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  • Bangladesh : « Ce qui frappe dans les camps de réfugiés de Rohingya, c’est l’abandon d’un peuple et la déstructuration sociale »

    L’annonce faite par Emmanuel Macron lors de son voyage au Bangladesh, le 11 septembre, d’augmenter d’un million d’euros la contribution française aux activités du Programme alimentaire mondial dans les camps de Rohingya de ce pays est-elle à la hauteur de la situation ?

    Rappelons-nous. Il y a six ans, des centaines de milliers de Rohingya quittaient l’Etat de Rakhine [Arakan] au #Myanmar, l’ex-Birmanie. Ils fuyaient les massacres, les viols, les incendies de leurs maisons commis pendant l’offensive militaire lancée en août 2017. A la fin de cette même année, plus de 700 000 nouveaux réfugiés étaient arrivés dans le district de #Cox’s_Bazar, dans le sud-est du #Bangladesh. Ils rejoignaient les 200 000 réfugiés rohingya issus de déplacements antérieurs.

    Pour accueillir ces populations, un camp entre jungle et rizières est sorti de terre. #Kutupalong-Balukhali est aujourd’hui le plus grand camp de réfugiés au monde. Il se compose de plusieurs sites contigus dont les artères centrales en brique et en ciment débouchent sur des ruelles étroites. Là, les familles vivent dans de petites habitations faites de bambou et de bâches.

    Toute une série de restrictions

    Certaines sont posées à flanc de colline et donc exposées aux glissements de terrain, conséquence des pluies diluviennes qui peuvent s’abattre pendant la mousson. Les points d’#eau_potable, certes nombreux, ne sont ouverts que quelques heures par jour, et il est fréquent de voir des disputes s’y dérouler. Quelle ironie dans cette région parmi les plus humides au monde. Parfois, on surprend le long des frontières du camp les barbelés qui nous rappellent qu’il s’agit d’un bidonville semi-fermé.

    Si le Bangladesh a ouvert ses portes aux réfugiés, il les soumet à toute une série de restrictions. Les boutiques rohingya qui fleurissent le font selon le bon vouloir de la police qui peut les fermer au motif qu’elles n’ont pas été autorisées. Les déplacements à l’intérieur de Kutupalong, même d’un camp à l’autre, sont extrêmement limités. Il est en outre interdit aux Rohingya de travailler, bien qu’un grand nombre d’entre eux le fassent.
    Ils sont alors à la merci de la #police, des #bakchichs et des #arrestations. L’éducation est par ailleurs très encadrée. De multiples obstacles sont posés à l’enregistrement des naissances. L’approche du gouvernement à l’égard des camps est un mélange ambigu de tolérance et de prohibition : cette élasticité laisse les Rohingya dans un état d’incertitude perpétuelle.

    Le #contrôle_social auquel sont soumis les réfugiés est aussi le fait des groupes politico-criminels rohingya qui pullulent dans le camp et dont la présence, ces dernières années, s’est faite plus intense. Ces groupes sont en conflit ouvert pour le contrôle du trafic de yaba. Ce mélange de méthamphétamine et de caféine est principalement produit au Myanmar, et le Bangladesh est l’un des principaux marchés où circule cette drogue.

    Viols et violences

    Le déploiement humanitaire est impressionnant, mais l’engagement des donateurs s’amenuise. Le mois dernier, le « Plan de réponse conjoint » 2023 élaboré par les Nations unies et le gouvernement n’était financé qu’à hauteur de 30 %. Entre mars et juin, les allocations alimentaires mensuelles – des paiements en espèces reçus sur une carte SIM – sont passées de 12 à 8 dollars par personne.

    Cette réduction a pour conséquence d’entraver la capacité des réfugiés d’acheter des produits frais sur le marché et des vêtements. Il faut trouver de quoi manger, coûte que coûte, ce qui amène les réfugiés à se livrer à des activités illicites – cambriolages et trafics en tout genre.

    Les conséquences du sous-investissement par les bailleurs de fonds sont aussi médicales et viennent s’ajouter à celles de l’augmentation de la population dans un espace qui, lui, ne s’accroît pas. Chaque année, y naissent entre 30 000 et 35 000 #bébés. Du fait de la densité des lieux et de la faiblesse des services sanitaires, il est estimé que 40 % de la population du camp souffre de la #gale. La fermeture de certains services de #santé a pour effet d’engorger les structures qui se maintiennent.

    Les #femmes seules, comme les personnes âgées et handicapées, sont parfois contraintes de payer des services pour des tâches qu’elles n’ont pas la possibilité d’accomplir seules : réparer leur maison, porter la bouteille de gaz du point de distribution jusque chez elles en dépit de l’existence d’une assistance prévue pour combler une partie de ces besoins spécifiques. Les femmes sont vulnérables aux #viols et aux violences – les cas sont nombreux et loin d’être mis au jour.

    Un « facteur d’attraction »

    Il est difficile d’imaginer que l’engagement présidentiel français modifiera la donne. Cela nécessite un tout autre investissement. La survie d’un peuple, condamné à vivre dans ces conditions de nombreuses années encore, relève du génie. Ce qui frappe dans les camps de réfugiés rohingya de Cox’s Bazar, ce sont moins les limites du système de l’aide que l’abandon d’un peuple et sa conséquence : la déstructuration sociale.

    La plupart des réfugiés espèrent retourner au Myanmar, une étape qui ne pourra être franchie que lorsque leurs terres et leur nationalité, dont ils ont été privés en 1982, leur seront restituées. Certains se résolvent malgré tout à rentrer clandestinement au Myanmar où ils s’exposent aux violences commises par les autorités birmanes.
    Quelques-uns ont bénéficié de rares opportunités de réinstallation dans d’autres pays, comme le Canada ou les Etats-Unis, mais le gouvernement bangladais a suspendu le programme de réinstallation en 2010, arguant qu’il agirait comme un « facteur d’attraction ». Les initiatives récentes visant à relancer le processus ont été timides.
    Une possibilité est la traversée risquée vers la #Malaisie, un pays qu’un nombre croissant de Rohingya à Kutupalong considère comme une voie de salut. Pour la très grande majorité des réfugiés, il ne semble n’y avoir aucun avenir à moyen terme autre que celui de demeurer entre deux mondes, dans ce coin de forêt pétri de #dengue et de #trafics en tout genre.

    Michaël Neuman est directeur d’études au Centre de réflexion sur l’action et les savoirs humanitaires (Crash) de la Fondation Médecins sans frontières.
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/10/31/bangladesh-ce-qui-frappe-dans-les-camps-de-refugies-de-rohingya-c-est-l-aban

    Massacre des Rohingya : « Facebook a joué un rôle central dans la montée du climat de haine » en Birmanie
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/09/29/massacre-des-rohingya-facebook-a-joue-un-role-central-dans-la-montee-du-clim
    https://archive.ph/DMWO8

    Au Bangladesh, l’exil sans fin des Rohingya
    https://www.lemonde.fr/international/article/2022/12/16/au-bangladesh-l-exil-sans-fin-des-rohingya_6154745_3210.html
    https://archive.ph/xKPyh

    #camp_de_réfugiés #Birmanie #Rohingya #réfugiés #musulmans #barbelés #drogues #déchéance_de_nationalité #aide_humanitaire #Programme_alimentaire_mondial

  • Jeu vidéo : Epic Games paiera 520 millions de dollars pour ne pas avoir assez protégé les mineurs
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/12/19/jeu-video-epic-games-paiera-520-millions-de-dollars-pour-ne-pas-avoir-assez-

    (...)
    La FTC avait intenté deux actions distinctes contre Epic Games. La première, devant un tribunal civil fédéral de Caroline du Nord, reprochait à l’éditeur de ne pas avoir prévenu les parents de joueurs mineurs qu’il collectait des données personnelles sur leurs enfants.

    L’agence dénonçait également le fait que l’interface de communication, vocale ou par écrit, entre joueurs était activée par défaut pour tous les utilisateurs de Fortnite. De ce fait, des adultes pouvaient entrer librement en contact avec des enfants via la plate-forme. « A travers Fortnite, des enfants ont été menacés et harcelés, y compris sexuellement », faisait valoir la FTC dans le document soumis à un juge fédéral.

