person:cecil taylor

  • #024 Strange Fruits reçoit Giovanni di Domenico
    http://www.radiopanik.org/emissions/strange-fruits/-024-strange-fruits-recoit-giovanni-di-domenico-

    Giovanni di Domenico obtient son diplôme de « piano jazz » et développe une technique encyclopédique : rythme, harmonie et tonalité sont influencés par les traditions non-occidentales mais sont toute fois susceptibles aux Préludes de Debussy, aux Sequenzas de Luciano Berio, à « l’ambi-ideation » (où chaque main prend son chemin) de Bora Bergman avec les Soul Note Recordings, à la densité polysémantique de Cecil Taylor, à la transparence meurtrie de Paul Bley et bien sûr, aux expressions les plus radicales du bas fonds de la pop, invariablement réunis dans sa propre pratique.

    Il s’agit d’une distinction qu’il partage avec beaucoup de musiciens qu’il a rencontrés récemment, des artistes tout aussi différents que Chris Corsano, Jim O’Rourke, Akira Sakata, Tetuzi Akiyama, Keiji Haino, Eiko Ishibashi, Joe Talia, (...)

    http://www.radiopanik.org/media/sounds/strange-fruits/-024-strange-fruits-recoit-giovanni-di-domenico-_05868__1.mp3

  • Poétique politique, une histoire des chansons de luttes francophones.

    Pendant une semaine, Rocé explique sa recherche de plusieurs années sur l’histoire des musiques de luttes francophones, par les damnés elleux-mêmes, les colonisés, les ouvriers. Avec pas mal de femmes aussi dedans. Une redécouverte de slam et spoken word en français, depuis longtemps avant que le rap n’arrive de ce côté de l’océan. C’est un énorme projet ! Qui sort en septembre.

    Rocé, aux origines de la recherche
    http://nova.fr/podcast/nova-stories/roce-aux-origines-de-la-recherche

    (Je ne sais pas comment trouver les mp3 de l’émission comme sur radio france depuis les RSS ping @intempestive)

    Le rappeur Rocé livre les coulisses de son projet Par les damnés de la terre, qui va faire l’objet d’une compilation à la rentrée de septembre. Une recherche de plusieurs années, de rencontres de hasard en flair attentif, il est parti à l’origine du spoken word à la française, via les « chansons de luttes » depuis la fin des années 1960. On part dans le XIXe arrondissement de Paris, au Cameroun, au Burkina, à Haïti, à New York... « C’est important de réunir avec cohérence cette énergie du passé si présent dans nos quotidiens, ces voix qui résonnent aujourd’hui dans le rap et ailleurs, les voix des vaincus, des subalternes, des damnés de la terre », nous dit Rocé.

    Des morceaux qui servaient pour les luttes sociales ou anticoloniales. Une quête subjective, qui l’a mené de rencontres en rencontres. Selon lui, on trouve là une des sources d’un spoken word francophone, qui a nourri plus ou moins directement le slam et le hip-hop français. Comme une branche de l’arbre pas encore totalement découverte.

    2ème : L’esthétique et la politique
    http://nova.fr/podcast/nova-stories/lesthetique-et-la-politique

    Parti du free jazz, conseillé par un ami disquaire, mais passé aussi par un underground sans œillère et l’écoute de francs-tireurs multiples, le projet de Rocé se nourrit de multiples racines. Ce qui lui parle : le mélange d’une teneur politique, mais esthétique forte : funk, blues... « Je cherche les Last poets à la française », dit Rocé. « Le proto-rap, le rap avant le rap ». La playlist du jour va de Francis Bebey aux chants de luttes sociales de la Régie Renault à la fin des années 1960.

    3ème : Un nom en entraîne un autre
    http://nova.fr/podcast/nova-stories/un-nom-en-entraine-un-autre

    En partant d’une pochette de disque, Rocé trouve des noms de labels, puis des figures comme François Tusques, pièce maîtresse du free jazz français, et enfin des noms qui restent clandestins et compliqués à trouver. À l’écoute, notamment : « Déménagement », par Salah Sadaoui, « Le Mal du pays », par Manno Charlemagne...

    4ème : Dane Belany, l’aventure américaine
    http://nova.fr/podcast/nova-stories/dane-belany-laventure-americaine

    Le projet a permis à Rocé de retrouver des artistes oubliés. Dane Belany en faire partie. Chanteuse noire d’origine turque et sénégalaise, qui chantait dans les cabarets de Pigalle, elle côtoyait du beau monde parisien, avant de partir à New York. Là-bas elle a rencontré Thelonious Monk, Miles Davis, croisé James Baldwin. Une maladie lui fait perdre sa voix. Elle s’est mise à clamer des textes en français, de David Diop, Aimé Césaire... Ce qui donne un disque dédicacé à Frantz Fanon. Rocé l’a retrouvée...

