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  • Rapport sur les #incidents_racistes #2023 : les centres de consultation reçoivent toujours plus de signalements

    Jamais le Réseau des centres de consultation pour les victimes de racisme n’a conseillé autant de personnes qu’en 2023. Au total, les centres de consultation membres ont traité 856 cas de #discrimination, soit 168 de plus que l’année précédente. Le travail qu’ils mènent revêt une importance toujours plus grande : en 2023, les interventions ont presque doublé par rapport à l’année précédente.

    Aujourd’hui, le 28 avril 2024, humanrights.ch et la Commission fédérale contre le racisme CFR publient le rapport annuel d’évaluation contre les incidents racistes recensés l’année dernière par les centres de consultation. La vidéo ci-dessous en présente les points saillants.

    https://www.youtube.com/watch?v=xLFDNRUnB_4

    Le rapport d’évaluation montre que les incidents racistes sont largement répandus en Suisse. Ils peuvent survenir dans les relations interpersonnelles, notamment lorsque les limites d’une personne sont franchies ou que celle-ci est dénigrée ou agressée verbalement ou physiquement. Des cas de racisme sont toutefois également signalés dans les structures et les institutions de notre société, dont les normes et les pratiques excluent ou désavantagent de diverses manières certaines personnes. Le racisme ne concerne pas uniquement les personnes individuellement, mais la société dans son ensemble. Le nombre de signalements effectués par des témoins et des professionnel·le·x·s augmente chaque année un peu plus.

    De nombreuses personnes, dont la plupart n’étaient pas directement concernées, se sont par exemple adressées au Réseau des centres de consultation pour lutter contre la diffusion de préjugés et de contenus discriminatoires dans le cadre de campagnes électorales. Cette mobilisation caractérisée par une forte solidarité revêt une importance capitale pour la lutte contre le racisme et renforce la cohésion sociale. Elle exprime l’attente suivante : les partis politiques doivent rejeter avec force les discours et les actions qui ciblent et accusent des groupes entiers de la population, leur portant préjudice.

    En 2023, les évolutions de la société ont également préoccupé de nombreuses personnes sur le plan tant émotionnel que politique. Depuis le début des évènements au Proche-Orient, les dynamiques racistes et antisémites se sont multipliées au sein de la population suisse. Les incidents antisémites, tels que des discours de haine dans l’espace public, ont nettement augmenté depuis le début de la guerre. Les consultations liées à des actes de racisme dirigés contre des personnes de confession musulmane ou issues du monde arabe ainsi que les cas de xénophobie sont également en hausse.

    Les chiffres présentés dans le rapport soulignent la nécessité d’une offre de conseil et de soutien pour les personnes concernées directement et indirectement par la discrimination raciale. Celle-ci constitue un élément clé de toute politique de lutte contre la discrimination. Les centres de consultation ne font pas qu’aider les victimes à surmonter les traumatismes liés à la discrimination ou à renforcer l’autonomie des personnes concernées et des témoins dans le développement de stratégies d’action : grâce à leurs multiples prestations, ils permettent aussi d’apporter des changements concrets dans les situations des personnes concernées. En 2023, ils ont effectué près du double d’interventions par rapport à l’année précédente, notamment dans les établissements de formation, dans les administrations et auprès des employeurs. Les centres de consultation permettent de visibiliser les pratiques discriminatoires perpétuées dans les institutions et soutiennent ainsi le changement.

    En soutenant les personnes qui subissent des discriminations raciales et les témoins de comportements discriminatoires, les centres de consultation effectuent un travail pertinent, qui doit être reconnu par la politique et par l’État. Des ressources financières suffisantes et durables doivent donc leur être octroyées.

    Une collaboration plus étroite entre la politique, la société civile, les expert·e·x·s et les personnes concernées est nécessaire pour que les dimensions structurelles et institutionnelles de la #discrimination_raciale soient thématisées et fassent l’objet d’une véritable #lutte.

    https://www.humanrights.ch/fr/antennes/discrimination/rapport-incidents-racistes-2022-pertinence-de-thematique-racisme-ne-cess
    #racisme #Suisse #statistiques #chiffres #rapport #racisme_structurel

    ping @cede

  • Forêt d’Hambach (Allemagne) : rencontres anarchistes annuelles « Alljährliches Chaotisch – Anarchistisches Treffen » #2, du 30 mai au 2 juin 2024
    https://infokiosques.net/spip.php?article2093

    Nous voulons l’anarchie. Nous voulons la liberté et l’autonomie pour tous, sans domination. Nous voulons le renversement de l’ordre existant. Nous voulons la révolution sociale. Cela n’a pas changé depuis la dernière réunion de l’ACAT. Entre autres sujets, on a discuté l’année dernière de si les luttes intermédiaires/spécifiques sont toujours une proposition valable dans les conditions actuelles, et/ou si nous en avons besoin maintenant plus que jamais ; face aux conditions dystopiques, de quelle manière (...) #ailleurs

    https://acat.noblogs.org
    https://acat.noblogs.org/kontakt

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - Présentation de l’auteur
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-presentation-de-l

    Principaux titres et responsabilités actuels Conseiller permanent du Centre International de Formation Euro­péenne. Membre du Comité Directeur et du Bureau du C.I.F.E. Président d’honneur de l’Union européenne fédéraliste et membre du Conseil du mouvement fédéraliste européen. Research fellow of the Center for the Study of Federalism, Temple University (Philadelphia, Pa.), and of the Jerusalem Institute for Federal Studies. Initiateur du Forum des Initiatives Européennes et Fédéralistes (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc
    #Alexandre_Marc #Karl_Marx
    / #Volonté_Anarchiste

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 24. La doctrine... introuvable
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-24-la-doctrine

    Jamais, peut-être, cette affirmation de Lénine n’a été aussi vraie que de nos jours : pour briser le cercle vicieux dans lequel se coulent, inséparables, le conformisme, la réforme et la révolte, il faut une doctrine révolutionnaire : réfractaire aux fluctuations de la mode, mais ouverte à tous les problèmes de notre temps ; vivifiante et novatrice, mais respectueuse de ce qui, dans nos traditions, ne s’est pas encore transformé en bois mort ; explosive et constructrice à la fois ; bref (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc #Alexandre_Marc #Karl_Marx

    / #Volonté_Anarchiste

  • Comment préparer sa retraite
    http://carfree.fr/index.php/2024/04/22/comment-preparer-sa-retraite

    On ne va pas se mentir, il va falloir travailler de plus en plus longtemps et au bout de la route, si vous êtes encore vivant à 64, 65 ou Lire la suite...

    #Alternatives_à_la_voiture #Fin_de_l'automobile #Vélo #Vie_sans_voiture #2000 #économie #humour #politique #sans_voiture #société #Solutions #travail #Vivre_sans_voiture

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 23. « La Révolution nécessaire » (R. Aron et A. Dandieu)
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-23-la-revolution

    A l’égard d’une entreprise de cette envergure, les conserva­teurs, les réactionnaires, les réformistes et les révoltés, pour parler vulgairement, ne font pas le poids. Pour ainsi dire congénitalement, intrinsèquement, ils sont condamnés à l’impuissance et à l’échec. Ils ne sont pas de taille à résister au monstre dont l’ombre obscurcit déjà l’horizon de notre à-venir. Du reste, le veulent-ils vraiment, ne sont-ils pas secrètement fascinés par la puissance de la bête, ne se résignent-ils (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc #Alexandre_Marc #Karl_Marx

    / #Volonté_Anarchiste

  • Les dépenses militaires mondiales augmentent dans un contexte de guerre, d’escalade des tensions et d’insécurité
    https://www.obsarm.info/spip.php?article649

    (Stockholm, 22 avril 2024) – Le total des dépenses militaires mondiales s’élève à 2 443 milliards de dollars en 2023, soit une augmentation de 6,8 % en termes réels par rapport à 2022. Il s’agit de la plus forte augmentation d’une année sur l’autre depuis 2009. Les 10 plus grands dépensiers en 2023 – avec en tête les États-Unis, la Chine et la Russie – ont tous augmenté leurs dépenses militaires, selon les nouvelles données sur les dépenses militaires mondiales publiées aujourd’hui par le (...) #Armements

    / Dépenses militaires / Budgets, #Guerres, #Industrie_d'armement

    #Dépenses_militaires_/_Budgets
    https://www.obsarm.info/IMG/pdf/milex_press_release_fre-5.pdf

  • Berlinskij Kreml / The Terror Machine, de Gregory Klimov, Le prix de la liberté, addendum à la deuxième édition du livre, 1971,
    https://g-klimov.info/klimov__pesn_pobeditelya_ru/pesn_pobeditelya_20.html

    On ne trouve ce texte en ligne que dans la version russe du livre. Vu d’aujourd’hui, plus de soixante dix ans après sa première publication et plus de cinquante ans après celle de l’addendum, ce texte nous révèle deux éléments intéressants de l’histoire de la guerre froide.

    D’abord Klimov raconte que le systéme de gestion des DP (displaced persons) états-unien était géré par des gangsters qui pillaient les réfugiés, les torturaient et les utilisaient comme monnaie d’échange pour leurs deals avec les services secrets de l’URSS. Il s’agit des observations personnelles du vécu l’auteur en 1947. Dans la deuxième partie du texte on découvre le résultat de la transformation d’un jeune homme brillant sous l’impression des persécutions stalinistes et états-uniennes et de sa tentative manquée to sort things out .

    En 1971 déjà Gregory Klimov se réfugie dans des idées dignes des médecins eugénistes nazis qui tournent autour de la décadence. Il explique cette vue du monde plus explicietement dans un autre texte. C’est remarquable car il anticipe une partie de la pensée russe post-soviétique dont se servent les poutinophobes pour dénoncer les Russes comme fascistes.