    La seconde action concernait le fait que les modalités d’achat d’objets virtuels dans le jeu avaient été tellement simplifiées que de jeunes joueurs pouvaient ne pas se rendre compte qu’ils effectuaient des achats.

    La FTC avait notamment recueilli des témoignages de parents expliquant avoir découvert que leurs enfants avaient dépensé plusieurs dizaines, voire centaines de dollars à leur insu en jouant à Fortnite. Depuis, Epic Games a notamment ajouté un niveau de validation supplémentaire pour un achat et instauré une limite de dépense sur la plate-forme pour les joueurs de moins de 13 ans.

  • Rachat d’Activision par Microsoft : l’autorité de la concurrence américaine veut bloquer l’opération
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/12/08/rachat-d-activision-par-microsoft-l-autorite-de-la-concurrence-americaine-ve

    L’autorité américaine de la concurrence, la FTC, a porté plainte jeudi 8 décembre pour bloquer le rachat pour 69 milliards de dollars (65 milliards d’euros) d’Activision Blizzard, éditeur de jeux vidéo à succès comme Call of Duty, par Microsoft.

    #jeu_vidéo #jeux_vidéo #business #finance #microsoft #activision_blizzard #jeu_vidéo_call_of_duty #ftc #concurrence #zenimax #bethesda_softworks #jeu_vidéo_starfield #commission_européenne

  • La rédaction de Gamekult démissionne après le rachat du site par Reworld Media
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/11/17/la-redaction-de-gamekult-demissionne-apres-le-rachat-du-site-par-reworld-med

    L’essentiel des journalistes du site de jeu vidéo a annoncé jeudi qu’ils entendaient quitter leur poste, après que sa maison mère, Unify, a été vendue par TF1 au groupe de médias connu pour sa stratégie de rachat et de réduction des coûts.

    #jeux_vidéo #jeu_vidéo #gamekult #reworld_media #rachat #acquisition #finance #cession #démission #départ #rédaction #journalisme #presse

  • En dépit de toutes ses contradictions, elle mérite le plus grand respect. Ce sont des personnes comme elle et Snowden, nos "braves pioupious" d’aujourd’hui.

    Chelsea Manning : « Maintenant, décrire la réalité est considéré comme un acte criminel »
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/10/18/chelsea-manning-maintenant-decrire-la-realite-est-considere-comme-un-acte-cr

  • Des données personnelles de clients Orange Cyberdefense diffusées en ligne
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/09/06/des-donnees-personnelles-de-clients-orange-cyberdefense-diffusees-en-ligne_6

    Un fichier avec les données personnelles de plusieurs centaines de ses clients a été partagé dimanche sur Internet. Il contient les coordonnées de nombreux responsables informatiques d’entreprises françaises, des informations particulièrement sensibles.

  • « #Uber_Files » : révélations sur le « #deal » secret entre #Uber et Emmanuel #Macron à Bercy

    Des documents internes à l’entreprise, analysés par « Le Monde », montrent comment, entre 2014 et 2016, le ministre de l’économie a œuvré en coulisse pour la société de #VTC, qui tentait d’imposer une #dérégulation_du_marché et affrontait l’hostilité du gouvernement.

    Premier octobre 2014. Depuis minuit, la toute nouvelle loi Thévenoud est entrée en vigueur : elle encadre beaucoup plus sévèrement les conditions pour devenir chauffeur Uber, trois ans après l’arrivée de l’entreprise américaine en France, et interdit de facto UberPop, le service qui a provoqué un gigantesque mouvement de colère des taxis dans l’Hexagone en permettant à tout un chacun de devenir chauffeur occasionnel. Mais à 8 h 30, ce matin-là, c’est un véhicule Uber un peu particulier qui se gare devant le 145 de la rue de Bercy – l’entrée du ministère de l’économie par laquelle passent les invités d’Emmanuel Macron, nommé un mois plus tôt à ce poste.

    « Meeting méga top avec Emmanuel Macron ce matin. La France nous aime après tout » Message du lobbyiste d’Uber Mark MacGann à ses collègues

    A l’intérieur du van Mercedes Viano se trouvent quatre figures d’Uber : Pierre-Dimitri Gore-Coty, le directeur Europe de l’Ouest, aujourd’hui chargé d’Uber Eats ; Mark MacGann, le lobbyiste en chef pour la zone Europe, Afrique, Moyen-Orient ; David Plouffe, l’ancien conseiller de Barack Obama, fraîchement nommé vice-président d’Uber ; et le fondateur et PDG de l’entreprise en personne, Travis Kalanick. Une heure plus tard, l’équipe de lobbying de choc ressort abasourdie du bureau d’Emmanuel Macron. « En un mot : spectaculaire. Du jamais-vu, écrit Mark MacGann dans un bref compte rendu envoyé dans la foulée à ses collègues. Beaucoup de boulot à venir, mais on va bientôt danser ;) » « Meeting méga top avec Emmanuel Macron ce matin. La France nous aime après tout », écrira-t-il également.

    Cette rencontre restée confidentielle ne figurait pas à l’agenda d’Emmanuel Macron. Le Monde et ses partenaires du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) sont aujourd’hui en mesure d’en révéler l’existence grâce à l’analyse d’une vaste quantité de documents internes d’Uber, transmis au quotidien britannique The Guardian. Ces « Uber Files », des dizaines de milliers d’e-mails, de présentations, de tableurs et de documents PDF, écrits entre 2013 et 2017, jettent un éclairage particulièrement cru sur ces années folles, émaillées de violences durant les manifestations de taxis, pendant lesquelles l’entreprise américaine a usé de toutes les recettes du lobbying pour tenter d’obtenir une dérégulation du marché en France.

    Surtout, ces documents montrent à quel point Uber a trouvé une oreille attentive chez Emmanuel Macron, qui scellera quelques mois plus tard un « deal » secret avec l’entreprise californienne pour « faire en sorte que la France travaille pour Uber afin qu’Uber puisse travailler en et pour la France ».

    Gouvernement court-circuité

    Les dirigeants d’Uber sont d’autant plus ravis de l’accueil extrêmement cordial du ministre de l’économie que le reste du gouvernement leur est très hostile. Le président François Hollande a bien rencontré très discrètement Travis Kalanick en février 2014, mais personne au sein de l’exécutif ne semble prêt à défendre Uber. Arnaud Montebourg, le prédécesseur d’Emmanuel Macron à Bercy, accusait directement Uber de « détruire des entreprises » ; au ministère de l’intérieur, Bernard Cazeneuve – qui a la tutelle des taxis – ne cache pas son hostilité au service, qui opère en marge de la loi et est visé par au moins quatre enquêtes différentes. Manuel Valls, premier ministre, n’a guère plus de sympathie pour Uber, et Alain Vidalies, aux transports, se méfie de ce service qui n’offre aucune sécurité de l’emploi. Lorsqu’il reçoit M. Kalanick, M. Macron ne peut ignorer qu’il court-circuite ainsi les décisions de ses collègues du gouvernement et des députés socialistes.

    L’actuel président de la République n’a jamais caché sa sympathie pour Uber et son modèle, à même, selon lui, de créer énormément d’emplois, notamment pour les personnes peu qualifiées. « Je ne vais pas interdire Uber, ce serait renvoyer [les jeunes de banlieue sans qualifications] vendre de la drogue à Stains [Seine-Saint-Denis] », avait-il déclaré à Mediapart en novembre 2016. Fin 2014, Emmanuel Macron défend très publiquement le modèle d’Uber lors de la conférence Le Web, durant laquelle il se prononce contre l’interdiction d’Uber à Paris et explique que « [son] job n’est pas d’aider les entreprises établies mais de travailler pour les outsiders, les innovateurs ».

    Emmanuel Macron a été, à Bercy, plus qu’un soutien, quasiment un partenaire

    Mais les « Uber Files » montrent à quel point Emmanuel Macron a été, à Bercy, plus qu’un soutien, quasiment un partenaire. Un ministre qui suggère à Uber de transmettre des amendements « clés en main » à des députés amis ; un ministre qu’Uber France n’hésite pas à solliciter en cas de perquisition dans ses locaux ; un ministre qui, ce 1er octobre 2014, « s’excuse presque » de l’entrée en vigueur de la loi Thévenoud, d’après un compte rendu du rendez-vous écrit par le lobbyiste Mark MacGann pour ses collègues anglophones. D’après ce message, M. Macron aurait affirmé vouloir aider Uber à « travailler autour » de cette loi.