    5ème : Un chapitre africain
    http://nova.fr/podcast/nova-stories/un-chapitre-africain

    On termine cette Nova Story par un zoom sur la partie africaine des recherches de Rocé. Qui commence par un morceau d’Abdoulaye Cissé, figure de la musique burkinabè, mandaté par le président Thomas Sankara, créateur à sa demande de deux groupes : Les chanteurs au poing levé et Les Colombes de la Révolution. Rocé retrouve Abdoulaye Cissé, qui l’aide aujourd’hui dans ses travaux.

    #musique #Rocé #Histoire #luttes_sociales #damnés_de_la_terre #colonisation #chanson #spoken_word #slam #radio #audio #Radio_Nova #historicisation

    et cc @intempestive @sinehebdo @mad_meg @odilon @touti

    • les urls sont des redirections du proxy google, il faut donc cliquer sur celles que tu as données pour les retrouver ! (ce qui permet à google d’enregistrer qui va écouter quoi avant de te laisser l’accès)

    • L’album arrive ! Premier extrait ! (et on peut le commander)
      https://horscadres.bandcamp.com/album/par-les-damn-e-s-de-la-terre

      Je fais partie de cette génération qui a vu naître le rap français, et avec lui l’énorme engouement pour cette musique des enfants de la deuxième et troisième génération d’immigrés. J’ai voulu creuser au-delà du rap, fouiller les artistes de la langue française qui véhiculent la poésie de l’urgence, la poésie à fleur de peau, engagée malgré elle parce que le contexte ne lui donne pas le choix. La poésie des « damné.e.s de la terre ». Dans l’ombre des chanteurs à texte médiatisés existent des femmes et des hommes devenus artistes juste le temps d’un disque.
      Inutile de chercher dans ce recueil le morceau « exotique et funky », extrait du folklore destiné à la métropole. Rythmes et textes sont vêtus de leur propre « blues » dur et sincère. La langue française réunit des régions du monde qui portent des fardeaux communs. Géopolitique et sentiments se mêlent. Les paroles des anciens résonnent jusque dans les oreilles des enfants d’aujourd’hui, ceux des diasporas. Un bon nombre des artistes présent.e.s dans ce recueil n’a pas eu la chance de croiser son public à l’époque, je pense que le contexte actuel des migrations et des questionnements identitaires donnera une résonance toute particulière à ces textes et à ces musiques.

      Deux historiens, Naïma Yahi et Amzat Boukari-Yabara, écrivent le livret du disque, ils décrivent les contextes de l’époque et des pays dont proviennent les morceaux.

      Ce projet, musical et de patrimoine, répond à un besoin : (re)donner la voix aux nouvelles générations qui évoluent en France avec une absence d’identification, un oubli de l’histoire de leurs parents dans le paysage politique et culturel qu’elles traversent en grandissant. Il écrit une autre histoire de la musique en français. A la jonction des luttes de libération des pays d’origines, des luttes ouvrières, des exils, il cristallise une époque où les luttes bâtissaient des fraternités, des affirmations, de la dignité, des liens entre les peuples opprimés et des convergences que l’Histoire des livres scolaires ne dit pas. Il est important à mes yeux de transmettre ces moments de tous les possibles afin d’en imprégner la morosité dans laquelle grandissent les nouvelles générations.

      Les enfants des diasporas et ceux des travailleur.euse.s ouvrier.ère.s ont besoin d’avoir des espaces de transmission de l’histoire de leurs parents. Ces parents qui ont sacrifié des années dans des luttes ou dans l’exil et qui ont choisi pour leurs enfants une intégration dans la discrétion et pointée vers un futur sans le poids d’une lourde mémoire. Le passé ne se transmet pas facilement lorsqu’il est emprunt de tabous et qu’on pense ses enfants libres, sauvés, car nés en France. Mais les combats de nos aînés, à la vue des luttes actuelles, sont précieux et utiles. Le présent se débrouille mieux lorsqu’il a de la mémoire.

      Ce disque est donc un constat, un bout de mémoire qui montre que le champ des possibles était ouvert un court moment, avant d’être refermé, nous plongeant dans l’individualisme, le court terme, l’absence de projets de société. L’absence des ces histoires dans l’Histoire nous prive de l’espoir, des notions de fraternité, de résistance, de modes d’emplois d’autodéfense. L’époque actuelle nous impose ses fictions dystopiques, des histoires d’échecs et d’impasses.