    Grigory Klimov « Le chant du vainqueur »
    Le prix de la liberté
    Addendum à la deuxième édition du livre
    De nombreux lecteurs de « Le Kremlin de Berlin » se sont demandé : « Et que s’est-il passé ensuite ? »
    Lorsque je leur en ai parlé, ils se sont exclamés : « Mon Dieu, c’est si intéressant ! Pourquoi ne l’avez-vous pas décrit ? »
    J’ai donc décidé de décrire les choses « intéressantes » que je n’avais pas décrites auparavant.
    Si aujourd’hui, en 1971, un touriste soviétique, un marin ou un Kagabeshnik saute d’un train ou d’un bateau à vapeur, il est immédiatement emmené en Amérique. Crier dans la presse qu’il a choisi la liberté américaine est une forme de guerre psychologique. Même la fille de Staline a été emmenée en Amérique.
    C’est parce qu’aujourd’hui, les États-Unis et l’URSS sont officiellement ennemis. Lorsque j’ai choisi la liberté, en 1947, ils étaient officiellement amis et alliés. Et il n’y avait pas encore de guerre psychologique. L’élection de la liberté était un peu différente à l’époque. À l’époque, je travaillais comme ingénieur principal pour la SVA, l’administration militaire soviétique en Allemagne.
    Dans ma quête de liberté, j’ai essayé de demander aux alliés occidentaux, les Britanniques et les Américains, ce que l’on appelle l’asile politique par le biais d’intermédiaires allemands. C’était un geste de courtoisie. Mais les gentilshommes alliés ne voulaient rien entendre.
    Au même moment, les journaux berlinois écrivaient que les Britanniques avaient échangé leur agent-espion Igor Stern, qui s’était endormi et avait été arrêté dans la zone soviétique, contre un officier soviétique qui avait choisi la liberté et demandait « l’asile politique » dans la zone anglaise.
    Quelques années plus tard, les Anglais ont condamné ce même Igor Stern à 10 ans de prison pour des faits délictueux. Et le Russe, qui cherchait la liberté, a payé de sa vie ce Stern.
    Comme j’ai été l’un des premiers à arriver au Kremlin à Berlin, j’ai eu un bon appartement et beaucoup de bonnes choses. Les officiers démobilisés avaient le droit d’emporter tout cela comme trophée. Je donnais maintenant toutes ces bonnes choses à mes bons amis. C’étaient des majors et des lieutenants-colonels du service du génie, presque tous membres du Parti. Lorsqu’ils ont reçu mes cadeaux, ils ont deviné que j’allais partir n’importe où, mais pas en URSS. Certains d’entre eux me l’ont directement laissé entendre. Mais moi, avec un pistolet dans ma poche, je me suis entêté :
    – Je vais à Moscou !
    Un camarade major, après s’être donné du courage avec un verre de vodka, m’a avoué qu’il avait un oncle à Paris et m’a proposé d’écrire son adresse. Je secouai la tête :
    – Je vais à Moscou !
    En guise de cadeau d’adieu, j’ai offert à Inga, une gentille petite amie allemande, toute une cargaison d’objets. Elle aussi a compris qu’un officier soviétique qui partait en Russie ne donnait pas toutes ses affaires, et elle m’a dit : "Écoute, veux-tu que je t’aide ?
    – Écoute, veux-tu que je t’aide à t’enfuir en Allemagne de l’Ouest ?
    Je me tais.
    « J’ai un camarade de classe », dit Inga. - Il était dans la SS pendant la guerre. Maintenant, il s’occupe de faire passer la frontière aux gens. C’est vrai, je devrais vous dire qu’à la frontière, il les tue, leur tire une balle dans la nuque et les vole..... Mais je lui dirai que tu es mon fiancé, et il ne te tuera pas.... Tu veux que je vienne avec toi ?"
    Je l’ai remerciée et j’ai dit que j’allais à Moscou. Oh, cette Inga était une bonne femme. Il est bon de s’en souvenir !
    Finalement, avec l’aide d’intermédiaires allemands, je suis arrivé en voiture dans un village frontalier de Thuringe. Le soir, deux guides, père et fils, paysans locaux, m’ont fait passer la frontière. Ils empruntaient souvent ces chemins forestiers pour se rendre chez leurs parents de l’autre côté de la frontière.
    C’était une nuit d’hiver lumineuse. Me souvenant de l’histoire d’Inga, je marche derrière mes guides - avec un parabellum dans ma poche - juste au cas où. Sous mon manteau est accroché à mon épaule, la bouche vers le bas, un fusil automatique allemand. Des grenades et des chargeurs de rechange pour la mitrailleuse sont éparpillés dans mes poches. C’était au cas où les gardes-frontières soviétiques nous croiseraient.
    Nous avons marché ainsi pendant deux ou trois heures. Et nous sommes arrivés sans encombre à la première gare de la zone américaine. Derrière le bâtiment de la gare, j’ai payé mes conducteurs : je leur ai donné, je crois, mille marks d’occupation, ce qui, à l’époque, représentait environ 5 dollars américains. C’était le premier paiement pour la liberté et, je dois le dire, je l’ai gagné très honnêtement. En guise de récompense, j’ai donné à mes guides mon parabellum, mon fusil automatique et mes grenades à main, ce dont ils m’ont vivement remercié et m’ont longuement salué. Peut-être ne s’attendaient-ils pas à avoir tout un arsenal derrière eux.
    Je suis monté dans le train. Allons-y. Je ne sais même pas où. Loin de la frontière. J’étais tellement concentré sur mon évasion de la zone soviétique que je n’ai pas pensé à ce que je ferais dans la zone américaine. Je me perdais parmi les Allemands, je jetais un coup d’œil et nous verrions ensuite. À cette fin, j’ai même obtenu une carte d’identité allemande au nom de Ralph Werner.
    Bientôt, la police militaire américaine commence à marcher le long du train : les Alliés vérifient les documents. Je montre ma kennecard et je suis arrêté. À la gare suivante, les Alliés me remettent à la police allemande. Je demande à l’aimable policier allemand ce qui se passe. Il s’avère que ma fichue carte d’identité provient de la zone soviétique et qu’ils ont d’autres cartes d’identité ici. Herr Werner sera donc renvoyé dans la zone soviétique par le prochain train. Le policier compatit beaucoup avec moi, mais c’est l’ordre des autorités d’occupation américaines : renvoyer tous les réfugiés allemands de la zone soviétique. Y compris Herr Werner.
    Voyant qu’il n’y avait rien à faire, j’ai sorti d’une autre poche ma carte d’identité SBA (Administration militaire soviétique), où j’étais représenté en uniforme d’officier soviétique.
    Le lendemain, je me suis retrouvé chez les Alliés, dans une villa de campagne près de Kassel, où il y avait une sorte de maison de vacances pour les officiers de renseignement américains. L’après-midi, l’un d’entre eux m’a invité à participer à une compétition de tir au pistolet. Nous avons tiré dans la cour sur des morceaux de bois de chauffage fraîchement sciés, en les mettant sur la crosse. L’éclaireur américain sortait de derrière sa ceinture un revolver court, presque sans canon, comme celui que portent les fringants agents du F.B.I. dans les films. Il a également tiré comme un cow-boy au cinéma - de la hanche, sans viser. Et, bien sûr, il ratait tout le temps.
    Il a ensuite sorti de sa poche un Colt de calibre 32 et me l’a tendu. Comme je tirais avec une arme normale et d’une manière normale, mes résultats étaient bien meilleurs. Mais je soupçonne qu’après cela, l’officier de renseignement américain a conclu que j’étais un tireur d’élite et donc un dangereux agent soviétique. Pour ma défense, je peux seulement dire qu’il était tout simplement impossible de tirer plus mal que lui.
    Quoi qu’il en soit, le lendemain, on m’a fait monter dans une jeep et on m’a conduit au Camp King à Oberursel, près de Francfort. Il s’agissait d’un ancien camp de concentration allemand où les Américains détenaient désormais principalement des criminels de guerre allemands. Le panneau au-dessus de la porte indiquait : « Quartier général du contre-espionnage américain en Europe ».
    Dans ce camp de concentration, j’ai été détenu pendant trois mois. En isolement. J’ai donc choisi la liberté - et pour la première fois de ma vie, je me suis retrouvé derrière les barreaux. Avec des criminels de guerre allemands. Un allié rendant visite à un allié !
    Pendant tout ce temps, je crois que je n’ai été interrogé que deux fois. À l’époque, je parlais couramment l’allemand, mais en anglais, je pouvais seulement lire, mais je ne pouvais pratiquement pas parler. Lors du premier interrogatoire, une Galicienne portant l’uniforme d’un sergent américain a servi d’interprète russe. Mais elle ne comprenait pas le russe et je ne comprenais pas le galicien. Qu’a compris le jeune lieutenant américain de cet interrogatoire ? - Je n’en sais rien.
    Je me suis dit : "Mon Dieu, ils n’ont donc pas un seul interprète russe dans les quartiers principaux du service de contre-espionnage américain ! Les protocoles d’interrogatoire sont estampillés « top secret ». Et cette femme ne comprend pas la moitié de ce que je dis. Et ma vie en dépend. Quelle idiote !"
    Lors du deuxième interrogatoire, on m’a donné un interprète allemand. C’était un jeune homme juif portant l’uniforme d’un caporal américain, qui parlait yiddish au lieu d’allemand. Il ne comprenait pas l’allemand et je ne comprenais pas le yiddish. L’interrogatoire s’est déroulé comme suit :
    Question :
    – De quel établissement d’enseignement avez-vous été diplômé ?
    J’ai répondu en allemand :
    – Polytechnische Hochschule, c’est-à-dire l’Institut polytechnique, où l’on forme des ingénieurs. Le traducteur traduit en anglais comme suit :
    – Vokeschenal High School, ce qui, en Amérique, signifie une école de commerce où vont les plus mauvais élèves qui ne peuvent pas obtenir un diplôme d’une école secondaire normale.
    Les questions qui suivent permettent à l’enquêteur d’apprendre que j’ai obtenu mon diplôme à l’âge de 23 ans, alors que les Américains les plus stupides y parviennent à l’âge de 18 ans. Je suis donc une sorte de supercrétine. Et après ça, j’ai été l’ingénieur en chef du SAS. Qu’est-ce que l’interrogateur a retiré de cet interrogatoire ? - Je n’en sais rien.
    Je me disais : « Comment interroger des criminels de guerre allemands si vous n’avez même pas d’interprètes allemands ? (Soit dit en passant, l’un de ces interprètes des services de renseignement américains était un juif, Henry Kissinger, qui devint plus tard le bras droit du président Nixon). Et ce magasin est le siège du contre-espionnage américain en Europe ?! »
    À Moscou, j’ai obtenu par hasard un diplôme de l’Académie diplomatique militaire, où des milliers de personnes étudiaient toutes les langues du monde, jusqu’aux dialectes nègres d’Afrique. Et ici ?
    Pour être objectif, je dois dire que la nourriture était bonne. Tous les matins, au lever du drapeau, le haut-parleur de la cour diffusait l’hymne américain, que j’écoutais, je l’avoue, avec le plus grand dégoût. Aujourd’hui encore, 24 ans plus tard, lorsque j’écoute cet hymne, il me rappelle automatiquement le camp King.
    Une cellule d’isolement. Sur les murs, des inscriptions laissées par d’anciens prisonniers. Dans toutes les langues du monde, y compris le russe. Certaines d’entre elles sont manifestement des notes de suicide. Par la fenêtre, derrière les barreaux, on aperçoit un canon de char américain. Puis des barbelés. Derrière les barbelés se trouve un champ vert, sur lequel des lapins allemands courent tranquillement. Parfois, ces lapins grimpent même sous les barbelés et s’ébattent sous ma fenêtre.
    Et moi, je m’assois et je me dis : « Oh, pourquoi ne suis-je pas un lapin ? » Prisonnier numéro M-62. Un homme qui a choisi la liberté. Lors de l’interrogatoire, j’ai déclaré que j’avais quitté l’URSS pour des raisons politiques et que je me considérais comme un émigrant politique. Mais pourquoi suis-je détenu ? Pourquoi n’y a-t-il pas d’interrogatoire ? Après tout, mon cas est parfaitement clair. J’ai tous mes documents soviétiques sur moi. Mon nom figure dans les procès-verbaux du Conseil de contrôle allié à Berlin, où j’ai travaillé avec les Américains et les Britanniques. J’ai de nombreuses connaissances allemandes qui vivent dans les secteurs américain et anglais de Berlin et qui me connaissent depuis des années, tant dans le cadre de mon travail que sur le plan personnel. Et tout cela est très facile à vérifier.
    D’un point de vue juridique, il existe un traité sur l’échange mutuel des déserteurs. Mais j’ai un certificat de démobilisation de l’armée. Avec toutes les signatures et tous les sceaux. Et même un laissez-passer pour passer la frontière, sur du papier-monnaie avec filigrane et ma carte-photo. Seul le laissez-passer était à l’envers. Mais de toute façon, le traité d’échange des déserteurs ne s’applique pas à moi.
    Mais alors pourquoi suis-je détenu ? Et en isolement. Et sans interrogatoire. Et sous le sceau « top secret ». Peut-être, me suis-je dit, pour m’échanger contre un espion américain qui s’est endormi dans la zone soviétique, comme Igor Stern ? Oh, vous, les marchands de biens vivants !
    Je ne sais pas si, à l’époque, on n’a pas trouvé de biens convenables à échanger, ou si c’est pour une autre raison. Quoi qu’il en soit, trois mois plus tard, un major américain m’a informé avec indifférence que j’étais libéré. En passant, il a fait remarquer qu’ils allaient devoir m’acheter une nouvelle carte d’identité. Au marché noir. À mes frais, bien sûr, avec l’argent qu’on m’avait pris lors de mon arrestation.
    J’étais un peu surpris que le quartier général du contre-espionnage américain, et dans toute l’Europe, n’ait pas d’autre moyen d’obtenir les papiers d’une personne que de les acheter au marché noir. Mais à l’époque, je m’en fichais. Au moins, ils me laissent sortir.
    La nuit, avant même l’aube, un Tadjik, qui parlait à peine le russe et qui servait apparemment de chauffeur dans ce camp, m’a conduit en voiture du camp King à Stuttgart. En chemin, il s’est arrêté dans un camp DP et a pris un papier certifiant que moi, Herr Ralf Werner, un homme de nationalité indéterminée, j’avais été libéré du camp DP et que je déménageais dans un appartement privé, c’est-à-dire que je passais des mains américaines à l’économie allemande. Je passais donc des mains des Américains à celles de l’économie allemande. C’était là toute l’astuce de l’achat de documents au marché noir.
    Avec ce morceau de papier, nous sommes allés à la police allemande et mon Tadjik a commencé à obtenir de nouveaux documents pour moi. Mais il parlait allemand de telle manière que le policier ne le comprenait pas. J’ai alors fait appel aux services de renseignements américains et j’ai expliqué au policier que ce n’était pas ce Tadjik qui avait besoin de ces documents, mais moi, Herr Werner. J’ai donc obtenu une nouvelle kennkarta, un permis de séjour et des cartes de rationnement.
    C’est ainsi que le vainqueur a choisi le destin du vaincu.
    Après avoir pris congé du Tadjik, je me suis assis sur un banc public et j’ai ouvert le paquet scellé que le Tadjik m’avait glissé au dernier moment - au nom de ses supérieurs. Il était censé contenir mes documents et l’argent emporté lors de l’arrestation. Mais tous les documents avaient disparu. La moitié de mon argent a disparu avec eux - 20 000 marks d’occupation, le prix d’une nouvelle carte d’identité.
    Travaillant comme ingénieur principal pour la SVA, je gagnais en tout et pour tout 8 000 marks par mois. Il n’est donc pas surprenant qu’au moment où la « liberté » a été élue, je me sois retrouvé avec environ 40 000 marks d’occupation (et d’inflation).
    J’ai payé 1 000 marks aux guides allemands qui m’ont fait passer la frontière. Et c’était un gesheft honnête. Mais voilà que le service de renseignement américain me réclame 20 000 marks pour ma « liberté » et tous mes documents professionnels, y compris mon diplôme d’ingénieur, dont je pourrais encore avoir besoin à l’avenir. Cette affaire américaine ne m’a pas enthousiasmé.
    Traduits en monnaie américaine, 20 000 marks représentaient à l’époque une somme insensée, de l’ordre de 100 dollars. Mais les officiers de renseignement américains n’étaient pas dupes. Pour le réfugié que j’étais, cette somme n’avait pas la même signification. Après tout, à cette époque, les Allemands, parmi lesquels je devais vivre, recevaient 400 à 500 marks par mois.
    Si les services secrets américains n’avaient volé que moi, si cela avait été un accident, j’aurais simplement craché et je n’aurais pas décrit la situation avec autant de détails. Mais ce n’était pas un accident, c’était un système. C’est ainsi que presque tous les Soviétiques qui ont « choisi la liberté » ont été traités à l’époque, entre 1945 et 1950. Plus tard, en tant que président de l’Association centrale des émigrés d’URSS de l’après-guerre, c’est-à-dire des personnes qui avaient suivi un chemin similaire, j’ai entendu de nombreuses histoires similaires de leur part.
    Les services de renseignement américains sont officiellement appelés les services de renseignement du gouvernement américain. Mais je dois dire à l’oncle Sema que ce bras n’est pas tant un bras de renseignement qu’un bras de voleur.
    Je dois faire remarquer que le vol ou le cambriolage au Camp King a été effectué de manière assez organisée et prudente. La veille de ma libération, un sergent américain est entré dans ma cellule et m’a tendu un papier à signer, disant : « Je confirme par la présente que j’ai récupéré sains et saufs tous les documents, objets de valeur et, en général, tout ce qui m’a été enlevé lors de mon arrestation ».
    En regardant les mains vides du sergent, j’ai demandé :
    – Où sont toutes ces choses ?
    – Vous les aurez demain quand vous serez libéré", m’a répondu le sergent.
    Après trois mois d’isolement, et avec la perspective d’être renvoyé devant le peloton d’exécution, je n’avais pas particulièrement envie de me disputer avec le sergent pour quelques papiers. J’ai donc pris et signé le papier que le sergent m’a glissé.
    Ainsi, les services secrets américains m’ont non seulement volé, mais ils ont également reçu un reçu attestant que tout m’avait été rendu. C’est peut-être la seule raison pour laquelle ils m’ont gardé à l’isolement pendant trois mois - comme entraînement psychologique pour intimider une personne. Je ne vois pas d’autre raison logique.
    Après avoir vécu quelques jours à Stuttgart, j’ai commencé à réfléchir à ce que je devais faire ensuite. Les officiers soviétiques de la mission de rapatriement se promenaient encore dans Stuttgart à cette époque. Il était un peu étrange pour Herr Werner de regarder cet uniforme qu’il avait lui-même porté récemment.
    Pour une raison quelconque, je me suis souvenu du Conseil de contrôle allié à Berlin, où j’avais rencontré les Américains. Les véritables vainqueurs de l’Allemagne hitlérienne y étaient clairement identifiés. Les Soviétiques se sont comportés de manière résolument cavalière, tandis que les Américains ont fait preuve d’ingratitude. Ils ont tâté mes boutons et mes épaulettes et m’ont souri de manière flatteuse. Ensuite, il y avait des divisions de chars soviétiques derrière moi. Ils m’ont alors pris pour un Soviétique et j’ai pensé qu’ils étaient des gentlemen. Aujourd’hui, le soviétique est devenu russe et les gentlemen sont devenus des escrocs. Bien sûr, pas tous, mais...
    Mais je n’avais pas encore subi la psychologie du vainqueur du Conseil de contrôle. Et si j’allais voir le consul américain à Stuttgart et lui demandais conseil sur ce que je devais faire ? Après tout, les Américains du Conseil de contrôle ne demandaient qu’à me parler. Mais je n’ai pas pu le faire à l’époque. Aujourd’hui, je le peux. Eh bien, parlons-en. Après tout, vous êtes les patrons ici. Je n’ai rien à vous cacher. Même si les services secrets américains sont truffés d’escrocs, les diplomates américains doivent être des gentlemen.
    Je suis donc assis dans le bureau du consul. Il a l’air d’un gentil monsieur avec une bedaine. Mais pour une raison que j’ignore, ce monsieur est surtout intéressé de savoir où et comment j’ai obtenu mon kennkart.
    – Par la police allemande, réponds-je. - Mais avec l’aide des services secrets américains.
    – Et avez-vous payé quelque chose pour cela ?
    La question est assez délicate et même un peu provocatrice. Si je me tais, le consul peut vérifier, et alors on me demandera : « Pourquoi le cachez-vous ? Peut-être cachez-vous aussi quelque chose d’autre ? »
    – Oui et non", réponds-je.
    – Que voulez-vous dire ? - insiste le consul.
    – Je ne l’ai pas payé moi-même, mais ils me l’ont pris.
    – Combien ?
    – Vingt mille marks.
    – Par qui ?
    – Les services secrets américains.
    Après avoir découvert cette question financière, le monsieur à la bedaine s’est désintéressé de moi. C’est peut-être vrai que les Américains ne s’intéressent qu’à l’argent. - me suis-je dit. En me disant au revoir, le consul m’a promis qu’il ferait quelque chose.
    Et effectivement, le lendemain matin, la police militaire américaine m’a tiré du lit. Ils m’ont mis dans une jeep, avec toutes mes affaires, et m’ont emmené. Ils m’ont emmené au même Camp King, près de Francfort. Ils m’ont retiré ma nouvelle carte d’identité et m’ont de nouveau enfermé à l’isolement.
    J’y suis resté trois mois de plus. Sans un seul interrogatoire. Une seule fois pendant tout ce temps, trois messieurs sont entrés dans ma cellule - comme par hasard - un colonel, un major et un sergent qui servaient d’interprète de l’anglais à l’allemand, ou plutôt, de nouveau en yiddish, où je ne comprenais que quelques mots.
    Sur un ton de reproche, le colonel m’informa qu’ils voulaient m’aider, mais qu’au lieu de leur témoigner de la gratitude, je ne faisais que leur causer des ennuis - un trable - et qu’ils ne savaient tout simplement pas quoi faire de moi : apparemment, ils n’avaient qu’à me renvoyer. Après quoi, secouant la tête d’un air réprobateur, ces messieurs sont partis.
    Comme le colonel est apparemment l’un des chefs du camp, je me suis dit qu’il ne s’agissait pas du travail de certains officiers, mais d’un système : tout le quartier général du contre-espionnage américain est entre les mains de gangsters. Et le consul américain à Stuttgart n’est pas mieux. Ils forment tous un seul et même gang, messieurs de la route.
    Mon opinion personnelle est bien sûr absurde. Mais je n’étais pas le seul à le penser, des centaines de Soviétiques qui avaient choisi la liberté et subi une rééducation idéologique au camp King le pensaient aussi.
    Une nuit, je me suis réveillé en entendant un grondement dans l’une des cellules voisines. À travers les murs, on entendait un bruit de lutte, comme si on attachait quelqu’un, et de forts jurons.... russe... Des piétinements et des voix d’Américains... Puis quelqu’un est traîné dans le couloir.
    Eh, me suis-je dit, cela signifie que quelqu’un de notre côté a été traîné... Pour la restitution.
    Après cela, j’étais tellement dégoûté que j’ai décidé d’entamer une grève de la faim et de refuser de prendre le plateau du petit-déjeuner le matin. Mais le sergent a placé le plateau sur la couchette du haut et a fermé la porte à clé. Le petit-déjeuner est resté là jusqu’à l’heure du déjeuner. Au déjeuner, un autre sergent plaça un autre plateau, qui resta là jusqu’au dîner. Et le dîner restait sur la couchette du haut jusqu’au matin. Et ainsi de suite tous les jours. Pendant douze jours.
    Si quelqu’un pense qu’il s’agit d’une farine alléchante, il n’en est rien. Même si j’avais toujours de la nourriture au-dessus de ma tête, je n’avais pas du tout envie de manger. Ensuite, on ne boit même plus. Seules la fatigue et la somnolence apparaissent. Et tout cela est absolument indolore. Ceux qui veulent perdre du poids peuvent essayer. Mais il faut d’abord se retrouver dans le couloir de la mort.