    La rencontre d’octobre 2014 à Bercy avec Travis Kalanick est la première d’une longue série d’échanges avec le très controversé fondateur et PDG d’Uber, qui a quitté le conseil d’administration de l’entreprise en 2017 après une série de scandales de harcèlement et de conflits avec ses actionnaires. Au moins dix-sept échanges significatifs (rendez-vous, appels, SMS) ont eu lieu entre Emmanuel Macron ou ses proches conseillers et les équipes d’Uber France dans les dix-huit mois qui ont suivi son arrivée au ministère, dont au moins quatre rencontres entre le ministre et Travis Kalanick. Soit un échange par mois en moyenne.

    Relation « gagnant-gagnant »

    Les cadres d’Uber France entrevoient rapidement comment ils peuvent, dans une forme de symbiose, établir une relation « gagnant-gagnant » avec Emmanuel Macron, en fournissant au ministre des occasions de se présenter comme le champion de l’innovation, tout en assurant à l’entreprise des retombées médiatiques et politiques positives. Fin 2014, l’actualité offre un moment idéal : le géant du transport Mory Ducros, en grave difficulté financière depuis plusieurs années, s’apprête à déposer le bilan. Le dossier intéresse beaucoup Uber, et Travis Kalanick l’évoque avec Emmanuel Macron. Plutôt que de laisser les 2 200 salariés que compte encore l’entreprise perdre leur travail, pourquoi ne pas leur proposer de devenir chauffeurs Uber ? L’entreprise fait face à une pénurie de « supply » – « ravitaillement », le mot utilisé en interne pour désigner les chauffeurs.

    En février 2015, quand Mory Ducros dépose finalement le bilan, les principaux cadres d’Uber France voient une occasion parfaite pour « pousser » leur proposition de simplifier les conditions d’accès à la licence de VTC (véhicule de transport avec chauffeur). « Cela pourrait être une sortie de crise pour le ministre [Emmanuel Macron], avec des milliers de chauffeurs de poids lourds qui deviendraient chauffeurs Uber », écrit Alexandre Molla, responsable du développement d’Uber en France. « On devrait en parler aussi vite que possible au cabinet de Macron (…) pour voir si ça l’intéresserait d’explorer cette idée avec Travis Kalanick », répond Maxime Drouineau, de l’équipe affaires publiques d’Uber.

    Le projet n’aboutira jamais. Pas plus que celui, pourtant très avancé, d’organiser une visite des locaux d’Uber France et une rencontre avec des chauffeurs. Emmanuel Macron avait également donné son accord pour un détour par le siège californien d’Uber à San Francisco, en marge de son déplacement au Consumer Electronics Show, le salon des technologies de Las Vegas, visite qui n’aura jamais lieu. Fin 2015, un porte-parole d’Uber France s’agacera d’ailleurs publiquement que les rencontres avec son PDG ne soient « jamais inscrites à l’agenda » de ses interlocuteurs politiques.

    Dès sa première rencontre avec Travis Kalanick, le ministre s’engage à aider Uber qui est dans le viseur des services de la répression des fraudes

    En coulisse, en tout cas, Emmanuel Macron et son cabinet se démènent pour aider l’entreprise américaine. Dès sa première rencontre avec Travis Kalanick, le ministre de l’économie s’est engagé à donner un coup de pouce à Uber sur un dossier bien précis : la DGCCRF. A l’époque, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, sous la tutelle de Bercy, enquête sur Uber et son modèle, considérant qu’UberPop se présente de manière mensongère comme un service de covoiturage. Les contrôles de chauffeurs se multiplient et, à Paris, les cadres de l’entreprise se doutent qu’une perquisition est imminente. Ce 1er octobre 2014, Emmanuel Macron les rassure : opposé à ce que les agents de la DGCCRF soient « trop conservateurs » dans leur interprétation des textes, il demande à son cabinet d’avoir « une discussion technique » avec eux, selon un compte rendu de la réunion écrit par Uber.

    Mais six semaines après cette rencontre, et d’autres échanges plus informels, deux agents de la DGCCRF se présentent dans les locaux d’Uber France à Lyon. Trois jours plus tard, c’est le siège à Paris qui est visé par une perquisition. Depuis les Etats-Unis, David Plouffe, vice-président d’Uber, fulmine : « [Ces agents] dépendent de Macron, n’est-ce pas ? » Trois jours plus tard, le sujet est évoqué dans une nouvelle réunion entre Thibaud Simphal, directeur général d’Uber France, et Emmanuel Lacresse, le directeur de cabinet adjoint d’Emmanuel Macron, aujourd’hui député (Renaissance) de Meurthe-et-Moselle. « Lacresse a précisé que les grandes administrations comme la DGCCRF (…) fonctionnent principalement en autonomie, relate un compte rendu. Mais il a reconnu qu’il était important qu’ils agissent en cohérence, et donc il a dit qu’il leur parlerait. »

    La DGCCRF a-t-elle subi des pressions ? Non, assure-t-elle aujourd’hui. Sollicités, plusieurs de ses hauts responsables de l’époque, dont la directrice Nathalie Homobono, n’ont pas souhaité répondre aux questions du Monde. Quant à Emmanuel Lacresse, il affirme de son côté qu’à aucun moment « des consignes n’ont été données à la DGCCRF ».

    Un décret sur mesure

    Une situation similaire se produit en octobre 2015 : le préfet de police de Marseille, Laurent Nuñez, prend un arrêté interdisant de facto Uber dans une large partie des Bouches-du-Rhône. « Monsieur le Ministre, nous sommes consternés par l’arrêté préfectoral à Marseille », écrit aussitôt Mark MacGann, le lobbyiste en chef d’Uber, à Emmanuel Macron. « Pourriez-vous demander à votre cabinet de nous aider à comprendre ce qui se passe ? » Emmanuel Macron répond par SMS qu’il va « regarder cela personnellement ». Trois jours plus tard, la préfecture de police « précise » les contours de son arrêté : l’interdiction disparaît au profit d’une menace de contrôles accrus pour les chauffeurs qui ne seraient pas en règle.

    Laurent Nuñez, aujourd’hui coordonnateur national du renseignement à l’Elysée et proche conseiller d’Emmanuel Macron, assure n’avoir reçu aucune pression ni avoir eu aucun échange avec Bercy sur ce sujet ; d’anciens cadres d’Uber estiment que la préfecture se serait simplement rendu compte que son arrêté initial était illégal. M. Lacresse affirme de son côté que « le ministre n’est jamais intervenu auprès de la préfecture des Bouches-du-Rhône concernant la suspension du service UberX à Marseille, ni sur des procédures judiciaires quelles qu’elles soient concernant l’entreprise Uber ».

    La réaction agacée d’Uber face à l’arrêté marseillais est d’autant plus vive qu’à ce moment-là, l’entreprise est précisément en train de valider les contours précis d’un accord confidentiel avec Emmanuel Macron, proposé par le ministre. Le « deal », comme l’appellent les cadres d’Uber France, repose sur un échange simple : en contrepartie de la suspension d’UberPop, Emmanuel Macron leur fait miroiter une simplification drastique des conditions nécessaires pour obtenir une licence de VTC. Un accord « gagnant-gagnant » pour Uber, dont le service UberPop a déjà été jugé illégal à plusieurs reprises, et que l’entreprise réfléchit déjà à arrêter.

    Pour y parvenir, Emmanuel Macron et Uber s’accordent sur une stratégie commune. « Il veut que nous l’aidions en communiquant clairement et de manière agressive », écrit Thibaud Simphal, dans un compte rendu de réunion en janvier 2015. Première étape : Uber rédige directement des amendements parlementaires simplifiant les conditions d’accès à la licence de VTC, pour qu’ils soient proposés par des députés et discutés au cours de l’examen du projet de loi dite « Macron 1 » ; si leur adoption est peu probable à l’Assemblée, ils donneront plus de poids au ministre pour signer un décret qui n’aura pas besoin de passer par l’Assemblée.