      Le sillon fossilisé dans le disque m’a permis de découvrir des artistes et intellectuels qui ont transmis des solutions multiples. On connaît trop peu le personnage de Frantz Fanon, ce Martiniquais qui a épousé la cause algérienne, on connaît trop peu le grand Franklin Boukaka, artiste congolais qui rend hommage dans une chanson à Mehdi Ben Barka, homme politique marocain. Il a existé un soutien entre étudiants guadeloupéens pour l’indépendance de la Guadeloupe et un militant corse du FLNC qui a décidé d’héberger sur son label leur musique.
      Nous pouvons être tous d’accord, ça ne sert à rien s’il n’y a pas de projet commun. Je ne sais pas comment sera demain, ce que je sais c’est qu’avec la mémoire nous pouvons additionner la force et l’union des peuples d’hier aux diasporas et subalternes d’aujourd’hui. Nous placer au centre de l’histoire que l’on nous conte afin de rompre avec la logique impérialiste.


      « Voir ce qui n’avait pas lieu d’être vu, faire entendre comme discours ce qui n’était entendu que comme un bruit. » Jacques Rancière

      Rocé

    • Yes ! et vendredi 2 novembre, à l’occasion de la sortie du projet tant attendu, grand entretien avec Rocé sur www.jefklak.org ! Le livret, le projet et les sons/chansons sont plus qu’indispensables !

    • Pour celles et ceux qui ont aimé Par les damné·es de la terre collecté par monsieur @Roce, on pourra continuer le chemin avec

      MOBILISATION GENERALE/ Protest and Spirit Jazz from France 1970-1976

      Commande & écoute ici : http://www.bornbadrecords.net/releases/bb057-va-mobilisation-generale-protest-and-spirit-jazz-from-france-1

      1968. France société anonyme. L’incendie est déclaré et tout l’immeuble est entrain de s’effondrer. On ne sauvera rien. Des décombres du vieux monde les enfants de Marx et de Coca Cola surgissent pour arracher le bleu et le blanc au drapeau tricolore. Le fond de l’air est rouge et la musique n’adoucira plus les mœurs. Le chantier peut commencer.

      Si les Stones, les Who, les Kinks ou le MC5 composent la bande son de la revolution à coups de singles Molotov, ce sont des noirs américains qui ont fait sauter les digues durant les sixties. Contre le jazz à papa et la tradition occidentale Ornette Coleman, Cecil Taylor, Eric Dolphy, Albert Ayler ou Archie Shepp libèrent alors la note, explosent les formats, se lancent dans des improvisations furieuses qui redessinent un territoire sans frontières, aussi spirituel que politique. Avec le free jazz, le saxo devient lui aussi une machine à détruire l’ordre établi.

      L’Art Ensemble of Chicago qui atterrit à Paris en 1969 au Théâtre du Vieux Colombier allume une nouvelle mèche. Le quintette intègre au linup traditionnel une multiplicité de « petits instruments » dénichés un peu partout (de la sonnette de bicyclette aux wind chimes en passant par le steel drum, le djimbe ou le vibraphone : rien ne leur échappe) dont ils usent en fonction de leur inspiration. Sur scène le groupe détonne en arborant boubous et peintures de guerre afin de célébrer les pouvoirs d’une musique libre et hypnotique, en connexion directe avec ses racines africaines. La rencontre avec le label Saravah (fondé en 1965 par Pierre Barouh), alors aux avant postes d’une world music qui ne porte pas encore de nom, est évidente. L’album Comme à la radio de Brigitte Fontaine enregistré en 1970 à l’issue d’une série de concerts donnés au Théâtre du Vieux Colombier scelle l’union de cette héritière d’une chanson française, poétique et engagée (Magny, Ferré, Barbara) avec le jazz voodoo de l’Art Ensemble of Chicago et la tradition arabe perpétuée par son compagnon Areski Belkacem.

