• Lecture d’un extrait du livre « Les sables » de Basile Galais, paru chez Actes Sud, en 2022.

    http://liminaire.fr/radio-marelle/article/les-sables-de-basile-galais

    Dans une ville portuaire à l’atmosphère d’intranquillité, déstabilisante et déroutante, le paysage donne le vertige autant qu’il inquiète avec son climat mystérieux tout en clair-obscur. L’information sur les réseaux de la mort du Guide désole la foule éplorée des habitants, très vite démentie, transformée en fake news qui tourne en boucle sur les chaînes d’informations en continu. Chaque personnage livre à distance sa version imparfaite des faits, parcellaire. Leurs relations se tissent au fil des chapitres « dans des couches de réalités indistinctes. » Sans doute est-ce dans cette instabilité constante que se construit cette histoire de disparition et d’oubli, ce roman sur le temps et la mémoire, insaisissable et mouvant comme les sables. (...) #Radio_Marelle / #Écriture, #Langage, #Livre, #Lecture, #Art, #En_lisant_en_écrivant, #Podcast, #Voix, #Littérature, #Vérité, #Réel, #FakeNews (...)

    http://liminaire.fr/IMG/mp4/en_lisant_les_sables_basile_galais.mp4

    https://www.actes-sud.fr/catalogue/litterature/les-sables

  • Usbek & Rica - « Quelque part, on s’amuse plus dans une attraction Disney que dans la vraie nature »
    https://usbeketrica.com/fr/article/quelque-part-on-s-amuse-plus-dans-une-attraction-disney-que-dans-la-vra

    L’idée d’utiliser l’univers Disney pour évoquer le rapport à l’authenticité est ancienne. Umberto Eco, dans ses chroniques rassemblées dans La guerre du faux, s’est rendu dans les années 1970 aux États-Unis, pays du « faux » par excellence, pour y observer le phénomène. Il ne choisit que les destinations les plus fake possibles : Las Vegas, les villes de pionniers de l’Ouest reconstituées de toutes pièces et, clou du circuit, le premier parc d’attractions de Walt Disney ouvert dans les années 1950 en Californie. Eco y fait une découverte majeure : l’univers Disney n’imite pas le réel en moins bien, contrairement à une reconstitution historique. Il assume le caractère fantaisiste et, quelque part, surpasse l’original : on s’amuse plus dans une attraction Disney que dans la « vraie nature ».

    #Disney #Réel #Réalité #Géographie

  • Carnets de réclusion # 5, Jean-Marc Royer
    https://lundi.am/Capital-et-mode-de-connaissance-scientifique-moderne-un-imaginaire-en-partage

    Dans cet article extrait d’un manuscrit en cours d’écriture, Jean-Marc Royer nous livre sa réflexion sur la façon dont l’Imaginaire occidental s’est structuré autour d’une rationalité calculatrice qui a participé de la cristallisation du mode de connaissance scientifique moderne. Il explique ensuite en quoi cette manière d’appréhender le monde est, à l’instar de la marchandisation du vivant, triplement transgressive et enfin comment ce mode de connaissance scientifique fut mis à la place d’un nouvel avatar du religieux. Il conclue enfin par la nécessité d’analyser l’Imaginaire du Capital pour avoir des chances de le désinstituer un jour, le plus tôt étant le mieux, d’après l’auteur.

    Il existe à présent de nouveaux défis historiques qui surpassent de loin ceux des deux derniers siècles, au point que l’on pourrait dire que nous sommes menacés à court, moyen et long terme par un quintuple « état d’exception » : écologique, climatique, pandémique, socio-économique, sécuritaire et guerrier. En fait, c’est la pérennité du vivant ici-bas qui est en jeu.

    Dans ces conditions, attendre la ixième crise du capitalisme censée entraîner son effondrement définitif devient irresponsable dans la mesure où, ainsi que semblent nous l’annoncer quelques évènements, nul n’en sortira indemne malgré les phantasmes transhumanistes, survivalistes ou post-apocalyptiques. Mais aussitôt surgissent les interrogations suivantes : alors que le constat de ce péril systémique fait maintenant l’objet d’un large consensus, pourquoi n’existe-t-il aucun mouvement d’opposition théorique et politique à la hauteur de cette funeste perspective ? Si une telle situation ne résultait que d’une « fausse conscience », comment se fait-il qu’elle ait présidé aussi longtemps à la manière de dépeindre un ordre si destructeur et si déshumanisant ? Pour rendre compte du fait que ces rapports de production durent depuis aussi longtemps, on ne peut en inférer qu’à l’existence d’un étayage puissant et inconscient. Mais là réside un autre impensé de taille évoqué par ailleurs : l’essence du capital – à savoir la mort – est non seulement rétive à l’analyse, mais s’y oppose. Et quoi de plus humain que de s’en tenir à distance ?

    Si nous ne pensons pas que la critique radicale détient le pouvoir magique de changer le cours des choses, ni de parer à la division du sujet, nous sommes tout du moins persuadé qu’à défaut d’un effort de clarification largement partagé, toutes les révoltes qui ne manqueront pas de se produire face aux états d’exception en cours ou qui s’annoncent, seront condamnées à l’échec répété. Dans ces conditions, comprendre à quel Imaginaire [1] tient encore cette civilisation, comment il s’y s’articule et pourquoi il s’agit aussi de son talon d’Achille, pourrait permettre de résoudre la question du fondement subjectif du capitalisme tout en rallumant quelques étoiles dans la nuit, debouts en gilet jaune.

    #capitalisme #subjectivité #Imaginaire #Réel

  • Andrea-DWORKIN-Heartbreak-The-Political-Memoir-of-a-Feminist-Militant.pdf
    http://www.feministes-radicales.org/wp-content/uploads/2010/11/Andrea-DWORKIN-Heartbreak-The-Political-Memoir-of-a-Feminist-M

    The women
    (TW)

    I found women whose whole lives were consumed by pornography: “I’ve been involved in pornography all my life until 1987. I was gang-raped, that’s how I conceived my daughter, and she was born in a brothel in Cleveland, Ohio”; the child “was beaten to death by a trick - she used to get beat up a lot by tricks. I’ve often wondered if some of the physical damage that was done to her simply [was because] maybe a child’s body wasn’t meant to be used that way, you know. Maybe babies aren’t meant to be anally penetrated by things or snakes or bottles or by men’s penises, but I don’t know for sure. I’m not really sure about that because that’s what my life was. ”

  • Pour une pratique critique de la carte en sciences sociales

    Cette communication s’appuie sur un recueil d’arguments convergents pour une mise en critique de la carte en tant que récit sur et de l’homme habitant la Terre. Son objet est initialement une intuition qui a donné lieu au fil des années à une compilation de textes et d’expérimentations cartographiques. La proposition du séminaire a été vue comme une occasion de confronter mon approche, de passer de l’intuition à une première formalisation. La position que je défends ici s’est construite à partir des travaux de l’anthropologue Tim Ingold, des démarches d’appropriation et de déconstruction de la cartographie par l’art et des positionnements de cartographes tels que Philippe Rekacewicz. De cette discussion, je définis plusieurs enjeux qui traversent la pratique cartographique et le recours aux cartes, qui me semblent justifier une pratique critique de la carte en sciences sociales.

    Je suis géographe, j’ai donc derrière moi une formation et une pratique de la cartographie que l’on peut qualifier de “classique” (Beguin et Pumain, 2014). J’ai appris à faire un croquis cartographique des Barkhanes (dunes) du Sahara, à faire un carte dans un tableur Excel (des localisations x, y) puis à analyser de l’information géographique, à écrire de scripts informatiques pour automatiser la mesure et le dessin des déplacements d’enquêtés, ou encore à définir mathématiquement (discrétisation) et esthétiquement (sémiologie graphique) comment représenter une variable sur un fond de carte. De par mon parcours, la carte s’est d’abord révélée être un outil, et même un multi-tool tant la cartographie a vu ses usages s’enrichir et se diversifier avec l’informatique et le développement des SIG (Système d’Information Géographique) et d’outils interactifs par le biais du web et le recours quasi-généralisé aux GPS (Global Positioning System). Cette richesse de pratiques et d’approches qu’il y a derrière la carte rend parfois difficile son appréhension. Il est fréquent, selon les affinités et les parcours des cartographes (et ce terme est très large), que l’attention soit particulièrement portée sur un aspect au détriment d’un autre, de la production de la donnée à la représentation graphique, du questionnement au traitement statistique, de l’intention au public visé. Finalement plus que la carte en elle-même ce qui peut faire défaut ce sont des informations, des indices pour situer la carte, accéder à la carte et lire la carte. Autrement dit : La carte pour qui ? La carte pour quoi ? (Groupe dupont, 1986). Bien que je revienne à ces aspects en fin de discussion, comme tout géographe qui porte une réflexivité sur la carte (Bord 2012), c’est d’abord à partir du livre de Tim Ingold, Une brève histoire des lignes (2011), que je souhaite introduire une lecture critique de la cartographie. Car s’il est particulièrement important pour la discipline géographique de s’interroger sur la normativité de la carte dans la production de connaissances scientifiques en sciences humaines, et d’en interroger le rôle dans sa diffusion croissante dans la société (Beguin et Pumain, 2014), ces questionnements et discussions sont très largement “géographo-centrés” (Groupe Dupont, 1986 ; Roques, 1993 ; Bord, 1997 ; Bavoux, 2009) et l’enjeu est souvent celui de la géographicité de la carte (Verdier, 2015) ou de la carte comme attribut de la géographie (Bord, 2012). Je trouve donc particulièrement opportun de situer ici la réflexion à l’échelle des sciences sociales afin de s’émanciper de ce tropisme disciplinaire.

