Planification écologique : semaine de vérité pour le gouvernement

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  • Borne To Be Green 💚 #oupas hop | Mediapart | 18.09.23

    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/180923/planification-ecologique-semaine-de-verite-pour-le-gouvernement

    Alors que la loi énergie-climat n’est toujours pas programmée au Parlement, la première ministre doit présenter lundi aux chefs de partis politiques quelques mesures phares de planification écologique. Ou comment l’exécutif tente de changer le plomb macronien en or vert.

    par Lucie Delaporte et Jade Lindgaard

    probablement assez réaliste de ne s’attendre à rien - même pas de la comm de moyenne qualité

    • Borne reçoit ce lundi 18 septembre les chef·fes de partis politiques pour leur présenter les grands axes de la planification écologique promise par le président de la République. « L’enjeu est de poser le débat politique », indique Matignon, qui précise que toutes les organisations du spectre partisan ont répondu présent. Le rendez-vous se déroulera à huis clos, sans collaborateurs ni téléphone portable, comme lors des rencontres de Saint-Denis avec Emmanuel Macron.

      Ce sera la première étape d’une semaine ponctuée par un conseil national de la refondation consacré à ce sujet mardi, avant une déclaration du chef de l’État attendue en début de semaine prochaine. Le projet de loi de finances bientôt discuté au Parlement comportera plusieurs points relatifs à la planification écologique.

      La question de la souveraineté devrait être au cœur de l’intervention de la première ministre, alors que Matignon explique que « sortir des énergies fossiles, on le fait pour le climat mais aussi pour nos économies, pour le pouvoir d’achat, car le pétrole est à l’origine de beaucoup des crises économiques qu’a vécues notre pays ces dernières années ».

      Autre axe de discussion : la tension entre les tenants de l’« innovation » et ceux de la « sobriété ». « Nous pensons qu’il faut sortir de l’opposition et combiner les deux », assure Matignon, qui avance que les échanges avec les chef·fes de partis porteront également sur « la répartition juste des efforts » pour mener cette transition entre entreprises, ménages et collectivités territoriales notamment. Car l’intensité de l’effort à fournir implique aussi de s’interroger sur la manière de « rendre ces mesures acceptables pour les citoyens ».
      Ces communications de l’exécutif font suite à des mesures structurantes égrenées depuis le début de l’année : 100 milliards d’euros sur cinq ans pour la décarbonation des industries, 4 milliards en plus d’aides de l’État pour les propriétaires qui engageront des travaux de rénovation énergétique (MaPrimeRenov’) ou encore 264 millions d’euros supplémentaires pour la biodiversité. Au total, l’État devrait dépenser 7 milliards d’euros de plus qu’en 2023 pour financer la transition écologique.

      Il y a aussi les 300 millions d’euros de soutien à l’avion bas carbone et les 200 millions pour la production de biocarburants, la hausse du bonus sur les voitures électriques (dévoilée par Les Échos), le développement des RER métropolitains, le plan eau, et le lancement des travaux en vue du plan Ecophyto 2030.

      Ovni dans la technocratie

      En tout, vingt-deux chantiers ont été identifiés par l’exécutif : construction et rénovation des logements, voitures et infrastructures routières, décarbonation de l’industrie, numérique responsable, préservation de l’eau, etc. C’est beaucoup mais c’est l’échelle d’action indispensable pour respecter les objectifs de réduction des gaz à effet de serre, premières causes du dérèglement climatique. En application de l’accord de Paris sur le climat et du plan européen « Fit for 55 », la France doit réduire de 55 % ses émissions de CO2 d’ici à 2030, et de 80 % d’ici à 2050.

      En juillet, à l’occasion du conseil national de la transition écologique réunissant associations, collectivités, entreprises, syndicats et représentant·es de l’État, des indicateurs de la planification écologique ainsi que des leviers d’action de décarbonation ont été rendus publics par le gouvernement : montée du covoiturage et électrification des flottes de véhicules d’entreprise, changements de chaudières, efforts de sobriété, objectif de rénovation des bâtiments, gestion plus durable des forêts, etc.