    Finalement, après douze jours de grève de la faim, un major américain est venu dans ma cellule avec une pipe entre les dents et m’a demandé ce qui se passait. Je lui ai répondu que je voulais moi-même savoir ce qu’il en était. Et pourquoi suis-je détenu ici ?
    En regardant la pipe entre les dents du major, je me suis souvenu que je n’avais pas fumé depuis plusieurs jours et je lui ai demandé une cigarette. Le major fouilla dans ses poches, puis regarda sa pipe, qui était vide et même sans cendres, et m’informa qu’il n’avait ni cigarettes ni tabac. Il a sucé la pipe vide. Juste pour le style.
    J’imite Sherlock Holmes, me suis-je dit.
    D’ailleurs, du point de vue de la psychanalyse freudienne, si populaire en Amérique, les hommes impuissants aiment sucer une pipe vide pour se donner l’air puissant. Et l’impuissance est souvent liée au sadisme. Et le sadisme, à son tour, est souvent associé à une soif pathologique de pouvoir sur les autres. Et ces types pullulent dans tous les lieux maléfiques - Tchéka, Gestapo ou camp de concentration américain - où un homme peut abuser d’un autre en toute impunité.
    Suçant sa pipe vide, le major a dit entre ses dents que j’étais envoyé demain et m’a recommandé d’arrêter ma grève de la faim afin de prendre des forces pour le voyage.
    – Où vais-je être envoyé ? - demandai-je.
    – Je ne le sais pas, répondit le major.
    – Et est-ce que c’est certain que c’est demain ?
    – Je vous donne ma parole d’honneur en tant qu’officier américain", a dit le major, apparemment un peu vexé que je ne l’aie pas cru dès le premier mot.
    Eh bien, pensai-je, si demain on m’envoie dans un endroit inconnu, il vaut mieux, en effet, économiser des forces pour la route - vendre ma vie plus cher.
    Sans retirer sa pipe vide de la bouche, le major m’a souhaité un bon appétit et est parti. Mais comme la grève s’était terminée dans des termes assez vagues, malgré douze jours de grève de la faim, je n’avais pas d’appétit. Sur la couchette du haut, il y avait un plateau de repas froid. Mais j’ai attendu le dîner, quand on m’a apporté un service chaud, et c’est seulement à ce moment-là que j’ai mangé. Je n’avais pas d’appétit non plus.
    Le jour suivant s’est écoulé sans changement. Puis le deuxième. Et le troisième. La parole d’honneur de l’officier américain s’est donc révélée aussi fausse que sa pipe vide !
    Auparavant, en tant que criminel particulièrement dangereux, on m’avait emmené me promener seul. Maintenant, je me promenais en compagnie d’un général SS et d’un colonel de la Gestapo. Au début, j’ai eu honte de leur dire qui j’étais. Je n’avais pas honte de moi, mais des Américains. Lorsque j’ai finalement révélé mon secret, mes collègues de prison ont presque éclaté de rire. Ils s’attendaient à tout sauf à une telle absurdité.
    Mais je ne riais pas. Que faire ? Attendre qu’ils vous attachent comme un mouton la nuit et qu’ils vous rendent ? Et selon la loi soviétique, fuir à l’étranger est officiellement considéré comme de la haute trahison et est passible du peloton d’exécution. J’ai lu de telles phrases plus d’une fois dans les ordres du quartier général de la SVA.
    En proie à un sentiment de protestation impuissante, j’ai décidé d’essayer de me suicider. Bien sûr, je n’avais pas l’intention de me tuer sérieusement. Mais quand on est sur le point d’être tué par d’autres, pourquoi ne pas essayer d’abord soi-même ? Au moins, il y a l’avantage de pouvoir changer d’avis à la dernière minute. C’est pour l’instant ma seule liberté.
    Après le dîner, je me suis mis au travail. J’ai déchiré ma chemise en lanières, je les ai torsadées en harnais et je les ai enduites de savon. Je les ai ensuite attachées en une corde et j’ai fait une boucle à l’extrémité. Le seul endroit où la corde pouvait être accrochée était une grille au plafond, derrière laquelle était cachée une ampoule électrique.
    La cellule était déjà plongée dans la pénombre. Je me suis assis sur la couchette supérieure, j’ai attaché la corde à la grille et j’ai regardé le plafond. Puis j’ai appuyé sur le plafond avec ma main. Pour un ingénieur ayant étudié la résistance des matériaux, il était clair que le jeu n’en valait pas la chandelle : mon cou était bien plus résistant que le mince plafond en contreplaqué.
    Pour ne pas me tromper, j’ai décidé de tester d’abord le plafond. Et pour ne pas gaspiller mon cou, j’ai saisi la boucle à deux mains et j’ai sauté.
    Mes calculs sur la résistance des matériaux se sont avérés exacts. J’ai atterri en douceur, comme dans un gymnase, sur le sol. Toutes sortes de matériaux de construction et de fragments d’ampoules me sont tombés sur la tête.
    Comme je ne voulais pas encore dormir, j’ai décidé d’essayer une autre méthode pour me tuer. Dans l’obscurité, j’ai cherché à tâtons sur le sol une douille d’ampoule dont les bords étaient recouverts de fragments de verre aiguisés comme des scies. Je me suis assis sur la couchette inférieure et j’ai commencé à scier les veines de mon bras gauche avec cet instrument. Là où bat le pouls.
    Je ne me sentais pas mal à l’aise de scier les veines d’où venait le sang. J’ai beaucoup de sang. Pendant la guerre, j’ai souvent donné mon sang pour des transfusions - juste pour le plaisir, parce que j’en ai beaucoup. Mais, bizarrement, pour une raison quelconque, je me suis senti désolé de voir dans l’obscurité les tendons, qui sont quelque part tout près de moi. Après tout, me suis-je dit, en cas de problème, tu ne pourras pas serrer le poing.
    Quelque chose de chaud et de collant a coulé le long de mon bras, comme disent les écrivains. La scie avec les éclats de verre était plutôt inconfortable et déchirait la viande. Cette procédure ennuyeuse a fini par me lasser et j’ai eu envie de dormir. Je me suis allongé sur la couchette, j’ai posé ma main (je l’ai sentie - elle fuyait) et je me suis endormi.
    Dans mon sommeil, j’ai entendu la porte s’ouvrir, les débris de verre et de matériaux de construction crisser sur le sol. Le faisceau d’une lampe de poche a traversé la cellule et a touché une flaque de sang sur le sol. Puis l’alarme a retenti dans le couloir. On a appelé un médecin, on m’a bandé le bras, on m’a enlevé mes lunettes et on m’a transféré dans une autre cellule. Seul, bien sûr. Comme il est d’usage pour les criminels dangereux.
    Le lendemain soir, un visiteur est venu dans ma cellule. Il portait un uniforme militaire, avec le ventre volumineux d’un rentier prospère, un énorme pistolet sur son cul tout aussi volumineux, et un brassard noir avec une croix blanche sur sa manche. J’ai regardé et je me suis demandé si c’était un pirate ou un médecin. Mais il s’agissait en fait d’un prêtre protestant.
    La seule chose dont je me suis rendu compte, c’est qu’une fois et pour une raison quelconque, il s’était également suicidé. Je pense que lorsqu’il était missionnaire en Afrique, ses disciples ont décidé qu’il valait mieux le faire bouillir et le manger.
    Que les cannibales allaient manger le pasteur, il y avait une certaine logique à cela. Une logique cannibale, mais une logique tout de même. Le pasteur était gros et il serait utile aux cannibales affamés. Mais à quoi cela servait-il aux Américains de faire ce qu’ils étaient en train de me faire ? - Je ne pouvais pas comprendre cela.
    Car à l’époque, je me considérais comme un partisan aussi sincère de l’Occident que, par exemple, à l’inverse, ces communistes américains qui passent du côté soviétique. Mais si les services secrets soviétiques rencontraient ces communistes comme les Américains m’ont rencontré, tous ces escrocs et ces voleurs seraient abattus comme des chiens. Non pas pour avoir volé, mais pour avoir porté atteinte aux intérêts de l’État. Et ici ? Quelle sorte de démocratie est-ce là ?
    De temps en temps, des livres anglais en lambeaux étaient apportés dans la cellule. Il s’agissait de romans policiers ou d’espionnage. En les lisant, je me suis dit : « C’est dans ces livres que les espions américains apprennent à travailler ».
    Mais parfois, ils apportaient des journaux allemands. Dans l’un d’eux, j’ai lu un petit article sur un soldat soviétique qui s’était échappé à l’Ouest et qui était resté dans un hôpital américain en attendant d’être extradé vers les autorités soviétiques.
    Je me suis dit qu’il était peu probable que ce soldat se soit rendu à l’hôpital pour des maux d’estomac. Il a probablement aussi tenté de se suicider lorsqu’il a appris qu’il allait être extradé.
    La note poursuit en disant que lorsqu’un groupe d’Américains accompagnés d’officiers soviétiques s’est présenté à l’hôpital, le soldat condamné a arraché une mitrailleuse à quelqu’un, a tiré sur huit ou neuf personnes autour de lui, puis s’est suicidé.
    J’ai soigneusement déchiré cette note et l’ai glissée dans ma poche.
    Quelques jours plus tard, on m’a réveillé au milieu de la nuit, on m’a emmené à la douche et on m’a dit de me raser. Ensuite, on m’a fait monter dans une jeep accompagnée de deux policiers militaires. L’un d’eux avait un sac avec mes papiers.
    À l’aube, nous sommes entrés sur l’autoroute et j’ai lu le panneau : « Tant de kilomètres jusqu’à Leipzig ». Nous sommes donc en route vers la frontière soviétique. Il reste quatre heures.
    Un soldat s’est assis au volant, l’autre à côté de lui, et on m’a mis à l’arrière. C’étaient de simples Américains à l’arrière du crâne rasé et rose. Pour montrer leur démocratie, ils m’ont même offert du chewing-gum. Puis le second s’est endormi, et son colt de gros calibre s’est balancé par derrière et m’a tapé séduisamment sur le genou.
    Prends ce colt, me suis-je dit, tire sur ces têtes roses vides et cours. Il y a des bois et des buissons tout autour. Mais courir où ? Je ne peux pas aller à l’est. Et si je tue ces soldats, je ne pourrai pas aller à l’ouest.
    La jeep roulait à vive allure vers la frontière soviétique, et j’essayais dans mon esprit de prévoir toutes les possibilités de transfert et de mettre la main sur une arme. Je me suis souvenu d’une note dans ma poche. Ce soldat a eu de la chance de mettre la main sur un fusil automatique. La mitrailleuse a 72 cartouches, mais ce colt minable n’en a que 8, et on ne peut pas faire de feu d’artifice avec un colt.
    Le plus important, c’est d’arracher l’arme. Au moins, je n’étais pas ligoté comme ce chercheur de liberté qui jurait alors qu’on le traînait dans les couloirs du Camp King la nuit.
    Je n’avais même pas particulièrement envie de tirer sur les conseillers. Pourquoi ? Parce qu’ils pouvaient être des gens comme moi, des esclaves du système. Mais abattre plus d’Américains, c’est un oui... Suis-je une nuisance pour vous ? Pourquoi me livrez-vous à l’abattoir ?
    Bien sûr, ce n’est pas la faute des soldats américains qui m’emmènent. Quelle est ma faute ? Je ne suis qu’un animal chassé. J’aimerais pouvoir abattre les lieutenants, les majors et les colonels qui sont restés au Camp King...
    Et puis lâchez la mitrailleuse, levez les mains et allez vers vos hommes pour qu’ils soient fusillés. Mais avant le peloton d’exécution, je ne vous demanderai qu’une seule faveur : faire un discours devant les soldats et les officiers soviétiques. Pour une fois, quand j’étais écolier, j’ai été le premier orateur. Puis, devenu adulte, je me suis tu. La conscience m’en a empêché. Mais maintenant, je vais faire un tel discours, un tel discours, du fond du cœur, du fond de mon cœur :
    – Camarades, frères, battez ces salauds d’Américains jusqu’à la dernière balle ! Je serais bien le premier, mais vous voyez, je ne peux pas... Ne croyez pas un seul mot des Américains. Ce sont tous des voleurs et des menteurs. J’en ai fait l’expérience moi-même. Et leur glorieuse liberté - la voilà, regardez-moi ! Vous voyez ?
    J’étais tellement en colère que j’étais même prêt à rejoindre le parti communiste avant d’être fusillé. Je vais le dire :
    – "Camarades, frères, je n’ai plus rien à perdre. Je vais donc vous dire toute la vérité. Oui, j’ai évité de rejoindre le parti communiste parce que je pensais que tous les communistes étaient des idiots ou des salauds. Mais maintenant, je suis convaincu que les Américains sont encore plus idiots et plus salauds. Et comme il n’y a pas de vérité dans le monde, inscrivez-moi au parti communiste. Je veux mourir en communiste !
    Oui, je leur ferai la propagande qu’aucun responsable politique n’a pu inventer. Et tout cela du fond du cœur. Et comment vont-ils abattre l’homme dont les Américains ont fait un ardent communiste ?
    Et je me suis dit : il y aura un idiot de moins qui aura cru à la liberté.... Ah, les ailes d’un paysan.
    Il est arrivé quelque chose de similaire aux soldats soviétiques qui se sont rendus aux Allemands au début de la guerre. Après avoir traversé les camps de la mort allemands, si ces soldats se sont à nouveau engagés dans l’Armée rouge, ils se sont vraiment battus jusqu’à la dernière balle.
    Entre-temps, la jeep a roulé jusqu’à la gare frontière du chemin de fer Bebra West. La même gare où, six mois plus tôt, j’avais choisi la « liberté » pour passer ces six mois dans une prison américaine.
    L’un des accompagnateurs a pris le sac contenant mes papiers et s’est rendu chez le commandant militaire américain. Je me suis assis là, m’attendant à ce que cela commence maintenant.... En même temps que le commandant américain, les gardes soviétiques armés de fusils automatiques sortaient et.... Je voulais juste arracher la mitrailleuse. J’ai retiré le support, libéré la sécurité et, le doigt sur la gâchette, j’ai tiré sur les Américains.....
    Au bout d’un moment, l’escorte est sortie seule et m’a fait signe de la main de sortir. Ils ont donc décidé de m’emmener là-bas. Je suis sorti de la voiture pour me rendre au bureau du commandant.
    Mais l’escorte s’est mise au volant et a démarré le moteur, comme si elle allait partir. Je n’ai eu d’autre choix que de demander :
    – Où dois-je aller ?
    – Où vous voulez aller", répond le soldat en mâchant du chewing-gum. - Si vous voulez, allez par là", dit-il en faisant un signe de la main en direction du côté soviétique. - Et si vous ne voulez pas, allez où vous voulez...
    Le soldat a fait tourner la jeep et a donné un coup d’accélérateur, de sorte que les pierres sous les roues me sont tombées dessus, comme dans les films de gangsters. Et je me suis retrouvé seul.
    J’ai regardé autour de moi pour voir si j’étais suivi. Le soleil brillait, les Allemands se promenaient et personne ne faisait attention à moi. J’avais l’impression d’être à nouveau libre. Je me suis assis sur une pierre à l’entrée de la gare et j’ai essuyé la sueur de mon front. Intérieurement, je m’étais préparé à toutes les possibilités, sauf à celle-ci.
    J’avais déjà tellement dit adieu à la vie que le retour à la vie m’avait assommé. Au lieu de la joie ou du soulagement, je ne ressentais qu’une froide fureur. Encore une chose sournoise ! Quel est ce jeu du chat et de la souris ?
    Poste frontière. Des policiers allemands se promènent et vérifient les documents. Il y a aussi des députés américains. Il y a six mois, j’ai été arrêté ici alors que je vérifiais mes papiers. Pour m’apprendre la gratitude et les bonnes manières, ces messieurs du Camp King m’ont retiré la carte de séjour pour laquelle ils m’avaient pris 20 000 marks. Et maintenant, je n’avais plus de papiers du tout. Si un policier s’approchait de moi et me demandait mes papiers, il me renverrait à Kamp-King, d’où je venais, pour identification.
    Le prochain train pour Stuttgart ne part que le lendemain matin. Comme il était dangereux de passer la nuit à la gare, j’ai passé ma première nuit de liberté en première ligne : je suis simplement entré dans une maison bombardée loin de la gare, je me suis allongé sur une pile de briques, j’ai mis mon poing sous ma tête et je me suis endormi en regardant le ciel étoilé au-dessus de ma tête.
    À mon arrivée à Stuttgart, je me suis rendu au poste de police où j’avais obtenu ma carte d’identité et j’ai déclaré qu’on me l’avait volée. Bien entendu, ayant appris de ma triste expérience avec le consul américain, j’ai prudemment gardé le silence sur le fait que les voleurs qui avaient dérobé ma carte étaient le quartier général des services de renseignements américains en Europe. Herr Werner a donc reçu un duplicata de sa carte et a commencé une nouvelle vie.
    En 1947, l’Allemagne de l’Ouest à moitié détruite était envahie par des millions de personnes déplacées de tous les pays d’Europe de l’Est et par des millions de réfugiés allemands expulsés de ces mêmes pays d’Europe de l’Est. Il n’y avait aucune possibilité de travailler dans une spécialité. Un jour, j’ai lu dans le journal que les Américains recherchaient un électricien pour superviser les fours à maïs électriques du PX. J’ai posé ma candidature et j’ai dit honnêtement qu’avant cela, j’avais été ingénieur principal dans l’administration militaire soviétique et que j’avais dirigé des dizaines de grandes usines électriques travaillant sur les réparations, et que j’espérais donc pouvoir m’occuper de quelques fours électriques pour rôtir le maïs. Mais j’ai essuyé un refus. Et ils m’ont même dit honnêtement pourquoi : je n’étais pas politiquement fiable.
    Allez au diable, me suis-je dit. J’ai fui l’Union soviétique parce que j’y étais considéré comme politiquement peu fiable. Et ici, je suis aussi politiquement peu fiable !
    Pour tuer le temps, j’ai écrit quelques croquis de la vie au Kremlin à Berlin, c’est-à-dire dans le quartier principal de la SVA, et je les ai envoyés aux éditeurs de Posev. Après avoir lu mes croquis, ils ont décidé que j’étais un professionnel de la presse et m’ont longtemps persuadé d’avouer où j’avais écrit auparavant - dans la Pravda ou les Izvestia, et sous quel nom.
    Je vivais alors dans une mansarde d’un hôtel bon marché, le « White Deer », dans la banlieue de Stuttgart. Je dormais sur un lit, et sur l’autre - un korobeynik allemand borgne, qui gagnait sa vie en se promenant avec une boîte autour du cou dans les villages voisins et en vendant des lacets, de la cire, du fil et des épingles. Pendant qu’il marchait, je m’asseyais à la fenêtre du grenier et j’écrivais sur le Kremlin de Berlin.
    À l’automne, j’ai emménagé dans une petite maison avec une veuve russe. Lorsque la veuve fut convaincue que je ne préférais pas une vieille femme russe mais de jeunes Allemands, les complications patriotiques commencèrent. Je m’asseyais et écrivais mes essais, tandis que la vieille femme offensée s’asseyait et écrivait partout des dénonciations selon lesquelles j’étais un espion soviétique. Puis le gendre de cette vieille femme a sauté par la fenêtre du cinquième étage et s’est tué. Pouvez-vous imaginer quel genre de vieille femme elle était ?
    En hiver, ma cellule n’était pas chauffée et il faisait aussi froid à l’intérieur qu’à l’extérieur. Le seul moyen de chauffage était les cigarettes faites avec du tabac noir de paysan - sucre, plus fort et plus puant que la mahorka. Le papier papyrus était un luxe trop grand pour mon budget, et j’ai filé des cigarettes à partir de « Posev », dans lequel j’étais imprimé, et que l’on m’envoyait en tant qu’exemplaires d’auteur. De cette façon, en une semaine, j’ai fumé tout The Seed.
    Toute la journée, je m’asseyais et j’écrivais - dans mon manteau, avec des gants et un chapeau sur la tête. Parfois, je devais faire des pauses lorsque l’encre de l’encrier gelait. La seule source de revenus était les droits d’auteur du Posev. À cette époque, la nourriture était très rare en Allemagne, et je devais parfois manger du hareng avec de l’eau et du pain pendant une semaine. Une autre semaine, je mangeais du miel artificiel, également avec de l’eau et du pain.
    J’ai essayé d’émigrer en France - on me l’a refusé. J’ai essayé d’émigrer en Australie - on me l’a refusé. Comme politiquement peu fiable. Au même moment, pour la troisième fois, tous mes documents ont mystérieusement disparu, y compris le duplicata de la malheureuse carte Kenn. Des DP expérimentés m’ont assuré que tous les fonctionnaires américains de l’UNRRA et de l’IRO chargés de l’émigration étaient des shantrapa internationaux, des compagnons de route communistes, des agents soviétiques ou simplement des voleurs qui vendaient même leur propre mère au marché noir, et qui avaient sans aucun doute vendu tous mes documents et questionnaires, dans lesquels je devais dire toute la vérité, aux services de renseignements soviétiques.
    Le deuxième hiver arriva, et je restai assis dans ma cellule à écrire. Mais à Noël, j’ai reçu un cadeau émouvant. L’un des lecteurs de Posev, qui gagnait sa vie en volant (un vol honnête), a volé une machine à écrire quelque part et me l’a apportée en cadeau :
    – Vous écrivez si bien, m’a-t-il expliqué, que j’en ai les larmes aux yeux. Et c’est le plus important, quand cela touche le cœur. Après tout, nous avons tous parcouru ce chemin. J’ai donc décidé d’aider la cause commune...
    En partant, il fait claquer ses talons comme un soldat et donne la visière de son chapeau de feutre :
    – Camarade ex-commandant, je vois que vous avez faim et froid ici. Même nous, les voleurs, nous ne vivons pas comme ça. Alors ne soyez pas timide... Si tu as besoin de quelque chose, tu n’as qu’à le dire... Nous t’aiderons.
    Oui, en parlant de voleurs. J’ai des photos de Kitty, une de mes amies berlinoises, qui manquent dans ma valise. J’ai récemment reçu ces photos par la poste. Elles n’ont pas pu se perdre. Mais qui les voudrait ? Seulement une agence de renseignements. Mais les services secrets soviétiques, en cas de besoin, ne prendront pas une photo, mais une Kitty en direct. Donc, selon la théorie des probabilités, il ne reste qu’une chose : les services secrets américains, les mêmes messieurs de Camp King.
    C’est amusant. Pendant que les voleurs russes me proposent leur aide, les services secrets américains fouillent mes valises. Et en même temps, pour la deuxième année consécutive, je publie chaque semaine dans Posev, qui est l’une des principales sources d’information pour les experts américains des affaires soviétiques. Cet épisode m’est revenu à l’esprit plus tard, après un nouvel échec et une flagellation publique de l’agence de renseignement américaine CIA, lorsque des badges ont été vendus dans tout Washington avec l’inscription suivante : "Notre travail est si secret qu’il n’y a pas d’autre moyen d’y parvenir : « Notre travail est si secret que nous-mêmes ne savons pas ce que nous faisons ».
    On dit que l’Amérique est un pays de merveilles. C’est pourquoi les vrais best-sellers russes sont écrits en Amérique par des écrivains fantômes. Et si quelqu’un a écrit son propre livre, ce n’est pas un phénomène normal.
    Les livres russes normaux sont écrits en Amérique de cette manière. C’est ainsi qu’est paru le livre « The Secret World » de Peter Deryabin, ancien lieutenant-colonel des services secrets soviétiques. La couverture indique honnêtement qu’il a été écrit par quelqu’un d’autre à partir des mots de Deryabin. Vient ensuite le film d’action suivant, Notes of Penkovsky, qui a été fusillé en URSS pour espionnage. Sur la couverture, on peut lire qu’au lieu de Penkovsky, ce livre a été écrit par Deryabin. Ce même Deryabin, qui ne pouvait même pas écrire son propre livre, écrit maintenant allègrement à la place du cadavre de Penkovsky. Miracles !
    Et moi, comme un idiot, je me suis assis pendant deux ans et j’ai écrit mon livre moi-même. Et dans des conditions telles que lorsque j’ai terminé mon travail, j’étais fermement convaincu que j’avais gagné la tuberculose.