    C’est donc la carte comme récit qui me semble particulièrement justifier une démarche de déconstruction de l’objet et de sa fabrique : la carte en général contribue à produire une normativité de nos rapports à l’espace et de nos discours sur l’espace. La critique de la fabrique cartographique et de son usage qui émerge de la lecture de Tim Ingold (2011) renvoie effectivement à un positionnement plus général de remise en cause de la science positiviste et de son régime de connaissances. On retrouve par ailleurs cette approche dans l’ouvrage de recension de pratiques artistiques mobilisant la carte, Géo-esthétique : “La cartographie en tant que discipline a été profondément imbriquée dans la production performative des récits de la modernité, de la rationalité et du positivisme mais aussi de l’histoire du colonialisme et des récits nationaux, et qui se trouve aujourd’hui largement re-signifiée par l’intervention de contre-pratiques et de contre-cartographies d’artistes.” (Quiros et Imhoff, 2014, p.6)
    Anthropologie de la ligne

    Tim Ingold est professeur au département d’anthropologie de l’Université d’Aberdeen en Écosse. Sa recherche vise à rompre avec le positivisme et à déconstruire la dualité nature/culture : il pense qu’en tant que scientifiques nous devrions nous appuyer sur nos “travaux pour critiquer, et remettre en cause certains présupposés dissimulés dans nos propres façons de penser” (Descola et al, 2014, p.45). Il invite ainsi à reconsidérer notre façon de produire de la connaissance sur l’expérience d’être au monde, et de ne plus nous percevoir, en tant que scientifiques, comme en dehors des objets que nous décrivons. Dans cette perspective, la cartographie en sciences sociales est, pour lui, une image et un récit qui contribue à “l’aplanissement du monde” (Descola et al, 2014, p.59).

    Dans Une brève histoire des lignes (2011), Tim Ingold se propose de décrypter l’histoire des formes que les hommes produisent en habitant le monde. Pour cela, il a recours à la ligne comme schème pour décrire différents rapports au monde :

    “Mon objectif est de montrer comment au cours de son histoire la ligne s’est progressivement détachée du mouvement qui l’avait fait naître, autrefois tracée d’un geste continu la ligne a été fragmentée sous l’influence de la modernité et transformée en une succession de traits et de points […] cette fragmentation s’est manifestée dans plusieurs domaines connexes : celui du voyage, où le trajet fut remplacé par le transport orienté vers une destination ; celui des cartes, où le croquis cartographique fut remplacé par le plan de route ; et celui de la textualité, où la tradition orale du récit fut remplacée par la structure narrative prédéfinie. La fragmentation a aussi modifié notre conception du lieu : autrefois nœud réalisé à partir d’un entrecroisement de fils en mouvement et en développement il est désormais un point nodal dans un réseau statique de connecteurs.” (Ingold, 2011, p.100).

    Par cette approche, Tim Ingold met en valeur notre distanciation de plus en plus importante vis-à-vis de l’expérience : ainsi, dans la lecture, tout comme dans le récit et le voyage, “c’est en cheminant qu’on se souvient. La mémoire doit donc s’entendre comme un acte : on se souvient d’un texte en le lisant, d’un récit en le racontant et d’un voyage en le faisant” (Ingold, 2011, p.27). Ainsi, Ingold nous invite à mieux entrevoir ce qui fait la trame de notre existence, et à garder une attention aux liens, aux accumulations et aux trajectoires. Il oppose les processus d’occupation et d’habitation de nos environnements pour “mettre en évidence les difficultés contemporaines rencontrées par les hommes obligés d’habiter dans un environnement prévu et expressément construit pour les besoins de l’occupation” (Bessy, 2012).

    A propos des cartes, il montre que sa forme moderne efface la mémoire (Ingold, 2011, p.37). Il explique que ce qui a permis de faire la carte, les expériences des voyageurs, tous ces témoignages, sont totalement absents de la carte moderne. C’est comme si tout avait été assimilé à un passé qui a été recouvert et, reprenant l’expression de Michel de Certeau, “la carte élimine toute trace des pratiques qui l’ont produites, donnant l’impression que la structure de la carte découle directement de la structure du monde” (Certeau, 1980, p.178-179 ; Ingold, 2011, p.37). Cet aplanissement du monde par la carte peut être compris comme une forme de distanciation de la réalité, du rapport au monde dont la carte souhaite témoigner, mais aussi des étapes par lesquelles est passé le cartographe, pour concevoir sa carte, pour en produire les formes. On voit là que la critique s’applique de façon conjointe au contenu et à la forme de la carte, leur dissociation étant justement cette évolution soulignée par Ingold. Finalement le rapport au terrain, à la récolte des données, le choix du cadre ou de son absence, de l’échelle sont autant d’éléments dont la carte tait le processus de construction pour conserver la seule information que l’on souhaite communiquer. Dans cette perspective, les cartes écrasent la richesse et la diversité des expériences, les nuances des vécus et des expressions, celles du cartographe y compris et c’est peut-être par là qu’il faut commencer pour se réapproprier la carte.

    L’enchaînement des gestes qui aboutissent à la carte est peu discuté et encore moins représenté, soit par ignorance soit par manque d’intérêt, même chez les cartographes. Ainsi la distanciation au terrain est très largement sous-estimée voire ignorée, alors qu’elle est, par exemple, un effet direct lié à l’usage massif de données secondaires pour produire des cartes. L’incertitude liée aux données, à leur mise en forme, à la façon dont les informations ont été réunies sont autant d’aspects absents de la carte. Or de ce fait, la distanciation peut s’opérer dès la formulation de la carte dans l’esprit du cartographe. Cela n’est pas sans évoquer les enjeux que renferme une certaine mise en chiffres du monde (voir Alain Desrosières, La Politique des grands nombres : Histoire de la raison statistique, Paris, La Découverte, 1993).
    La carte, l’instrument de sa propre critique

    L’opposition de Tim Ingold entre la carte et le croquis cartographique est radicale dans la mesure où il ne laisse pas entrevoir de ponts. C’est pourtant ce que je souhaite revendiquer : il existe une place pour une cartographie indiciaire – en référence au paradigme de l’indice de Carlo Ginzburg (1980) – une cartographie de la trace qui viendrait rendre compte de nos trajectoires dans le monde, des lignes qui tissent une connaissance géographique sur notre “être au monde”, c’est-à-dire une cartographie qui rompt avec le schème de l’occupation et d’exercice du pouvoir sur l’espace (par la fragmentation et l’intégration) pour se positionner dans une connaissance de l’habiter.

    Tim Ingold n’évoque pas de perspectives pour la cartographie de s’émanciper de son caractère normatif. Mais je pense qu’il propose là, sans le formuler lui-même, un cadre à l’émancipation du cartographe en sciences sociales : comprendre le régime de spatialité dans lequel nous nous insérons et chercher à le fissurer, à rendre tangible d’autres rapports à l’espace. Cette approche doit [re]mettre l’expérience au cœur de la démarche cartographique pour déconstruire nos usages de la cartographie. C’est un enjeu central parce qu’il se décline à la fois dans le contenu de la carte, garder les liens avec l’expérience, et à la fois dans sa forme, proposer une expérience cartographique. Plus qu’une définition de ce que serait une cartographie critique, je préfère identifier ici des enjeux à partir desquels chacun peut se positionner. La carte est un récit qu’il convient d’appréhender par ce que l’historien Christian Jacob définit en 1992 (Bord, 2012) comme ses deux dimensions fondamentales : “la matérialisation et la communication”. Or il apparaît nécessaire de resituer ces deux aspects de la carte dans leur contribution à une certaine normativité du rapport à l’espace et de la conception de l’espace même, et, dans les pas de Brian Harley (Gould et Bailly, 1995 in Quiros et Imhoff, 2014, p.6), de considérer les “cartes “scientifiques” […] comme des formes de savoir socialement construites, des fictions esthétiques disciplinant l’espace.” De ce point de vue, la lecture de différents textes du cartographe Philippe Rekacewicz (2010, 2013, 2015) est opportune car il propose notamment des pistes pour une pratique critique de la cartographie qui font écho aux enjeux évoqués jusqu’ici : l’aplanissement du monde, où la carte doit être critiquée pour son rôle dans une spatialité de l’occupation, où les lieux sont intégrés dans des réseaux, les lignes découpent et attribuent des rôles et des fonctions. La carte est alors un objet d’exclusion. Le lien entre l’expérience et la mémoire, où la carte doit être critiquée pour son écrasement des histoires constitutives de son contenu et de sa forme, pour la distanciation qu’elle crée vis-à-vis des expériences qui se cachent derrière les lignes, points, couleurs, données. La carte donne à voir des formes comme si elles préexistaient aux hommes qui en sont les producteurs, alors que c’est l’engagement de nos corps dans le monde qui crée les formes.
    La cartographie expérimentale

    Philippe Rekacewicz est un cartographe qui a longtemps travaillé pour le journal français Le Monde Diplomatique, qui co-anime aujourd’hui le site visionscarto.net avec Philippe Rivière. De par son engagement entre cartographie, art et militance, il a largement communiqué sur ce qu’est la carte et les enjeux que revêt l’acte de cartographier (Rekacewicz, 2010, 2013, 2015, 2016). Pour lui, la carte est un dialogue permanent entre l’imaginaire et le réel, une production qui représente la manière dont le cartographe voit le monde, voire comment le cartographe aimerait que soit le monde (Rekacewicz, 2010) : ce sont des informations qui passent par le filtre de la sensibilité du cartographe. Il revendique ainsi une dimension émotionnelle de la carte, qui produit un effet sur ses lecteurs, comme il en témoigne à partir de la réaction d’une personne lors d’une exposition de ses cartes : “On sent bien que, quand le cartographe a dessiné cette carte, il était très en colère !” (Rekacewicz, 2010). Par ailleurs, Philippe Rekacewicz témoigne de ce que cartographier implique et revendique le besoin de rendre compte d’une certaine forme d’imprécision – du tâtonnement du cartographe – tout comme de l’incertitude inhérente aux données que l’on utilise. Pour lui “l’esquisse permet, si l’on peut dire, de “reproduire fidèlement” l’imprécision, et surtout de la rendre légitime” (Rekacewicz, 2010). On retrouve là la réflexion à propos du croquis cartographique chez Ingold (2011, p.112). Pour Philippe Rekacewicz, c’est une façon de relativiser les connaissances représentées ou produites par la carte. Cela questionne aussi le rôle de la donnée, de la valeur qu’on lui donne, de l’accès au terrain qu’elle permet ou non : quels sont les liens que l’on choisit de conserver vis-à-vis de l’expérience ? Comment rendre compte de la chaîne de production cartographique ? Il est intéressant de souligner que Philippe Rekacewicz y voit aussi un enjeu en termes de travail collectif : une carte est rarement issue d’une seule personne et, à partir du moment où elle mobilise des données secondaires, elle implique les gens qui ont produit ces données (Rekacewicz, 2015).