    En janvier 2015, Uber France transmet donc des amendements « clés en main » au député socialiste Luc Belot, opposé à UberPop mais très favorable à Uber, avec qui ils sont déjà en contact. « Bon appel avec Luc Belot, député socialiste, soutien-clé des VTC et d’Uber, se félicite Thibaud Simphal, le 21 janvier. Il a fait allusion à Macron à plusieurs reprises, et aussi, de manière détournée, à notre rencontre [avec Macron] d’hier soir. Il veut que le dossier VTC avance. » M. Simphal retire de cet échange « l’impression » que le député « avait reçu un coup de fil de Julie Bonamy », la rapporteuse de la mission de Thomas Thévenoud sur les taxis et les VTC en 2014, voire « de Macron lui-même, étant donné le niveau de détail qu’il avait ». Sollicité par Le Monde, M. Belot reconnaît avoir déposé des amendements tels que rédigés par Uber ou légèrement modifiés, et explique avoir été en plein accord avec leur contenu, étant convaincu qu’Uber apportait des améliorations aux services de transport.

    Le plan se déroule sans accroc : les amendements présentés par Luc Belot sont rejetés ou retirés, mais Emmanuel Macron saisit l’occasion, à l’Assemblée, pour annoncer qu’un décret en reprendra les grandes lignes. Début 2016, le gouvernement réduit la durée de la formation nécessaire pour l’obtention d’une licence de VTC de deux cent cinquante à sept heures. Uber France conteste avoir obtenu une législation plus favorable à la suite de l’arrêt de Pop, et explique avoir stoppé ce service en raison du « niveau des violences visant nos utilisateurs, chauffeurs comme passagers, qui ne nous permettaient plus d’assurer leur sécurité », ainsi que par le placement en garde à vue de deux de ses cadres.

    Une forme de fascination

    Six mois plus tôt, le « deal » avait pourtant été entériné directement au plus haut niveau. Le 3 juillet 2015, Travis Kalanick envoie un SMS à Emmanuel Macron. Dans les jours précédents, le ministre de l’économie a discuté avec Bernard Cazeneuve et Manuel Valls pour leur présenter son « deal », et Uber a annoncé le matin même la suspension d’UberPop en France, mais Travis Kalanick, échaudé, se demande si l’intérieur est vraiment d’accord. « Pouvons-nous faire confiance à caz [Cazeneuve] ? », écrit M. Kalanick. « Nous avons eu une réunion hier avec le premier ministre, répond Emmanuel Macron. [Bernard] Cazeneuve s’assurera que les taxis restent calmes et je réunirai tout le monde la semaine prochaine pour préparer la réforme et corriger la loi. Caz a accepté le deal. Quand êtes-vous à Paris ? » A 20 heures, UberPop est définitivement mis hors ligne en France. M. Cazeneuve assure au Monde ne jamais avoir été consulté ou tenu au courant d’un accord de ce type.

    Conclu, le « deal » est rapidement mis à rude épreuve. Trois jours après cet échange, juste avant 8 heures, une vingtaine d’agents débarquent au siège d’Uber à Paris pour une perquisition. Très agacé par ce qu’il perçoit comme une trahison, Mark MacGann demande en parallèle à ses collègues de lui passer les enquêteurs au téléphone pour « brandir Macron, Caze, etc. », dans l’idée de se prévaloir de leur soutien.

    L’enquête, portant sur des soupçons d’évasion fiscale, est du ressort des services du ministère du budget, et non de ceux d’Emmanuel Macron. Mais cela n’empêche pas Mark MacGann d’envoyer immédiatement un SMS au ministre de l’économie, resté sans réponse : « Désolé de vous embêter, mais descente en ce moment d’une vingtaine de fonctionnaires de la direction des finances publiques. Ils disent qu’ils vont mettre [nos] dirigeants en garde à vue. (…) Nous avions l’espoir de pouvoir atteindre le fameux climat d’apaisement dès ce week-end. Pouvez-vous demander à vos services de nous conseiller ? »

    Quelle était la motivation d’Emmanuel Macron pour s’impliquer, avec tant d’énergie, aux côtés d’une multinationale américaine à la réputation sulfureuse ? Une convergence de vues politique, d’abord, en faveur d’une dérégulation rapide. Mais aussi une certaine fascination pour Travis Kalanick. Dans le très controversé fondateur d’une des entreprises les plus « disruptives » de la dernière décennie, le futur président voyait, semble-t-il, une sorte de double. A la veille de leur première rencontre, une collaboratrice d’Uber relatait ainsi une discussion avec son cabinet : « Emmanuel Macron est très intéressé par l’histoire de Travis, miroir de la sienne – moins de 40 ans et réussite impressionnante. »

    Sollicité, l’Elysée affirme que l’action de l’ancien ministre de l’économie rentrait dans le cadre classique des fonctions d’un ministre qui était « naturellement amené à échanger avec de nombreuses entreprises engagées dans la mutation profonde des services advenue au cours des années évoquées, qu’il convenait de faciliter en dénouant certains verrous administratifs ou réglementaires ».

    Ces bonnes relations se sont-elles poursuivies après le départ d’Emmanuel Macron de Bercy, et son arrivée à l’Elysée ? D’après le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, des représentants d’Uber ont rencontré des collaborateurs du président Macron à huit reprises entre 2017 et 2022. En 2018, Dara Khosrowshahi, le bien plus fréquentable remplaçant de Travis Kalanick, faisait partie des invités de marque du sommet Tech for Good, voulu et organisé par le président de la République. Une rencontre publique, et en grande pompe, cette fois.

    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/07/10/uber-files-revelations-sur-le-deal-secret-entre-uber-et-macron-a-bercy_61342

    #Emmanuel_Macron #loi_Thévenoud #UberPop #Mark_MacGann #Pierre-Dimitri_Gore-Coty #David_Plouffe #Travis_Kalanick #Uber_France #DGCCRF #lobbying #lobby #justice #kill_switch #perquisition #obstruction_à_la_justice #optimisation_fiscale

    • « Macron a aidé Uber à piétiner la justice française.
      Ce n’est pas un bilan, c’est un vol en bande organisée… »

      « Macron a aidé Uber à installer son système illégal en France quand il était ministre de l’économie.
      Son bilan, c’est une immense affaire judiciaire… »

      https://twitter.com/realmarcel1/status/1546166083429830656?cxt=HHwWgMC86Yz3ivUqAAAA
      #UberFiles

      Jamais il ne représentera autre chose que les intérêts des lobbies.

      Honteux depuis 5 ans, et 5 ans de plus !

      Scandale #UberFiles. Commentaires des économistes et des journalistes macronisés, commentaires des Renaissants macronistes : banaliser le rôle des économistes libéraux, banaliser le #lobbying, banaliser le statut des ubérisés, banaliser le comportement de Sa Majesté Macron.

      https://twitter.com/HMaler/status/1546406962707005445?cxt=HHwWioC8pY-8-PUqAAAA

    • https://video.twimg.com/ext_tw_video/1546274785595998208/pu/vid/430x236/8wpmPfM6NKTHu6TF.mp4?tag=12


      Ça fait mal, les archives … 2017 (Rue 89)

      Un peu plus tard les députés godillots vote la charte de la transparence de la vie publique...

      Permettez que je pose un extrait de la charte signée par les députés en marche.
      Allez, je file, j’ai mon Uber qui m’attend.

    • « Nous avons vendu un mensonge à tout le monde » : Mark MacGann, le lanceur d’alerte des « Uber Files », se dévoile
      https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/07/11/nous-avons-vendu-un-mensonge-a-tout-le-monde-mark-macgann-le-lanceur-d-alert

      Le lobbyiste irlandais a été, durant deux ans, l’un des principaux responsables des affaires publiques d’Uber. C’est lui qui a transmis au « Guardian » les 124 000 documents qui constituent les « Uber Files ».