    Fils d’un médecin gynécologue, j’ai toujours aimé feuilleter les livres de médecine de mon père. Peut-être parce qu’il s’agissait de livres sur les maladies féminines avec toutes sortes d’images intéressantes, si explicites qu’aujourd’hui en Amérique, même dans les magazines pornographiques, on ne les trouve pas. Après avoir regardé ces images, je me suis considérée comme une experte et, lorsque j’avais des douleurs, j’aimais me diagnostiquer moi-même.
    Ainsi, lorsque j’ai passé un examen médical, j’ai déclaré avec autorité que je devais avoir la tuberculose. Mais le médecin a secoué la tête et m’a dit que j’étais en pleine forme. J’ai d’abord été très surpris. Puis je me suis souvenue de mon père avec gratitude - il semble qu’il ait été médecin-gynécologue pour une bonne raison, il m’a formée selon toutes les règles de la science et de la technologie.
    En 1950, le pendule de la politique américaine est passé d’un extrême à l’autre. D’un extrême à l’autre. L’ère Roosevelt a été remplacée par l’ère McCarthy. L’un après l’autre, les procès d’espionnage atomique se déroulent en Amérique. Des centaines de pédés sont chassés du département d’État. Les compagnons de route communistes sont renvoyés des bureaux du gouvernement. La presse américaine crie à la chasse aux sorcières. Et les journaux allemands écrivaient que le consul américain à Stuttgart, un de mes amis, était tellement perturbé par tout cela qu’il en est mort le cœur brisé.
    En même temps, sur le front soviétique, les Américains ont commencé ce qu’on appelle la guerre psychologique. À Munich est apparu le Projet Harvard, qui se livrait à toutes sortes de recherches psychologiques, puis la radio Voice of America, Radio Liberty, et un certain Comité américain, qui a changé de nom si souvent que je ne sais même plus comment il s’appelle aujourd’hui.
    Tous les moineaux sur les toits de Munich ont gazouillé que l’agence de renseignement américaine CIA était derrière tout cela. La presse américaine elle-même l’a ensuite clairement confirmé. Le personnel américain de ce complexe de guerre psychologique, aussi étrange que cela puisse paraître, se composait principalement de fonctionnaires qui, pour une raison ou une autre, avaient été renvoyés du département d’État et qui, pour une raison ou une autre, avaient été pris sous leur aile par la CIA.
    À la même époque, l’Association centrale des émigrés d’URSS d’après-guerre (COPE) a été créée à Munich, réunissant tous les « nouveaux », et j’en suis devenu le président. Les « nouveaux » étaient nécessaires à la guerre psychologique. Mais grâce aux activités de Kamp-King, le flux des « nouveaux » s’est presque complètement arrêté. Pour comprendre pourquoi cela s’est produit, j’ai décrit en détail mes propres aventures dans ce Kamp-King.
    Un jour, un homme élégant, vêtu d’un costume tropical clair et de chaussures colorées, tel un gigolo italien, s’est présenté à mon appartement. Il se présenta comme le pasteur protestant qui avait failli être dévoré par des cannibales et qui avait eu le plaisir de me rencontrer au Camp King.
    En regardant le pasteur déguisé, je me suis dit : "Quel genre d’intelligence as-tu, mon oncle, de nos jours ?
    Remarquant ma mine déconfite, le pasteur s’est empressé de m’informer qu’une enquête gouvernementale spéciale avait été diligentée au sujet de Kamp-King, mais qu’à l’arrivée de la commission d’enquête, tous les documents relatifs aux activités de ce camp avaient été providentiellement brûlés. Aujourd’hui, cette commission tente de reconstituer indirectement ce qui s’est passé à Kamp-King. Et comme je suis le président de l’organisation représentant tous les citoyens soviétiques qui ont fui à l’Ouest après la guerre et qui ont donc subi une rééducation démocratique au camp King, c’est à ce moment-là que le pasteur s’est adressé à moi.
    Voici une petite illustration, par exemple. Un pédéraste soviétique s’est plaint bruyamment d’avoir caché des diamants dans son cul lorsqu’il s’est enfui, mais les messieurs du Camp King les ont trouvés même là et les ont volés. Ensuite, cet Ostap Bender n°2 a travaillé comme colonel de radio à Radio Liberty. Il y travaille encore aujourd’hui, depuis 20 ans.
    J’ajouterai quelques détails supplémentaires tirés de ma propre expérience. En plus des documents soviétiques et des timbres allemands que j’ai déjà mentionnés, les messieurs du camp King m’ont volé les babioles suivantes :
    1. Lorsque j’ai été démobilisé de l’armée, j’ai reçu 5 000 roubles pour ancienneté de service. Je n’ai pas eu le temps de les échanger contre des timbres. Les Américains ont empoché ces 5 000 roubles. Tout neufs, impeccables, tout droit sortis de la banque d’État. Pourquoi les espions américains en avaient-ils besoin ? Comme souvenirs ? Ou pour l’espionnage ?
    2) En tant qu’ingénieur de haut niveau, j’avais le droit de porter à la fois un uniforme militaire et un costume civil. Je me suis donc acheté une épingle à cravate en or avec une perle. Les Américains ont également volé cette épingle. Apparemment pour me débarrasser de mes habitudes bourgeoises.
    3. J’ai acheté aux Allemands, au marché noir, un stylo auto-écrivant américain Parker. Les Américains me l’ont volé au camp King.
    4. J’avais aussi un étui à cigarettes bon marché en métal jaune et émail noir. Les Américains l’ont apparemment pris pour de l’or et l’ont également empoché.
    Je ne me soucie pas de toutes ces petites choses. Mais si l’on raconte des anecdotes sur la façon dont les Russes ont volé des montres aux Allemands, pourquoi ne pas raconter comment les Américains ont volé des montres aux Russes ? Et certains, comme Ostap Bender #2, ont même regardé le cul.
    Tout cela s’est déroulé sous le drapeau des États-Unis flottant au vent. Et pour que les gens ne se trompent pas d’endroit, l’hymne national américain était diffusé par les haut-parleurs.
    Voice of America et Radio Liberty dépensaient des millions de dollars pour encourager les soldats et les officiers soviétiques stationnés en Allemagne de l’Est à choisir la liberté américaine. Les services de renseignement avaient besoin de langues, mais il n’y avait pas de transfuges.
    La propagande soviétique exploite pleinement les activités de Kamp King. Les troupes soviétiques recevaient constamment l’ordre de tirer sur les soldats et les officiers soviétiques qui avaient fui vers les Américains - et qui avaient été extradés. Bien sûr, cela décourageait l’élection de la liberté dans de telles conditions.
    Mais les Américains sont des gens pragmatiques. Afin d’augmenter le nombre de transfuges, les services de renseignements américains ont créé un bataillon spécial de prostituées à Berlin pour attirer les officiers soviétiques à l’Ouest, dans le cadre d’une forme de guerre psychologique. Les prostituées étaient payées sur la base d’une liste de prix fermes : 20 000 marks pour un lieutenant, 25 000 marks pour un capitaine et 30 000 marks pour un major. Et pas des marks d’occupation et d’inflation, mais des marks nouveaux et solides.
    Je me suis assis et j’ai fait un rapide bilan. Les braves scouts américains m’avaient déjà volé quelque chose comme 100 dollars. Et à cause de cela, ils paient maintenant des prostituées 7 500 dollars pour un tel homme ?! C’est ainsi que les contribuables américains paient les petits voleurs du camp King.
    Ensuite, dans le cadre de la guerre psychologique, un bataillon de prostitués masculins a été ajouté pour aider les prostituées féminines, c’est-à-dire les pédérastes allemands, qui ont repéré leurs semblables parmi les soldats et les officiers soviétiques - et les ont attirés à l’Ouest.
    Bien entendu, tous ces projets spéciaux de guerre psychologique étaient tellement confidentiels que même moi, le président de la CSPE, n’en avais pas connaissance. Mais comme ces personnes venaient ensuite me voir, j’en voyais les résultats. Tout cela ne peut être compris que rétrospectivement.
    Et les résultats sont les suivants. Plaisanter avec l’amour a mal fini. Les personnes qui ont été attirées à l’Ouest par des prostituées, femmes ou hommes, ont rapidement réalisé qu’elles avaient été trompées, se sont senties comme des poissons jetés dans le sable, se sont enivrées, ont sombré dans la misère sociale et, finalement, comme dernière forme de protestation impuissante, sont retournées en URSS - pour y être fusillées.
    À leur arrivée, Voice of America et Radio Liberty leur ont crié au ciel qu’ils avaient « choisi la liberté ». Lorsqu’ils sont repartis, il y a eu un silence sépulcral. Comme dans un bon salon funéraire. Ou bien, pour brouiller les pistes, ils faisaient courir une sale rumeur. La liberté était comme les ailes d’un citadin qui s’envole sur des ailes artificielles et qui tombe.
    Ainsi, si auparavant les services secrets américains volaient les transfuges soviétiques et les renvoyaient au peloton d’exécution, ils allaient maintenant eux-mêmes au peloton d’exécution. En partant, ils ont dit ouvertement :
    – "Les Américains ? Ce sont tous des prostitués. Nous préférons être fusillés par les nôtres !
    Entre-temps, mon « Kremlin de Berlin » a été traduit en allemand. Un jour, j’ai reçu une lettre de 12 pages d’un de mes lecteurs. Il s’agissait d’un colonel allemand, chevalier de la Croix de fer, la plus haute distinction de l’armée allemande. Le colonel avait perdu une jambe sur le front russe et avait passé sept ans en captivité en Union soviétique. De retour en Allemagne et après avoir lu mon « Kremlin », il a voulu me serrer la main pour ce livre - d’officier à officier.
    Le colonel allemand avait ramené de sa captivité russe une cuillère en bois faite maison, offerte par ses amis russes du camp de concentration, ainsi qu’une simple icône russe, offerte par un agriculteur collectif soviétique. Cet homme comprenait les problèmes du communisme et du peuple russe bien mieux que la plupart des experts occidentaux des affaires soviétiques.
    Un jour, j’ai reçu une lettre de ce type :
    "Cher Herr Klimov ! Aux jours de la victoire et de la défaite, vous, le vainqueur, avez trouvé dans votre « Kremlin de Berlin » des mots de sympathie et de gentillesse pour nous, les femmes et les enfants de l’Allemagne vaincue. En remerciement, je vous envoie ce médaillon, qui est consacré, et qu’il vous garde en sécurité."
    Edith Neugebauer.
    La lettre était accompagnée d’un médaillon catholique à l’effigie de la Madone et d’une chaîne à porter autour du cou.
    Quelques mois plus tard, j’ai effectué un long voyage d’affaires en voiture. En chemin, il y a eu un accident. Le chauffeur a été tué sur le coup. J’étais assis à côté du chauffeur, dans le couloir de la mort, mais je suis resté en vie.
    Lorsque je me suis réveillé à l’hôpital, j’ai vu que j’avais ce médaillon accroché à ma poitrine. Je n’avais jamais porté ce médaillon avant ou depuis. Mais lors de ce voyage, pour une raison que j’ignore, je l’ai porté. Je ne suis pas superstitieuse, mais...
    En général, tout s’est très bien passé avec les Allemands. J’ai même passé sans grande difficulté la procédure de dénazification, qui a été passée par tous les habitants de l’Allemagne, pour attraper tous les anciens nazis, la Gestapo, les SS et ainsi de suite. J’ai simplement écrit sur le formulaire que j’avais servi dans l’Armée rouge à l’époque et j’ai reçu un certificat officiel de dénazification. Avec tous les tampons, signatures et sceaux.
    Cependant, malgré le certificat de dénazification, on m’a à nouveau refusé l’émigration vers l’Amérique. Et ce, bien que j’aie été le chef du CITE, au sujet duquel tous les moineaux sur les toits de Munich gazouillaient qu’il s’agissait d’un projet spécial de la CIA, l’agence de renseignement américaine.
    Apparemment, les voleurs du Camp King m’avaient donné une mauvaise référence, pensai-je. Et le travail de la C.I.A. est tellement secret qu’ils ne savent pas ce qu’ils font.
    Peu à peu, la guerre psychologique est entrée dans une troisième phase. Cette troisième phase était principalement basée sur ce que l’on appelle le projet Harvard, qui a été réalisé à Munich en 1949-50, et où j’ai également travaillé un peu. Ce projet Harvard était principalement basé sur le mystérieux « complexe de Lénine », c’est-à-dire, comme les experts l’ont expliqué plus tard, sur le complexe d’homosexualité latente de Lénine.
    De quoi s’agit-il ? Il est assez difficile de l’expliquer. Mais en principe, d’un point de vue clinique, il s’agit d’une dégénérescence ou d’une dégénérescence composée de maladie mentale et de perversion sexuelle. C’est le poison corpulent de la race humaine, qui a ruiné la Grèce antique, la Rome antique, et qui a beaucoup contribué à la révolution en Russie. C’est donc un remède assez puissant. Et du point de vue de la religion, c’est ce que la Bible appelle le diable et le prince de ce monde.
    Après tout, les émigrés russes ont longtemps dit : "Contre les bolcheviks, même avec le diable ! Eh bien, les Américains pragmatiques ont pris ce même diable comme allié.
    Bien entendu, cette alliance inhabituelle a été si soigneusement classée que même le président du Comité central de l’Union soviétique n’en a pas eu connaissance. Tout cela ne peut être compris que rétrospectivement.
    Même si, à l’époque, je ne connaissais pas tous les secrets du projet Harvard, les services secrets soviétiques étaient au courant dès le début. Et ils ont pris leurs propres mesures. Il n’y a donc aucune raison de garder le silence à ce sujet. Pourquoi cette fausse honte ?
    Il est tout à fait naturel que pour une tâche aussi spécifique qu’une alliance avec le diable, vous ayez besoin du personnel approprié. Par exemple, j’avais un commissaire très sympathique de la C.I.A., un vrai charmeur. Mais il s’est avéré qu’au lieu de sa femme, ce commissaire préférait sa secrétaire.
    Vous savez, certaines personnes utilisent leur secrétaire et d’autres préfèrent leur secrétaire. On dit que c’est de là que vient le mot « secrétaire ». Du point de vue du projet Harvard, il s’agit là d’une des variantes du « complexe de Lénine ».
    Voici un autre exemple. Je faisais la cour à une charmante jeune femme de la Voix de l’Amérique. Mais il s’est avéré que cette charmante jeune femme courtisait ses amis, qu’elle était, pardonnez-moi l’expression, lesbienne. Oui, et aussi une sadique, comme celles qui travaillaient autrefois pour la Tchéka et qui, au bon vieux temps, étaient tout simplement brûlées sur le bûcher sous prétexte qu’elles étaient des sorcières. Et du point de vue des professeurs de Harvard, c’est le complexe de l’épouse de Lénine.
    Bien sûr, je ne peux pas dire que tous les employés de l’American Committee, de Radio Liberty, de Voice of America et d’autres organes de psycho-guerre étaient armés de ce complexe de Lénine. Mais je peux garantir que presque toutes les personnes que j’ai connues là-bas avaient cet ordre de Lénine. Et j’ai connu beaucoup de gens là-bas.
    Le projet de Harvard était une sorte de dramatisation du Besov de Dostoïevski, mise en scène par les services secrets américains. J’ai donc travaillé dans un environnement de dégénérés et de monstres, dont la moitié, selon les statistiques, sont des malades mentaux. C’est pourquoi, lors de la grande purge des années 30, Staline a détruit ces léninistes en les traitant de chiens enragés, Hitler les a conduits dans des chambres à gaz et des camps de concentration et, dans le bon vieux temps, on les a brûlés sur le bûcher en les traitant de sorciers et de sorcières. Pour ne froisser personne, nous pouvons ajouter que Staline et Hitler étaient eux-mêmes exactement les mêmes dégénérés.
    En général, dans un tel environnement, mon travail était agréable et je ne m’ennuyais pas.
    Certains appelaient le Comité américain « le Comité pour sauver la Russie des bolcheviks - avec l’aide des trotskistes et des mencheviks » ! Pourquoi ? C’est très simple. Après tout, le premier postulat du marxisme est l’unité et la lutte des contraires. Les Américains, rusés, ont donc décidé de vacciner les bolcheviks contre la rage, composée de la salive empoisonnée des trotskistes, des mencheviks et des SR.
    Mais cette chose est extrêmement confuse. Par exemple, il faut connaître la philosophie du chercheur de diable Berdyaev, qui prêchait l’union de Satan et de l’Antéchrist et le royaume du prince de ce monde qui en résulterait. Et si je l’explique, il y aura un tel hurlement, comme si nous avions marché sur la queue de Satan et de l’Antéchrist.
    Quels sont les « démons » du projet Harvard dans la pratique ? Du point de vue sociologique, il s’agit de « l’ordre de Lénine ». Du point de vue de la psychologie, il s’agit de l’"érotisme buccal" freudien. Et du point de vue de la langue russe, il ne s’agit pas de personnes, mais de jurons ineffaçables.
    Ces « porteurs d’ordre » font littéralement ce que disent ces jurons apparemment dépourvus de sens. Ce mystère fait d’eux une sorte de parti secret dont le nom est Légion, ce que la Bible appelle le prince de ce monde. Et derrière tout cela se cachaient des « démons », c’est-à-dire des maladies mentales.
    La tâche de ces démons était de mutiler à la radio ou dans la presse les mêmes démons en Union soviétique ou de les attirer à l’Ouest. Au début, cela se faisait avec l’aide de prostituées allemandes des deux sexes. Ensuite, ils ont eu recours à des prostituées de la radio.
    Comme ces « chercheurs de liberté » sont venus me voir à la CACE, j’ai vu les résultats de tout cela. Alors qu’auparavant les services de renseignement américains avaient volé les transfuges soviétiques et les avaient renvoyés pour qu’ils soient fusillés, ils allaient maintenant être fusillés eux-mêmes. D’autres se suicidaient. D’autres encore se retrouvaient dans des cliniques psychiatriques ou des centres d’isolement pour alcooliques. D’autres encore, de jeunes soldats soviétiques, choqués par tout cela, sont entrés dans un monastère.
    Pour ces personnes, la liberté s’est transformée en ailes de citadin, qui tente de voler avec des ailes artificielles - et tombe.
    Peu à peu, la guerre psychologique s’est transformée en une guerre de fous. Un psychiatre aurait dû siéger à la place du président de la CEPE. Mais comme je n’étais ni psychotique ni psychiatre, et que je n’avais pas le complexe de Lénine, je m’en suis simplement lavé les mains en 1955 et je suis parti en Amérique.
    Comme j’étais président de la CSPE, élu pour ainsi dire, j’étais censé rendre compte à mes électeurs, selon les règles démocratiques. Eh bien, me voici.
    Rétrospectivement, les discours de victoire de Voice of America et de Freedom Radio, qui parlaient de ceux qui avaient « élu la liberté », ressemblent aujourd’hui à des publicités de pompes funèbres. Franchement, si le Comité soviétique « Pour le retour à la mère patrie » était qualifié de comité-piège, le Comité américain avec sa Radio Liberty n’est pas moins un piège. Cette liberté n’est pas une simple liberté, mais une liberté spéciale, construite selon les recettes du chercheur de diables Berdyaev, où, comme en 69, le bien-mal et le mal-bien s’entremêlent, et où rien n’est rien. C’est pourquoi certains experts disent qu’il y a 69 façons d’être malheureux.
    Certains marchands d’âmes humaines n’apprécieront peut-être pas. Mais je dirai une chose : pour moi, une âme saine est plus proche qu’une âme malade. Et j’accorde plus de valeur à une âme vivante qu’à une âme morte. Et vous faites le commerce d’âmes malades ou mortes.
    Tels sont les résultats de la psycho-guerre américaine sur le front russe de 1945 à 1955. À cet égard, il convient de rappeler l’excellent livre d’Ariadna Delianich « Wolfsberg - 373 » (ce livre peut être obtenu auprès des rédactions des journaux « Russian Life » et « Russia » ou auprès des libraires), qui décrit comment, après la capitulation de l’Allemagne, les services secrets britanniques ont filtré les anticommunistes russes. De nombreux parallèles sont suggérés ici. Ici comme là, les résultats sont plutôt tristes.
    Par ailleurs, la troisième phase de la guerre psychologique, que j’ai décrite plus haut, se poursuit encore aujourd’hui. Les Américains utilisent toutes les méthodes de la guerre psychologique, par le biais de la radio et de la presse écrite, pour inciter les fous soviétiques de l’"Ordre de Lénine" à se révolter. Et le KGB soviétique, connaissant parfaitement tous les secrets et les mystères du projet Harvard, place discrètement ces « léninistes » dans des hôpitaux psychiatriques, que les fous eux-mêmes ont judicieusement baptisés « maisons de fous ».
    Dans le jargon professionnel du KGB, en pleine conformité avec le projet Harvard, ces fous sont classés selon Freud comme suit : type HS, type PL, type VRE, type GE, et ainsi de suite. Ces nouvelles abréviations soviétiques ne sont que des raccourcis de gros mots non imprimables. Ces victimes de la psycho-guerre américaine s’assoient dans des « maisons de fous » et chantent des chansons arméniennes :
    Eh, politika-malytica....
    Où es-tu, ma tête malade ?
    Et les dégénérés occidentaux, également comme HS, PL ou VRE, qui sont légion dans le nom, savent très bien que leurs frères sont mis dans des « maisons de fous » - et le crient au ciel. Voilà pour la quintessence de la psycho-guerre des 20 dernières années.
    C’est pourquoi les philosophes disent que le diable n’est dangereux que lorsqu’on ne le voit pas. Et quand on le voit, il est ridicule et pathétique. Les philosophes disent aussi que le diable est un mauvais allié.
    Les services secrets américains nourrissent ces fous et les services secrets soviétiques les exploitent. Et si nécessaire, ils seront écrasés comme les mouches bleues de Tarsis. Les mouches bleues sont des mouches de cadavres. Et elles transportent le poison des cadavres.
    À propos, pendant que le chef du renseignement américain Allen Dulles commandait la psycho-guerre, son fils était dans un asile de fous.
    Au siège de l’Agence centrale de renseignement des États-Unis, près de Washington, on peut lire sur la façade une phrase biblique : « Vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres » (Jean 8:32). La Bible ne parle pas du tout de la liberté américaine, mais de la liberté par rapport au péché. D’accord, je vais vous dire une de ces vérités sans péché :
    Franchement, si l’empereur Nicolas II avait fait en son temps ce que le KGB fait aujourd’hui, c’est-à-dire enfermer les Lénine, Kamenev, Trotski et autres dans des « maisons de fous », il n’y aurait pas eu de révolution ni de pouvoir soviétique en Russie. L’Amérique aurait alors été plus calme. Mais à l’époque, l’Amérique faisait la même chose qu’aujourd’hui.
    En ce qui concerne les patients des « asiles de fous » soviétiques, dans la plupart des cas, vous verrez la même chose que ce que le philosophe noir Berdyaev appelait l’union de Satan et de l’Antéchrist, qui promet le royaume du prince de ce monde. Nous devons admettre que le vieux chercheur de diable Berdyaev n’était pas du tout un imbécile.
    Et les professeurs de Harvard avec leur « complexe de Lénine » ne sont pas non plus des imbéciles. La police secrète soviétique et ses « maisons de fous » ne sont pas non plus des imbéciles. Les seuls imbéciles sont ceux qui ne savent pas tout. Mais essayez de dire ceci...
    On dit que la vérité nue est parfois désagréable. Comme, par exemple, les démons nus de la guerre psychologique. Mais ils disent aussi que Dieu n’est pas dans la force, mais dans la vérité.