    Il réfute par ailleurs la carte comme objectivation du monde et revendique une production subjective de la carte, qui est bien plus qu’un objet de référencement pour la science géographique (Rekacewicz, 2010). Dans ce registre, s’il ne rompt pas avec la cartographie régionale, il la met en discussion, à l’instar d’Elisée Reclus (Reclus, 1903 ; Monsaingeon, 2014 ; Chollier et Ferretti, 2016), en soulignant l’existence avant tout cartographique des frontières. Il parle “d’indigente représentation visuelle” à propos de la frontière (le même trait noir ou rouge) qui aplanit une réalité plus complexe et diverse de la frontière “qui divise des peuples, ou les regroupe. Soit elle menace, soit elle protège, ici c’est un mur, là un grillage, parfois une ligne et souvent… rien” (Rekacewicz, 2010). A propos de cet “aplanissement du monde” il y reconnaît également l’expression de l’occupation et de l’autorité : “c’est en tout cas les frontières qui permettent de grouper les pays et d’esquisser une géographie régionale. Mais toujours avec le risque d’exclure l’autre, de nier l’existence de “ceux qui ne sont pas dans le groupe” (Rekacewicz, 2010).

    Enfin, il perçoit dans ces différents mouvements de contre-cartographie “un exercice libre de déconstruction de l’espace et des phénomènes sociaux, pour lequel les protagonistes se permettent de pervertir les conventions les plus classiques.” (Rekacewicz, 2013). Ces pratiques cartographiques d’artistes et leurs postures critiques sont un écho extrêmement consistant et fertile pour se positionner sur les enjeux que j’ai soulevés jusqu’ici. Ces mouvements ne se privent d’ailleurs pas de discuter et de conceptualiser leur approche, dont le projet est ainsi résumé en introduction de l’ouvrage Géo-esthétique : “à travers notamment une critique des articulations entre espace, pouvoir, savoir et des géographies imaginatives, il s’agirait de défaire ces topographies instituées, autant physiques qu’imaginaires, et d’ouvrir les disciplines de l’espace et la “rationalité cartographique” (Farinelli, 2003) à une révision géo-historique.” (Quiros et Imhoff, 2014). C’est la déconstruction des usages de la cartographie et la reconnaissance d’autres formes de représentation qui permettent de se réapproprier la cartographie tout en rappelant sans cesse, dans un écho à Michel de Certeau, que la carte n’est pas le monde.
    Bibliographie

    Bavoux J-J., (2009), « Chapitre 6 – Quels sont les rapports entre la carte et le géographe ? », in Bavoux J-J. (dir), La géographie. Objets, Méthodes, Débats, Paris, Armand Colin, « U », p. 114-133.

    Beguin M. et Pumain D., (2014), La représentation des données géographiques, Paris, Armand Colin.

    Bessy C., (2012), « L’attention aux lignes », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2012/3 (n° 59-3), p. 143-149.

    Bord J-P, (2012) L’univers des cartes. La carte et le cartographe, Paris, Belin.

    Bord J-P., (1997), « Le géographe et la carte. Point de vue et questionnement de la part d´un géographe cartographe, Cybergeo : European Journal of Geography » [En ligne], Cartographie, Imagerie, SIG, document 17.

    Chollier A. et Ferretti F. (éds.), (2016), Élisée Reclus. Écrits cartographiques, Genève, Éditions Héros-Limite.

    Descola Ph., Ingold T., Lussault M., (2014), Être au monde. Quelle expérience commune ?, Lyon, Presses universitaires de Lyon.

    Ginzburg C., (1980), « Signes, traces, pistes. Racines d’un paradigme de l’indice », Le Débat, 1980/6 n° 6, p. 3-44.

    Gould P. et Bailly A., (1995), Le pouvoir des cartes. Brian Harley et la cartographie. Paris, Economica, Anthopos.

    Groupe DUPONT., (1986), « GÉOPOINT 86 : La Carte pour qui ? La carte pour quoi ? : Cartes et pratiques géographiques. » Colloque Cartes géographiques et cartographie, 26 au 31 mai 1986, Avignon : Groupe DUPONT.

    Ingold T., (2011), Une brève histoire des lignes, Bruxelles, Editions Zones Sensibles.

    Monsaingeon G., (2014), Mappamundi, art et cartographie, Marseille, Ed. Parenthèses.

    Plourde M-C., (2016), « Compte-rendu de lecture, Philippe Descola, Tim Ingold, Michel Lussault – Être au monde. Quelle expérience commune ? », Revue Emulations [en ligne].

    Quiros K. et Imhoff A. (dirs.), (2014), Géo-esthétique, Paris, Éditions B42.

    Reclus E., (2002), « L’enseignement de la géographie », in J. Cornualt (éd.), Du sentiment de la nature, Charenton, Premières pierres, p. 162-164.

    Rekacewicz Ph., (2010), « La carte, un objet graphique », entretien réalisé par Vincent Casanova et Caroline Izambert, Vacarme, 50/Cahier, pp. 70-72.

    Rekacewicz Ph., (2015), « La cartographie : entre science, art et manipulation », Conférence à l’université de Lille, cycle La Carte invente le monde, le 08/12/2015 à 18:00 | Durée 01:46:18.

    Rekacewicz Ph., (2013), « Cartographie radicale », Le Monde Diplomatique, Février 2013, p.15, [en ligne].

    Rekacewicz Ph. et Tratnjek B., (2016), « Cartographier les émotions », Carnets de géographes 9, [en ligne].

    Roques G., (1992), « La carte, le géographe et le cartographe », Tréma, 1, [en ligne].

    Verdier N., (2015), « Entre diffusion de la carte et affirmation des savoirs géographiques en France. Les paradoxes de la mise en place de la carte géographique au XVIIIe siècle », L’Espace géographique, 44, p. 38-56.

    Wathelet O., (2009), « Tim Ingold, Lines. A Brief History », L’Homme, 190.

    https://cne.hypotheses.org/237
    #carte #cartographie #ressources_pédagogiques #Tim_Ingold #Philippe_Rekacewicz #cartographie_critique #géographicité #géographie #récit #carte_comme_récit #normativité #fabrique_cartographique #modernité #rationalité #positivisme #colonialisme #récits_nationaux #nationalisme #contre-cartographie #art #ligne #mémoire #distanciation #croquis_cartographique #croquis #cartographie_indiciaire #être_au_monde #spatialité #espace #expérience #matérialisation #communication #Christian_Jacob #fictions_esthétiques #imaginaire #réel #sensibilité #émotions #imprécision #tâtonnement #incertitude #esquisse #donnée #données #subjectivité #objectivité #frontière #frontières #aplanissement #occupation #autorité #contre-cartographie

    @reka

  • Ajouter au malheur de ce monde (Arno Bertina, Lundi.am, 04.06.19)
    https://lundi.am/Ajouter-au-malheur-de-ce-monde-Arno-Bertina

    Arno Bertina est romancier. Il nous a confié ce texte qui revient sur les derniers mois de la #politique française et le resserrement des #libertés que certains choisissent de ne pas voir.

    […]Belle série de paradoxes pourrait-on dire, mais les paradoxes n’existent pas – ce mot ne sert qu’à décrire l’impasse constituée par une description fautive des éléments en présence […].

    Décrire permet de déchirer la surface étouffante des opinions personnelles – notre continent de plastique mental, si on veut, qui flotte à la surface de nos raisonnements et empêche la vie, en dessous, d’accéder à la lumière. En s’astreignant à proposer des descriptions, l’écrivain prendra ses distances avec la bêtise qui fait l’éditorialiste.
    […]
    Attendre les signes d’une #dictature à l’ancienne, conforme, c’est manquer le #réel, qui est cent fois plus mobile et trouvera toujours le moyen de passer quelque part, […]. Il s’agit, je crois, de suspendre les opinions – qui ne sont jamais strictement les nôtres mais plutôt l’écume de l’époque – pour être en mesure de décrire des situations, de constater des glissements – en l’occurrence : vers la privation de #libertés_fondamentales.
    […]
    L’idée démocratique repose sur la confiance dans l’intelligence des citoyens, chacun étant consulté (au moment des élections au moins) sur la base de cette compétence. Un système strictement vertical affirme au contraire l’inégalité des intelligences ou du droit à la parole.
    […]
    Comment ne pas voir qu’aujourd’hui c’est toute une société qui file droit vers des formes renouvelées de pouvoir autoritaire depuis des positions libérales ou prétendument démocrates ?
    […]
    Ceux qui ne souffrent pas sont obsédés par l’idée que l’Etat n’est pas là pour protéger de la dureté de la vie…

    Destruction du système social basé sur la redistribution et la protection de tous les citoyens, indifférence à la santé de la démocratie, inversion des normes… Préparer, oui, quelque chose d’ignoble.