      Mais cette floraison d’annonces à dimension écologique se fait dans une grande incertitude politique. Le projet de loi énergie-climat n’a toujours pas de date de discussion parlementaire alors qu’il devait être voté avant l’été. Il pourrait être reporté à 2024. Or de lui dépend l’établissement de la nouvelle programmation pluriannuelle énergétique (PPE), qui est l’un des principaux outils de planification. Elle définit les objectifs de sources renouvelables, d’efficacité, la part du nucléaire dans le mix électrique ou les politiques de réduction du coût de l’énergie.

    • Lors de l’examen des lois d’accélération des renouvelables et de celle sur le nouveau nucléaire, au premier semestre 2023, l’exécutif avait renvoyé à ce nouveau texte législatif [le projet de loi énergie-climat] la discussion sur la part du nucléaire dans la production d’électricité.

      Si les mondes politique et économique attendent un discours d’Emmanuel Macron pour marquer de son sceau l’entrée dans l’ère de la planification écologique, le travail a en réalité déjà commencé. En juillet 2022, un décret a créé le secrétariat général à la planification écologique (SGPE). Véritable ovni dans la technocratie française, ce conseil d’expert·es est directement rattaché à Élisabeth Borne.

      C’est une sorte de cerveau collectif extérieur, dirigé par un membre de son cabinet, ancien conseiller du chef de l’État et ancien directeur général d’En marche !, Antoine Pellion. « C’est un peu comme une extension du cabinet, décrit un de ses membres, on sert à challenger les ministères. » Ingénieur·es, diplômé·es de l’école des Mines, scientifiques, ils apportent des réponses techniques à des questions de politique générale et s’autosaisissent de problèmes à résoudre. « Si Antoine trouve que c’est une bonne idée, ça passe en interministériel ». Avec trente-cinq personnes, c’est un petit laboratoire de têtes chercheuses à visée opérationnelle.

      Nouvelle ère, nouvelles méthodes. Le SGPE publie sur son site une partie de ses documents de travail, version provisoire d’indicateurs, « powerpoints » présentés en réunion. Antoine Pellion les relaie sur son compte Linkedin. L’open data fait partie de la culture de cette nouvelle génération d’expert·es.

    • face aux ministères qui refusent de s’adapter à la nouvelle donne climatique. Le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau, s’est illustré à la mi-juillet en déclarant qu’« on a plutôt des températures qui sont assez normales pour un été ». Alors que les températures estivales de 2023 sont en quatrième position des températures les plus chaudes depuis 1900 selon Météo-France.

      La question agricole est d’ailleurs l’un des points durs de blocage de la bifurcation écologique. Le 12 juillet, à la veille d’un important conseil national de la transition énergétique (CNTE), qui doit discuter des premières grandes lignes de la planification écologique, le SGPE met la dernière main à ses « slides ». Dans la soirée, Matignon les envoie aux autres ministères en demandant de les garder confidentiels. Le lendemain matin, en CNTE, le représentant de la FNSEA (premier syndicat agricole) en livre une critique très précise. Trop détaillée pour avoir été improvisée, selon un participant. Le syndicat agricole avait à l’évidence bénéficié d’une fuite.

      donc, bien penser à dissoudre la #FNSEA => https://petitions.assemblee-nationale.fr/initiatives/i-1385 ping @politipet

    • Les arbitrages en faveur de l’écologie restent toujours aussi durs à obtenir en macronie. Difficile, par exemple, de faire entrer le sujet du poids des véhicules dans les leviers d’action pour décarboner les transports. Pourtant, des voitures plus légères polluent beaucoup moins. Mais Bercy ne veut pas de mesures jugées défavorables à l’industrie automobile française.

      Il est, de plus, toujours aussi difficile de faire accepter les objectifs de sobriété : moins de déplacements, moins de construction, moins de consommation de viande. Tout comme le besoin de contraintes et de régulation, sans lesquelles les objectifs climat risquent de n’être atteints que sur le papier.