    New York. 20 décembre 1971.

    #conspirationnisme #eugénisme #anticommunisme #histoire #guerre_froide

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 22. Socialisme libertaire ou « socialisme » totalitaire
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-22-socialisme

    De nos jours, on s’interroge volontiers pour savoir si nos « com­munistes » ont évolué, s’ils sont sincères, si l’on peut donc se fier à eux. Questions mineures, sans réel intérêt, relevant d’un jeu de société plutôt que d’un examen objectif et sérieux de la situation. Quelles que soient les dispositions intimes et les intentions avouées ou cachées des « communistes » — qu’il s’agisse du reste d’eux, ou même des « socialistes », ou encore, éventuellement, d’autres partis, de gauche ou de (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc #Alexandre_Marc #Karl_Marx

    / #Volonté_Anarchiste

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 21. La propriété achevée : le « capitalisme collectif »
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-21-la-propriete-achevee

    Considérant les faiblesses et les lacunes de la dialectique marxienne, j’écrivais, il y a plusieurs décennies déjà : En méconnaissant le sens total de l’être, (...) en subissant jusqu’au bout l’envoûtement de l’idéalisme hégélien, l’auteur du Capital s’est condamné (...) à ne jamais aboutir dans sa quête (...) de l’homme réel, du concret vivant. Là se trouve (...) le nœud du drame contemporain : Karl Marx (...) qui se posait en révolutionnaire intransigeant, qui devait inspirer (...) (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc #Alexandre_Marc #Karl_Marx

    / #Volonté_Anarchiste

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 20. Le piège de la propriété
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-20-le-piege-de-la

    Pour utiliser un terme employé par Marx en parlant de Proudhon — qu’il se vantait d’avoir « infecté » d’hégélianisme, — on peut dire que l’irrémédiable poison de l’idéalisme absolu n’est pas le seul à infecter l’organisme marxien. Derrière Hegel, Rubel nous le rappelait, se tient Rousseau. Il est vrai que, dans des lettres peu citées, adressées à son compère Engels, Marx paraît curieusement approuver Proudhon, après publication de l’Idée générale de la Révolution au XIXe siècle, notamment (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc #Alexandre_Marc #Karl_Marx

    / #Volonté_Anarchiste

  • #02_février_2024 : Droits des personnes exilées aux #frontières_intérieures : le gouvernement sommé de revoir sa copie

    Le #Conseil_d’État vient de rendre sa décision, ce 02 février 2024, sur le régime juridique appliqué aux frontières intérieures depuis 2015 après que la #Cour_de_justice_de_l’Union_européenne (#CJUE) a, dans un arrêt du #21_septembre_2023, interprété le droit de l’Union.

    Conformément aux demandes des associations, le Conseil d’État annule l’article du #Ceseda qui permettait d’opposer des #refus_d’entrée en toutes circonstances et sans aucune distinction dans le cadre du rétablissement des contrôles aux frontières intérieures.

    Surtout, suivant son rapporteur public, le Conseil d’État souligne qu’il appartient au législateur de définir les règles applicables à la situation des personnes que les services de police entendent renvoyer vers un État membre de l’#espace_Schengen avec lequel la France a conclu un #accord_de_réadmission – entre autres, l’#Italie et l’#Espagne.

    Après huit ans de batailles juridiques, le Conseil d’État met enfin un terme aux pratiques illégales des forces de l’ordre, notamment en ce qui concerne l’#enfermement des personnes hors de tout cadre légal et au mépris de leurs droits élémentaires à la frontière franco-italienne. Le Conseil constate que leur sont notamment applicables les dispositions du Ceseda relatives à la retenue et à la rétention qui offrent un cadre et des garanties minimales. Enfin, il rappelle l’obligation de respecter le #droit_d’asile.

    Nos associations se félicitent de cette décision et entendent qu’elle soit immédiatement appliquée par l’administration.

    Elles veilleront à ce que les #droits_fondamentaux des personnes exilées se présentant aux frontières intérieures, notamment aux frontières avec l’Italie et l’Espagne, soient enfin respectés.

    Organisations signataires :
    ADDE
    Alliance DEDF
    Anafé
    Collectif Agir
    Emmaüs Roya
    Gisti
    Groupe accueil et solidarité
    La Cimade
    Ligue des droits de l’Homme
    Roya Citoyenne
    Syndicat des avocats de France
    Syndicat de la magistrature
    Tous migrants
    Welcome Pays d’Aix

    http://www.anafe.org/spip.php?article710
    #France #justice #02.02.2024 #contrôles_frontaliers #contrôles_systématiques_aux_Frontieres #frontière_sud-alpine #Alpes_Maritimes

    –-

    sur la décision de la CJUE du 21 septembre 2023 :
    https://seenthis.net/messages/1026361

    –-

    ajouté à la métaliste autour de la situation des exilés dans les #Hautes-Alpes :
    https://seenthis.net/messages/733721

    • 3) Quels effets de l’arrêt du 2 février Conseil d’État sur la frontière franco-italienne ?

      Le 2 février dernier, le Conseil d’État publiait un arrêt s’opposant aux pratiques de remises de refus d’entrée systématiques aux personnes exilées interpellées à la frontière. Cette décision supprimait l’article du CESEDA (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) qui permettait d’opposer des refus d’entrée en toutes circonstances et sans aucune distinction en cas de rétablissement des contrôles aux frontières intérieures (voir le communiqué de presse inter-associatif ici).

      Dans la foulée, nous avons observé un changement de pratiques à la PAF de Montgenèvre : les personnes interpellées sont placées en retenue administrative pour vérification d’identité ou de droit au séjour (maximum 24 heures). Les personnes qui souhaitent demander l’asile en France ressortent libre du poste de police pour aller déposer leur demande sur le territoire. Nous constatons des pratiques très hétérogènes en matière de procédures : les retenues observées vont de quelques minutes à plus de 23h30, et des personnes ont témoigné avoir fait une demande d’asile sans que cela ne soit pris en compte.

      Cette décision met-elle un terme définitif aux refoulements en Italie ? Non. Car toutes les personnes qui ne relèvent pas du droit d’asile sont refoulées à #Oulx sous une procédure de réadmission, certes plus encadrée qu’une simple décision de refus d’entrée, mais qui pose les mêmes problèmes en matière d’accès aux droits. Durant la retenue administrative, les personnes devraient pouvoir bénéficier d’un interprète, d’un avocat, avoir la possibilité de prévenir une personne de leur choix, et enfin, la possibilité de former un recours contre la décision préfectorale de réadmission en Italie. Nos premières observations montrent que ces droits ne sont pas systématiquement effectifs.

      Si les procédures de non-admission ont évolué, rien n’a changé concernant les pratiques de contrôles ciblés et discriminatoire, avec un dispositif important de gendarmes mobiles postés tout autour de la frontière. Par ailleurs, le dispositif de contrôle de la frontière est renforcé depuis début 2024 avec de nouveaux moyens matériels et humains mis à disposition de la PAF sur décision de la Préfecture. Neuf policiers adjoints ont été recrutés et seront affectés dans le département dès avril 2024, et notamment en renfort de la PAF. Un nouveau 4x4 ainsi qu’une seconde motoneige viennent également compléter le dispositif.

      Pour approfondir le sujet, vous pouvez regarder la rediffusion de cette formation/décryptage par l’Anafé (Association nationale d’assistance aux frtontières pour les étrangers) qui revient plus généralement sur les conséquences de l’arrêt de la CJUE (du 21 septembre) et du conseil d’État (du 2 février) sur les frontières intérieures :
      https://www.youtube.com/watch?v=DJevj85dM2Q

      https://tousmigrants.weebly.com/mars--avril.html

    • Quel effet de l’#arrêt du 2 février du Conseil d’Etat sur la frontière franco-italienne ?

      Le 2 février dernier, le Conseil d’État publiait un arrêt s’opposant aux pratiques de remises de refus d’entrée systématiques aux personnes exilées interpellées à la frontière. Cette décision supprimait l’article du CESEDA qui permettait d’opposer des refus d’entrée en toutes circonstances et sans aucune distinction en cas de rétablissement des contrôles aux frontières intérieures (voir le communiqué de presse inter-associatif ici).

      Dans la foulée, nous avons observé un changement de pratiques à la #PAF de #Montgenèvre : les personnes interpellées sont placées en #retenue_administrative pour vérification d’identité ou de droit au séjour (maximum 24 heures). Les personnes qui souhaitent demander l’asile en France ressortent libres du poste de police pour aller déposer leur demande sur le territoire. Nous constatons des pratiques très hétérogènes en matière de procédures : les retenues observées vont de quelques minutes à plus de 23h30, et des personnes ont témoigné avoir fait une demande d’asile sans que cela ne soit pris en compte.

      Mailing-list de Tous Migrants, 18.04.2024

  • Face à la hausse des arrivées irrégulières, Chypre annonce la suspension des demandes d’asile de Syriens

    Les autorités chypriotes ont annoncé dimanche la suspension du traitement des demandes d’asile des Syriens. Le président #Nikos_Christodoulides a évoqué « une mesure d’urgence » face à la forte hausse des arrivées irrégulières sur l’île, principalement depuis le Liban voisin.

    « Il s’agit d’une mesure d’urgence, d’une décision difficile à prendre pour protéger les intérêts de Chypre », a déclaré dimanche 14 avril le président chypriote Nikos Christodoulides lors de l’annonce de la suspension des demandes d’asile de Syriens dans le pays.

    Le gouvernement chypriote a pris cette décision en réaction à une forte augmentation des arrivées irrégulières ce mois-ci sur l’île. Plus de 1 000 personnes sont arrivées à Chypre sur des bateaux en provenance du Liban depuis le début du mois d’avril, dans un contexte d’aggravation des tensions au Moyen-Orient.

    Nicosie a donc demandé à ses partenaires de l’Union européenne (UE) de faire davantage pour aider le Liban et de reconsidérer le statut de la #Syrie - jusqu’à aujourd’hui déchirée par la guerre et considérée trop dangereuse pour y rapatrier les demandeurs d’asile.

    Nikos Christodoulides et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, ont discuté de la possibilité de renforcer l’aide économique attribuée à Beyrouth, a indiqué un porte-parole du gouvernement chypriote dans un communiqué. À cette fin, il a été convenu qu’ils se rendraient ensemble au Liban après une visite préparatoire de la Commission.

    Le #Liban, en proie à une grave crise financière, accueille des centaines de milliers de réfugiés syriens. Et les arrivées ne cessent de se poursuivre, les Syriens continuant à quitter leur pays désormais en proie à une très grave crise économique.

    Chypre, l’État le plus à l’est de l’UE et le plus proche du Moyen-Orient, se trouve à environ 160 km à l’ouest des côtes libanaises ou syriennes. L’île a enregistré plus de 2 000 arrivées par voie maritime au cours des trois premiers mois de l’année, contre seulement 78 au cours de la même période en 2023.

    Une mise en application encore floue

    Dans la pratique, la suspension du traitement des demandes signifie que les demandeurs d’asile pourront déposer un dossier mais qu’il ne sera pas traité.

    Ils seront confinés dans deux camps d’accueil qui fournissent un abri, de la nourriture, et réglementent les sorties, sans autre avantage.

    Ceux qui choisissent de quitter ces installations perdront automatiquement toute forme d’aide et ne seront pas autorisés à travailler, ont indiqué des sources gouvernementales.

    Pour Corinna Drousiotou, coordinatrice de l’ONG Cyprus Refugee Council interrogée par InfoMigrants, la décision du gouvernement chypriote concernant les demandeurs d’asile syriens ne repose sur aucune base légale. Par ailleurs, « il n’est pas encore clair de savoir comment les autorités vont appliquer cette décision […] Mais, nous ne pensons pas qu’elle parvienne à réduire les arrivées de réfugiés car ils ne sont généralement pas au courant de ce type de décision et les passeurs ne les en informent pas », souligne-t-elle.

    La responsable met également en garde : la mesure risque au contraire d’aggraver la crise de l’accueil des demandeurs d’asile, les deux seuls centres d’hébergement de l’île n’ayant que des capacités d’accueil limitées. Or, de plus en plus de demandeurs d’asile syriens risquent de se retrouver bloqués dans ces centres si leurs demandes d’asile ne sont pas examinées.