  • La trahison des politiques. Ou pourquoi Christophe Castaner est une grosse pipe (Olivier Ertzscheid, affordance.info, 03.04.19)
    https://www.affordance.info/mon_weblog/2019/04/la-trahison-des-politiques.html

    Mais avant, et d’aussi loin que je me souvienne, la question de l’#euphémisation de la #langue figure parmi mes causes de colère les plus violentes. C’est pour moi la pire des brutalités que de vouloir tordre le #réel, tordre l’évident, pour le faire entrer dans une gangue asservie aux intérêts de quelques-uns et, surtout, au détriment de tant d’autres. C’est peut-être pour cela que 1984 est l’un des rares ouvrages que je peux relire en boucle. Peut-être pour cela que la description du mal qui y est fait à la langue me semble toujours aussi intolérable qu’indépassable.
    […]
    Pour oser à ce point, et avec l’aplomb dont seuls disposent les parvenus et les cons, distordre la réalité des faits lorsque l’on est supposé occuper un ministère dont la fonction est d’en garantir l’exactitude, il faut à l’évidence se sentir protégé et couvert par une figure tutélaire dont on s’imagine que l’#autorité permettra de masquer sa propre insignifiance.

  • Myriam Revault d’Allonnes : « La #vérité n’a plus d’effet sur le #réel »
    http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2018/12/07/31003-20181207ARTFIG00280-myriam-revault-d-allonnes-la-verite-n-a-plus-d-ef

    On a beaucoup glosé sur la célèbre formule de #Nietzsche : « il n’y a pas de faits, il n’y a que des #interprétations ». Mais en aucun cas elle ne dissout ni n’abolit la vérité : elle énonce que les faits bruts ne signifient rien. Ils doivent être mis en ordre et ne font sens qu’à la condition d’être déchiffrés et interprétés. N’importe quel historien vous dira que les faits « purs » n’existent pas, qu’ils doivent être interprétés et organisés en un récit qui leur donne forme. Mais cette configuration des faits (certes liée à des choix) n’abolit pas la réalité factuelle. Ce n’est pas le cas de la « #post-vérité ».

  • Un an après, la galère des anciens députés Caroline Fontaine - 3 aout 2018 - maris patch
    https://www.parismatch.com/Actu/Politique/Un-an-apres-la-galere-des-anciens-deputes-1567013

    Seuls 25 % des élus de l’Assemblée nationale ont survécu au raz-de-marée En marche !. Parmi les battus, une grande majorité de socialistes. Leur difficulté à retrouver un emploi signe la fin de « l’ancien monde ».

    C’est le premier signe d’un changement d’importance : ils ne décrochent plus leur téléphone aux premières sonneries. D’ailleurs, ils ne le décrochent plus du tout. Et ils ne rappellent pas. Difficile pour eux, qui ont tant aimé prendre la lumière, d’annoncer qu’ils ne s’en sortent pas. Les élections législatives de 2017 ont laissé 434 sortants sur le carreau, dont environ deux tiers sont PS ou écologistes. Un an après, leur reconstruction personnelle et professionnelle est, pour beaucoup, loin d’être achevée. Digérer l’humiliation de la défaite – certains n’ont pas passé le premier tour – a pris du temps. « Pendant les cinq ans de mon mandat, je me suis investi à 110 %, confie Philippe Baumel, ancien élu socialiste de Saône-et-Loire. Mon échec m’a semblé profondément ingrat. J’ai vécu pendant six mois une forme de tétanisation. J’ai eu beaucoup de mal à tourner la page. »

    Six mois, c’est le temps qu’il a fallu à Véronique Massonneau, ex-députée écolo de la Vienne, pour ne serait-ce que sortir de chez elle : « J’avais du mal à supporter la compassion des gens. » Idem pour Catherine Lemorton, ancienne présidente PS de la commission des Affaires sociales, qui avait vendu sa pharmacie pour se consacrer à son travail d’élue. « Après le choc », elle a flirté avec les abîmes : « J’ai flanché. Ne plus me sentir utile a été très violent pour moi. » « On a eu peur qu’elle se suicide », glisse une de ses anciennes camarades. « La politique est une drogue dure », s’excuse Alexis Bachelay, ex-député socialiste des Hauts-de-Seine et porte-parole de Benoît Hamon pendant la campagne de la primaire. Tous sont habités par un profond sentiment d’injustice : s’ils n’ont pas été réélus, ce n’est pas leur faute, non, mais celle de François Hollande et de son gouvernement. « J’avais un seul défaut circonstanciel, celui d’être socialiste », dit Catherine Lemorton. Un an après, les plaies ne sont pas encore toutes cicatrisées.


    Notre enquête révèle leur difficulté à trouver un emploi malgré leur réseau et leur expérience
    Un sevrage violent, voilà donc le premier enseignement de notre enquête. Pour tous, même pour les 225 qui ont fait valoir leurs droits à la retraite. « J’avais le sentiment de n’avoir pas démérité », confie Dominique Raimbourg, ancien patron socialiste de la commission des Lois à l’Assemblée. Mais eux, au moins, savent qu’à leur manière, ils ont eu « de la chance », selon les mots de Patricia Adam, son homologue PS à la Défense : « Je suis un privilégié dans le sens où je suis vieux ! » s’amuse Raimbourg. Leur téléphone sonne beaucoup moins, mais, grâce à leur pension, ils ont pu rester actifs – en s’impliquant dans des associations, des think tanks ou des fondations – sans crainte du lendemain. « Ça aide », confirme Jean-Christophe Cambadélis, ancien patron du PS et ex-député de Paris. Pour les autres, pour ceux qui, comme le dit Véronique Massonneau, ont eu « la mauvaise idée de n’avoir “que” 59 ans », notre enquête révèle leur difficulté à trouver un emploi malgré leur réseau et leur expérience. Une première.

    « J’ai réalisé qu’on paraissait obsolète », s’attriste Véronique Massonneau
    « Autrefois, les députés avaient des carrières longues, explique Emile Blessig, président du Groupe des anciens députés. S’ils perdaient leur siège, ils gardaient leur mairie, leur conseil général… » Désormais, l’interdiction du cumul des mandats les prive de cette possibilité de rebond. Autre changement, l’accession au pouvoir d’Emmanuel Macron a signé la fin de l’alternance, ce balancier qui garantissait un retour dans l’hémicycle : après la droite, la gauche et ainsi de suite. Résultat, beaucoup se sont retrouvés sans rien. « Je ne suis plus une personne publique, je n’ai plus à m’exprimer », coupe Sandrine Mazetier, ancienne vice-présidente socialiste de l’Assemblée nationale. « Je n’ai rien à vous dire. Je suis redevenu un citoyen ordinaire », prétend Kader Arif, autrefois plus bavard dans sa vie d’élu de Haute-Garonne ou de ministre délégué de François Hollande. « Certains ont pris de tels coups sur la gueule qu’ils ne veulent plus entendre parler de rien », décode Catherine Coutelle, présidente de l’Association des anciennes députées. Et ce d’autant moins que la poignée d’anciens députés qui ont raconté leurs difficultés ont récolté sur les réseaux sociaux une volée d’insultes, sur le thème : « Mais pour qui se prend ce privilégié ? » Alors ils préfèrent se taire.
     « Avant, une entreprise pensait qu’un politique pouvait lui apporter des marchés, analyse Jean-Christophe Cambadélis. Aujourd’hui, elle se dit qu’il va lui valoir des emmerdes »

    « La vague a touché beaucoup de monde, rappelle Véronique Massonneau. Il y a d’anciens ministres, des vice-présidents de l’Assemblée nationale sans emploi. Et comme on cherche tous dans les mêmes domaines – porte-parole de fondation, dans les relations institutionnelles –, les places sont rares. » Alors même que leur image s’est dégradée : « Avant, une entreprise pensait qu’un politique pouvait lui apporter des marchés, analyse Jean-Christophe Cambadélis. Aujourd’hui, elle se dit qu’il va lui valoir des emmerdes ! » Catherine Coutelle opine : « Elles n’ont pas envie de s’encombrer avec des gens battus et dévalués dans l’opinion. » De surcroît s’ils viennent du PS. Alexis Bachelay raconte : « J’ai passé quelques entretiens. Mon étiquette politique est complètement démonétisée. Dans l’ancien monde, on était recruté parce que, cinq ans plus tard, on allait être à nouveau au pouvoir. Là, on est tricard. » Tricard et ringardisé par les jeunes loups macronistes. « J’ai réalisé qu’on paraissait obsolète », s’attriste Véronique Massonneau. Un « retour au réel » d’autant plus dur que certains « ont pris de mauvaises habitudes, admet Jean-Christophe Cambadélis. Ils ne veulent pas perdre leur position sociale. Ils cherchent donc des emplois plus élevés dans la hiérarchie que ceux qu’on leur propose. » Leurs difficultés n’avaient pas été anticipées. Rien n’a été prévu par l’Assemblée. Ici, aucun accompagnement pour les aider dans leur reconversion.

    En juillet 2017, 97 ex-députés touchaient l’allocation de retour à l’emploi
    Même pour les fonctionnaires – un quart des sortants –, le retour au bureau s’est révélé compliqué. « Vous n’êtes pas toujours le bienvenu, rappelle Catherine Coutelle. Une directrice de recherche a été déclassée de trois échelons. Une autre mise au placard… » Alexis Bachelay a travaillé onze ans dans la fonction publique territoriale : « Ils me reprenaient à leurs conditions. Ce n’étaient pas les miennes. » Au terme de six mois de congé parental à 370 euros par mois, il s’est mis en disponibilité – sans droits au chômage – pour créer, comme tant d’autres, sa société de conseil. « Ce n’est pas très original, mais, quand vous avez été parlementaire, vous n’avez pas 50 000 possibilités de reconversion ! »

    En juillet 2017, 97 ex-députés touchaient l’allocation de retour à l’emploi (contre 44 après les législatives de 2012). Un an après, ils sont encore 70 à la percevoir. Et certains, comme Alexis Bachelay ou Véronique Massonneau, qui a obtenu de son précédent employeur une rupture conventionnelle, n’y ont pas droit. En 2007, Guillaume Bachelay, ancienne figure montante du PS, député battu en 2017, publiait un livre au titre toujours d’actualité : « Désert d’avenir ? Le Parti socialiste, 1983-2007 ». Sollicité pour cette enquête, il n’a jamais donné suite à nos appels. Tout comme d’anciens ténors du PS – Christophe Borgel, François Lamy, Pascal Cherki… Signe que la nouvelle vie de ces ex-piliers de la Rue de Solferino doit être encore en construction. Un an après la défaite.