    • The Uber whistleblower: I’m exposing a system that sold people a lie | Uber | The Guardian
      https://www.theguardian.com/news/2022/jul/11/uber-files-whistleblower-lobbyist-mark-macgann
      https://i.guim.co.uk/img/media/749495115679b5c78076050372922d703c8f291f/0_0_5000_3000/master/5000.jpg?width=1200&height=630&quality=85&auto=format&fit=crop&overlay-ali

      Exclusive: Mark MacGann says he has decided to speak out about firm to ‘right some fundamental wrongs’
      by Paul Lewis, Harry Davies, Lisa O’Carroll, Simon Goodley and Felicity Lawrence
      Mon 11 Jul 2022 16.55 BST
      Last modified on Mon 11 Jul 2022 16.56 BST

      Mark MacGann, a career lobbyist who led Uber’s efforts to win over governments across Europe, the Middle East and Africa, has come forward to identify himself as the source who leaked more than 124,000 company files to the Guardian.

      MacGann decided to speak out, he says, because he believes Uber knowingly flouted laws in dozens of countries and misled people about the benefits to drivers of the company’s gig-economy model.

      The 52-year-old acknowledges he was part of Uber’s top team at the time – and is not without blame for the conduct he describes. In an exclusive interview with the Guardian, he said he was partly motivated by remorse.

      “I am partly responsible,” he said. “I was the one talking to governments, I was the one pushing this with the media, I was the one telling people that they should change the rules because drivers were going to benefit and people were going to get so much economic opportunity.

      Q&A
      What are the Uber files?

      The Uber files is a global investigation based on a trove of 124,000 documents that were leaked to the Guardian by Mark MacGann, Uber’s former chief lobbyist in Europe, the Middle East and Africa. The data consist of emails, iMessages and WhatsApp exchanges between the Silicon Valley giant’s most senior executives, as well as memos, presentations, notebooks, briefing papers and invoices.

      The leaked records cover 40 countries and span 2013 to 2017, the period in which Uber was aggressively expanding across the world. They reveal how the company broke the law, duped police and regulators, exploited violence against drivers and secretly lobbied governments across the world.

      To facilitate a global investigation in the public interest, the Guardian shared the data with 180 journalists in 29 countries via the International Consortium of Investigative Journalists (ICIJ). The investigation was managed and led by the Guardian with the ICIJ.

      In a statement, Uber said: “We have not and will not make excuses for past behaviour that is clearly not in line with our present values. Instead, we ask the public to judge us by what we’ve done over the last five years and what we will do in the years to come.”

      “When that turned out not to be the case – we had actually sold people a lie – how can you have a clear conscience if you don’t stand up and own your contribution to how people are being treated today?”

      The senior role MacGann held at Uber between 2014 and 2016 put him at the heart of decisions taken at the highest levels of the company during the period in which it was forcing its way into markets in violation of taxi-licensing laws. He oversaw Uber’s attempts to persuade governments to change taxi regulations and create a more favourable business environment in more than 40 countries.

      He said the ease with which Uber penetrated the highest echelons of power in countries such as the UK, France and Russia was “intoxicating” but also “deeply unfair” and “anti-democratic”.

      In his wide-ranging interview, MacGann detailed the personal journey that led him to leak the data years after leaving Uber.

      “I regret being part of a group of people which massaged the facts to earn the trust of drivers, of consumers and of political elites,” he said. “I should have shown more common sense and pushed harder to stop the craziness. It is my duty to [now] speak up and help governments and parliamentarians right some fundamental wrongs. Morally, I had no choice in the matter.”

      The Guardian led a global investigation into the leaked Uber files, sharing the data with media organisations around the world via the International Consortium of Investigative Journalists (ICIJ).
      What are the Uber files? A guide to cab-hailing firm’s ruthless expansion tactics
      Read more

      Responding to the investigation, Uber acknowledged past failings but insisted the company had transformed since 2017 under the leadership of its new chief executive, Dara Khosrowshahi. “We have not and will not make excuses for past behaviour that is clearly not in line with our present values,” a spokesperson said.

      The Uber files consists of confidential company data that MacGann had access to at Uber. It includes company presentations, briefing notes, security reports and tens of thousands of emails and WhatsApp, iMessage and chat exchanges between the company’s most senior staff at the time.

      They include Travis Kalanick, Uber’s combative co-founder and then chief executive, David Plouffe, a former Barack Obama campaign aide who became a senior vice-president at Uber, and Rachel Whetstone, a British PR executive who has also held senior roles at Google, Facebook and now Netflix.

      When MacGann departed Uber in 2016, Whetstone described him as “a wonderful leader”. Plouffe called him a “talented public policy professional” and “terrific advocate for Uber”.

      The one-time cheerleader-in-chief for Uber in Europe, MacGann now looks set to become one of its sharpest critics.

      His profile as a senior executive and political insider make him an unusual whistleblower. So, too, does the fact he actively participated in some of the wrongdoing he is seeking to expose – and the fact it took him more than five years after leaving the company to speak out.

      The process through which he came to re-evaluate what he witnessed at Uber was a gradual one, he says. “When I decided I had an obligation to speak up, I then went about finding the most effective, impactful way in which to do that. Doing what I am doing isn’t easy, and I hesitated. That said, there’s no statute of limitations on doing the right thing.”

      MacGann is understood to have recently reached an out-of-court settlement with Uber after a legal dispute relating to his remuneration. He said he was prohibited from discussing his legal dispute but acknowledged he had had personal grievances with the company, which he alleges undervalued his role as an interlocutor with government and failed in its duty of care to him.

      He accuses Uber under Kalanick’s leadership of adopting a confrontational strategy with opponents in taxi industries, that left him personally exposed. As a public face of Uber in Europe, MacGann bore the brunt of what became a fierce backlash against the company in countries including France, Belgium, Italy and Spain.

      Amid threats to his life, he was given bodyguard protection. His experience of working at Uber, he says, took a mental toll and contributed to a subsequent diagnosis of post-traumatic stress disorder (PTSD).
      Brazenly breaking the law

      A Brussels insider, MacGann was an obvious pick to lead Uber’s government relations in the Europe, Middle East and Africa (EMEA) region in 2014. Born in Ireland, he speaks several languages and possessed an impressive contacts book built up over two decades in lobbying and public affairs.

      MacGann had worked at established public policy firms such as Weber Shandwick and Brunswick, and had run DigitalEurope, a trade association that advocated for companies such as Apple, Microsoft and Sony. His most recent job had been as senior vice-president at the New York Stock Exchange on a salary of $750,000 a year.

      MacGann took a significant salary cut to work at Uber for €160,000. But like all senior executives joining the company back then, the financial reward was in the promise of stock options that could be worth millions if Uber realised its global ambitions.

      Uber and its investors were eyeing vast returns if the tech company succeeded in its mission to deregulate markets, monopolise cities, transform transit systems and one day even replace drivers with autonomous vehicles. The plan, MacGann acknowledges, required Uber to flout the law in cities in which regulated taxi markets required hard-to-get licences to drive a cab.

      “The company approach in these places was essentially to break the law, show how amazing Uber’s service was, and then change the law. My job was to go above the heads of city officials, build relations with the top level of government, and negotiate. It was also to deal with the fallout.”

      MacGann started work for Uber around the summer of 2014, when he worked on contract for a European lobbying consultancy that Uber had hired to oversee government relations outside the US. In October 2014, Uber brought him in-house and put him in charge of public policy for the EMEA region.

      On his first day on staff, MacGann was in an Uber from London City airport when he got his first taste of the startup’s laissez-faire approach to privacy. After emailing a senior executive to tell them he was in traffic, MacGann received the reply: “I’m watching you on Heaven – already saw the ETA!”

      “Heaven”, otherwise known as “God View”, was the codeword Uber employees used at the time for a tool that allowed staff to surreptitiously use the app’s backend technology to surveil the real-time movements of any user in the world.

      “It felt like children playing around with powerful surveillance technology,” said MacGann. “Even back then it was dawning on me this was a rogue company.”

      In its statement, Uber said tools such as God View, which it stopped using in 2017, “should never have been used”. A spokesperson for Kalanick said it would be false to suggest he ever “directed illegal or improper conduct”.

      The Uber files contain some instances in which MacGann pushes back at the company’s operations and decisions. But, for the most part, the documents show him expressing little dissent over the company’s hardball tactics, and on some occasions he appears directly involved in wrongdoing.