    En 2022, une décision similaire avait déjà été prise pour tenter de limiter les arrivées de Syriens à Chypre. Mais, selon Corinna Drousiotou, elle n’avait eu aucun effet sur le nombre d’arrivées.

    https://www.infomigrants.net/fr/post/56463/face-a-la-hausse-des-arrivees-irregulieres-chypre-annonce-la-suspensio

    #Chypre #asile #migrations #réfugiés #statistiques #chiffres #2024 #réfugiés_syriens

    • Des centaines de migrants syriens refoulés par Chypre et renvoyés au Liban

      Plusieurs bateaux de migrants syriens ont été bloqués par les #gardes-côtes et la police chypriotes, selon des sources concordantes. Certains ont été renvoyés au Liban, d’autres dérivent en mer dans le plus grand dénuement.

      Les Libanais ne veulent pas de nous et les Chypriotes nous renvoient ici, alors que faire ? » s’exclame Bassem*, frère d’un passager de l’un des bateaux partis du Liban-Nord vers Chypre depuis plusieurs jours et renvoyé à son point de départ après une traversée infernale en Méditerranée.

      Plusieurs centaines de personnes, en majorité syriennes, ayant tenté de rejoindre Chypre de manière irrégulière depuis le Liban ont été interceptées dans les eaux territoriales chypriotes en début de semaine par la police et les gardes-côtes, selon des sources concordantes. Une partie d’entre elles ont été renvoyées mercredi vers le Liban, dans un contexte de raidissement de la politique migratoire et de montée du racisme antisyrien dans les deux pays.

      Raflé au Liban, refoulé à Chypre

      Il est pour l’instant difficile de quantifier avec certitude le nombre de ces candidats malheureux à l’exil. Mais une chose est sûre, ils sont nombreux. Un média chypriote évoque cinq embarcations transportant 500 migrants, tandis que l’ONG Alarm Phone, qui soutient les personnes traversant la mer Méditerranée, assure sur son compte X (anciennement Twitter) être en contact avec les passagers de quatre bateaux et dénonce le refus du Centre commun de coordination des opérations de sauvetage chypriote (JRCC) de lancer une opération de sauvetage.

      Dérivant dans les eaux territoriales chypriotes depuis le 12 avril, « d’aucuns sont malades, ils n’ont plus de nourriture, d’eau et d’essence pour poursuivre leur voyage », écrit Alarm Phone mardi. Parmi eux, des passagers affirment que la police chypriote les a menacés avec des armes à feu en leur disant de rentrer en Syrie. « Les derniers jours ont été un cauchemar pour eux. Nous sommes accablés par le refus des autorités de leur venir en aide », témoigne Anja, membre d’Alarm Phone.

      Bassem, lui, assure que huit embarcations sont parties du Liban : cinq continueraient de dériver en mer tandis que trois auraient fait le chemin inverse vers le Liban. Parti lundi, son frère Ziad* a fait cet aller-retour cauchemardesque pour la somme de 2 650 dollars. Vivant depuis plus de dix ans au Liban où il travaille à Jounieh comme réparateur de climatiseurs, le jeune homme de 28 ans a subitement décidé de remettre son destin dans les mains des passeurs après avoir été victime d’une rafle raciste. « Après la mort de Pascal Sleiman (responsable des Forces libanaises pour la région de Jbeil), mon frère raccompagnait notre soeur à Ghazir, avec son époux et un cousin, quand ils se sont fait tabasser par les
      autoproclamés “Gardiens de Ghazir”. Ils n’ont même pas pu aller à l’hôpital car il était interdit aux Syriens de se déplacer. C’est la goutte d’eau qui l’a décidé à partir pour Chypre », relate-t-il.

      Peur de « mourir de faim »

      Mais son rêve d’exil échoue à quelques milles des côtes chypriotes. « Ils sont arrivés hier à 10h du matin dans les eaux territoriales chypriotes, mais les gardes-côtes les ont bloqués pendant deux jours. Puis ils leur ont donné de l’essence, de l’eau et de la nourriture et les ont renvoyés vers le Liban », dit-il. Mercredi, plusieurs photos et vidéos circulent sur les réseaux sociaux montrant des femmes, des hommes et des enfants débarquant d’un bateau de pêche en bois à Mina, la ville portuaire accolée à Tripoli. Sur ces images, ils expliquent avoir été refoulés par les gardes-côtes chypriotes.

      Selon Mohammad Sablouh, avocat membre de l’ONG Cedar Center for Legal Studies, l’un des trois bateaux arrivés au Liban est détenu par l’armée, avec le risque que ses passagers soient déportés en Syrie. Interrogé, le porte-parole de l’armée n’a pas apporté d’éléments sur ce sujet. Or, selon Bassem, « beaucoup sont recherchés par le régime, soit pour être enrôlés dans l’armée, soit parce qu’ils font partie de l’opposition ».

      Le sort des passagers qui ne sont pas retournés au Liban inquiète aussi Alarm Phone. Sur le réseau X, l’ONG affirme que certains lui « disent craindre de mourir de faim ». D’autres rapportent que le JRCC « leur a dit qu’ils n’atteindraient jamais Chypre et qu’ils devaient retourner en Syrie ». « Cela constitue une violation de la Convention relative au statut des réfugiés et met leur vie en danger », poursuit l’ONG, qui dénonce « un jeu cruel entre le Liban et Chypre », aux dépens du droit d’asile des personnes tentant la traversée irrégulière. « C’est du refoulement et cela est prohibé quoi qu’il arrive. Chypre, comme l’ensemble des États membres de l’UE, doit respecter le principe de non-refoulement qui est la pierre angulaire du droit d’asile », réagit Brigitte Espuche, co-coordinatrice du réseau Migreurop.

      Confrontées à un pic d’arrivées de demandeurs d’asile syriens depuis le Liban, les autorités de l’État insulaire ont exhorté début avril le Liban à ne pas « exporter » son problème migratoire. Le 15 avril, Nicosie a décidé de suspendre tout traitement des demandes d’asile de Syriens. « Nous l’avons appris tandis que mon frère était déjà avec les passeurs. Sinon, il ne serait jamais parti », soupire Bassem. Selon Brigitte Espuche, « le nombre de demandeurs d’asile ne peut justifier une réduction de l’accueil et de la protection, c’est absolument illégal ».

      Après avoir signé en 2020 un protocole d’accord secret avec le Liban visant à freiner les départs et faciliter les retours des candidats à la migration, Chypre cherche désormais à obtenir un accord officiel sur les migrants entre l’Union européenne et le Liban. L’objectif du lobbying de Nicosie ? Convaincre les Européens qu’il existe des « zones sécurisées » à l’intérieur de la Syrie où les réfugiés pourraient être transférés. Les organisations internationales soulignent toutefois de nombreux cas de disparition forcée ou d’arrestation de réfugiés lors de leur retour en Syrie.

      *Les prénoms ont été modifiés pour des raisons de sécurité.

      https://www.lorientlejour.com/article/1410738/des-centaines-de-migrants-syriens-refoules-par-chypre-et-renvoyes-au-
      #refoulements #renvois #expulsions

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 19. La « dialectique de la mort * » (Robert Aron)
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-19-la-dialectique-de-la

    Le moment vient où il n’est guère facile d’éluder la question décisive : qui donc est responsable de la dramatique mutation par laquelle l’anti-Système libérateur a été altéré, déformé, dénaturé, au point de dégénérer en sa propre négation, en son contraire ? L’heure n’étant plus aux nuances, aux congratulations, aux ronds de jambe, aux clins d’œil complices, aux politesses universitaires, aux extases intellectuelles, il importe de laisser de côté tout ménagement et de justifier in (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc #Alexandre_Marc #Karl_Marx

    / #Volonté_Anarchiste

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 18. Quel socialisme ?
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-18-quel-socialisme

    Tous les mots ont été galvaudés, profanés, trahis : le vocable de socialisme n’a pas échappé à cette redoutable usure . Alors qu’il désignait un grand, un noble, un indéracinable espoir de libé­ration, de dignité, de justice, telle a été sa dégénérescence qu’il prête flanc, aujourd’hui, aux furieuses diatribes des nouveaux hérétiques et schismatiques surgis en France, parmi lesquels Bernard-Henri Lévy : Le socialisme est à bien des égards un semblant et une impos­ture ; il ment quand il (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc #Alexandre_Marc #Karl_Marx

    / #Volonté_Anarchiste

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 17. Il n y a pas de marxisme révolutionnaire
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-17-il-n-y-a-pas-de

    En vérité, la faillite du marxisme est totale, même si, devant un tel blasphème, des millions d’hommes continuent de se boucher les oreilles et de se voiler la face. Et encore, s’il ne s’agissait que d’une faillite purement intellectuelle : hélas ! c’est sur le plan des faits, dans la perspective de l’histoire, à l’échelle du monde, que le drame se déroule. Ce sont, non seulement des millions, mais des centaines de millions d’êtres humains qui sont engloutis dans cette banqueroute. Et (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc

    / #Volonté_Anarchiste

  • Germany prepares to widen fixed border checks

    (automne 2023 —> pour archivage)

    Germany is expected to notify the EU about plans to introduce fixed border checks on the Polish, Czech Republic and Swiss borders. Previously, this had only been possible at the Austrian frontier.

    The German Interior Ministry is expected to register fixed border controls with Poland, the Czech Republic and Switzerland with the European Commission in light of a high number of refugees entering Germany.

    The intention of the checks is to more effectively fight against people smugglers and to detect and stop unauthorized entries.
    What we know so far

    According to government sources, the necessary notification in Brussels was being prepared on Monday.

    The plan is an extension of police checks directly at the border in place at the border with Austria since 2015.

    German Interior Minister Nancy Faeser had long rejected permanent fixed contro points, citing, among other things, the effects on commuters and freight transport. The norm in the EU’s Schengen Zone is for open borders but with police reserving the right to check anybody crossing at random, but not at set checkpoints.

    Interior ministers of the eastern German states of Brandenburg and Saxony have pressed Faeser to implement fixed checks.

    Germany had introduced additional controls at border crossings with Poland and the Czech Republic in September, but these were not intended to be permanent.

    German municipalities have urged the federal government to provide more funding to cope with the surge in migrant arrivals. They have pointed to stretched accommodation and services that seem similar to the events of 2015, when Germany took in over 1 million refugees mainly fleeing war in the Middle East.

    Opposition parties in Germany have also called on the government to limit the number of asylum-seekers, with Bavaria’s conservative Premier Markus Söder suggesting an annual upper limit on asylum seekers of 200,000.

    https://www.dw.com/en/germany-prepares-to-widen-fixed-border-checks/a-67109731

    #Allemagne #Pologne #Suisse #République_Tchèque

    #Allemagne #Suisse #contrôles_systématiques_aux_frontières #France #frontières_intérieures #frontières #asile #migrations #réfugiés #frontière_sud-alpine #prolongation #2023 #2024 #contrôles_frontaliers #frontière_sud-alpine

    –—

    ajouté à cette métaliste sur l’annonce du rétablissement des contrôles frontaliers de la part de plusieurs pays européens :
    https://seenthis.net/messages/1021987

    • 15.12.2023 : L’Allemagne prolonge de trois mois les contrôles aux frontières suisses

      L’Allemagne estime que la protection des frontières extérieures de l’UE est déterminante pour limiter l’immigration irrégulière. Elle prolonge donc les contrôles à la frontière avec la Suisse jusqu’au 15 mars 2024 au moins. Les frontières allemandes avec la Pologne et la République tchèque sont également concernées.

      Afin de lutter encore plus fortement contre la criminalité liée au trafic de migrants et de limiter la migration irrégulière, les contrôles seront poursuivis et ont été notifiés à la Commission européenne, a annoncé vendredi le ministère allemand de l’Intérieur.

      Berlin avait introduit en octobre des contrôles aux frontières avec la Pologne, la République tchèque et la Suisse, en raison de la nette augmentation du nombre de réfugiés en Allemagne. Cette mesure a été prolongée à plusieurs reprises.

      Mesures efficaces

      Le nombre d’entrées non autorisées en Allemagne a diminué de 60%, passant de plus de 20’000 en octobre à 7300 entrées non autorisées en novembre. « Nos mesures sont efficaces », a déclaré la ministre de l’Intérieur Nancy Faeser.

      Les contrôles aux frontières intérieures entre l’Allemagne et l’Autriche, qui avaient déjà commencé à l’automne 2015, durent actuellement jusqu’au 11 mai 2024.

      Les contrôles aux frontières ne sont en fait pas prévus au sein de l’espace Schengen et doivent être notifiés à Bruxelles. S’il ne s’agit que de quelques jours, il est possible de le faire à court terme, mais cette possibilité prend fin après deux mois, soit vendredi 15 décembre dans le cas de l’Allemagne.

      https://www.rts.ch/info/monde/14556738-lallemagne-prolonge-de-trois-mois-les-controles-aux-frontieres-suisses.

    • 17.10.2024 : Face à l’immigration illégale, l’Allemagne réinstaure des contrôles à la frontière suisse

      Le ministère allemand de l’Intérieur a notifié lundi auprès de la Commission européenne « des contrôles temporaires aux frontières avec la Pologne, la République tchèque et la Suisse »

      Le gouvernement allemand a annoncé le renforcement de sa surveillance aux frontières au sud et à l’est. Depuis lundi, des contrôles stationnaires aux passages douaniers avec la Pologne, la République tchèque et la Suisse ont été instaurés, indique le ministère allemand de l’Intérieur. Cette mesure exceptionnelle, qui nécessite l’aval de Bruxelles, est destinée à durer 10 jours, et peut être prolongée pour deux mois, précise le ministère.

      Des contrôles de ce type ont été mis en place à la frontière autrichienne depuis 2015, au moment de l’afflux sans précédent d’immigrants vers l’Allemagne, une décision dont la prolongation de six mois à compter du 12 novembre a également été annoncée ce lundi. « La police fédérale peut utiliser les mêmes moyens aux frontières avec la Pologne, la République tchèque et la Suisse que ceux déjà en place avec l’Autriche », précise le ministère. Les voyageurs transfrontaliers ne devraient cependant pas être confrontés à des contrôles systématiques : « un paquet de contrôles fixes et mobiles » sera mis en œuvre « de façon flexible et selon la situation », a déclaré la ministre allemande Nancy Faeser, citée dans le communiqué.

      Une importante hausse des arrivées en Allemagne

      L’Allemagne est confrontée à une forte hausse de l’immigration illégale. De janvier à début octobre, la police a comptabilisé environ 98 000 arrivées illégales dans le pays, dépassant déjà le nombre total des arrivées pour l’année 2022 qui était d’environ 92 000. Pour justifier les mesures décidées, l’Allemagne s’appuie sur un article de la réglementation de Schengen qui permet d’introduire pour une période limitée des contrôles intérieurs aux frontières en cas « de menace sérieuse à l’ordre public ou à la sécurité intérieure ».

      Nancy Faeser s’était pourtant jusqu’ici montrée réticente à l’idée d’instaurer des contrôles fixes, en raison notamment de leur impact sur les travailleurs frontaliers ainsi que sur les échanges commerciaux avec les pays voisins : ces mesures ralentissent en effet considérablement le trafic et créent des embouteillages. Mais la hausse des arrivées illégales provoque un vif débat en Allemagne, dont les capacités d’accueil s’épuisent. Les communes et les régions, qui ont aussi absorbé l’arrivée d’un million de réfugiés ukrainiens depuis février 2022, se disent à la limite de leur capacité d’accueil, alors que la situation profite à l’extrême-droite, qui a obtenu des résultats records dans deux scrutins régionaux il y a une semaine.

      « Le nombre de personnes qui viennent actuellement chez nous est trop élevé », avait récemment martelé le chancelier Olaf Scholz, en présentant des mesures pour accélérer les expulsions de personnes déboutées de l’asile. La décision était donc attendue, et « la ministre de l’Intérieur […] a apparemment attendu les élections législatives polonaises avant de rendre publique sa décision », note le Tages-Anzeiger.
      Poursuite de la collaboration avec les douaniers suisses

      Nancy Fraeser « a assuré à [Elisabeth] Baume-Schneider que le trafic frontalier serait entravé aussi peu que possible », indique le Département fédéral de justice et police (DFJP) à Keystone-ATS. La conseillère fédérale et la ministre allemande ont par ailleurs convenu lundi de renforcer la « collaboration fructueuse » entre les deux pays dans le cadre du plan d’action mis en place en 2022 qui prévoit des patrouilles en commun et un meilleur échange d’informations pour enrayer les migrations secondaires, ajoute le DFJP. Au parlement, l’annonce allemande semble être accueillie avec compréhension : « ce n’est pas un secret que de nombreux migrants utilisent la Suisse comme pays de transit, tous ceux qui prennent le train de Milan à Zurich le voient », a réagi dans la Neue Zürcher Zeitung le président de la Commission de politique extérieure du Conseil national, Hans-Peter Portmann (PLR/ZH).

      Un porte-parole du gouvernement allemand a par ailleurs confirmé au quotidien zurichois que les contrôles avaient commencé à être mis en place ce lundi, et qu’ils « seront renforcés dans les jours à venir en fonction de l’évaluation de la situation par la police fédérale » allemande. « Les contrôles fixes aux frontières présentent l’avantage […] que les personnes peuvent être refoulées par la police fédérale dès qu’elles tentent de franchir la frontière », poursuit la NZZ. « Elles sont alors considérées comme n’étant pas entrées sur le territoire » et nécessitent un investissement bureaucratique « incomparablement plus faible » que dans le cas d’un processus d’expulsion du territoire, argumente le journal.

      « Les spécialistes, les politiciens et les policiers sont loin d’être d’accord » sur l’efficacité des contrôles, tempère le Tages-Anzeiger qui rappelle qu’il y a quelques semaines encore, Nancy Faeser qualifiait les contrôles fixes de « fausses solutions ». Reste, conclut le Tagi, qu’il est « pour l’instant impossible d’estimer » les effets concrets des nouvelles mesures à la frontière suisse, notamment sur le trafic important des pendulaires avec le Bade-Wurtemberg.

      https://www.letemps.ch/suisse/face-a-l-immigration-illegale-l-allemagne-reinstaure-des-controles-a-la-fron

    • La Suisse accusée de « #laisser_passer » les migrants

      Le président du Conseil national Martin Candinas est en visite à Berlin ce vendredi, dans un climat tendu : l’Allemagne reproche à la Suisse de faciliter le transit des demandeurs d’asile.

      Le nombre des réfugiés arrivant en Europe atteint un nouveau record… et l’Allemagne est une fois de plus en première ligne. Elle accuse ses voisins de « laisser passer » des demandeurs d’asile de Syrie, d’Afghanistan, du Pakistan ou d’Irak, voire de leur faciliter le transit comme en Suisse. La télévision suisse alémanique avait révélé fin 2022 comment la compagnie ferroviaire CFF avait mis en place des « wagons réservés aux étrangers » avec des portes fermées à clé pour conduire les réfugiés jusqu’à Bâle.