    #députés #députées #PS #politicards #chômage #chômeurses #chômeurs #précarité #assurance-chômage #crise #pauvreté #politique #exclusion , retour de bâton , subir les lois qu’ils/elles ont voté #tricard #ringard #réel #solferino #assistanat #galère

    • C’est poignant, tant de misère humaine ...

      Les 26 députés qui ont voté contre l’état d’urgence

      François Asensi (GDR) Alain Bocquet (GDR) Marie-George Buffet (GDR) Jean-Jacques Candelier (GDR) Patrice Carvalho (GDR) André Chassaigne (GDR)Jacqueline Fraysse (GDR)

      Laurence Abeille (non inscrit) Pouria Amirshahi (non inscrit) Isabelle Attard (non inscrit) Danielle Auroi (non inscrit) Michèle Bonneton (non inscrit) Sergio Coronado (non inscrit) Cécile Duflot (non inscrit) Noël Mamère (non inscrit) Philippe Noguès (non inscrit) Jean-Louis Roumégas (non inscrit)Eva Sas (non inscrit)

      Jean-Frédéric Poisson (LR)

      Fanélie Carrey-Conte (SRC) Linda Gourjade (SRC) Jean-Luc Laurent (SRC) Denys Robiliard (SRC) Barbara Romagnan (SRC) Gérard Sebaoun (SRC)Suzanne Tallard (SRC)
      Les 4 députés qui se sont abstenus

      Jean Lassalle (non inscrit)

      Nicolas Sansu (GDR)Gaby Charroux (GDR)

      Jean-Patrick Gille (SRC)

    • Erratum : la liste ci-dessus est la liste de ceux qui n’ont pas voté pour le reconduction de l’état d’urgence.
      Voici la liste des six qui n’ont pas voté l’état d’urgence :
      L’élu socialiste Pouria Amirshahi avait pour sa part annoncé son intention de voter contre. Deux autres socialistes, Barbara Romagnan et Gérard Sebaoun, l’ont également fait. Ainsi que les écolos Sergio Coronado, Noël Mamère et Isabelle Attard. La députée PS Fanélie Carre-Conte s’est pour sa part abstenue.

      Tout ça pour dire que le déconvenue aurait pu être plus douce en s’affirmant.

      Qu’en sera t-il pour les députés godillots de la tribu des DRH (futurs gestionnaires de camps) de LREM ?

    • Je ne me fous pas spécialement de leur gueule, c’est juste que je sais qu’il est facile de taper sur la gueule d’une partie de la population quand on a l’assurance de ne jamais se retrouver dans sa situation. Donc, le chômage, c’est toujours pour les autres, quand on veut, on peut, utilise ton foutu réseau et tu auras un boulot…
      Là, avec une réseau qui n’a rien à voir avec celui d’un chômeur en fin de droits, ils sont triquards.

      J’aimerais bien que ça les fasse réfléchir à ce qu’ils ont infligé aux autres.
      Cela dit, je me souviens quand on avait les anciens cadres qui arrivaient sur Actu>chômage. En fait de prise de conscience, on avait le droit à « pourquoi moi ? ».
      Désespérant.

    • Mais moi je me marre et sans aucune forme de honte. Ces gens là ils n’ont pas vocation à être député à vie non plus ou alors faut clairement aller en Chine et faire partie des pontes du PC chinois. Et ils viennent pleurer après…
      Ça me rappelle une entrevue entre le maire d’une petite ville de la banlieue de Lille avec des amis qui essayaient de mettre en place une mosquée et à qui le maire mettait des bâtons dans les roues régulièrement. Pendant la conversation le maire ne parlait qu’en terme de possession personnelle des ressources municipales : mon terrain, mes parkings etc Mon ami lui a alors dit « On ne va pas se mentir Monsieur X, on sait tous ici que vous êtes en CDD ». Le maire a rougi et n’a plus rien dit.
      Cerise sur le gâteau du texte : Cambadelis comme porte-parole, franchement ! Le gars il a été condamné plusieurs fois et il incarne la corruption et les magouilles du monde politique à lui tout seul.

  • Guide pour ne pas respecter les conseils de son psy et accepter sa névrose comme un signe d’aliénation par le système qu’il faut changer par la lutte et la révolution permanente (Tracks ARTE)
    http://tracks.arte.tv/fr/guide-ne-pas-respecter-conseils-psy-accepter-nevrose-alienation-systeme-

    À mesure que se dévoile la matrice qui conditionne la mesure de votre #bonheur, vous réalisez finalement que votre champ d’action est terriblement circonscrit. Le seul vrai #choix dont vous disposez est celui de la marque de yaourt au supermarché et pas grand-chose d’autre. Votre #condition ainsi révélée, vous pouvez enfin panser les blessures de votre esprit meurtri. Si les séquelles du #totalitarisme violent marquent les corps roués de coups, l’#oppression psychologique est plus pernicieuse car elle rentre dans votre tête sans s’annoncer, s’exfiltre discrètement puis vous laisse enfin épuisés de vous être battus, sans le savoir, contre des chaînes invisibles. C’est alors que vous vous rendez compte que si le psy vous dit que vous n’allez pas bien, vous avez peut-être raison de penser que c’est plutôt le reste du monde qui ne va pas.

    Aimez vos #désirs, désirez vos passions, assumez votre #résistance et faites la #révolution ! Faites advenir le #réel en ajustant la perception des autres sur la vôtre ! N’oubliez pas enfin que votre objectif n’est pas de réussir, de vaincre ou de terrasser. Si vous finissez sur le bas-côté, exténué, vous aurez prouvé par votre échec l’#aliénation de la #société. Ce que vous voulez finalement, c’est avoir raison d’être là.

  • Le réel de Marx
    par Bernard Aspe et Patrizia Atzei
    Intervention au colloque Communisme à Rennes en mai 2017

    http://ladivisionpolitique.toile-libre.org/le-seminaire/le-reel-de-marx-ciolloque-communisme

    Le communisme est le refus de la mise au travail généralisée, de la mise au travail pour le capital. Un refus dont la mise en œuvre suppose une opération de désidentification.

    #communisme #Marx #opéraïsme #post_opéraïsme #refus_du_travail #salariat #Tronti #capital #réel #Lacan #Rancière

    • Le réel de Marx
      http://ladivisionpolitique.toile-libre.org/le-seminaire/le-reel-de-marx-ciolloque-communisme

      Nous savons que, comme d’autres mots, le mot « communisme » n’a jamais été et ne sera jamais univoque, qu’il s’agit toujours de lui donner une signification qu’il n’a pas tout seul, c’est-à-dire de mettre sur le mot « communisme » ce qu’on décide d’y entendre.

      Pour parler du communisme, il nous semble nécessaire de revenir une fois encore à Marx. Mais il ne saurait s’agir, pour nous, de proposer un énième commentaire de son œuvre : Marx n’est pas l’auteur auquel il faut en revenir parce que dans ses textes se trouverait une vérité ultime. Nous considérons qu’il est l’un de ces auteurs qui nous obligent à aborder son héritage de façon partiale, avec des parti-pris. Il nous oblige, surtout, à nous saisir de cet héritage depuis le présent.

      Nous allons donc dégager quelques traits de l’approche de Marx qui nous semblent devoir être prolongés aujourd’hui pour une entente clarifiée et opératoire du mot « communisme », du communisme en tant que « mouvement réel ».

      Nous insisterons essentiellement sur deux aspects. Il s’agira dans un premier temps de montrer que le communisme se présente sous la forme du refus du travail. Ensuite, il s’agira d’affirmer la possibilité d’une intelligibilité de la politique qui ne dépend pas d’un horizon de totalisation, et qui suppose un mode de subjectivation particulier, relevant d’une « désidentification ». (...)

      version audio
      https://seenthis.net/messages/602983

    • Un texte qui commence par « comme le disait Althusser » n’augure rien de bon. Althusser était un charlatan stalinien qui a passé l’essentiel de sa vie à caricaturer le marxisme pour en faire une coquille vide (débarrassée de la dialectique) acceptable par l’idéologie dominante.

      Mais je tente une lecture quand même :)

    • Althusser, semble faire office ici de muleta mais il n’est cité que pour renvoyer à un phrase de L’idéologie allemande à propos du communisme « le mouvement réel qui abolit l’état de choses existant », afin d’avancer dans l’analyse du réel en question, avec et contre Hegel, avec Lacan. Outre Marx, ce sont les apports de tout autres théoriciens que le texte met en rapport, sans décerner ni blâmes ni médailles...

      Ce qui nous paraît essentiel dans les analyses de [Jason] Moore, c’est qu’elles donnent une extension nouvelle au concept de force de travail en montrant toutes les activités que l’on peut compter au titre de travail non-payé, non reconnu comme tel.

      Parmi ces activités, à considérer l’histoire de l’économie-monde, il y a bien sûr le travail des esclaves dans les colonies depuis les XVème-XVIème siècles ; ou le travail assigné aux femmes dans le développement de la société bourgeoise – travail invisible qui n’est pas seulement celui de la « reproduction de la force de travail », mais qui est lui-même force de travail non reconnue comme telle.

    • Tu n’a pas lu l’article, tu ne sais pas, comment fais-tu pour répondre ? je répète, je répète, Althusser n’est cité que pour introduire un passage de Marx qu’il a dit « fameux », et parce qu’il sagit d’un colloque ou les Français croient que le marxisme c’est Althusser.
      L’article, coécrit par une femme, puisque seul cela compte à tes yeux, n’a rien à voir avec tes a priori, avec cette manière purement réactive de (ne pas) lire. Il évoque tout autrement ces questions.