      Un ovni vient de se poser sur les platines des ados français qui découvrent la culture underground via Actuel, Libération, Charlie Hebdo, Rock’n Folk et une free press en pleine ébullition. Une jeunesse qui est de tous les combats : aux cotés des paysans sur le plateau du Larzac, des ouvriers de l’usine Lip, contre le nucléaire à Creys-Malville, la guerre du Vietnam, la peine de mort, les discriminations subies par les femmes, les homosexuels et les immigrés. Faire de la musique quand on a 20 ans au début des années 70, c’est faire de la politique. On ne prend pas un micro pour devenir une rock star mais pour faire avancer ses idées. Tandis que le prix du baril s’enflamme et que Pompidou bétonne à tout va en développant les grands ensembles et en « adaptant la ville à l’automobile », on prend la route pour se réfugier à la campagne. Des communautés qui se forment aux quatre coins de l’hexagone naissent des groupes (ou plutôt des collectifs) à géométrie variable qui mélangent allégrement musique, happening théâtral et agit prop sous une bonne dose d’acide. Le grand n’importe quoi est souvent de mise (le prog rock est la tarte à la crème de l’époque), mais ceux qui empruntent le sentier dessiné par le spiritual jazz planent vers d’autres cieux. La véhémence (voir la grandiloquence) des propos est alors portée et transcendée par la finesse et l’inspiration du jeu. La France de Claude François n’a jamais entendu ça. À la fois spatiaux, pastoraux et tribaux, les morceaux réunis ici font la jonction parfaite entre un certain héritage psychédélique, le space jazz de Sun Ra et l’Afro Beat qui se met alors en place à Lagos avec Fela, ils sont autant des incantations (l’usage du spoken word est récurrent), des cris de guerre, des poèmes que des tracts.

      1978. Giscard est à la barre. Le punk et la disco décapitent les derniers hippies. Si le sang bout toujours, il est déjà trop tard. La guerre est finie, elle a été perdue sans que personne ne s’en aperçoive, et l’on a beau se battre encore contre des moulins à vent, faire parfois parler la poudre et le plomb dans des luttes sans issues (du rêve au cauchemar il n’y a qu’un pas), on sait que la parenthèse enchantée vient de se refermer, que les lendemains qui chantent sont désormais derrière nous et qu’on ne laissera que quelques disques à nos enfants. Le spectre d’un single prophétique peut alors ressurgir des speakers. Brigitte Fontaine y interroge Areski : « Hey mais je pense à un truc, on ne va pas mourir dans une minute ? »

    • Très bonne interview : http://dialna.fr/interview-par-les-damne-e-s-de-la-terre-lhommage-aux-luttes-du-passe-de-roce

      Évocation de #archivage_militant (mais au final tout le projet en est question)

      Cet album est aussi possible car ces luttes ont été gravées sur vinyles, ou sur bandes. D’après toi, que garderons-nous de nos luttes actuelles ?
      Rocé : Je pense que c’est un peu le problème de notre époque. Tu peux le voir avec notre consommation de la musique, des photos, etc .. Aujourd’hui tu changes de téléphone, tu perds tes photos. Avant tu avais moins ce problème. On a beaucoup plus de choses aujourd’hui, mais on les transporte beaucoup moins longtemps avec nous. Je ne sais pas ce qu’il advient des albums photos de famille, plus personne n’en a. C’est tout con, mais on fait une confiance aveugle en la technologie mais l’obsolescence fait qu’on peut tout perdre du jour au lendemain. Il y a des morceaux qui cartonnent grâce à des plateformes de téléchargement, mais tout ne tient qu’à ces plateformes. J’ai réédité mon premier album qui date de 2001. Le graphiste de l’époque avait gardé un disque dur avec les morceaux, la pochette, etc. Le disque dur ne démarrait pas quand on l’a branché. On a dû reprendre la pochette vinyle et allait la faire une reproduction de la photo. Encore une fois, le vinyle a sauvé l’affaire, c’est du sillon gravé. Le numérique, c’est limité. Que va-t-il advenir de nos luttes d’aujourd’hui ? On va y arriver mais ça va être moins simple.

  • http://www.desordre.net/musique/taylor.mp3

    La mort, tu fais vraiment chier.

    Je me souviens d’un concert de L’Art Ensemble avec Cecil Taylor au piano, c’était free tendande free ascendant free (comme avait écrit cette fois ou une autre Francis Marmande, une émeute, une vraie, des strapontins qui claquaient, c’était extraordinaire et après une heure de tempête, ils s’étaient retrouvés sur une phrase mercuriale de trompette, nous sommes toutes et tous sortis de là à la fois essorés et euphoriques.

    Je me souviens que j’ai longtemps eu un garagiste pas spécialement compétent, mais qui écoutait Cecil Taylor dans son atelier et auquel je restais donc fidèle, comment ne pas avoir confiance en un garagiste qui écoutait Cecil Taylor, fût-il incompétent ?

