person:emmanuel sanséau

  • Bure : le silence est d’or
    Faire accepter la poubelle du nucléaire à coup d’argent public

    Par Emmanuel Sanséau

    http://jefklak.org/bure-le-silence-est-dor

    Dans la Meuse, où l’État compte cacher les déchets radioactifs les plus dangereux de France, des sommes colossales d’argent public abreuvent une campagne dépeuplée. Les euros coulent à flots, non pas pour les écoles, qui ferment, ni pour les hôpitaux, qui périclitent. Mais des millions de subventions pour les clubs sportifs, les associations de chasseurs ou les salles des fêtes… Ainsi espère-t-on enterrer l’opposition des riverain·es à Cigéo, projet vaseux d’enfouissement de la question du nucléaire. Or l’achat des consciences n’est pas la seule arme pour réprimer celles et ceux qui résistent : depuis septembre 2016, une pluie de procès s’abat sur les opposant·es à Cigéo. Mardi 12 juin 2018, ce sont encore cinq personnes qui passent au tribunal, et le 26 juin, ce sera le délibéré pour treize personnes arrêtées en mars et jugées le 23 mai dernier. Alors que, le 16 juin prochain, se prépare une journée d’action à Bar-Le-Duc (Meuse), Jef Klak décortique les plus que douteuses méthodes employées par l’État et le secteur du nucléaire pour imposer la fuite en avant énergétique.

  • Et vogue la galère

    Reportage sur les quais précaires de Saint-Nazaire

    Par Emmanuel Sanséau

    http://jefklak.org/?p=5488

    Ce fut le premier déplacement en région du président de la start-up nation : Saint-Nazaire et ses chantiers navals. Emmanuel Macron daignera même les sauver d’une cession au groupe italien Fincantieri par une « nationalisation ». C’est que le bastion ouvrier était « Macron compatible » avant l’heure. En vingt ans de lourdes restructurations dans la gestion de leur main-d’œuvre, les chantiers ont fait figure de laboratoire de la précarisation.

  • Les Hommes du progrès
    par Emmanuel Sanséau,
    paru dans CQFD n°150 (janvier 2017).
    http://cqfd-journal.org/Les-Hommes-du-progres

    C’est que le mariage du « Parti du peuple » et des classes privilégiées tient de la conversion du premier aux évangiles du libre marché et du « capitalisme éclairé. » Dès le tournant des années 1970, une nouvelle génération de démocrates se prenait de passion pour le « travail créatif » et les quêtes existentielles. « Les gens éclairés ne se souciaient plus de salaire minimum et de droits des travailleurs. Mais les sottises sur l’authenticité et l’accomplissement personnel – le topo des “jeunes existentialistes” – cela ferait gagner des élections », écrit Thomas Frank [3]. Voilà que le travailleur à la chaîne, aliéné et peu sophistiqué, basculait de base électorale à force d’opposition au changement. Les Nouveaux Démocrates ont ainsi fait du renoncement une philosophie politique – nul ne peut s’opposer à « l’économie post-industrielle » – pour devenir le parti de la « classe du savoir », des « travailleurs connectés », des « innovateurs disruptifs »…

    #Boston, #Silicon_Valley, #CQFD, #Massachusetts, #GAFA

  • L’Empire du moindre mal
    par Emmanuel Sanséau
    paru dans CQFD n°148 (novembre 2016)
    http://cqfd-journal.org/L-Empire-du-moindre-mal

    « La présidentielle ? Pfffff... » Amber est au volant de son taxi. « Je crois que tout le monde est fatigué des Clinton. Bill était pas mal comme président mais Hillary a l’air de convoiter le pouvoir depuis des décennies. On dirait qu’elle est prête à tout pour se faire élire. Alors entre elle et Trump… C’est assez déprimant, vous savez. Dans un pays aussi grand que le nôtre, on s’attendait à avoir le choix. » D’après le magazine Bloomberg, à la mi-octobre, la machine électorale d’Hillary Clinton avait levé 911 millions de dollars (830 millions d’euros), soit plus du double de Donald Trump. Pour ses six derniers mois de campagne, la démocrate ne s’est déplacée que deux fois dans le Massachusetts. Et uniquement pour des levées de fonds. Après tout, abstention ou pas, on est en terrain conquis, ici.

    #Election_US #Fall_River #Massachusetts #Sanseau #election

    • L’État du Massachusetts compte parmi les plus prospères des États-Unis. D’après le Bureau des statistiques, pourtant, 23% des habitants de Fall River vivent sous le seuil officiel de pauvreté, soit près du double de la moyenne américaine. Le taux de chômage y oscillait entre 6 et 9% cette année. Le salaire médian y est deux fois inférieur à celui du Massachusetts. L’épidémie d’héroïne qui ravage le pays y a fait 44 morts l’année dernière.

      Chez le prêteur sur gages de Main Street, trois photographies du vieux Fall River. Les années 1930 et 1945. On peut y voir les rues débordant de passants, les routes emplies de voitures, les enseignes crépitantes des magasins. La ville comptait une centaine de filatures de coton à la fin du XIXe siècle. C’était alors l’un des principaux centres manufacturiers des États-Unis. « Les filatures ont commencé à déserter au sud après la crise de 29, dit Marc, un journaliste au canard local. Puis les années 1970 ont achevé son déclin. Les emplois partaient en Chine, au Mexique, au Bangladesh. L’Alena [accord de libre-échange nord-américain ratifié par Bill Clinton, ndlr] a été un désastre, surtout pour les ouvriers à bas salaires. » Fall River est tout de même restée fidèle aux démocrates. En 70 ans, pas un seul maire républicain n’y a été élu.

      La même hégémonie démocrate régente le Massachusetts. Pour ses autres villes ouvrières comme Lowell et Worcester, c’est là un choix malheureux. Façonné par la crise de 29 et l’appui des syndicats, le parti du New Deal s’est éloigné de son électorat ouvrier au tournant des années 1970, lui préférant la nouvelle classe moyenne de « l’économie du savoir. » À l’État-providence, les Nouveaux Démocrates ont substitué la gouvernance des « experts » et l’idéologie de la « méritocratie » qui prescrit davantage d’éducation pour tous les maux. C’était l’avènement du « ni de gauche ni de droite » et des sacrifices inévitables de « l’économie globalisée. » La mue néolibérale de Bill Clinton consista à tirer le coup d’envoi de la fuite des emplois non-qualifiés vers le Mexique (avec l’Alena), à durcir la répression pénale et à tailler dans l’assistance publique.