      L’adresse générique de la politique, l’adresse à un « tous » (non pas un « tous » positivé, effectif, mais un « tous » potentiel) cela implique notamment — et il est utile de le souligner dans la situation qui est la nôtre aujourd’hui — que la race ne peut, en tant que telle, être un opérateur de la subjectivation politique. On pourrait affirmer que pour qu’il y ait subjectivation émancipatrice, il faut qu’il y ait déprise des identités. Cela ne signifie nullement que toute revendication basée sur la race est nécessairement vouée à l’échec, ou intrinsèquement réactionnaire : cela signifie seulement que son potentiel émancipateur ne réside jamais en une positivation de l’identité raciale en tant que telle. Pour qu’une identité (prolétaire, peuple colonisé, femme, noir, etc.) constitue le point de départ d’un processus véritablement émancipateur, il faut que soit conjurée toute appropriation exclusive de la revendication politique. Autrement dit, il faut qu’il y ait une connexion entre cette identité particulière et une adresse générique. En clair : les identités existent bel et bien, et on ne peut pas simplement décider de les ignorer ou d’en sortir, comme le voudrait une certaine utopie queer. « Désidentification », cela ne signifie pas : abolition des identités. Cela signifie : constitution d’identités paradoxales, d’identifications polémiques. Car quand on ne travaille pas à déplacer les identités, à les rendre paradoxales, ce sera l’ordre d’oppression et d’exclusion qui se chargera de les remettre à leur place (pensons au racisme de la police).

  • La #photographie, évidence du #réel ?

    La photographie est-elle encore un reflet de la #réalité à l’époque de la #post-vérité ? A l’occasion de l’#exposition « Évidences du réel » au Musée d’art de #Pully, décryptage de l’absence de #représentations dans l’#image.

    http://www.rts.ch/info/culture/arts-visuels/8386915-la-photographie-evidence-du-reel-.html
    cc @albertocampiphoto

  • Abattoirs : « La #protection_animale doit devenir aussi importante que l’hygiène »

    LE MONDE | 31.03.2016 à 14h57
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2016/03/31/abattoirs-le-controle-du-respect-de-la-protection-animale-peut-etre-une-vari

    Laurent Lasne, président du Syndicat national des inspecteurs en santé publique vétérinaire (SNISPV), reconnaît une « faille » des services.

    Comment expliquer cette défaillance des services d’inspection ?

    Il y a eu une faille des services d’inspection, mais le problème se trouve d’abord du côté de l’entreprise d’abattage, qui n’a pas appliqué les bonnes pratiques [selon la réglementation, l’animal ne doit être mis à mort qu’après étourdissement]. Pourquoi ne l’a-t-elle pas fait ? Sans doute en raison d’impératifs de rentabilité économique. Quand on augmente la cadence, on travaille moins bien. Cet établissement a probablement été débordé par un afflux de commandes conjoncturel avant Pâques.

    Il y a aussi un aspect sociologique, lié à la formation des ouvriers d’abattoirs. Ils ont longtemps été recrutés sur leurs capacités physiques à porter des charges lourdes, à supporter le froid, des conditions difficiles… Leur sensibilité à la protection animale n’est pas le premier critère de recrutement. L’été, avec le pic de commandes lié aux barbecues, les entreprises recrutent des intérimaires, dont des étrangers qui parfois ne maîtrisent pas très bien le français . La première préoccupation de l’employeur, c’est de les former pour qu’ils soient productifs, pas de les former à la protection animale.

    Est-ce que cette situation évolue ?

    Oui, mais lentement. En vingt ou trente ans, on a constaté une véritable révolution culturelle au niveau de l’hygiène. Les #abattoirs en ont fait une priorité, ils ont compris que c’était un impératif pour vendre leurs produits. Cette révolution n’est pas totalement accomplie concernant le #bien-être_animal , même si la médiatisation de cette question, grâce au travail des associations, peut permettre une prise de conscience des acteurs du secteur.

    Aujourd’hui, il faut que la protection animale devienne pour les abattoirs un enjeu aussi important que les conditions sanitaires, mais aussi que les conditions de travail de l’ouvrier. On ne peut pas demander à un ouvrier de dépasser la durée légale du travail, de travailler douze heures d’affilée pour faire face à un afflux de commandes, et exiger qu’il respecte les règles de protection animale.

    La seconde, que nous défendons, est la mise en œuvre de comités d’éthique dans les abattoirs. Jusqu’à présent, ces entreprises étaient un peu des boîtes noires. Elles ne sont pas glamour, se trouvent en province, dans les périphéries des sous-préfectures… Les seuls qui y vont, ce sont les services vétérinaires. On pourrait imaginer des comités incluant des représentants des éleveurs, des bouchers, d’ associations de défense des animaux , des mairies, de la société civile…

    #carnisme
    #l'offre_et_la_demande
    #schizophrénie
    avec au passage une petite touche de #xénophobie et de mépris pour la #province dans ce pavé de #déni où la #pensée_magique (ah, l’#éthique_de_la_mise_à_mort de la #viande_sur_pied !) se mêle au #réel_mis_cul_par_dessus_tête...

  • De l’idéologie aujourd’hui, par François Brune (@mdiplo, août 1996)
    https://www.monde-diplomatique.fr/1996/08/BRUNE/5688

    La #publicité, par exemple, est bien une réalité contemporaine. On la déclare phénomène de société et, sous prétexte qu’il s’agit d’un fait établi, on ne cesse de la justifier comme valeur. « Comment peut-on critiquer la publicité ? » , s’offusquent les « réalistes ». Et l’idéologie publicitaire peut, sans frein, diffuser son opium.

    On peut en dire autant de la #consommation. Il s’agit bien d’une réalité de chaque jour ; mais en faire le critère majeur de santé économique et la solution au problème de l’emploi, sans remettre en cause la notion même de « société de consommation », c’est virer en pleine #idéologie : l’idéologie même de ce #capitalisme qui produit, à l’échelon international, le #chômage des uns et la surexploitation des autres, au nom du sacro-saint marché.

    Des milliers de phrases suspectes, dans les #médias ou ailleurs, légitiment chaque jour des réalités sociales ou économiques jugées indiscutables parce qu’appartenant à l’époque… (…)

    Il faut des bouleversements sociaux pour que soudain le pseudo-réalisme du discours ambiant se brise et laisse entrevoir la formidable idéologie qui le sous-tend. Mais de telles illuminations, trop brèves, n’empêchent pas le conditionnement politico-médiatique de reconquérir le champ de conscience des citoyens. La force de ce système, en effet, c’est que les divers « complexes idéologiques » qui le constituent ne cessent d’interférer, de s’étayer les uns les autres. Quand l’un faiblit, l’autre prend la relève : doutera-t-on de la société de consommation que l’on continuera de croire à l’infaillibilité du progrès technique ; on devient méfiant à l’égard des médias, mais on conserve la représentation globale de la « modernité » qu’ils nous donnent ; on déplore la #mondialisation, mais on s’ébahit devant cette formidable « communication » qui va unifier la planète… La multiplicité des mythes quotidiens, qui se jouent de notre objectivité en se reconstituant sans cesse, produit un effet de brouillage qui décourage l’analyse critique. Où est le #réel ? Doit-on se fier aux opinions majoritaires fluctuantes des #sondages successifs ?

    Ce brouillage idéologique est aggravé par les incohérences notoires qui se produisent entre l’ordre du discours qu’on nous impose et l’expérience des choses qui, souvent, le contredit. (…)

    On oblige le bon citoyen à pratiquer la double pensée, en s’efforçant de croire tout et le contraire de tout. Une scission s’opère entre les données de l’expérience quotidienne et l’imprégnation de l’idéologie ambiante. Aux fractures sociales s’ajoute la fracture mentale qui divise le for intérieur de chacun de ses membres. Quand les citoyens ne savent plus où donner de la tête, à qui cela profite-t-il, sinon aux pouvoirs ? L’idéologie aujourd’hui, qui part du réel pour nier le réel, conduit ainsi à une forme de schizophrénie collective.

  • #Emmanuel_Carrère, le #Journalisme et « l’opacité du #réel »
    https://www.mediapart.fr/journal/france/220216/emmanuel-carrere-le-journalisme-et-l-opacite-du-reel

    Emmanuel Carrère © Ed Alcock À l’occasion de la parution d’Il est avantageux d’avoir où aller (P.O.L), recueil d’articles de presse rédigés entre 1990 et 2015, rencontre avec l’écrivain à succès qui cherche dans le journalisme d’autres vues que la sienne.

    #France #Culture-Idées #Balzac #De_Lestrade #fiction #Littérature

  • Nicolas Grimaldi : « Les terroristes agissent comme dans un rêve, prenant congé du réel » - Libération

    http://www.liberation.fr/debats/2016/01/22/nicolas-grimaldi-les-terroristes-agissent-comme-dans-un-reve-prenant-cong

    Par Robert Maggiori et Anastasia Vécrin — 22 janvier 2016 à 18:01

    Dessin Sylvie Serprix

    Dans son dernier ouvrage, le philosophe compare les fanatiques qui tuent, à Paris comme dans le reste du monde, à des « somnambules » : ils s’éloignent de la réalité, aveuglés par leur croyance. Cet « envoûtement », les poussant à exclure de l’humanité ceux qui ne partagent pas la même foi, les fait vivre dans une fiction.

    Nicolas Grimaldi : « Les terroristes agissent comme dans un rêve, prenant congé du réel »

    Ils tuent aveuglément des gens dont ils ne savent rien, se préparent à la mort comme pour une noce et croient servir le bien et la justice. Que se passe-t-il dans la tête des terroristes ? Aussi avides et méthodiques soient-ils, pour le philosophe Nicolas Grimaldi, ce sont des « somnambules » qui, prenant une fiction pour une réalité, s’efforcent d’exclure de l’humanité quiconque ne partage pas cette croyance. Dans les Nouveaux Somnambules, paru récemment aux éditions Grasset, le professeur émérite à la Sorbonne décrit cet aveuglement volontaire et ordinaire propre à toute croyance qui, comme le jeu, comme le rêve, nous fait éprouver combien nous vivons à la frontière du réel.