    Et il fallait que ce soit mon amie Sophie qui me l’apprenne, une ombre passant sur son visage.

  • Rêve des capsules olfactives
    Des souvenirs de ses parents
    À sa propre naissance

    Il n’est pas sept heures
    Et je suis déjà en train
    D’écrire ( Anguilles et Oiseau bleu )

    Peu après sept heures
    Je reçois le courriel d’une jeune mère
    Et qui reprend le travail. Ému

    http://www.desordre.net/musique/taylor.mp3

    Ma voiture est malade
    Mon garagiste qui écoutait Cecil Taylor
    A revendu son affaire, puis-je avoir confiance ?

    Je maigris encore
    Je vais finir par apercevoir
    Mes testicules !

    Retour de vacances de ma collègue F.
    Troublée, elle a besoin de parler, à moi donc
    Ma reconversion professionnelle dans le champ psy

    C’est lundi dans le monde
    Est-ce que les ouvriers moldaves
    Sont revenus ? Un jour aller en Moldavie

    J’ai été actionnaire une fois dans ma vie
    Pendant une heure, le temps de vendre
    Toutes les actions de mon employeur (intéressement)

    L’intéressement
    Ne m’intéresse pas
    Je ne suis pas intéressé

    Le garagiste m’explique une panne
    Je pourrais ne pas avoir de voiture vendredi
    Pour aller à Autun écouter l’Anguison Quartet

    Le vieux garagiste
    Qui écoutait Cecil Taylor
    Aurait compris un tel enjeu

    On nous parle d’une cellule terroriste à Ripoll
    On me dit Ripoll et je pense au portail de son monastère
    Et je voudrais continuer de penser à Ripoll de cette manière

    Je fais semblant
    De ne pas penser à elle tout le temps
    De temps en temps cela fonctionne

    Et de temps en temps
    Je reçois un signe d’elle
    Pas toujours volontaire

    Quelqu’un a peint un cercle ciblé
    Sur le trottoir, il est inscrit Wish you were here
    Là-même où nous nous sommes embrassés la première fois

    Je vais prendre des nouvelles de mon automobile
    J’adore l’odeur délétère de l’atelier (poussière et peinture)
    Mais je plains les jeunes mécaniciens qui y travaillent

    J’ai aimé, jeune, puis détesté
    Plus vieux, l’odeur délétère
    De l’hyposulfite de sodium

    Sans parler
    De L’hydroquinone
    Oxydée

    Dîner
    Avec
    Émile

    Dîner,
    En tête-à- tête
    Avec Émile

    Diner en tête-à-tête
    Avec Émile
    Au restaurant

    Diner en tête-à-tête
    Avec Émile
    Au restaurant japonais

    À la demande d’Émile
    Dîner en tête-à-tête
    Au restaurant japonais

    À l’initiative d’Émile
    Dîner en tête-à-tête au restaurant japonais
    Émile s’était habillé élégamment pour moi !

    Je raccompagne Émile
    Nous passons par des rues inconnues
    Belle lumière, beauté d’Émile, grandi

    Coup de téléphone à B.
    Coup de téléphone à A.
    Coup de téléphone à C.

    L’échange avec B.
    Me catapulte
    En Provence

    Pas
    Celui
    Avec A.

    Avec C.
    Il est question
    De faire passer un piano par la fenêtre

    Attentat de Barcelone :
    La police a abattu Abouyaaqoub,
    Le conducteur de la fourgonnette

    Commentaires élogieux pour la police
    Au bas de cet article
    Je m’interroge à propos du verbe abattre

    On abat un arbre
    On abat une bête
    Abat-on un homme ?

    Tous les soirs je me demande bien
    De quoi sera fait le prochain paragraphe
    Des Anguilles les mains mouillées ?

    #mon_oiseau_bleu

  • Rêve d’une audition pour Niels Arelstrup
    Je suis retenu pour mes grands talents
    De serveur-danseur équilibriste

    Le matin, après l’orage
    Trois petites balles de coton
    S’effilochent sur l’ubac

    Au marché sur la place
    Un vieil homme, sa canule,
    Sa bonbonne, mon futur ?