      He describes himself as having been “drunk on the Kool-Aid” at Uber, a company he alleges did not encourage dissent or criticism. But he does not dispute he was at the heart of many of the controversies that have been revealed by his data leak.

      “I believed in the dream we were pushing, and I overdosed on the enthusiasm,” he said. “I was working 20 hours a day, seven days a week, constantly on planes, in meetings, on video conference calls. I didn’t stop to take a step back.”

      His whirlwind stint at the company involved meetings with prime ministers, presidents, transport and economy ministers, EU commissioners, mayors and city regulators.

      MacGann said most senior politicians were instinctively supportive of Uber, viewing the tech company as offering an innovative new platform that could allow for flexible working and help reboot economies after the financial crisis.

      However, it was a more mixed story in France, where Uber’s unlicensed service prompted taxi driver riots and divided the cabinet of the then president, François Hollande.

      On one side was Bernard Cazeneuve, the minister of the interior, who according to MacGann once summoned him to his office and threatened him with jail, saying: “I will hold you personally and criminally responsible if you do not shut it down by the end of the week.”

      On the opposing side of the debate was Emmanuel Macron, the pro-tech, pro-business economy minister who, the leak reveals, became something of a secret weapon for Uber.

      The data includes text message exchanges between MacGann and Macron, who was working behind the scenes to assist the US tech company. In one exchange, MacGann asks for Macron’s help in the midst of a raid on the company’s offices. In another he complains about an apparent ban on its services in Marseille.

      Macron told MacGann he would “personally” look into the matter. “At this point, let’s stay calm,” the minister said.

      MacGann recalls Macron as being “the only person who gave us the time of day … So he was a massive breath of fresh air.”

      Macron did not respond to detailed questions about his relationship with Uber. A spokesperson said his ministerial duties at the time “naturally led him to meet and interact with many companies” engaged in the service sector.

      After leaving Uber, MacGann maintained relations with Macron and helped raise funds for his La République En Marche party in 2016. He says his political support for the French president was a personal decision and had “absolutely nothing to do with Uber”. They continued to exchange text messages with one another up to as recently as April this year.

      ‘Speed dating for elites’

      The French president is not the only political figure who knows MacGann. He is on first-name terms with two former EU commissioners, Neelie Kroes and Peter Mandelson. After leaving Uber, MacGann maintained a business relationship Lord Mandelson, a former Labour cabinet minister.

      MacGann is also a familiar face among VIPs who attend the World Economic Forum in Davos, which he describes as “speed dating for elites”. He recalls persuading an initially reluctant Kalanick to attend the gathering in the Swiss Alps in 2016.

      “For a lobbyist, Davos is a wonderful competitive advantage that only money can buy,” he said. “Politicians don’t have a retinue of advisers and civil servants hanging around taking notes.”

      Uber’s executives met with the Israeli prime minister, Benjamin Netanyahu, the Irish taoiseach, Enda Kenny, and the UK chancellor, George Osborne. Securing those meetings, MacGann said, was “a piece of cake”. “Uber was considered hot property.” So much so that when Kalanick met Joe Biden at the Swiss resort it was at the US vice-president’s request.

      The Uber files reveal that Kalanick fumed when he was kept waiting by Biden, texting other Uber executives: “I’ve had my people let him know that every minute late he is, is one less minute he will have with me.”

      However, it was another Kalanick text in the leak – in which the former CEO appears to advocate sending Uber drivers to a protest in France, despite the risk of violence – that has sparked headlines across the world.

      Warned by MacGann and Whetstone that encouraging Uber drivers to protest amid violent taxi strikes in Paris risked putting them at risk, Kalanick replied: “I think it’s worth it. Violence guarantee[s] success.”

      MacGann called Kalanick’s instruction to stage an act of civil disobedience with French Uber drivers, despite the risks, as a “dangerous” and “selfish” tactic. “He was not the guy on the street who was being threatened, who was being attacked, who was being beaten up.”

      Kalanick’s spokesperson said he “never suggested that Uber should take advantage of violence at the expense of driver safety” and any suggestion he was involved in such activity would be completely false. Uber acknowledged past mistakes, but said no one at the company, including Kalanick, wanted violence against Uber drivers.

      MacGann insists that Uber drivers were seen by some at the company as pawns who could be used to put pressure on governments. “And if that meant Uber drivers going on strike, Uber drivers doing a demo in the streets, Uber drivers blocking Barcelona, blocking Berlin, blocking Paris, then that was the way to go,” he said. “In a sense, it was considered beneficial to weaponise Uber drivers in this way.”

      The files show MacGann’s fingerprints on this strategy, too. In one email, he praised staffers in Amsterdam who leaked stories to the press about attacks on drivers to “keep the violence narrative” and pressure the Dutch government.

      Looking back, MacGann said: “I am disgusted and ashamed that I was a party to the trivialisation of such violence.”

      A parting of ways

      One of the worst flashpoints in Europe was at Brussels Midi train station, where Uber drivers lingered to pick up passengers who would otherwise be queueing at a regulated taxi rank. MacGann was first recognised there on 27 April 2015.

      “Got spotted by a bunch of taxi drivers at the train station arriving from London,” he emailed a colleague that day. “Seven of them followed me as I went to get my Uber, hurling insults and spitting … One of them ran after me for a while, intending to hurt my driver.”

      The colleague replied: “Thank God you made it … This weekend Uber driver and taxi driver got into a fistfight. Getting intense in Brussels.”

      The threats intensified over subsequent weeks. Emails show alarm at the company after a taxi driver trailed MacGann’s limousine to his apartment in Brussels and posted his home address on a “stop Uber” Facebook group in Belgium. Taxi drivers snapped surveillance-style photos of MacGann outside a hotel with friends and uploaded them to the internet.

      In August that year, a security report commissioned by Uber mentioned rumours that MacGann and another Uber executive were going to be “taken off the streets by a core group of taxi drivers”.

      Uber gave MacGann a personal team of bodyguards. An email states that between September and November 2015, the security team spent 619 hours shepherding him in Belgium alone, while Uber also beefed up security for foreign trips.

      During a protest in Brussels, about 100 taxi drivers gathered outside MacGann’s office in the city and blocked the road. An Uber security report described how an initially relaxed atmosphere became “more grim”. Fireworks were let off and riot police charged protesters.

      Taxi drivers at the protest attached “wanted” posters on the sides of their cars. They displayed photos of MacGann and two other Uber executives. The caption read: “International criminals.”

      In October 2015, MacGann emailed a colleague: “I have had bodyguards full-time now for five months and it is becoming very stressful.” A week later, he told Plouffe and Whetstone of his intention to resign. He officially departed four months later, on 12 February 2016.

      It seemed an amicable split. Publicly, he expressed no regrets and used his Facebook page to lavish praise on Kalanick.

      “Toughest boss I ever had and I’m a stronger leader for it,” he said, adding there was “no thing” he would change about his time at Uber. “Forget the hyperbole in the media; forget the intrigue; think about how pushing a button and getting a ride makes your life better.”

      Uber publicly commended MacGann’s work and asked him to stay on as a consultant.

      He was given a new job title – senior board adviser – and retained his Uber-provided emails, laptops and phones.

      That role ended in August 2016, after which MacGann took on a new job at a telecoms company and started his own business venture. It was a full year after leaving Uber that, MacGann says, he experienced his most “terrifying” ordeal as a perceived representative of the cab-hailing firm.
      ‘MacGann, we will get you’

      The incident outside Brussels Midi station was recorded in a police report, Uber emails and media reports. It took place between 11.45am and 12.15pm on 19 September 2017, shortly after MacGann arrived at the station.

      As he walked towards his waiting Uber, taxi drivers approached him and ordered him not to get into the car. One grabbed him by the arms to stop him from putting his bags in. Concerned for his safety, MacGann asked the Uber driver to lock the doors when he was in the car.

      Several more taxi drivers joined the fray, surrounding the car. MacGann called the police. A security report commissioned by Uber questioned whether the taxi drivers had recognised him. But he recalls the drivers yelling: “MacGann, we will get you, we know where you live.”

      He recalls them thumping on the windows and rocking the car from side to side. Three taxi drivers were taken to the police station, but no further action was taken.

