• Patrick Ollier réélu à la tête du Grand Paris à l’issue de tractations complexes
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/07/09/patrick-ollier-reelu-a-la-tete-du-grand-paris-a-l-issue-de-tractations-compl

    D’abord écarté par son propre camp, le maire de Rueil-Malmaison a été sauvé par la gauche et les centristes. A 75 ans, il repart pour un nouveau mandat de six ans.

    Il avait été écarté en amont par son propre camp et ne s’était donc pas porté candidat. Le vieux gaulliste Patrick Ollier a pourtant été réélu, jeudi 9 juillet, à la présidence de la Métropole du Grand Paris (MGP), à l’issue d’une étonnante série de rebondissements. Contesté par une partie de la droite, le maire de Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine) a été sauvé par la gauche et les centristes. Seul candidat, il a obtenu 133 voix sur 137 au second tour de scrutin. A 75 ans, il repart ainsi pour un nouveau mandat de six ans.

    Vincent Jeanbrun, le lieutenant de Valérie Pécresse qui avait gagné la primaire organisée au sein du groupe Les Républicains (LR) et se voyait déjà dans le fauteuil de président de la métropole, au point que cette perspective était déjà mentionnée sur sa page Wikipédia, a immédiatement dénoncé les « petits arrangements, les magouilles » ayant abouti à ce résultat surprise. « Certains ici font honte à la démocratie, a-t-il lancé. Cela dépasse ce qui s’est passé à Marseille ! Patrick Ollier a perdu son honneur de gaulliste. »

    A l’issue de la primaire tenue mardi soir au sein des élus LR et associés de la métropole, la situation paraissait claire. Vincent Jeanbrun, jeune maire de L’Haÿ-les-Roses, avait alors été choisi par la droite pour prendre la tête de la métropole, avec 54 voix contre 44 en faveur de Patrick Ollier. Jeudi, lors du conseil de la métropole tenu exceptionnellement au Palais des congrès de Paris, Vincent Jeanbrun a donc été le seul candidat de son groupe au premier tour. Mais il s’est retrouvé en concurrence avec un autre candidat de droite, Philippe Laurent, maire (UDI) de Sceaux (Hauts-de-Seine), ainsi qu’avec deux candidats de gauche. Aucun d’eux n’a obtenu la majorité absolue nécessaire.

    Au fil des suspensions de séance, de longues discussions ont alors eu lieu pour trouver une solution de compromis. Vincent Jeanbrun ? Trop dur, aux yeux de beaucoup. Sa volonté de dynamiter de l’intérieur une MGP jugée peu utile a heurté au sein de son propre camp. Philippe Laurent ? Son profil plus rond, son statut de secrétaire général de l’Association des maires de France auraient pu faire de lui un candidat plus consensuel. Une partie de la gauche a voté pour lui.
    Solution de compromis

    Aux yeux de beaucoup, il présentait toutefois une faiblesse majeure : il n’appartient pas à LR, mais à l’UDI. Avec lui, le parti de Christian Jacob aurait donc perdu le contrôle de la MGP. Difficile à avaler. Même Valerie Pécresse, la présidente de la région Ile-de-France, qui avait incité Vincent Jeanbrun à se présenter, en a convenu. Lors d’une suspension de séance, elle a incité son poulain à lâcher prise et à écarter également Philippe Laurent.

    C’est alors que Patrick Ollier, discret depuis le début, est apparu comme la solution de compromis. Il permet à son parti, LR, de garder la MGP. Mais il était aussi, depuis le début, soutenu par la gauche, Anne Hidalgo en tête. Depuis l’origine, l’ancien ministre, ex-député et fugace président de l’Assemblée nationale de mars à juin 2007, a, en effet, mis en place une « gouvernance partagée », qui associe les diverses tendances politiques.

    Anne Hidalgo, la maire socialiste de Paris, est ainsi la première vice-présidente de la MGP. Une situation que tenaient à maintenir les socialistes parisiens. Vincent Jeanbrun, lui, avait promis cette vice-présidence à Rachida Dati (LR), la grande rivale d’Anne Hidalgo à Paris. Au bout du compte, Patrick Ollier s’est ainsi retrouvé seul candidat à sa succession. « J’ai retiré ma candidature pour que mon parti garde la métropole, mais le résultat constitue une insulte à la démocratie, a commenté à chaud Vincent Jeanbrun. Avec Patrick Ollier, c’est le candidat d’Anne Hidalgo qui a été élu. »

    A ses côtés, Rachida Dati regrettait, elle aussi, le résultat de cette folle matinée : « Patrick Ollier s’est accroché à son siège et a négocié dans notre dos un deal avec Anne Hidalgo et l’UDI. » La maire de Paris, elle, s’est réjouie de la réélection de Patrick Ollier, qui lui permet de rester vice-présidente : « Je suis très, très heureuse qu’au bout de cette demi-journée on revienne à un dispositif qui permet aux maires de travailler ensemble en dépassant les clivages. » Des tractations en coulisse ? Emmanuel Grégoire, le premier adjoint d’Anne Hidalgo, résume autrement l’élection du candidat LR soutenu par la Mairie de Paris : « Cela s’appelle une opération rondement menée. »