Archéologies révolutionnaires. Regards croisés sur la Tunisie et l’Égypte (2011-2013)
▻http://anneemaghreb.revues.org/2005
n Égypte, en Tunisie, les révolutions furent immédiatement vécues comme de vastes archéologies collectives : alors que les chapes de plomb des dictatures semblaient se briser, les groupes engagés dans l’action exprimaient de pressants et divers besoins d’histoires qui, cette fois, ne devaient pas être imposées mais sourdre de la nation elle-même. Réactualisant les souvenirs des luttes anticoloniales, les premiers usages du passé témoignent de la façon dont ces révolutions ont été vécues comme de nouvelles révolutions d’indépendance, et cette fois véritables. Permettant à des conceptions concurrentes du temps et de l’histoire longtemps étouffées d’inspirer des slogans, des programmes politiques ou d’alimenter des mobilisations collectives, ces révolutions ont aussi ouvert des boîtes de Pandore, ressuscité d’âpres conflits, suscitant parfois un climat de guerre civile dans lesquelles le passé est réinventé et utilisé comme une arme. Les dynamiques révolutionnaires n’étant pas terminées, ces processus d’appropriations politiques et de revendications identitaires peinent encore à coexister pacifiquement ou à s’accorder autour d’un récit commun. De la résolution des conflits anciens, de la capacité des groupes et des institutions représentatives à forger des versions apaisées de l’histoire dépend en partie, comme ce fut le cas pour bien des révolutions du passé, la cohésion future de sociétés engagées dans de complexes processus de transitions politiques, sociales et culturelles.