    Ils agissent exactement comme dans un rêve, l’expérience la plus commune d’effacement du réel. Or, on ne rêve qu’en s’étant endormi. Dans l’ordinaire des situations, il dépend de nous de nous abandonner au sommeil. Nous tirons les rideaux, nous décidons de prendre congé du réel. De même, nous ne nous laissons subjuguer par une croyance qu’en ayant commencé à détendre le lien qui nous unissait au réel. Dans le cas des fanatiques, tout se passe comme s’ils étaient envoûtés par une croyance, et ne vivant pas, très souvent, comme des religieux, ils utilisent le drapeau de la religion pour couvrir cette croyance. Cet envoûtement fait que l’on va prendre une fiction pour la suprême réalité et on va supprimer la réalité parce qu’elle fait obstacle à la fiction.

    #terrorisme #psychologie #réel #rêve #imaginaire


  • Le dernier continent, Vincent Lapize, 2015

    Ils sont biens les films des copains de réel factory... Et Vincent je le connais mal mais il a sacrément bien bossé...

    Ce qui est difficile dans les films sur les ZAD, et plus généralement dans les films partisans d’un mode de vie différent c’est que beaucoup d’entre eux, je veux dire beaucoup trop d’après moi, reviennent à un plaidoyer mondialement chiant. Des gens qui vous expliquent comment qu’on peut faire pousser soi même et comment que c’est bien les compostes. Putain... Et le cinéma dans tout ça bordel !
    Et bien le cinéma il est là, tout simplement. Des sensations, des impressions, de la poésie où les personnages semblent parfois mettre de côté leurs enjeux musclés pour faire une ode au film poétique de Vincent.
    Même les CRS... C’est incroyable comment il a réussi à filmer ça...
    Allez le voir, allez le soutenir, et achetez le film dès qu’il sort.
    https://vimeo.com/117403223


    #critique_a_2_balles #le_dernier_continent #vincent_lapize #2015 #réel_factory #la_famille_digitale #film_des_copains #cinéma
    #documentaire

    • #Amanda_baggs est américaine, d’où peut-être la moindre culture psychanalitique, quoique qu’elle connaisse bien l’anti-psy (qui est d’ailleurs un truc plutôt anglais non ?), je crois... Quand j’avais essayé de comprendre tout ce machin d’"autosupport" et d’activisme autie, l’ennemi c’était souvent #Bruno_Bettleheim et effectivement l’équation psychotique = autisme qui vient de la psychanalyse classique (freud etc), si je ne m’abuse. Le truc neuro a peut-être aidé à la création d’un « spectre » autistique et donc d’une definition plus souple, qui permet peut-être même l’auto-définition... J’avoue que le sujet est affreusement ardu et que je manque d’outils pour vraiment piger... Mais Baggs et sa bande déboîtent, quoique je ne sache plus trop où ils en sont aujourd’hui... J’ai posté ça aussi, traduit du site autistics.org http://seenthis.net/messages/347391 qui est bien marrant... et si tu ne l’as pas vu, diable, on avait fait une trad de ce magnifique film de Baggs again, huge classic https://www.youtube.com/watch?v=1EvvotxGq4k

    • ah et pour la voix... je crois que j’avais fait ça sur un site internet de voix synthétique, pas direct de l’ordi. Tu tapais une phrase, et le machin te sortais un petit mp3 à télécharger...

    • Voir aussi : http://seenthis.net/messages/213211

      Je copie ici la lettre de Quartz du week-end pour mémoire :

      “You guys,” a friend tweeted on Thursday, “today was what the Internet used to be like ALL THE TIME.”

      He was talking, of course, about “the dress“—the image of a garment that looked white and gold to some people and blue and black to others, or even looked different to the same people at different times of day, and drove what seemed like the entire internet crazy. BuzzFeed said its coverage of the dress garnered 41 million views in less than a day.

      But the tweet might as well have been talking about that day’s decision by the US Federal Communications Commission to adopt strict “#net_neutrality” rules that treat the internet as a public utility. Both were expressions of the internet in its purest, most democratic form—the way its idealistic pioneers imagined.

      (…) The dress was just an optical illusion. It became #TheDress because everyone could see it, and wanted to know what other people were seeing, and could find out, and tell each other, instantly. While websites vied to profit from their curiosity (and some succeeded hugely), they were just riding the wave. The wave itself was hundreds of millions of moments of direct, unmediated communication, the raw collective power of a society talking to itself—the internet as the ultimate public square.

      This is the internet that net neutrality is designed to protect. It would, of course, be wonderful if as many people used it to try to solve poverty or global warming as went apeshit over a dress. But we’re glad we have it, all the same. — Gideon Lichfield

  • À quoi engage le cinéma ? Une autoréduction au Festival international du film documentaire, « Cinéma du réel »
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=7616

    Un texte récemment traduit en français sur la #politique des #films des Huillet&Straub commence par un récit d’une autoréduc, à Beaubourg, il y a huit ans de cela :

    « Samedi 10 mars 2007, 14h30 : une salle de cinéma située dans le sous-sol du Centre Georges Pompidou à Paris. On assiste à la projection de courts-métrages allemands des années 1960-1970, rarement projetés, dans le cadre de la 29e édition du Festival international du film documentaire, « Cinéma du réel ». Y était présenté l’essai cinématographique de 15 minutes, Einleitung zu Arnold Schönbergs ‘Begleitmusik zu einer Lichtspielscene’ (Introduction à « une musique d’accompagnement pour une scène de film » d’Arnold Schönberg, 1972) réalisé par Jean-Marie Straub et Danièle Huillet.

    Alors que de nombreux spectateurs s’installent dans leurs sièges, une agitation se fait entendre depuis l’extérieur. Soudain, un groupe d’une cinquantaine de militants force le passage et fait irruption dans la salle. Tout en distribuant dans toute la salle des tracts de l’ère pré-Photoshop, le groupe, qui s’autodéfinit comme étant composé de jeunes chômeurs, réclame d’assister gratuitement à la projection, outré qu’un festival financé par de l’argent public puisse exiger que l’on paye sa place et plaidant globalement pour une séparation de l’art et du commerce.

    Offensée par cette manifestation, la directrice du festival – après avoir ordonné au technicien de ne pas démarrer la projection et mobilisé le service de sécurité afin qu’il intervienne physiquement dans la salle pour intimider les manifestants – prend la parole et déclare à la foule (notons que les spectateurs ayant payé leurs places se sont rangés presque unanimement du côté des manifestants, en dépit du désagrément) qu’elle ne se laissera pas « terroriser » et forcée à poursuivre la projection, ce qui eût pour effet de prolonger l’occupation de la salle par les spectateurs. »

    Le #tract diffusé sur place :

    LE RÉEL ? Chouette !
    ENTRÉE LIBRE !!!

    « Si le cinéma ne s’était pas aussi complaisamment livré à la fausse alternative art/divertissement, il aurait pu servir d’outil de vérification de thèses essentielles. » ...

    #cinéma #réel #autoréduction

  • C’est pas le moment de chroniquer Houellebecq, par Christine Angot
    http://lemonde.fr/livres/article/2015/01/14/c-est-pas-le-moment-de-chroniquer-houellebecq-par-christine-angot_4556380_32

    La réalité visible peut alimenter des fresques sociales ou des autofictions, la division n’est pas là, ce n’est pas un territoire qu’on se partage, c’est en profondeur que ça se passe. L’image n’est pas celle d’une surface, d’une carte et d’un territoire, ni de la surface plane d’un miroir où on se voit, mais d’un puits à sec sous la surface, dans lequel on s’obstine quand même à envoyer des seaux pour essayer de remonter quelque chose. Le sentiment que l’être a de son humanité. Voilà. Ce sentiment n’est pas dans le seau. Mais dans le fait de ne rien trouver et de ne pas s’y résoudre. De chercher encore. Et de finir par trouver un mini-indice qui n’était pas visible. Ça, Houellebecq ne le fait jamais. Non seulement il ne le fait jamais, mais il le détruit, il le raille. Il raille Mai 68, l’humanisme, l’antiracisme, la psychanalyse, les universitaires, ceux qui essayent de trouver quelque chose derrière la réalité, ceux qui se disent que l’humain ça doit exister, et pas besoin d’avoir recours à Dieu pour ça.

    Si « la religion la plus con c’est quand même l’#islam », comme il le disait en 2001, pourquoi la mettre au pouvoir ? Si DSK est un cochon, pourquoi en être amoureuse ? Pour montrer qu’on a bien réfléchi. Houellebecq ne fait pas de différences fondamentales entre chien et humain, animalité et humanité, regard morne de l’animal et regard de souffrance de l’humain. L’humain n’a rien de spécial. Les droits de l’homme pourraient être les droits du chien. Tout cela, selon un raisonnement qui se présente comme imparable, calme, et surtout : intelligent. Mais d’une intelligence qui se trouverait au-dessus de l’intelligence. Trissotin avait ce type d’intelligence. Bouvart et Pécuchet ne s’énervaient jamais. Ils avaient une capacité à discuter calmement. Et les médecins de Molière parlaient doctement.

    (…) H se trompe. Non, il n’y a pas de retour du religieux, c’est la fin au contraire, et c’est bien pourquoi ils veulent nous tuer. Non, les femmes ne rentreront pas à la maison, et c’est bien pourquoi il parle de notre « sécheresse vaginale » passé un certain âge et de l’affaissement de nos chairs. Non l’être humain n’est pas un produit, et c’est bien pourquoi il tient à le calibrer.