    L’insuffisance respiratoire, sa peur
    Est ce qui me fait nager, nager encore
    Et nager plus longtemps et plus vite

    Les trous de lumière
    Entre les platanes
    Sur les étals du marché

    Tel commerçant surpris
    Que je connaisse l’endroit
    Où paissent ses chèvres

    http://www.desordre.net/musique/zappa_illinois_ennema_bandit.mp3

    Les truites du lac de Villefort
    Ecoutent Frank Zappa
    Dans leurs derniers moments

    Je ne dirais pas que cela leur donne
    Un goût particulier, tout de même pas
    Mais cela rend chaleureux l’échange

    http://www.desordre.net/musique/taylor.mp3

    Mes repères dans l’existence
    Le pisciculteur écoute Zappa
    Mon garagiste Cecil Taylor

    Derrière le comptoir de la boucherie
    Des sachets de chips délicieuses
    Et une photographie d’un ex-Président en visite

    Spaghetti à la truite fumée
    Bleu de chèvre de Lozère
    Reines-Claudes

    Tout est tellement calme
    Nous sommes tous heureux
    Manque une étreinte

    Zoé cherche de la lecture
    Dans les rayonnages de châtaignier
    Parmi mes livres d’adolescent

    Cela faisait presque quarante ans
    Que ses livres attendaient une lectrice
    Sur les planches du vieux châtaignier

    Petit à petit l’apprenti poète
    Serre ses écritures
    Dans un recueil sans fin (connue)

    Je relis à voix haute la version courte
    D’ Une Fuite en Égypte
    En face du Mont-Lozère

    Puis je pars avec Clément, Juliette,
    Sarah et Émile marcher sur le Mont-Lozère
    Du Mas de la Barque au Pic Cassini

    Au Belvédère des Bouzèdes, sur le sentier
    Je retrouve, perdu l’année dernière
    L’œilleton de mon appareil-photo

    Comme un con je suis parti
    Avec de nouvelles chaussures
    Pas encore cassées, ampoules (quelles !)

    Au pas de l’aigle toujours cette pensée
    Pour mon ami Stéphane Pagano
    Au loin, parmi les sucs, en Ardèche

    Au pic Cassini, mes pieds brûlent
    Mais je suis entouré des miens
    Et nous dégustons les spéculoos locaux

    Du pic Cassini, je pointe la source du Tarn
    L’entrée des gorges, les contreforts, le causse
    Et le Mont Gerbier de Jonc

    Du pic Cassini on voit de l’eau partir
    Vers la Garonne, le Tarn, et on distingue
    Les sources de la Loire en Ardèche

    Les enfants me sèment dans la descente
    Les pieds en feu, je me sens vraiment bien
    En marchant à mon train de (vieux) sénateur

    On rit beaucoup
    Et je bois beaucoup
    Au dîner !

    Tant de souvenirs
    Heureux à cette table
    À cette heure du jour !

    Pieds, dos et genoux
    En capilotade, mais quel bonheur !
    La pensée d’elle tenue à distance