      MacGann said he was left fearing for his life – and that of his Uber driver, who “was shaking and in tears, scared for his life”. “These taxi drivers had his licence number, they could come after him again. It just seemed to me that Uber viewed this guy as expendable supply – not an employee with rights.”

      Shortly afterwards, MacGann received an anonymous threat on Twitter: “One day police won’t be there and you’ll be alone. And we will see if money will help you.”

      MacGann held his former employer responsible. “I felt that Uber had caused this, by its ‘success at all costs approach’ that encouraged confrontations between Uber and taxi drivers … I started to feel it was indicative of Uber’s wider relationship with drivers, putting them in harm’s way for their own financial interests.”

      By mid-2018, MacGann said, the death of a close friend contributed to a deterioration in his mental health. A medical report from March 2019 said a subsequent diagnosis of PTSD was “evidently linked and impacted by the professional stress he had to endure” during his time at Uber.

      MacGann said that months of treatment and therapy between 2018 and 2019 – and an enforced period of personal reflection – led him to reassess his time at Uber. “I’d stepped off the corporate hamster wheel for the first time in decades. I emerged with a new sense of clarity about everything at Uber.”

      No longer living the fast-paced life of a corporate executive, MacGann had time to listen more carefully to the stories of Uber drivers who were ferrying him around. He credits those conversations with changing his understanding of what the company used to call “driver economics”.

      In its statement, Uber’s spokesperson said “driver earnings globally are at or near all-time highs today” and that Uber’s interests were “aligned with drivers, ensuring they have a positive experience earning on the platform”. If drivers were dissatisfied with its platform, she added, “they can and do choose to earn somewhere else”.

      Sharing secrets

      In February 2020, MacGann, increasingly angered by what he viewed as the mistreatment of drivers, tried to take action. Uber was appealing against a decision by Transport for London (TfL) to refuse the company a licence in the capital, on the grounds it failed to meet the “fit and proper” test.

      Emailing the mayor’s office, MacGann explained he was a former Uber executive with information to share in a “private and non-sensationalist manner, given my intimate knowledge of the company”. MacGann said he felt “frustrated” when his attempt to formally raise concerns about Uber did not receive a reply.

      In February 2021, MacGann went a step further. After reading about a French lawyer who was bringing a class action lawsuit against Uber on behalf of drivers, MacGann got in touch and offered to provide information to help their case. The lawyer visited him at his home and MacGann allowed him to take photographs of a small sample of Uber documents he had stored on his old computer.

      His relationship with the French lawyer turned out to be short-lived. But the dam had been broken. MacGann realised quite how many of Uber’s secrets he was sitting on.

      In January 2022, Uber’s former top lobbyist travelled to Geneva and met with reporters from the Guardian.

      He opened two suitcases and pulled out laptops, hard drives, iPhones and bundles of paper. He warned it would take a few days, at best, to explain everything he knew. “I’ve seen some really shady shit, to use one of the Silicon Valley expressions.”

      #Uber_Files #Mark_MacGann #Pierre-Dimitri_Gore-Coty #David_Plouffe #Emmanuel_Macron #Travis_Kalanick #Uber_France #DGCCRF #lobbying #lobby #justice #kill_switch #perquisition #obstruction_à_la_justice #optimisation_fiscale

    • non @sombre, Bouzou c’est celui-ci :
      https://seenthis.net/messages/927171#message927218

      Le 10 juillet 2022, l’enquête du Monde consacrée aux Uber Files montre que Bouzou, qui travaille avec plusieurs agences de lobbying à Paris, a rédigé au printemps 2015 pour la multinationale Uber, en échange d’une rémunération de 10 000 € hors taxe, une étude sur l’intérêt du service de voiture de transport avec chauffeur (VTC), « assortie d’un service après-vente auprès de la presse et des parlementaires »

      https://fr.wikipedia.org/wiki/Nicolas_Bouzou

    • J’ai découvert que cette vidéo capturée chez Twitter était dans ce tweet : https://twitter.com/MathildePanot/status/1546268571357089792

      Mais je ne vois pas trop d’où provient le passage mis en citation sous la vidéo. Erreur de mise en page de @marielle ?

      {Edit] A propos du mec de la vidéo, je suis sur une piste !!!

      L’article mentionné par le syndicaliste @SayahBaaroun
      ne donne plus accès à la vidéo du déjeuner entre lobbyistes d’Uber, députés et membres du cabinet Macron.

      On a retrouvé la vidéo !

      Il est maintenant temps de chercher qui est à la table (1:16). #UberFiles

      Source : https://twitter.com/Action_Insoumis/status/1546263495846551553

      Du coup : « On a les noms, on a la liste …on a les preuves …alors on va devant le juge ! »

  • La pénurie de cartes graphiques se résorbe avec l’écroulement des cryptomonnaies
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/07/07/la-penurie-de-cartes-graphiques-se-resorbe-avec-l-ecroulement-des-cryptomonn

    L’activité de « minage », gourmande en matériel de ce type, étant devenue moins rentable, la plupart des gammes de cartes destinées aux joueurs sont désormais disponibles à des tarifs raisonnables.

    […]

    Un autre facteur-clé a joué : l’allégement des mesures visant à contenir la pandémie, qui a eu plusieurs conséquences. D’abord, les ventes d’ordinateurs portables destinés aux télétravailleurs ont chuté, « libérant des capacités de production chez les fondeurs de puces », comme l’explique Alan Priestley, qui s’occupe, entre autres, des études sur les semi-conducteurs au sein du cabinet de conseil Gartner.

    #jeu_vidéo #jeux_vidéo #minage #cryptomonnaies #carte_graphique #disponibilité #finance #gaming #alan_priestley #chaîne_d_approvisionnement #ldlc #laurent_de_la_clergerie #nvidia #amd #samsung #intel #tsmc

  • Un influenceur condamné à sept ans de prison pour des escroqueries au fonds de solidarité pendant la pandémie
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/07/07/un-influenceur-condamne-a-sept-ans-de-prison-pour-des-escroqueries-au-fonds-

    Sur Snapchat, le jeune homme connu sous le pseudonyme « PA7 » incitait ses abonnés à monter de fausses entreprises pour toucher des aides de l’Etat [destinées aux entreprises touchées par la pandémie de Covid-19]. La justice estime qu’il a contribué au détournement de 7,6 millions d’euros de fonds publics.

  • Avec le métavers, une nouvelle étape dans la difficile lutte contre les agressions sexuelles sur Internet
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/06/14/avec-le-metavers-une-nouvelle-etape-dans-la-difficile-lutte-contre-les-agres

    Des cas d’agression sexuelle dans les mondes en réalité virtuelle soulèvent la question de la modération des métavers. Si certains existent depuis longtemps, notamment dans les jeux vidéo, ils n’ont pas pour autant de solution simple.

    Par Lucie Ronfaut

    Elle a également relancé une crainte : celle des agressions, notamment sexuelles, en réalité virtuelle. Andrew Bosworth, directeur technique de Meta, reconnaît lui-même que le harcèlement dans un métavers est « une menace existentielle » pour les ambitions de son entreprise, d’après un mémo confidentiel révélé en novembre par le Financial Times. Il a aussi admis qu’une modération à grande échelle était « pratiquement impossible ».

    « Le choc est le même que dans la vraie vie »

    Ces questions ne sont, pourtant, pas neuves. Les exemples d’agression sexuelle dans des mondes immersifs, qu’il s’agisse ou non d’expériences en réalité virtuelle, sont nombreux. En 2016, une utilisatrice du jeu de tir QuiVR racontait dans un post de blog avoir subi des attouchements à la poitrine par un autre joueur. Et dès 1993, un article du journaliste américain Julian Dibbel, « A Rape in Cyberspace » (« Un viol dans le cyberespace »), décrivait comment un membre d’un « MOO » (Multi-user dimension Object Oriented), une communauté en ligne reposant sur des échanges textuels, avait forcé d’autres joueurs et joueuses à des simulations d’actes sexuels.