    Céline n’aurait pas été Céline s’il n’avait fait que ses pamphlets, avec ses points de suspension. Dans ses grands romans il n’y a pas la moindre petitesse. Ses personnages sont tous quelqu’un.

    #littérature #roman #religion ; le #réel et son #secret (#seenthis-paywall-done)

    • @Histhom me répond en partie sur twitter (la suite autour d’un café, ça veut dire que c’est pas immédiatement reproductible ?!! — argh) :

      le pire texte écrit sur le roman, et je compte ce qu’à pu écrire Joffrin… pire papier sur Houellebecq qui ne parle finalement que d’elle… pour changer ; et pour Joffrin qui qualifie le roman d’entrée du lepenisme en littérature c’est tout simplement ridicule : on en revient aux procès du XIXe faits à Flaubert ou Baudelaire pour raisons de #morale.

      cc @lucile

  • La politique de Straub-Huillet | Période
    http://revueperiode.net/la-politique-de-straub-huillet

    Samedi 10 mars 2007, 14h30 : une salle de cinéma située dans le sous-sol du Centre Georges Pompidou à Paris. On assiste à la projection de courts-métrages allemands des années 1960-1970, rarement projetés, dans le cadre de la 29e édition du Festival international du film documentaire, « Cinéma du réel ». Y était présenté l’essai cinématographique de 15 minutes, Einleitung zu Arnold Schönbergs ‘Begleitmusik zu einer Lichtspielscene’ (Introduction à « une musique d’accompagnement pour une scène de film » d’Arnold Schönberg, 1972) réalisé par Jean-Marie Straub et Danièle Huillet. Alors que de nombreux spectateurs s’installent dans leurs sièges, une agitation se fait entendre depuis l’extérieur. Soudain, un groupe d’une cinquantaine de militants force le passage et fait irruption dans la salle. Tout en distribuant dans toute la salle des tracts de l’ère pré-Photoshop, le groupe, qui s’autodéfinit comme étant composé de jeunes chômeurs, réclame d’assister gratuitement à la projection, outré qu’un festival financé par de l’argent public puisse exiger que l’on paye sa place et plaidant globalement pour une séparation de l’art et du commerce. Offensée par cette manifestation, la directrice du festival – après avoir ordonné au technicien de ne pas démarrer la projection et mobilisé le service de sécurité afin qu’il intervienne physiquement dans la salle pour intimider les manifestants – prend la parole et déclare à la foule (notons que les spectateurs ayant payé leurs places se sont rangés presque unanimement du côté des manifestants, en dépit du désagrément) qu’elle ne se laissera pas « #terroriser » et forcée à poursuivre la projection, ce qui eût pour effet de prolonger l’#occupation de la salle par les spectateurs. En fin de compte, le programme prévu ne sera pas maintenu.

    #cinéma #autoréduction #chômeurs #gratuité

    • Je transmet : Ce qu’oublie monsieur Parfax, c’est que c’était aussi cette après midi là l’occasion de voir le seul film d’#Holger_Meins (#Oskar_Langenfeld) ; qu’il ne s’agissait pas seulement des Icônes Straub mais bien d’un geste lié à une programmation particulière. En PJ (les tracts, j’espère que ce sont les bons).

      LE RÉEL ? Chouette ! ENTRÉE LIBRE !!!

      « Si le cinéma ne s’était pas aussi complaisamment livré à la fausse alternative art/divertissement, il aurait pu servir d’outil de vérification de thèses essentielles. »

      Traversés de questions politiques que ne sauraient circonscrire de quelconques échéances électorales, nous venons, précaires sans qualités, sans #argent, en cette zone de miniaturisation du continent cinématographique (zone festivalière), faire en commun l’expérience de
      Am Siel (Au bord du chenal),
      de Aufsätze (Rédactions),
      de Von Griechenland (De la Grèce),
      de Einleitung zu Arnold Schönbergs « Begleitmusik zu einer
      Lichtspielscene » (Introduction à la “Musique d’accompagnement pour une scène de film” d’Arnold Schönberg),
      de Jeder ein Berliner Kindl (Bière pour tous),
      de Die Worte der Vorsitzenden (Les Citations du Président),
      de Farbtest : Die rote Fahne (Essai couleur : le drapeau rouge), et de Oskar Langenfeld – 12 mal (Oskar Langenfeld – 12 fois).

      « Du fleuve qui déborde on dit souvent qu’il est violent. Mais du lit qu’il enserre nul ne dira qu’il est violent. »

      Réponse à l’annulation :

      LE RÉEL ? telosblind1 !!

      « Si le cinéma ne s’était pas aussi complaisamment livré à la fausse alternative art/divertissement, il aurait pu servir d’outil de vérification de thèses essentielles. »

      Nous étions une trentaine à nous rendre à Beaubourg pour voir ces films programmés le samedi 10 mars, décidés à entrer dans la salle sans nous être acquittés du billet d’entrée. Nous pensons que faire l’#expérience en commun de ces films nous importe, ne serait-ce que parce que pour ces réalisateurs, le cinéma engage à quelque chose. La question d’ailleurs "à quoi engage le cinéma ?" plutôt que les sempiternelles atermoiements stériles autour d’un cinéma engagé ou politique, nous apparaît cruciale. Il ne peut s’agir de seulement considérer ces films comme appartenant à l’histoire du cinéma ou comme figures d’un courant du cinéma politique, mais de tenter de les rendre au présent et de pouvoir s’en saisir comme d’un héritage possible. « Ne pas payer notre place » pour les voir était ainsi une tentative de rendre possible cette expérience et permettait aussi, à la plupart d’entre nous – rmistes, chômeurs ou précaires – de tout simplement entrer dans la salle. De fait, il y eut bousculade, le zèle triste et défensif des précaires employés par le festival, l’atteste aujourd’hui encore.

      Ce geste simple et intrusif, à nos yeux relativement insignifiant, à l’aune de ce qui traverse ces films et qui nous traverse, qui ne mériterait pas d’explications, et moins encore de revendications, s’il n’avait pas rencontré une situation de blocage entraînant la décision, par la direction du festival, d’annuler la projection. Cette décision fût prise immédiatement : nous fûmes qualifiés de preneurs d’otages, de fascistes, de violents et donc Punis de projection(s). Le terme "punis" a ici son importance : il fut prononcé par madame la directrice. Pas de fric, pas de film ; pas de bras, pas de banania. Et puis on ne fait pas intrusion, cela ne se fait pas, ne se fait pas, le #réel ne peut avoir lieu. L’arrivée rapide d’une quinzaine de vigiles en costumes et en gants de cuir noir, prenant place tout autour de la salle et exigeant l’évacuation de tous les spectateurs fut, il est vrai, du plus glaçant effet.

      1 telos : le but, la fin... blind : aveugle...

      Beaucoup de spectateurs, partageant notre étonnement devant cette réaction délirante, insistaient avec nous pour que les films soient projetés. Nous étions tous venus ici pour voir ces films, mais il faut croire que cette décision simple ne pouvait pas être maintenue. Après nous être vus demandé, par la direction du festival, de présenter nos excuses aux gens à l’entrée (ce que nous avons fait malgré le ridicule de la situation, situation comprise des personnes qui munies de billets, s’excusaient à leur tour...), après avoir accepté de nous mettre sur le côté de la salle pour que les gens ayant acheté un billet soient tous sûrs d’avoir une place assise, la séance fut définitivement annulée par la direction du festival, pour des raisons de sécurité...
      Tristesse, stupidité, état des choses. Le problème en fait, c’est l’#irruption ; le problème, c’est de ne pas montrer patte blanche. Le problème, c’est de vouloir retrouver de la #présence dans des lieux qui instituent des programmes mais qui ont oublié que programmer n’est pas montrer ; que montrer des films, cela n’est pas remplir des rayons ou des cases comme on empilent des tendances dans la grande distribution : le grand marché fictif. Le problème, c’est de se satisfaire de cet intolérable présent, où il suffit de programmer deux fois des films d’importance pour s’acquitter d’une conscience politique à l’intérieur de vitrines (Beaubourg) désertées de pensées en acte. Nous ne sommes pas venus militer pour la gratuité de l’ensemble des marchandises culturelles (rien à foutre d’entrer gratos pour aller voir les dernières conneries en date), nous étions venus montrer par notre présence et pour ces films, notre amitié pour les choses dites politiques.
      Devant ces réactions, il faut donc bien reconnaître que notre intrusion a été vécue comme violente. Mais la seule violence qu’on peut nous imputer est celle de ne pas considérer comme évident le fait de devoir payer un droit d’entrée pour voir certains films, de ne pas consommer ces films comme de vulgaires marchandises et de travailler à les voir pour ce qu’ils sont. Une gigantesque publicité pour la culture proclame sur le fronton de Beaubourg, « Le #beau est toujours bizarre ». le #normal sera donc toujours laid.

      Ceux du 15 mars.

  • La Mort de l’imagination
    http://www.nonfiction.fr/article-7168-dossier___la_mort_de_limagination.htm

    Le philosophe Jean Baudrillard n’est pas très optimiste sur notre capacité à imaginer, aujourd’hui. Selon lui, la faute en incombe à une réalité envahie par un monde virtuel, hyperréel : « Ainsi avons-nous investi la réalité de tout notre imaginaire, mais c’est cet imaginaire qui est en train de s’évanouir, car nous n’avons plus l’énergie d’y croire. [...] C’est le trop de réalité qui fait qu’on y croit plus. Saturation du monde, saturation technique de la vie, excès de possibilités, d’actualisations des besoins et des désirs. Comment y croire, dès lors que la production de réalité est devenue automatique ? Le réel est asphyxié par sa propre accumulation. Plus moyen que le rêve soit l’expression d’un désir, puisque son accomplissement virtuel est déjà là. » . Ecrit il y a dix ans, ce constat visionnaire est aussi désolant que déterminant. Mais est-il vrai ?

    #Emmanuel_Kant #Imagination #Jean_Baudrillard #Philosophie #Romantisme #Réel #Virtuel