      « Ça ne peut plus continuer ! […] Il nous faut une protection plus efficace à la frontière entre l’Allemagne et la Suisse. » (Thomas Strobel, ministre de l’Intérieur du Bade-Wurtemberg)

      La situation est particulièrement dramatique à la frontière avec la Pologne avec 14’303 illégaux arrêtés dans les sept premiers mois de l’année (+143% par rapport à 2022). En provenance de Suisse, la progression est encore plus importante : +200%, soit plus de 6000 illégaux arrêtées à la frontière avec le #Bade-Wurtemberg. « Les passages entre la Suisse et l’Allemagne n’ont jamais été aussi élevés depuis 2016 », s’est plaint le Ministère de la justice de la région frontalière dans un communiqué officiel.

      « Nos villes et nos communes ont atteint leurs capacités d’accueil. Ça ne peut plus continuer ! […] Il nous faut une protection plus efficace à la frontière entre l’Allemagne et la Suisse », a insisté avant l’été Thomas Strobel, le ministre conservateur (CDU) de l’Intérieur du Bade-Wurtemberg. Pour le chef du groupe parlementaire des libéraux (FDP), Hans-Ulrich Rülke, il n’est « pas normal qu’un État non-membre de l’UE comme la Suisse introduise des réfugiés en Allemagne par le Bade- Wurtemberg ».

      Menace de l’opposition

      Lors du débat de politique générale à l’assemblée fédérale (Bundestag), mercredi 6 septembre, Friedrich Merz, le leader de l’opposition conservatrice (CDU), a attaqué lui aussi la Suisse en l’accusant de ne pas respecter le « règlement de Dublin » qui l’oblige à traiter les demandes d’asile chez elle ou à renvoyer des réfugiés dans le premier pays d’enregistrement (la plupart des demandes sont faites en Autriche).

      « Vu le nombre de passages illégaux, nous sommes prêts à rétablir des contrôles aux frontières. » (Friedrich Merz, leader de l’opposition conservatrice (CDU))

      « Notre volonté n’est pas de réinstaller des barrières douanières aux frontières polonaises, tchèques et suisses. Mais vu le nombre de passages illégaux, nous sommes prêts à rétablir des contrôles », at- il menacé dans l’hémicycle sous les huées de la gauche gouvernementale.

      Une déclaration qui met le président du Conseil national dans l’embarras. Martin Candinas rencontre ce vendredi à 9 heures la vice-présidente du Bundestag, Yvonne Magwas (CDU), pour un entretien bilatéral. « La Suisse respecte le règlement de Dublin », nous a-t-il assuré jeudi, ne voulant pas davantage commenter cette crise. Il ne compte pas aborder le sujet avec les officiels allemands, sauf si ces derniers souhaitent lui en parler. Du côté allemand, on reste également discret sur la teneur de l’entretien.

      Le président du Conseil national Martin Candinas, qui doit rencontrer vendredi la vice-présidente du Bundestag, assure que « la Suisse respecte le règlement de Dublin ».

      La tension est sensible aux frontières polonaises et tchèques. La Saxe a décidé d’envoyer sa propre police pour épauler les agents fédéraux chargés de contrôler seulement les passages frontaliers officiels. Le ministre de l’Intérieur de Saxe, Armin Schuster, a estimé qu’il n’avait pas d’autre choix que d’employer cette méthode. Dès la première semaine, ses agents ont arrêté 307 clandestins et 7 passeurs sur un total de 514 personnes contrôlées… « Vous le voyez, le principe des accords de Dublin ne fonctionne pas », regrette-t-il. Friedrich Merz abonde : « Cela me fait mal au coeur de voir que nous ne sommes même pas en mesure de protéger nos propres frontières, d’autant plus que celles de l’Europe ne sont toujours pas sécurisées. »

      Épargner les frontaliers

      Mais la ministre fédérale de l’Intérieur, la social-démocrate Nacy Faeser, refuse catégoriquement la mise en place de contrôles permanents, surtout vers la Suisse. Les experts les considèrent comme inefficaces. La Bavière a mis en place 5 points de contrôle à la frontière autrichienne en 2015. « Ces contrôles n’ont aucun sens », estime Andreas Roßkopf du syndicat de la police (GdP).

      « Ils bouleversent surtout le quotidien des frontaliers. Le personnel soignant, les artisans et de nombreux pendulaires des deux pays sont concernés. Ils affectent durablement notre économie », ajoute la ministre. Elle a en revanche ordonné le renforcement des contrôles aléatoires aux frontières.

      https://www.tdg.ch/tensions-avec-lallemagne-la-suisse-accusee-de-laisser-passer-les-migrants-428988

    • A #Buchs, « porte d’entrée orientale du pays », la banalité de l’immigration

      Sorti ce lundi, le baromètre des préoccupations Ipsos réalisé par « Le Temps » place l’immigration en quatrième position. A Buchs, où plus de 26 000 personnes « illégales » ont été contrôlées l’an dernier, le phénomène fait désormais partie du paysage.

      La scène est devenue parfaitement ordinaire : il est un peu moins de 10h à la #gare de Buchs (SG) ce mardi 23 août et une cinquantaine d’hommes en training sont alignés contre un mur par les gardes-frontières suisses. Les voyageurs – des Afghans fuyant les talibans, des Nord-Africains en quête d’une vie meilleure et d’autres compagnons d’infortune internationaux – affluent tous du même endroit : #Vienne, d’où les trains de nuit rallient régulièrement Zurich (notre reportage sur la question : https://www.letemps.ch/suisse/rails-entre-vienne-zurich-migrants-route-balkans).

      L’année dernière, pas moins de 26 000 « entrées illégales » ont été enregistrées par l’Office fédéral de la douane à la frontière orientale suisse. Ce qui représente deux fois la population de Buchs, 13 000 habitants. Dans la petite localité saint-galloise, cet afflux ininterrompu laisse cependant froid. Les nouveaux arrivants ne sont pas là pour rester, alors à quoi bon s’en soucier ? Et qu’importent les Accords de Schengen-Dublin.

      « Les journaux n’en parlent plus »

      L’immigration. Politiquement, la thématique est omniprésente. Toutefois, rares sont les lieux en Suisse où le phénomène est aussi visible qu’à Buchs. « Porte d’entrée orientale » du pays comme il est souvent qualifié, le gros bourg est connu pour son joli château surplombant un petit lac, sa vieille ville bucolique. Mais surtout pour sa gare où, ce mardi, à quelques centaines de mètres d’écart, deux réalités s’affrontent. Sur le quai 5, des migrants dépenaillés cheminent en file indienne, entourés par des douaniers et des policiers… alors qu’à deux pas du quai 1, des ouvriers s’affairent pour préparer la 39e édition de la Buchserfest. Agendée trois jours plus tard, la manifestation annonce « concerts, spectacles de danse et restauration variée pour petits et grands ». Et c’est surtout cette perspective qui anime les bistrots de la rue centrale.

      « C’est une gare de transit, dit avec fatalité Barbara Gähwiler-Bader, présidente du PS de la commune, attablée au Café Wanger. Pour être franche, à moins de prendre le train, rien ne laisse penser que des milliers de personnes mettent un premier pied en Suisse ici chaque année. La politique locale ne s’intéresse pas au sujet, les journaux du coin n’en parlent plus, ni vraiment les habitants. C’est parfois à se demander si le phénomène est encore là. Ici tout va bien, et tant que c’est le cas, rien ne bouge. Réfléchir à la situation de ces gens, c’est réfléchir à ses propres privilèges. Et tout le monde n’a pas envie de faire l’effort. » Dans la station frontière, seul un panneau en persan indiquant les toilettes signale la spécificité des lieux. Le centre d’asile le plus proche est à plus de 30 kilomètres.

      « Rien n’est vraiment entrepris dans la commune, admet la socialiste, mais que faire ? C’est une situation tragique mais ils ne font qu’entrer et sortir. Très peu souhaitent s’attarder en Suisse. Les autorités les chargent dans le train suivant et ils partent pour la France, l’Allemagne, le Royaume- Uni. Voilà. » Si les arrivants dénués de papiers sont censés être identifiés, enregistrés et contrôlés, la police saint-galloise reconnaît laisser passer nombre d’entre eux sans intervenir. La plupart des vagabonds (contrôlés ou non) poursuivent ensuite leur chemin – avec ou sans billet – vers Zurich, puis Bâle, avant de sortir des frontières de la Suisse. Et de la liste des problèmes du pays.

      « On se sent en danger à la gare »

      Une attitude laxiste, selon Sascha Schmid, représentant local de l’UDC, membre du législatif cantonal et candidat au Conseil national aux élections fédérales 2023. « Il y a des lois en Suisse et elles doivent être respectées, tonne le vingtenaire, banquier au Liechtenstein. Ces gens ne restent peut-être pas à Buchs mais qui sait s’ils sortent vraiment du pays ? Il n’y a aucune garantie. Et qui nous dit que l’Allemagne ou la France ne durciront pas un jour les contrôles à leurs frontières ? Nous nous retrouverions dans une situation intenable. » Le politicien dénonce particulièrement le laisser-faire autrichien… tout en reconnaissant que Berne agit grosso modo comme Vienne, une étape plus loin.

      « Le problème est global, poursuit-il. Mais il existe des solutions. L’UDC aimerait une mise en oeuvre stricte des Accords de Schengen-Dublin (le renvoi des étrangers dans leur premier pays d’enregistrement). Toutefois, comme ces accords sont cliniquement morts, j’estime qu’il faut faire preuve de courage et considérer d’autres options. De très nombreux Autrichiens viennent travailler chaque jour dans la région. Il doit être possible de mettre la pression sur leur gouvernement pour qu’il respecte les accords internationaux. Il n’est pas acceptable d’enrichir les frontaliers sans contrepartie. » Si la plupart des migrants ne s’attardent pas à Buchs, Sascha Schmid considère tout de même qu’ils font « grimper l’insécurité à la gare et que la criminalité augmente en ville, tout comme les cambriolages et les vols ».

      « Ici la vie continue »

      Un diagnostic que Rolf Pfeiffer, président indépendant de la ville de Buchs depuis mars, réfute en bloc. « Les arrivants ne sont mêlés à aucun souci local, dit-il. Tout est calme. Tout se passe bien.

      C’est un non-sujet. Buchs surgit régulièrement dans les médias parce que nous sommes situés à la frontière, mais la ville est concentrée sur d’autres problèmes. » Jouxtant le Liechtenstein – dont la place financière attire de nombreux habitants optant pour une résidence en Suisse voisine – mais également proche de Saint-Gall, Coire (GR), Zurich (ZH), Feldkirch (AU) et Bregenz (AU), la petite cité grandit vite et il s’agit d’adapter ses infrastructures, précise-t-il. Un défi bien plus pressant que ce qui se trame au bord des rails.

      « Si le besoin surgit, complète le Saint-Gallois, nous nous mettons à disposition des membres de la protection civile pour monter quelques tentes destinées à accueillir les migrants qui en ont besoin. Généralement pendant une nuit tout au plus. Les coûts engendrés nous sont ensuite remboursés par la Confédération. Comprenez-moi bien, d’un point de vue humanitaire, la condition des arrivants est certainement triste. Ils sont là, nous les voyons. Nous n’ignorons pas la chose. Mais ici la vie continue. Nous ne pouvons pas influencer la situation, qui doit être réglée entre Etats. » Le jour de notre visite, la Confédération annonçait justement une nouvelle contribution de 300 millions d’euros sur sept ans destinée à « l’amélioration de la protection des frontières extérieures de l’espace Schengen ». Une décision qui fait suite au plébiscite (71,6% de oui) des Suisses à une participation élargie de Berne aux activités de Frontex en 2022. Et aux difficultés de la Suisse à gérer cette problématique.

      Car même si beaucoup de migrants poursuivent leur chemin, pas moins de 14 000 demandes d’asile ont été enregistrées par le Secrétariat d’Etat aux migrations en juillet 2023 et, au vu des pronostics – le nombre total pourrait monter à plus de 30 000 d’ici à la fin de l’année –, les centres d’accueil fédéraux craignent d’atteindre leurs limites. Vendredi dernier, la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider annonçait avoir arraché 1800 places supplémentaires aux cantons sur un objectif de 3000 – sans pour autant rassurer sur le long terme. Au centre de l’Europe, la Suisse mise cependant sur une autre solution : déléguer. « Une protection efficace des frontières extérieures de l’espace Schengen contribue à la sécurité et à la gestion migratoire de la Suisse, affirmait mercredi dernier le Conseil fédéral. Mieux les contrôles aux frontières extérieures fonctionneront, moins il y aura besoin de contrôles aux frontières nationales suisses. » Et, à l’instar de Buchs, moins il faudra se préoccuper de la chose.

      https://www.letemps.ch/suisse/suisse-alemanique/a-buchs-la-banalite-de-la-migration

      #statistiques #chiffres #2023

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 16. Que reste-t-il ?
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-16-que-reste-t-il

    Piètre « aboutissement », après quoi il ne reste plus qu’à tirer l’échelle. A moins d’avoir le courage de reconnaître que tout l’appareil scientifique du marxisme n’est qu’un camouflage compliqué derrière lequel se dissimule un jugement moralisateur dont on ne peut dire qu’il soit faux, mais qui risque en tout cas de passer pour primaire. N’est-ce pas du reste ce que le grand Mao Tsê-Toung (paix à son corps embaumé) aurait laissé entendre, en disant : Le marxisme comporte de multiples (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc

    / #Volonté_Anarchiste

    • Retour sur les critiques anarchistes du marxisme

      Poser la question de la pertinence contemporaine des critiques anarchistes du marxisme, c’est peut-être d’abord se demander ce que nous pouvons en faire à une époque comme la nôtre. Il n’aura échappé à personne que nous vivons au XXIe siècle. Ce que E. Hobsbawm appelle le « court XXe siècle », et qui a commencé avec la Première guerre mondiale avant de s’achever avec la dislocation de l’empire dit soviétique autour de 1990, est étroitement lié aux aventures et surtout aux mésaventures du marxisme puisque cette période correspond exactement à ce qu’a duré le premier régime politique à s’être réclamé explicitement de Marx. Or l’analyse économique, sociale et politique ainsi que le type d’émancipation promus par le marxisme sont ressortis de cette période, à tort ou à raison, durablement discrédités. De sorte que se demander quelle est l’actualité des critiques anarchistes du marxisme, c’est aussi se demander si ces critiques ne risquent pas de partager le sort de ce dernier. La promotion du marxisme, au cours du xxe siècle, au rang de doctrine officielle, de doctrine d’État a, dans les faits, conduit pour lui à une double défaite : transformé en doctrine d’État et de parti, ce qui a conduit à une profonde altération de son contenu et de sa visée émancipatrice, il a partagé le sort des États et des mouvements politiques auquel il avait été associé. Pour les anarchistes, qui furent les premiers à la combattre, cette évolution pourrait bien s’apparenter à une amère victoire ...

      ... On peut, pour commencer, et en revisitant à grands traits l’histoire des rapports entre marxisme et anarchisme, montrer, d’une part, que l’attitude de rejet de Marx chez la plupart des anarchistes contemporains, si elle n’est pas toujours raisonnable, a néanmoins ses raisons historiques et, d’autre part, qu’au rebours de l’ignorance réciproque dans laquelle marxisme et anarchisme sont largement demeurés l’un vis-à-vis de l’autre, il a existé des tentatives théoriques et pratiques de penser à la fois une appropriation anarchiste de Marx et une appropriation marxiste de l’anarchisme.

      L’anarchisme comme anti-marxisme

      Si l’on cherche d’abord les raisons historiques pour lesquelles anarchisme et marxisme sont en grande partie demeurés dans une forme d’ignorance mutuelle, et les raisons de la méconnaissance réciproque qu’entretiennent aujourd’hui la plupart des militants et des théoriciens de ces deux courants, un retour aux origines s’impose.
      L’anarchisme est originellement un anti-marxisme. L’acte de naissance historique de l’anarchisme en tant que mouvement est la scission intervenue au sein de l’Association Internationale des Travailleurs (que l’on a coutume de désigner comme la Première Internationale), à l’issue de ce qu’il est convenu d’appeler le conflit entre Marx et Bakounine – bien que ce conflit n’ait fait qu’incarner un conflit plus profond au sein du mouvement ouvrier naissant autour de la question de la politique et de l’organisation et que, bien souvent, Bakounine n’ait fait que formuler des critiques qui avaient été élaborées collectivement .

      Le motif de ce conflit, tel qu’il se donne à voir dans les textes où Bakounine critique Marx, est en effet le suivant : Bakounine, qui ne connaît de Marx que sa personne (qu’il goûte assez peu) et le Manifeste communiste, attribue à Marx l’intention de faire de l’Internationale une sorte de regroupement de partis politiques participant aux luttes électorales et ayant pour but de conquérir par ce biais le pouvoir au sein des nations où existe un système représentatif, ce qui impliquerait une feuille de route assez claire pour les prolétaires des différents pays : parvenir à un régime représentatif, conquérir le suffrage universel, s’organiser en parti, gagner les élections. C’est ainsi qu’il interprète la politique des socialistes allemands et l’idée, exprimée dans le Manifeste, selon laquelle la classe ouvrière doit se rendre maîtresse de l’appareil d’État pour le faire fonctionner à son profit, faire disparaître les oppositions de classe par l’extinction de la bourgeoisie en tant que classe, avant finalement de disparaître – puisque la raison d’être de l’État n’est rien d’autre que la perpétuation de la domination de classe, une société sans classes (c’est-à-dire en l’occurrence qui n’est plus régie par la division entre propriétaires des moyens de production et propriétaires de leur seule force de travail) serait une société sans État.

      La contestation de cette thèse politique de Marx va conduire chez Bakounine à la contestation d’une thèse qui est de l’ordre la philosophie de l’histoire, à laquelle la première s’articule, selon laquelle l’histoire est guidée par le développement nécessaire du mode de production capitaliste vers l’aiguisement des luttes de classes et la concentration de plus en plus forte du capital, qui rend à la fois plus nécessaire et plus aisé le renversement de la domination de la bourgeoisie. À ce qu’il considère comme une approbation de la nécessité historique, Bakounine oppose l’idée selon laquelle, quand bien même les conditions de production et de reproduction de la vie humaine seraient déterminantes dans le développement de l’humanité, certaines des causes secondaires, comme l’État, peuvent acquérir une importance plus grande. C’est ce qui sous-tend, philosophiquement, la fameuse proposition sur l’abolition de l’héritage défendue par Bakounine au congrès de Bâle de l’AIT en 1869, et combattue par Marx et ses amis : ce droit peut bien n’être que le reflet juridique d’un fait économique, il n’en a pas moins une importance déterminante dans le maintien de ce dernier.

