Articles repérés par Hervé Le Crosnier

Je prend ici des notes sur mes lectures. Les citations proviennent des articles cités.

  • Notation des allocataires : la CAF étend sa surveillance à l’analyse des revenus en temps réel – La Quadrature du Net
    https://www.laquadrature.net/2024/03/13/notation-des-allocataires-la-caf-etend-sa-surveillance-a-lanalyse-des-

    Il y a tout juste deux mois, nous publiions le code source de l’algorithme de notation des allocataires de la CAF. Cette publication démontrait l’aspect dystopique d’un système de surveillance allouant des scores de suspicion à plus de 12 millions de personnes, sur la base desquels la CAF organise délibérement la discrimination et le sur-contrôle des plus précaires. Ce faisant, nous espérions que, face à la montée de la contestation1, les dirigeant·es de la CAF accepteraient de mettre fin à ces pratiques iniques. Il n’en fut rien.

    À la remise en question, les responsables de la CAF ont préféré la fuite en avant. La première étape fut un contre-feu médiatique où son directeur, Nicolas Grivel, est allé jusqu’à déclarer publiquement que la CAF n’avait ni « à rougir » ni à s’« excuser » de telles pratiques. La deuxième étape, dont nous venons de prendre connaissance2, est bien plus inquiétante. Car parallèlement à ses déclarations, ce dernier cherchait à obtenir l’autorisation de démultiplier les capacités de surveillance de l’algorithme via l’intégration du suivi en « temps réel »3 des revenus de l’ensemble des allocataires. Autorisation qu’il a obtenue, avec la bénédiction de la CNIL, le 29 janvier dernier4.
    Surveillance et « productivité » des contrôles

    Pour rappel, le revenu est une des quelques quarante variables utilisées par la CAF pour noter les allocataires. Comme nous l’avions montré, plus le revenu d’un·e allocataire est faible, plus son score de suspicion est élevé et plus ses risques d’être contrôlé·e sont grands. C’est donc un des paramètres contribuant directement au ciblage et à la discrimination des personnes défavorisées.

    Jusqu’à présent, les informations sur les revenus des allocataires étaient soit récupérées annuellement auprès des impôts, soit collectées via les déclarations trimestrielles auprès des allocataires concerné·es (titulaires du RSA, de l’AAH…)5. Désormais, l’algorithme de la CAF bénéficiera d’un accès en « temps réel » aux ressources financières de l’ensemble des 12 millions d’allocataires (salaires et prestations sociales).

    Pour ce faire, l’algorithme de la CAF sera alimenté par une gigantesque base de données agrégeant, pour chaque personne, les déclarations salariales transmises par les employeurs ainsi que les prestations sociales versées par les organismes sociaux (retraites, chômage, RSA, AAH, APL…)6 : c’est le « Dispositif des Ressources Mensuelles » (DRM). Cette base, créée en 2019 lors de mise en place de la réforme de la « contemporanéisation » des APL7, est mise à jour quotidiennement, et offre des capacités inégalées de surveillance des allocataires.

    La justification d’une telle extension de la surveillance à l’œuvre à des fins de notation des allocataires est d’accroître la « productivité du dispositif [de l’algorithme] » selon les propres termes des responsables de la CAF8. Qu’importe que se multiplient les témoignages révélant les violences subies par les plus précaires lors des contrôles9. Qu’importe aussi que les montants récupérés par l’algorithme soient dérisoires au regard du volume des prestations sociales versées par l’institution10. Les logiques gestionnaires ont fait de la course aux « rendements des contrôles » une fin en soi à laquelle tout peut être sacrifié.

    #Surveillance #CAF #Chasse_aux_pauvres #Inégalités