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  • Julien Gracq et la « couche de non-savoir, de non-chaloir, de non-lire, de non-voyager qui [protège] » (1974)

    Tout comme la couche d’air qui nous entoure protège les Terriens contre la continuelle agression cosmique, il existait, il a longtemps existé autour d’eux une couche de non-savoir, de non-chaloir, de non-lire, de non-voyager, qui protégeait leur quiétude d’esprit contre le bombardement tellurique continu des Nouvelles, et qui l’a protégée plus longtemps encore contre celui, plus corrosif encore, des Images. On commence à s’apercevoir, maintenant que notre civilisation la dissipe, que cette couche isolante était vitale. Physiquement, l’homme ne vit pas nu, spirituellement aussi c’est un animal à coquille. Et les effets de ce mortel décapage sont devant nous : érosion continue et intense de toutes arêtes vives, de toute originalité – réduction progressive du refuge central, du for intérieur — contraction frileuse de l’esprit tout – entier exposé sur toute sa surface, comme une pellicule fragile, aux bourrasques cinglantes qui soufflent sur lui de partout, irritation à fleur de peau, état de prurit et de gerçure. On est « mal dans sa peau » : certes c’est bien dit ! à condition de savoir l’entendre. L’esprit longtemps en a eu une, et épaisse, et sainement cornée : il n’a plus qu’une muqueuse.

    Julien Gracq, Lettrines 2, éditions José Corti, 1974, page 66. [Les italiques sont de Gracq]. via @philippe (Arnaud, celui de Zinc)

    #attention #déconnexion #vie #tmi