• À Paris, la BRAV-M percute et tue un piéton | Pascale Pascariello, Camille Polloni et Matthieu Suc
    https://www.mediapart.fr/journal/france/171223/paris-la-brav-m-percute-et-tue-un-pieton


    Policiers de la BRAV-M lors d’une manifestation pour Nahel à Paris le 30 juin 2023. © Claire Série / Hans Lucas via AFP

    Dans le XIXe arrondissement de Paris, le 12 décembre, un équipage de la BRAV-M, unité de police à moto, a percuté un homme. Grièvement blessé, il est décédé. Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire pour déterminer les circonstances de cet accident mortel et la responsabilité des policiers.

    Déjà décriées pour leurs interventions violentes contre des manifestant·es, les brigades de répression de l’action violente motorisées (#BRAV-M), escouades de policiers se déplaçant en binôme sur des motos, sont aujourd’hui mises en cause pour leur conduite dangereuse dans les rues de Paris. 
    Un de leurs équipages a percuté un passant, mardi 12 décembre, dans le XIXe arrondissement de Paris. Cet homme âgé a été grièvement blessé, souffrant notamment d’un traumatisme crânien. Transporté aux urgences, il est décédé deux jours plus tard. 
    Le parquet de Paris a confirmé, auprès de Mediapart, avoir saisi l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) dans le cadre d’une enquête préliminaire ouverte sur les circonstances de cet accident mortel. Le service de traitement judiciaire des accidents (STJA) de la police parisienne est également saisi. 

    Selon une source à la préfecture de police de Paris, la BRAV-M « circulait en colonne » depuis sa caserne, située porte de la Villette dans le XIXe arrondissement, pour se rendre en mission dans un autre arrondissement de la capitale, quand l’une des motos a percuté un piéton qui traversait l’avenue de Flandre à proximité du métro Crimée.
    Une source policière, citée par l’AFP, indique que la BRAV-M répondait « à une demande de renfort d’un équipage de la direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne ». Selon la version des policiers mis en cause, le motard n’a pu éviter ce passant, « une bouteille à la main, semblant ivre », sinon il aurait « emplafonné une camionnette garée en double file ». 
    D’après les premiers éléments de l’enquête, l’alcootest du motard s’est révélé négatif mais des résultats d’analyses sanguines sont encore attendus. Le parquet a lancé des recherches pour retrouver des témoins potentiels et identifier la camionnette susceptible d’avoir gêné les policiers. Selon les agents, leur vitesse « n’aurait pas été excessive », une vidéo tournée un peu avant l’accident permettant d’en attester, sous réserve d’une mesure de vitesse ultérieure.  
    Ce n’est pas la première fois que la conduite de ces policiers pose problème. En effet, selon une source à la préfecture de police, des élus et habitants avaient fait part de leurs inquiétudes face aux excès de vitesse et au comportement routier de la BRAV-M lorsque ces policiers partaient en mission et rentraient à leur caserne. À la suite de ces alertes, il y a quelques semaines, le préfet de police, Laurent Nuñez, a convoqué ces brigades et, selon cette source, leur aurait dit : « Vous êtes une unité contestée, vous devez être irréprochables y compris dans vos déplacements. » 
    C’est en mars 2019, quelques jours après la nomination à la tête de la préfecture de police de Paris de Didier Lallement et en plein mouvement des « gilets jaunes » qu’apparaissent officiellement, au cours de manifestations parisiennes, les BRAV-M.
    Mais ces unités étaient déjà en gestation. Dès décembre 2018, sur décision du ministre de l’intérieur Christophe Castaner et du préfet Michel Delpuech, des binômes de policiers motorisés, interdits depuis le décès de Malik Oussekine en 1986, étaient déjà présents dans les rues de Paris. 

    Depuis, ces brigades sont devenues le symbole ambulant de ce que les manifestant·es reprochent aux forces de l’ordre françaises : une violence imprévisible, indiscriminée et gratuite. Plusieurs enquêtes visent la BRAV-M, notamment pour avoir agressé gratuitement un étudiant de 22 ans, ou encore pour avoir, le 20 mars à Paris, roué de coups et proféré des insultes racistes à l’égard de Souleymane, 23 ans. 
    Dans un rapport publié le 13 avril, l’Observatoire parisien des libertés publiques (OPLP), créé à l’initiative de la Ligue des droits de l’homme (LDH) et du Syndicat des avocats de France (SAF), étrille ces brigades. Intitulé « Intimidations, violences, criminalisation : La BRAV-M à l’assaut des manifestations », et fondé sur 90 observations des pratiques de maintien de l’ordre à Paris depuis le 1er mai 2019, ce rapport livre un réquisitoire sévère contre ces brigades « violentes et dangereuses, promptes à faire dégénérer les situations ».
    Hasard du calendrier : le 13 décembre, au lendemain de l’accident mortel, des membres de la BRAV-M jouaient les pères Noël à l’hôpital Necker-Enfants malades, en compagnie de la brigade de recherche et d’intervention (BRI). Dans un article consacré à cette opération organisée par une association de policiers, Le Parisien souligne « la tension » palpable chez les cadres de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), qui n’avaient pas été prévenus de la présence de la BRAV-M auprès des enfants. « Après avoir envisagé d’annuler au dernier moment le convoi pourtant déjà en route, l’AP-HP donna son feu vert », ajoute le quotidien.