rien aux messages de haine, à l’antisionisme parce qu’il est la forme réinventée de l’antisémitisme ». On ne sait si, par ces mots, le président Emmanuel Macron a simplement espéré gagner opportunément les faveurs de Benyamin Nétanyahou, qu’il accueillait aux cérémonies de commémoration de la déportation des juifs parisiens en juillet 1942, ou s’il a énoncé une conviction plus profonde. Mais dans les deux cas, il a eu tort. Espérer séduire Nétanyahou en cédant à son verbe n’est qu’un leurre — demandez à Barack Obama ce qu’il en pense. Quant au fond, l’assimilation de l’antisionisme à une nouvelle mouture de l’antisémitisme est une erreur funeste. Cette assertion est l’une des clefs de voûte depuis des décennies de la hasbara, la communication israélienne. Et plus Israël s’enfonce dans la domination coloniale d’un autre peuple, les Palestiniens, plus l’assertion « antisionisme égal antisémitisme » est répétée pour stigmatiser quiconque critique cette domination.

    En soi, la méthode consistant à délégitimer la critique en démonisant son auteur est vieille comme la politique. Ainsi Joseph Staline et ses émules assimilaient-ils toute critique du communisme soviétique à du « fascisme ». Si les fascistes étaient viscéralement anticommunistes, cela ne faisait pas de tous les contempteurs du régime soviétique des fascistes. Mais les staliniens continuaient à vilipender leurs adversaires, sans distinction, sous ce vocable infamant. Aujourd’hui, un Robert Mugabe, au Zimbabwe, qualifie régulièrement ses adversaires de « défenseurs de l’apartheid ». Que des racistes patentés figurent parmi les dénonciateurs de l’autocrate zimbabwéen est évident. Mais que tous soient des nostalgiques de la ségrégation raciale est une accusation délirante et dérisoire. On pourrait multiplier les exemples.

    Il en va de même de l’idée selon laquelle l’antisionisme serait la version moderne de l’antisémitisme. D’abord parce que l’antisionisme n’est pas une idéologie très définie. Historiquement, il a consisté à récuser l’idée d’une solution nationaliste à la question juive. Aujourd’hui, il y a en Israël des gens qui se disent antisionistes par simple hostilité à une occupation des Palestiniens menée au nom même du sionisme. D’autres se disent « post-sionistes » parce qu’à leurs yeux, l’ambition du sionisme étant la constitution d’un État juif, son existence annule d’autorité la nécessité du sionisme. Je connais enfin des Israéliens tout à fait sionistes qui sont si révulsés par la politique de Nétanyahou qu’ils se disent honorés d’être traités d’« antisionistes » par un gouvernement d’extrême droite raciste et colonialiste. Ces derniers remplissent par exemple les rangs d’une ONG comme Breaking the Silence, qui regroupe des soldats dénonçant les crimes commis par leur armée contre des Palestiniens et dont plusieurs des dirigeants sont des officiers et aussi des juifs pieux. Ils ne sont pas antisémites. Ils sont même l’honneur d’Israël. Quant à moi, je considère le sionisme comme une question philosophiquement désuète. En revanche, si le sionisme, comme le prône Nétanyahou, consiste à exiger la reconnaissance d’Israël pour mieux empêcher le droit des Palestiniens à l’autodétermination, alors je suis antisioniste. Serais-je donc antisémite ?

    Bref, que l’on trouve parmi les antisionistes d’aujourd’hui des gens projetant sur Israël leur antisémitisme atavique ou récent ne fait aucun doute. Mais que l’antisionisme soit en tant que tel une idéologie antisémite est une idée infamante et erronée. Et puis, il y a plus grave. Il y a chez Nétanyahou non seulement cette utilisation abusive de l’accusation d’antisémitisme, mais aussi cette sidérante propension à s’entendre avec de vrais antisémites lorsque ça l’arrange. Au moment où vous-même, M. le Président, cautionniez sa thèse, le New York Times publiait un article d’opinion d’une journaliste et traductrice israélienne, Mairav Zonszein, accusant ouvertement son premier ministre de collusion avec celui de la Hongrie, Viktor Orban, un homme qui laisse proliférer l’antisémitisme parmi ses partisans.

    Et de fait, de Paris, Nétanyahou a rejoint Budapest. Depuis des années, le gouvernement israélien raffermit ses relations avec les gouvernements les plus réactionnaires d’Europe centrale. Il a soutenu avec une grande compréhension l’attitude du régime hongrois dans la récente crise des réfugiés syriens. Nétanyahou soutient aussi la campagne lancée par Orban contre le financier américain George Soros, dont la fondation favorise les initiatives démocratiques. Cette campagne est menée à l’aide d’arguments fleurant l’antisémitisme : Orban accuse Soros d’user de « l’argent étranger » pour nuire à son pays. Quant aux graffitis hostiles qui prolifèrent en Hongrie contre le magnat américain, beaucoup sont sans équivoque antisémites.