      La critique adressée par Bakounine à la conception marxienne de l’histoire est donc double. D’une part, cette conception minorerait excessivement le rôle du facteur politique dans la marche de l’histoire. D’autre part, Marx sanctifierait la marche de l’histoire. Or, pour Bakounine, qu’il y ait des tendances centralisatrices dans l’histoire ne signifie pas du tout que ces tendances soient objectivement révolutionnaires ; que la genèse du mode de production capitaliste et la centralisation étatique qui l’accompagne soient des tendances historiques fortes ne signifie pas pour autant qu’il faudrait les approuver, et quand bien même elles auraient un caractère inéluctable, on aurait raison de se révolter contre elles en tant qu’elles marquent un progrès dans l’assujettissement des êtres humains. Dans cet esprit, le fait de résister à la mise en place de l’usine, ou à l’introduction de machines dans le processus de production, peut être interprété comme une forme de réaction de la part de tenants d’un mode de production en voie de disparition. Mais si l’on rompt avec la téléologie historique lourde qui est celle du marxisme, on peut aussi l’interpréter comme une défense de la liberté contre une forme inédite et redoutable d’oppression (et aussi comme une défense réussie des intérêts des ouvriers du secteur concerné). Il n’y a rien d’étonnant à ce que ce soit parmi les libertaires qu’on ait pu trouver des auteurs pour réhabiliter le mouvement luddite, que l’historiographie marxiste considérait comme rétrograde parce qu’il s’opposait au progrès technique, à la mise en place de grandes concentrations industrielles, et in fine à la possibilité d’organiser en masse la classe ouvrière.

      S’agissant du statut de la politique, Bakounine considère que la saisie du pouvoir d’État par une organisation révolutionnaire inspiré par le programme (présumé) de Marx conduirait à l’émergence d’une nouvelle classe qui administrerait la capital arraché des mains de la bourgeoisie et opprimerait à son tour à la fois la classe ouvrière et la paysannerie – c’est souvent ce que l’on désigne, par une formule problématique, comme l’« analyse prophétique » par Bakounine de la nécessaire dégénérescence de l’État ouvrier. À cette position politique qu’il attribue à Marx, Bakounine oppose l’idée selon laquelle l’Internationale n’est pas un regroupement de partis ayant vocation à prendre le pouvoir par les urnes, mais un organe de systématisation et d’affirmation concrète de la solidarité objective, économique, qui lie le monde ouvrier. Au sein de cette organisation, explique encore Bakounine, il est naturel, et nécessaire, que différentes options politiques s’expriment, que ce soit celle de Marx, celle des amis de Blanqui (le coup d’État opéré par une petite minorité d’hommes décidés) ou celle de ce qu’il nomme le parti anarchique (l’insurrection généralisée qui anéantit l’État immédiatement, c’est-à-dire non pas instantanément, mais sans médiation), mais aucune des trois ne doit jamais devenir la position politique officielle de l’organisation, sous peine que celle-ci ne dégénère en un embryon d’État 

      On a là une critique de la séparation du politique et un idéal de résorption du politique dans l’économique qui seront repris, développés et transcrits en acte par le syndicalisme révolutionnaire à la fin du siècle et au début du suivant. Avec conséquence, Bakounine s’oppose également à toute forme de centralisation au sein de l’Internationale. Attribuant à Marx le projet de vouloir constituer le Conseil général de l’organisation en une sorte de directoire central, il prône la libre fédération des sections de l’organisation et la réduction de son organe central à un simple bureau de statistiques et de correspondance. C’est sur ce point (et non sur un programme anarchiste) que la plupart des sections de l’Internationale s’opposeront au Conseil général et quitteront l’organisation après l’exclusion de Bakounine au congrès de La Haye de 1872.

      La pertinence contemporaine d’une critique

      Pour résumer, le conflit politique qui donne naissance historiquement à l’anarchisme lègue à ce dernier une triple critique dont il s’agit d’interroger la pertinence actuelle. En premier lieu, une critique de la politique, celle-ci étant entendue comme une activité menée par des spécialistes et orientée vers la conquête du pouvoir par le biais des élections, à quoi est opposée une antipolitique (et non un apolitisme comme Marx et ses amis tendront à le prétendre), c’est-à-dire une activité relative à l’État, mais qui vise sa disparition. En second lieu, une critique des organisations comme source possible d’une nouvelle oppression, d’une nouvelle centralisation, d’une nouvelle bureaucratie, critique qui connaîtra un prolongement immédiat dans le syndicalisme révolutionnaire et chez les premiers auteurs qui souligneront la confiscation de la démocratie par les partis politiques.

      Enfin, une critique de l’ordre de la philosophie de l’histoire en tant qu’est refusée à celle-ci tout télos qui l’orienterait, critique qui permet de comprendre pourquoi l’anarchisme, historiquement, n’a pas seulement survécu à ses défaites, mais les a transformées en légendes – la Commune, Makhno, l’Espagne libertaire, etc. Ces critiques ne sont encore qu’esquissées chez Bakounine. S’agissant des organisations, sa position est plus complexe que ce qu’il dit de l’Internationale, puisqu’il est en même temps un grand amateur de sociétés secrètes, qu’il dote de règlements interminables, règlements qui sont loin de constituer l’esquisse d’une société débarrassée de toute forme de domination.

      Quant à la philosophie de l’histoire, Bakounine adhère dans l’ensemble à la conception matérialiste de l’histoire telle qu’elle se donne à lire dans le Manifeste, il en rejette simplement le mécanisme grossier, sans rejeter une certaine téléologie. S’agissant de la politique, le conflit entre Marx et Bakounine donne lieu à un curieux chiasme, où l’auteur qui est censé minorer le rôle des facteurs politiques dans l’histoire se voit accusé de faire de la saisie du pouvoir d’État l’objectif essentiel, et où l’auteur qui insiste sur le rôle des facteurs politiques et juridiques dans le développement du mode de production capitaliste (par exemple au travers de l’héritage) tourne le dos à toute activité politique séparée ou spécifique.

      À ces trois critiques, il faut ajouter une quatrième, qui fut d’abord propre à Bakounine en raison de son intérêt pour les pays n’ayant pas développé d’industrie. Comme une partie du marxisme après lui, Bakounine pointe chez Marx une identification de la classe ouvrière à une classe révolutionnaire par essence, ce qui conduit à rejeter comme potentiellement contre-révolutionnaires des éléments de la population comme le Lumpenproletariat, la petite paysannerie ou les jeunes déclassés. Lorsqu’il cherche à penser les conditions d’une révolution dans des pays où l’industrie et la classe ouvrière en sont encore à leurs balbutiements (Russie, mais aussi Italie), Bakounine n’emprunte pas la voie qui consisterait à dire que ces pays doivent d’abord se doter d’une classe ouvrière disciplinée par l’industrie pour pouvoir envisager une révolution sociale, il souligne plutôt le rôle qui revient aux masses paysannes et à la jeunesse, voire à ce qui est décrié par Marx comme Lumpenproletariat. On retrouvera, plus près de nous, chez Pierre Bourdieu, une analyse convergente du potentiel révolutionnaire que recèle l’existence d’« intellectuels prolétaroïdes » qui ne sont pas parvenus à trouver leur place dans un champ déterminé et que « tout […] incline à mettre au service de l’indignation et de la révolte populaires leurs capacités d’explicitation et de systématisation ».

      Ces différentes critiques sont aussi intéressantes parce qu’elles entrent en résonance avec d’autres décentrements qui ont marqué l’époque contemporaine, en particulier lorsqu’il s’est agi de revisiter le problème de l’État. Il existe une parenté entre les critiques du marxisme formulées historiquement par les anarchistes et celles qui ont pu être présentées par des auteurs aussi différents que Michel Foucault et Pierre Bourdieu, notamment dans leur enseignement au Collège de France, lorsqu’ils ont eu respectivement à aborder la question de l’État. On peut également signaler les prolongements qu’a trouvés la critique anarchiste d’une certaine philosophie marxiste de l’histoire chez les anthropologues libertaires Pierre Clastres et David Graeber .

      Bien entendu, il faut apporter à cette présentation des critiques anarchistes de Marx plusieurs nuances. Tout d’abord, la position qui est attribuée par Bakounine et ses amis à Marx est fortement simplificatrice, et semble souvent s’appliquer aux conceptions des lassaliens et anticiper ce que sera le marxisme de la Deuxième Internationale. Sur la question politique, Marx a sans doute une position plus complexe, qui consiste à prendre en considération l’évolution propre à chaque pays, prônant dans certains cas l’organisation de la classe ouvrière en un parti destiné à prendre pacifiquement le pouvoir, mais n’excluant pas ailleurs que surviennent des révolutions. Surtout, Marx a oscillé, notamment au moment de la Commune de Paris, sur la question de la saisie du pouvoir d’État par le prolétariat : tout en continuant à suivre les efforts des socialistes allemands pour s’unir en un parti unique, Marx fait l’éloge des prolétaires parisiens qui ont compris que la classe ouvrière, dit-il corrigeant la formule du Manifeste, ne doit pas se contenter de prendre les pouvoirs de l’État tels qu’ils existent pour les faire fonctionner à son profit, mais doit immédiatement les détruire. S’agissant de l’organisation, Marx ne méprise absolument pas les formes d’organisation fondées sur la solidarité économique, il estime même qu’elles sont le lieu d’une préfiguration de la société sans classe, l’endroit où les prolétaires peuvent faire l’expérience d’un auto- gouvernement. Enfin, si lorsqu’il formule de grandes tendances historiques, ou quelque chose comme des lois de l’histoire (typiquement dans l’avant-dernier chapitre du livre I du Capital à propos de la tendance historique de l’accumulation capitaliste), il est difficile de ne pas considérer chez lui une forme de téléologie historique, mais il en va souvent autrement dans les analyses qu’il propose de conjonctures historiques particulières. Ces nuances sont à la fois importantes et dérisoires : dérisoires parce qu’elles seront souvent gommées par les versions dominantes du marxisme, mais importantes parce que c’est précisément sur elles que pourront s’appuyer certains auteurs et militants pour proposer un rapprochement entre marxisme et anarchisme.

      Il faut ensuite souligner que cette hostilité réciproque entre partisans de Marx et partisans de Bakounine, même si elle était nourrie de méconnaissance réciproque, n’allait pas jusqu’à l’ignorance, bien au contraire. Bakounine considérait, par exemple, que l’on pouvait ratifier la critique de l’économie politique contenue dans Le Capital comme une véritable critique scientifique (qu’il avait d’ailleurs commencé à traduire en russe). On peut d’ailleurs signaler que le premier grand vulgarisateur de l’ouvrage était un ami de Bakounine, le militant italien Carlo Cafiero, dont l’abrégé du Capital s’attira les éloges de Marx et d’Engels. Par la suite, les anarchistes ont pu s’approprier la critique marxienne de l’économie politique comme ils s’appropriaient d’autres connaissances scientifiques utiles pour la propagande et la lutte. Bien entendu, cela implique de considérer qu’il est possible de séparer chez Marx le bon grain de l’économie politique de l’ivraie de la politique et de la philosophie de l’histoire, ce qui n’a rien d’évident.

      Enfin, il importe de mentionner les rapprochements qui ont pu être tentés dans l’histoire entre marxisme et anarchisme. Maximilien Rubel, éditeur en français de Marx dans la Bibliothèque de la Pléiade, n’a pas hésité à voir en Marx un « théoricien de l’anarchisme », en insistant notamment sur les écrits suscités chez lui par la Commune de Paris. Daniel Guérin, écrivain et militant communiste libertaire, a pour sa part appelé d’une manière réitérée à une appropriation anarchiste du marxisme. Il faut toutefois souligner que ce furent là des cas assez isolés, au point que certains auteurs marxistes, qui parvenaient à des conclusions proches du communisme anarchiste, se sont toujours refusé à le reconnaître. Il faut enfin faire un sort particulier aux situationnistes qui, dans les années 1960, proposèrent un dépassement original de ce qu’ils considéraient comme les unilatéralités respectives du marxisme et de l’anarchisme.

      Fondamentalement, le débat théorique occasionné par le conflit entre anarchisme et marxisme a légué aux mouvements de lutte contre la domination un projet problématique : celui de l’auto-émancipation. Pour cette raison, il importe d’apercevoir que la pertinence des critiques anarchistes du marxisme dépasse largement le contexte immédiat dans lequel ces critiques ont été énoncées. Qu’il s’agisse d’identifier le sujet révolutionnaire, de comprendre les conditions sous lesquelles une société débarrassée de l’État est possible ou de parer aux reproductions de la domination au sein même de ces moyens d’émancipation que sont censées constituer les organisations, les problèmes pointés par ces critiques sont encore les nôtres.

      https://www.cairn.info/revue-actuel-marx-2013-2-page-173.htm

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 15. Des universaux métaphysiques à l’empire chosiste
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-15-des-universaux

    Toutefois, il faut se garder de tomber dans des généralisations hasardeuses et dans des condamnations précipitées : le verdict final sera d’autant plus incontestable qu’il n’aura pas été arraché par des procédés obliques, par des arguments fallacieux. D’avoir déclenché la dialectique du fait et du concept ne saurait en aucune manière être reproché à Marx : ce faisant, il illustrait simplement l’une des constantes de la méthodologie générale du savoir. Mais pour qu’il y ait dialectique, il (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc

    / #Volonté_Anarchiste

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 14. Du préfabriqué
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-14-du-prefabrique

    C’est bien d’un travailleur manuel qu’il s’agit : il y aurait lieu de s’interroger, sans conteste, sur les raisons de cette sacralisation de la manufacture. Quoi qu’il en soit, il est indéniable que le vrai marxisme est entièrement manualiste — d’où le fait qu’à l’époque et sur les territoires des révolutions techniques et scientifiques perpétuelles il apparaît de plus en plus antédiluvien. Il y a là une sorte d’ir­rationnel inassimilable ou, plus encore, d’arbitraire injustifié, pour ne (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc

    / #Volonté_Anarchiste

  • Les territoires des émeutes
    https://laviedesidees.fr/Les-territoires-des-emeutes

    Le haut niveau de #ségrégation urbaine constitue le meilleur prédicteur des violences. La différence la plus marquante entre 2023 et 2005 est l’entrée en scène des villes petites et moyennes, où les adolescents de cités d’habitat social s’identifient aux jeunes des banlieues de grandes métropoles.

    #Société #jeunesse #banlieue #révolte #urbanisme #gilets_jaunes
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20240412_emeutes.pdf

    • Conclusion

      Le retour sur les émeutes de #2005 a permis de mettre en évidence à la fois des continuités et des changements par rapport à celles de #2023. Si de façon générale, les communes les plus défavorisées ont de plus fortes probabilités de connaître des émeutes, c’est surtout la ségrégation des situations sociales les plus précaires et des immigrés dans des quartiers spécifiques (#QPV) qui apparaît comme un élément de contexte crucial. À profil social et urbain équivalent, avoir un QPV augmente de façon très significative la probabilité de connaître des émeutes. De plus, cette #ségrégation_sociale et ethnique s’accompagne d’une forte #ségrégation_scolaire dont nous avons pu mesurer également l’impact : plus elle est importante, plus les émeutes sont intenses et violentes.

      Les quartiers en question sont ceux directement concernés par la #politique_de_la_ville (QPV, #PNRU, #NPNRU) depuis plusieurs décennies. Si des changements sont indiscutables sur le plan de l’amélioration du cadre de vie des habitants et plus particulièrement des #conditions_de_logement, un grand nombre de ces quartiers continuent de concentrer une large part de la jeunesse populaire d’origine immigrée, celle la plus touchée par la #relégation, les #discriminations et les #violences_policières, et donc celle aussi la plus concernée par les émeutes. Si la #mixité_sociale et ethnique s’est sensiblement améliorée dans certains quartiers, d’autres demeurent des espaces de très forte #homogénéité_sociale et ethnique, que l’on retrouve dans les #écoles et les #collèges. Ceux où les interventions de l’#ANRU ont été moins intenses ont même vu le nombre de ménages pauvres augmenter. En Île-de-France, la quasi-totalité des communes qui avaient connu des émeutes en 2005, pourtant concernées par la politique de la ville, en ont connu également en 2023.

      Notre approche socio-territoriale met d’autant plus en évidence les limites d’une analyse au niveau national, que les émeutes de 2023 se sont diffusées dans un plus grand nombre de petites villes et villes moyennes auparavant moins touchées par ces événements. Cette plus grande diversité territoriale est frappante lorsque l’on compare les banlieues des très grandes métropoles, à commencer par les banlieues parisiennes, aux #petites_villes et #villes_moyennes. Le poids du #logement_social, de l’immigration, la suroccupation des logements, le niveau de #pauvreté, mais aussi la façon dont ces dimensions se rattachent aux #familles_monoparentales et nombreuses, renvoient à des réalités différentes. Pourtant, dans tous les cas, la ségrégation joue un rôle déterminant.

      Cette approche contextuelle ne suffit pas à expliquer l’ensemble des mécanismes sociaux à l’œuvre et ce travail devra être complété à la fois par des analyses plus fouillées et qualitatives, ciblées sur les réseaux sociaux, la police et les profils des protagonistes, mais aussi des études de cas renvoyant aux différentes configurations socio-territoriales. Des études qualitatives locales devraient permettre de mieux comprendre comment, dans les différents contextes, les dimensions sociales et ethno-raciales interagissent lors des émeutes. Cela permettrait par exemple de mieux saisir l’importance de la mémoire des émeutes dans les quartiers populaires des banlieues des grandes métropoles, sa transmission et le rôle des réseaux militants et associatifs. Dans le cas des petites villes et des villes moyennes, la comparaison avec le mouvement des Gilets jaunes apporte un éclairage particulièrement intéressant sur l’intersection et la différenciation des formes que peuvent prendre la colère sociale et le ressentiment.

      #émeutes #violence #villes #urban_matter #violences_urbaines #banlieues #ségrégation_urbaine #violences #statistiques #chiffres

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 13. Encore le prolétaire marxiste
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-13-encore-le-proletaire

    Qu’il me soit permis de rappeler quelques éléments du problème. Si l’on s’interroge sur le sens étymologique du mot prolétaire (pro et alare), on remonte à la conception romaine : prolétaire, celui qui ne possède rien d’autre — qui n’a donc pas autre chose à donner à la société — que ses enfants. Au cours des XVIIIe et XIXe siècles, cette notion vague évolue vers un concept plus moderne : class of wage-workers dependent for support on daily or casual employment. La notion primitive (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc

    / #Volonté_Anarchiste

  • Karl Marx ou la perversion du socialisme - 12. La main et l’intelligence
    https://www.partage-noir.fr/karl-marx-ou-la-perversion-du-socialisme-12-la-main-et-l

    Dans une curieuse « N. du Tr. », insérée dans l’édition française des Fondements, il est du reste décrété que Marx est enclin à distinguer deux sortes de plus-value, correspondant à deux phases différentes du capitalisme : 1° celle de la manufacture (qui n’emploie pas encore de machines...), 2° celle de la grande industrie (où le capital fixe l’emporte sur la force vivante du travail). Et d’y ajouter cette précision ambiguë : Il semble que les machines aident et allègent le travail des (...) #27_-_Karl_Marx_ou_la_perversion_du_socialisme_-_Alexandre_Marc

    / #Volonté_Anarchiste