    Je me couche
    Sourire aux lèvres
    Verge flasque

    #mon_oiseau_bleu

  • J – 58

    J. Episode N°14

    J’y vois presque un désintérêt de l’Autre. Avec un grand A. Je m’explique. Soit on sait qui est Jessica Marchant, on l’a déjà écoutée en concert ou même sur un disque du répertoire contemporain, en formation suffisamment réduite pour remarquer quand même qu’en arrière-plan ce n’est pas exactement une manchote qui pelote la grand-mère, et alors on peut faire des kilomètres pour aller voir et écouter cette femme de taille moyenne, aux cheveux mi-longs, aux yeux noisettes, jouer comme personne, cum arco ou pizzicato — notez comme je vous gâte avec ces doublements de z italiques en Garamond ! — de cet instrument gigantesque, soit on ne sait rien de tout cela, on peut tout ignorer de la contrebasse ou même du répertoire contemporain, de ses plus grands compositeurs, et alors on ne risque pas de tomber sur je ne sais quel lien vers je ne sais quelle page de site internet avec quelques ressources à propos de Jessica, de son jeu, de sa discographie et des salles de concert qu’elle fréquente assidument, lieux improbables pour les profanes, mais dans lesquelles on croise toujours les mêmes quinquagénaires un peu bedonnants, trop jeunes pour avoir eu l’occasion d’écouter Cecil Taylor avec l’Art Ensemble of Chicago, mais déjà trop vieux pour subir sans protester les murailles de son d’un Stephen O’Malley, beaucoup d’hommes, quinquagénaires donc, nettement moins de femmes, mais alors avec des allures un peu caricaturales de Carla Bley, l’organiste — Carla is composing and she thinks she is Beethoven — bref de psychanalystes en goguette, allez n’importe quel soir aux Instants Chavirés à Montreuil, en sortant des bureaux de plus en plus nombreux autour du désordre sympathique de cette salle alternative, mais serait-ce à Vancouver, en Colombie britannique, ou même Hobart en Tasmanie, que Jessica aurait choisi d’aller promener sa Grand-Mère, ce serait dans les mêmes salles exiguës à la sonorisation parfois aléatoire, et devant le même parterre de quinquagénaires mâles avec des allures d’architectes déjà empâtés par l’âge, au bras desquels on trouverait invariablement des jeunes femmes, plus jeunes d’au moins quinze ans, parfois même enceintes, et du coup Stephen O’Malley ou Otomo Yoshihide et leur infernal volume sont-ce de si bonnes idées que cela ? ces hommes feignent-ils d’ignorer que leurs corps n’ont plus vingt-cinq ans, que les hommes c’est comme les poires ça commence à pourrir par la queue, et qu’ils auront 65 ans quand cette nouvelle progéniture — nul doute qu’une autre jeune femme, plus très jeune, s’occupe des premiers chapitres de la progéniture de ce sémillant architecte quinquagénaire — entrera dans les belles turbulences de l’adolescence, je ne vous fais pas un dessin, vous voyez très bien la salle de concert, les quinquagénaires aux allures d’intellectuels en question, lunette en écaille pour signifier qu’on a beaucoup lu, et tout cela, quelque chose me dit que Jessica s’en moque éperdument, elle se moque comme d’une guigne de la moquette usée jusqu’à la corde dans laquelle elle plante Mère-Grand par la pointe et lui inflige toutes sortes de traitements, pas tous très corrects, pourtant tous prescrits par des partitions dont le déchiffrement n’est pas donné à l’homme de la rue, même quinquagénaire, même architecte, même intellectuel, faisant appel à de lointaines leçons de musique du temps où les enseignants de musique ne bradaient pas nécessairement Pierre Boulez pour je ne sais quel chanteur de variétés françaises, elle se moque comme de son premier sous-tif, son expression, pas la mienne, j’adorais cette expression de Jessica, que le public soit là, qu’il soit composé de quinquagénaires architectes ou pas, avec à leur bras leur dernière jeunette, ou pas, elle se moque même bien de savoir combien ce soir-là sera payé, et même s’il sera payé, ce n’est certainement pas à ses coupons d’intermittence qu’elle pense quand elle monte sur scène, relève Grand-Mère de sa position couchée sur le côté, plante la pointe dans le bout de moquette rase qu’elle a demandé, accorde en un clin d’œil les quatre cordes épaisses et légèrement tendues, Jessica elle serait du genre à jouer légèrement détendu, hypotendu, non que son style de jeu manque de nerf, mais parce que détendues, légèrement, d’un huitième de ton, de toute façon à la contrebasse personne ne fait la différence et elle corrige au manche par des doigtés autrement fautifs, elle peut aller chercher des effets sourds, plus longs, qui ne manquent pas de tenailler l’auditoire assez directement au ventre, pose son ventre, petit, mais ventre, contre les flancs de Grand-Mère et commence rapidement à lui faire subir les derniers outrages, Jessica est alors possédée, ses cuisses enserrant Grand-Mère, peloter Grand-Mère, oui, peut-être, Jessica pratique plutôt le corps-à-corps, la position de Jessica autour de sa contrebasse est aussi peu orthodoxe que la position de départ au service de John Mac Enroe, c’est comme si la contrebasse tenait en équilibre serrée entre ses deux cuisses, on a dû lui dire que ce n’était pas comme ça qu’on fait, pensez si elle a écouté, pensez si Mac Enroe a écouté son professeur de tennis, et vous imaginez bien que l’écoutant en concert, la photographiant dans de tels états, j’avais parfois le sentiment de la violer, violant Grand-Mère. Et donc vous pensez que dans de pareilles conditions s’emmerder, Jessica parle et jure comme un charretier, un charretier polonais précise-t-elle eu égard à ses origines de l’Est, à tenir à jour je ne sais quelle présence sur internet, oui pensez comme elle s’en moque. Comme du public, de son premier sous tif, de la moquette rase, des architectes quinquagénaires dans le public. De tout. Autrui.

    Elle joue. Point.

    #qui_ca

  • J – 102 : Telle est l’incroyable grandeur de la scène des Instants chavirés . Pendant les trois prochaines semaines la programmation est compacte et sans fissures et cela commence donc ce soir avec le duo de Fred Van Rohe (piano — le Bösendorfer des Instants qui en aura vu de toutes les couleurs quand on y pense) et Roger Turner (batterie non limitative).