    Ce lien entre la droite coloniale israélienne que Nétanyahou incarne — même si désormais on trouve plus radical que lui en Israël — et des organisations exsudant un antisémitisme plus ou moins manifeste n’est pas neuf. Aux États-Unis, un polémiste d’extrême droite comme Glenn Beck, qui avait lui aussi insulté George Soros avec des relents antisémites, était venu se refaire une virginité en 2011 en visitant des colonies religieuses israéliennes extrémistes. Il y fut accueilli en héros (Beck est avant tout islamophobe). Quant à l’invité d’honneur du dernier diner de la Zionist Organisation of America (ZOA), une formation américaine qui regroupe les soutiens à la droite israélienne radicale, il se nommait Steve Bannon, proche conseiller de Donald Trump accusé entre autres par son ex-femme de propos antisémites. Le tollé fut tel dans la communauté juive américaine qu’il renonça à venir. Mais la ZOA afficha sa solidarité avec lui.

    On assiste aujourd’hui à un phénomène ahurissant dans cette dérive israélienne. À double détente, l’accusation d’antisémitisme y est désormais soumise aux intérêts contingents. Un : les antisionistes sont tous des antisémites. Deux : les prosionistes sont tous bienvenus, y compris quand ils sont antisémites. Si vous défendez les droits humains en Palestine, vous êtes antisémite. Si vous êtes islamophobe, que vous soyez aussi antisémite revêt peu d’importance. Le prix à payer à l’avenir pour cette folie risque d’être très élevé. Et l’avaliser aura été, selon l’adage, plus qu’une erreur : une faute.

    SYLVAIN CYPEL

  • Non, l’antisionisme n’est pas un antisémitisme réinventé | Sylvain Cypel
    http://orientxxi.info/magazine/non-m-le-president-l-antisionisme-n-est-pas-un-antisemitisme-reinvente,1

    « Nous ne céderons rien aux messages de haine, à l’antisionisme parce qu’il est la forme réinventée de l’antisémitisme ». On ne sait si, par ces mots, le président Emmanuel Macron a simplement espéré gagner opportunément les faveurs de Benyamin Nétanyahou, qu’il accueillait aux cérémonies de commémoration de la déportation des juifs parisiens en juillet 1942, ou s’il a énoncé une conviction plus profonde. Mais dans les deux cas, il a eu tort. Espérer séduire Nétanyahou en cédant à son verbe n’est qu’un leurre — (...) Source : Orient XXI

  • Comment les généraux israéliens ont préparé la conquête bien avant 1967
    Sylvain Cypel > 13 juin 2017
    http://orientxxi.info/magazine/comment-les-generaux-israeliens-ont-prepare-la-conquete,1892
    http://orientxxi.info/local/cache-vignettes/L800xH399/5348d415a43104f40751f9ce1ffea8-76d09.jpg?1496654686

    Non seulement, de l’aveu même de ses généraux, Israël n’était pas menacé de destruction en juin 1967, mais l’état-major de l’armée avait depuis longtemps préparé son plan de conquête de la Cisjordanie, de Jérusalem, de Gaza, du Sinaï et du Golan. Et il a imposé ce plan par un quasi-coup d’État contre le premier ministre Levi Eshkol et les membres de son gouvernement encore hésitants à déclencher les hostilités.(...)

  • « Liberty », l’histoire américaine au prisme de l’immigration
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/061016/liberty-l-histoire-americaine-au-prisme-de-l-immigration

    Le journaliste Sylvain Cypel revisite cette histoire de l’immigration aux États-Unis dans un livre à paraître le 6 octobre, Liberty, nourri d’analyses et d’anecdotes passionnantes. Mediapart publie le chapitre consacré à l’intégration, en Californie, des Chinois passés en quelques années du statut de « parias » à celui d’« immigrés modèles ».

    #Culture-Idées #Etats-Unis #immigration

  • « Liberty », l’histoire américaine au prisme de l’immigration
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/061016/liberty-lhistoire-americaine-au-prisme-de-limmigration

    Le journaliste Sylvain Cypel revisite cette histoire de l’immigration aux États-Unis dans un livre à paraître le 6 octobre, Liberty, nourri d’analyses et d’anecdotes passionnantes. Mediapart publie le chapitre consacré à l’intégration, en Californie, des Chinois passés en quelques années du statut de « parias » à celui d’« immigrés modèles ».

    #Culture-Idées #Etats-Unis #immigration

  • « Liberty », l’histoire américaine au prisme de l’immigration
    https://www.mediapart.fr/journal/international/061016/liberty-lhistoire-americaine-au-prisme-de-limmigration

    Le journaliste Sylvain Cypel revisite cette histoire de l’immigration aux États-Unis dans un livre à paraître le 6 octobre, Liberty, nourri d’analyses et d’anecdotes passionnantes. Mediapart publie le chapitre consacré à l’intégration, en Californie, des Chinois passés en quelques années du statut de « parias » à celui d’« immigrés modèles ».

