Nicole Garreau

Poétesse sans talent et dictateuse sans vergogne

  • ne l’a pas fait, non, cette fois-ci — les années précédentes, lorsque les ceusses organisaient de grandes randonnées pédestres autour du patelin, la veille au soir elle allait subrepticement ficher la pagaille dans le balisage : elle changeait les piquets de place, inversait les panneaux directionnels, obligeant les Parisien·ne·s à revenir sur leurs pas ou à tourner en rond, les envoyant dans des culs-de-sac, les dirigeant vers des cours de fermes où les koulaks les accueilleraient à coups de fourches, les précipitant dans des ravins ou des marécages desquels certain·e·s ne reviendraient jamais.

    Las ! cela ne sert plus à rien : désormais le balisage iels s’en fichent, iels « randonnent » le pif collé sur l’écran de leurs espèces de talkies-walkies — il paraît qu’il y a tout là-dessus, les itinéraires, la topographie, les temps, les distances, leurs pulsations cardiaques (oh, les pauv’ choux), la météorologie et même le portrait du président de la République. Avec tant de guides infaillibles il n’y a plus moyen de les perdre en se contentant de saboter la signalétique au bord du chemin : iels n’en ont pas besoin et ne l’utilisent simplement pas.

    Cette saleté de technologie aura privé la très méchante Garreau d’un de ses derniers petits plaisirs.