sèche... elle ne retrouve pas le nom de la police de caractères... un truc très arrondi, très début des années Soixante-Dix, assez peu lisible, sans empattement mais avec un système de pleins et de déliés extrêmement marqués... Vous voyez, le style de lettres faites pour être dessinées en orange au milieu des tables en formica et des papiers peints à grosses fleurs...
Elle s’inquiète elle-même, parfois. Alors qu’elle termine sa vie dans des conditions sanitaires et sociales épouvantables, au lieu de s’en tracasser elle peut passer des heures et des heures réfugiée dans sa mémoire à la recherche de choses anodines. Une police display terriblement datée, franchement, qu’est-ce que ça peut faire ? Enfin si, ça peut lui rappeler le temps où elle-même essayait sans grande conviction de se faire passer pour une artiste, elle avait casé quelques crobards dans des canards miteux, créé une poignée de logos, pondu et fourgué une petite douzaine d’affiches, dessiné des alphabets. Elle était vaguement amoureuse et voulait surtout émerveiller une meuf qu’elle savait élève aux Beaux-Arts — ça n’avait pas fonctionné, bien sûr ; on ne peut pas émerveiller quand on n’est pas merveilleuse. M’enfin par la force des choses elle a gardé quelques notions « plastico-calli-typographiques » (sic) de cette pitoyable époque de sa vie.
Zyva, saleté de vieillesse : une simple image aperçue sur Internet et toute la fabrique de souvenirs est relancée.