    Fred Van Rohe est un très vieux monsieur, il a l’âge de mon père, qui se hisse avec peine mais envie sur la scène via le petit escalier des Instants, mais une fois calé derrière le piano, il est comme un gamin et c’est tout juste s’il attend que son jeune, plus jeune que lui, batteur s’installer derrière ses fûts, Roger Turner est un type de grande taille qui joue sur une toute petite batterie, ses genoux en enserrant la caisse claire ne cessent de butter contre les limites de la grosse caisse, un adulte qui tenterait à tout prix d’enfourcher le vélo de son enfant, donc à peine assis Fred Van Rohe démarre d’abord piano, pour rapidement entrer dans le vif du sujet, une sorte de Cecil Taylor mâtiné de Steve Reich.

    Ma surprise vient surtout du jeu de Roger Turner qui est à la fois arythmique (quand on exclue quelques drives de cymbale dont on peut se demander s’ils ne servent pas surtout, mais pas seulement, à patienter pendant qu’il farfouille dans un arsenal pléthorique d’objets contondants et de cymbales à main et autres petits objets au rapport bruit/taille avantageux) et pas toujours très percussif, Roger Turner promène et fait survoler baguettes, tiges en acier et balais sur un set selon des gestes qui sont dû lui demander quelques journées d’entraînement pour parvenir à pareillement les canaliser, les repères rythmiques sont presque inexistants et on assiste à une inversion des rôles quasiment entre le piano qui sert de boussole et la batterie qui brode.

    Je repense à un très lointain concert de Paul Bley et John Surman, Gary Peacock à la contrebasse et donc Toni Oxley à la batterie, l’installation du set de ce dernier ayant pris trois bons quarts d’heures, cela commençait à siffler un peu dans la salle mais nous avons tous fini par comprendre que cette installation avait tout son sens parce qu’elle ne cessait d’anticiper les ricochets entre cymbales et timbales

    Les deux musiciens ne semblent pas beaucoup échanger, pas même quelques regards et il est étonnant de les entendre se retrouver sans mal pour des fins cut de morceaux au long cours. C’est une musique passionnante qui est fabriquée littéralement sous nos oreilles, entièrement improvisée selon des grammaires acquises depuis longtemps, plus jamais révisées, tenues pour correctes et non fautives depuis des lustres, ce qu’ils jouent-là n’aurait rien à voir s’ils l’avaient joué une heure plus tôt ou une heure plus tard, en cela c’est une matière brute que l’on débite à intervalles données laissant à voir des tranches sans cesse changeantes, comme le sont les sculptures de Ulrich Rückheim.

    Et l’un des grands bonheurs des Instants c’est de pouvoir être le nez sur ce que font les musiciens ou encore d’engager librement la conversation avec eux à la fin du concert, ne serait-ce que pour les remercier de certains de ces voyages invraisemblables dans lesquels ils nous entraînent.

    Fred Van Rohe :
    http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/sons/van_rohe_gratkowski_oxley.mp3

    Roger Turner :
    http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/sons/turner_yoshihide.mp3

    Les deux, ensemble :
    http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/videos/049.htm

    #qui_ca

  • Trois labels célèbrent Joëlle Léandre
    http://www.citizenjazz.com/Trois-labels-celebrent-Joelle-Leandre.html

    Il fallait au moins ça !
    Trois labels majeurs, trois maisons de disques françaises, Fou Records, Nato et RogueArt, s’associent pour fêter les 40 ans de carrière de #Joëlle_Léandre en organisant un concert
    le 28 novembre à l’Eglise Saint-Eustache à Paris, en présence de la contrebassiste.
    Elle n’y sera pas seule.
    Le violoniste, altiste américain Mat Maneri (partenaire de Cecil Taylor, Paul Motian, Marilyn Crispell, Craig Taborn, Barre Phillips…), la chanteuse écossaise Maggie Nicols (John Stevens, Johnny Dyani, Keith Tippett, Phil Minton, Robert Wyatt, Dudu Pukwana…) et la tromboniste française Christiane Bopp (Kent Carter, Dominique Pifarély, Hélène Breschand …), qui figure dans le tentet de Joëlle Léandre, la rejoindront.

    Cette soirée sera l’occasion de revenir sur ce parcours émeraude.

    Les places peuvent être pré-achetées en suivant ces liens :
    http://web.roguart.com/shop/album/id/109 (tarif plein à 12 euros)
    http://web.roguart.com/shop/album/id/110 (tarif réduit à 8 euros : étudiants, chômeurs, RSA)

    #whouah #ça_va_être_top !