    #International #Etats-Unis #immigration

  • Hillary Clinton, retour à un interventionnisme musclé ? | Sylvain Cypel
    http://orientxxi.info/magazine/hillary-clinton-retour-a-un-interventionnisme-muscle,1413

    La convention démocrate s’apprête à désigner Hillary Clinton comme candidate à l’élection présidentielle de novembre 2016. Son parcours comme secrétaire d’État comme ses déclarations de politique internationale laissent prévoir le retour à un interventionnisme plus musclé au Proche-Orient, fondé sur une alliance avec l’Arabie saoudite et Israël. Source : Orient XXI

  • La réélection de Nétanyahou enterre définitivement le « processus de paix » - Sylvain Cypel
    http://orientxxi.info/magazine/apres-la-reelection-de-netanyahou,0851

    Le nouveau succès électoral de Benyamin Nétanyahou met un point final au « processus de paix » ouvert en 1993 avec les accords d’Oslo. Il a porté aussi à son paroxysme la crise entre Tel-Aviv et Washington, même si les Etats-Unis continueront à soutenir Israël. Et le recours aux Nations unies redevient une option envisageable pour les Palestiniens. Les élections législatives israéliennes ont accouché d’une surprise. Donné battu, Benyamin Nétanyahou les a emportées, et d’assez loin, sur son adversaire de (...)

  • Des élections pour rien en Israël ? - Sylvain Cypel
    http://orientxxi.info/magazine/des-elections-pour-rien-en-israel,0842

    Les Israéliens désigneront leurs députés ce mardi 17 mars, à la suite de la dissolution du Parlement par Benyamin Nétanyahou. Celui-ci, qui pensait remporter facilement le scrutin, se retrouve en position difficile selon les sondages. Mais, quel que soit le futur premier ministre, la politique de colonisation et d’occupation des territoires palestiniens demeurera inchangée. Les chancelleries occidentales s’émeuvent : être enfin débarrassés de Benyamin Nétanyahou, voilà un miracle qu’aucune d’entre (...)

  • Charlie : Une aubaine pour Benyamin Nétanyahou - Sylvain Cypel
    http://orientxxi.info/lu-vu-entendu/revue-de-presse-israelienne,0794

    La presse israélienne a largement couvert les attentats à Paris — surtout celui contre un commerce cacher dans lequel trois Français et un Tunisien juifs ont été tués. Une partie des articles affirment leur soutien à Benyamin Nétanyahou, qui a profité des événements pour inviter les Français juifs à rejoindre Israël sur fond de théorie conspirationniste à propos de ce qui serait l’inquiétante « occupation » de l’Europe par les musulmans. D’autres, notamment dans le journal de centre gauche Haaretz dénoncent sa (...)

    • It is not just Mr. M’Bala M’Bala who has flourished in this atmosphere; other comedians trot out the most hackneyed racial clichés.

      The phenomenon cuts across social class. Take Alain Finkielkraut, a professor of philosophy at the elite École Polytechnique: He recently published “L’identité malheureuse,” a book bemoaning the dilution of an eternal France about to be defiled by swarthy barbarians threatening to plunge “European civilization” into a multicultural bouillabaisse. Among the objects of his disgust: “Halal butcher shops and fast food.”

      Mr. Finkielkraut’s sentiments echo those of Renaud Camus, a writer (not related to Albert Camus) who has denounced the “great replacement” of populations, which imposes on “the true rooted French” those who are not. Mr. Camus makes no secret of his admiration for Marine Le Pen, daughter of Jean-Marie and current leader of the National Front. Such ideas have even found resonance in the media, thanks to commentators like the political journalist Éric Zemmour, who laments the fate of the “white proletariat,” helpless before the “ostentatious virility of their black and Arab competitors seducing numerous young white women.”

      The worst came last fall with a campaign against France’s Roma people. The previous president, Nicolas Sarkozy, had already singled out this vulnerable population of 20,000 as a dangerous nuisance — despite the fact that the Roma constitute just 0.03 percent of the population. The interior minister, Mr. #Valls, has now called for their expulsion. Well might we wonder about the integrity of a politician who defends Jews from Dieudonné’s quenelle while deporting Gypsies.

  • Le faux tweet d’AP à 136 milliards de dollars - LeMonde.fr
    http://www.lemonde.fr/economie/article/2013/05/07/un-canular-a-136-milliards-de-dollars_3172521_3234.html

    Passionnant reportage de Sylvain Cypel pour le Monde sur une réunion du comité technologique de l’agence américaine de contrôle des marchés aux Etats-Unis, sur le thème comment se prémunir du piratage informatique. Six jours avant, le compte Twitter de l’agence Associated Press avait été piraté en annonçant un attentat à la Maison Blanche. En trois minutes, Wall Street perdait 136 milliards de dollars. Le lendemain, l’autorité ouvrait une enquête sur des contrats négociés à des niveaux trop volumineux (...)

    #finance #HighTradingFrequence