    Plus largement, d’après une récente étude de l’institut Ipsos, 41 % des Français (et 81 % des 18-24 ans) ont déjà été victimes de violence en ligne. « En un sens, le harcèlement dans les métavers est motivé par les mêmes facteurs que celui qu’on constate sur d’autres plates-formes : on se sent déconnecté des conséquences de nos actions, explique Katherine Cross, chercheuse américaine en sciences de l’information à l’université de Washington, spécialisée dans le harcèlement en ligne. Mais il existe une différence fondamentale, qui peut rendre cette expérience bien pire : la réalité virtuelle est conçue pour nous faire croire que ce que nous vivons est vrai. »

    Et, au contrôle du contenu produit par les internautes (textes ou images, comme sur un réseau social classique), s’ajoute celui des discussions tenues à l’oral et des comportements physiques. « Dans un métavers, la toxicité prend plein de formes différentes. Il y a le sujet de la voix. Comment repérer une insulte ? Ou si une personne très jeune discute avec d’autres plus âgées ? », détaille Charles Cohen, PDG de Bodyguard, entreprise française spécialisée dans les outils automatiques de modération pour les particuliers et les entreprises. « Et puis, il y a les gestes. Si un avatar en suit un autre, est-ce par jeu, ou s’agit-il de harcèlement ? »

    A défaut de pouvoir contrôler ce genre d’attitudes en direct, la plupart des plates-formes proposent une panoplie d’outils pour améliorer l’expérience des internautes : activer une frontière invisible autour de son corps virtuel, moduler la tessiture de sa voix (si une femme veut se faire passer pour un homme), réduire les autres avatars à des petites boules flottantes… On peut aussi signaler les actions problématiques, comme sur un réseau social, mais encore faut-il avoir enregistré une vidéo à apporter comme preuve.

    L’autre sujet crucial est celui du design. Comment construit-on un univers virtuel qui empêcherait les abus en amont ? Des métavers proposent des avatars sans jambes (évitant ainsi des postures sexuelles), proscrivent certains gestes avec les mains virtuelles (sur la version de base de VRChat, on peut lever son pouce en l’air, mais pas son majeur), prévoient des zones où un avatar devient aussitôt invisible aux yeux des autres, que ce soit pour se protéger ou faire une pause.

    Beaucoup de mondes virtuels choisissent aussi de rappeler leurs règles de manière peu subtile, au travers de posters ou d’avertissements qui s’affichent pendant les temps de chargement. Comme si, en marchant dans la rue, des panneaux nous rappelaient sans cesse qu’il est interdit de gifler autrui.

    La modération est, depuis longtemps, une épine dans le pied des grandes entreprises du Web, accusées de ne pas assez investir pour la sécurité des internautes, et d’avoir conçu des plates-formes impossibles à contrôler. Les métavers, parfois décrits comme notre futur en ligne, pourraient-ils être l’occasion de faire les choses correctement, dès le commencement ? Ou, au contraire, est-on déjà en train de reproduire les erreurs du passé ? « La modération est souvent utilisée comme un pansement pour régler les problèmes structurels des plates-formes, regrette Katherine Cross. On doit construire des métavers qui prennent en compte les abus potentiels dès la première ligne de code. Mais, pour des grosses entreprises comme Meta, malheureusement, la modération restera probablement un sujet auquel on réfléchira après coup. Comme cela a toujours été. »

    #Metavers #Agressions_sexuelles #Modération

  • Avortement : aux Etats-Unis, les géants du numérique face au danger lié aux données personnelles
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/06/27/avortement-aux-etats-unis-les-geants-du-numerique-face-au-danger-lies-aux-do

    Géolocalisation, messages, recherches… De nombreuses informations personnelles habituellement collectées par les plates-formes pourraient devenir particulièrement plus sensibles dans les Etats souhaitant interdire l’avortement.

    « Celles et ceux qui cherchent, offrent ou facilitent l’accès à l’avortement doivent, désormais, partir du principe que toutes les données qu’ils et elles laissent sur Internet ou ailleurs peuvent être recherchées par les autorités. » Le communiqué de l’Electronic Frontier Foundation, principale organisation de défense des libertés numériques aux Etats-Unis, a énoncé, dès vendredi 24 juin, le défi qui se pose à l’industrie technologique depuis la décision retentissante de la Cour suprême sur le droit à l’avortement. « La différence entre aujourd’hui et la dernière fois que l’avortement était interdit aux Etats-Unis est que nous vivons dans une ère sans précédent de surveillance numérique », a appuyé Eva Galperin, une cadre de l’organisation.

    [...]

    L’historique des requêtes Google, par exemple, peut être utilisé par la justice pour renforcer un dossier ou appuyer une inculpation. Si une personne fait une recherche sur des cliniques dans un Etat voisin disposant d’une législation différente, ou sur les pilules nécessaires à un avortement médicamenteux, ces données peuvent être obtenues par la justice, aussi bien via la saisie des téléphones et ordinateurs – comme cela a déjà été le cas dans au moins une affaire en 2018 – que via une demande au moteur de recherche concerné.

    Les données de géolocalisation, qui ne sont pas seulement collectées par Google et Apple, mais aussi par les opérateurs de téléphonie mobile, sont également très sensibles. Si certains Etats cherchent à interdire le fait de se rendre dans une clinique sur un territoire voisin pour avorter, et à poursuivre toute personne qui entreprend ce voyage, les données de géolocalisation seront cruciales.

    Enfin, les applications de suivi menstruel, dont les données sont extrêmement sensibles, sont en première ligne. L’application Flo a récemment annoncé le lancement prochain d’un « mode anonyme », qui efface toutes les identifiants d’un compte. De son côté, Clue a également publié un communiqué, promettant que toutes les données de ses utilisatrices et utilisateurs étaient hébergées en Europe, et que l’entreprise n’était en conséquence pas tenue de répondre aux demandes de la justice américaine concernant les données de santé de ses clients. Enfin, l’application Natural Cycles a annoncé travailler sur une méthode d’anonymisation totale des données.

    #surveillance

  • E-sport : les équipes ont-elles vocation à s’ancrer localement ?
    https://www.lemonde.fr/pixels/article/2022/06/24/e-sport-les-equipes-ont-elles-vocation-a-s-ancrer-localement_6131954_4408996

    En costume noir sur la scène de l’AccorHotels Arena à Bercy, Kamel Kebir exulte. Mardi 21 juin, ce Français de 26 ans, plus connu sous le pseudonyme de Kameto, a réuni 12 000 personnes autour d’un événement mettant à l’honneur ses équipes e-sportives de la Karmine Corp. Au programme : des affrontements sur les jeux vidéo Valorant et League of Legends (LoL), un spectacle en musique et en effets scéniques à l’américaine et, surtout, une ambiance explosive rarement observée dans l’e-sport français.

    #jeu_vidéo #jeux_vidéo #esport #accorhotels_arena #bercy #événement #kamel_kebit #kameto #karmine_corps #jeu_vidéo_valorant #jeu_vidéo_lol #jeu_vidéo_league_of_legends #élysée #france_esports #jeu_vidéo_overwatch #jeu_vidéo_call_of_duty #call_of_duty_league #optic_texas

  • Après sa déroute électorale, Blanquer bénéficie de la création express d’un poste à l’université Assas | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/210622/apres-sa-deroute-electorale-blanquer-beneficie-de-la-creation-express-d-un

    Sors-le par la porte il revient par la fenêtre !

    L’enseignement supérieur ne manque visiblement pas toujours de moyens. L’université Paris 2 (Panthéon-Assas) a exceptionnellement décidé d’ouvrir un poste sur mesure au sein de son département de droit public pour accueillir l’ancien ministre Jean-Michel Blanquer, tout juste défait aux élections législatives, selon des informations de Mediapart.

    La possibilité de créer ce poste ad hoc, à l’heure où les universités affrontent depuis des années une lourde pénurie de personnels, s’est concrétisée vendredi 17 juin, cinq jours après le premier tour des élections. Elle doit être finalisée prochainement, à l’occasion d’une réunion du département de droit public.

    Première incongruité : elle a été annoncée par le président de l’université Stéphane Braconnier lui-même, et non par le directeur du département. Deuxième source de questionnement : le calendrier de l’annonce, intervenue quelques jours seulement après l’élimination, le dimanche 12 juin, de Jean-Michel Blanquer au 1er tour dans la 4e circonscription du Loiret et alors qu’aucun poste n’avait été envisagé jusque-là. Troisième interrogation : les raisons de ce recrutement express.