• J’archive cette histoire sur Les Suppliantes à la Sorbonne

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    Voici le texte rose-brun !
    Le texte touche pas à ma racine gréco romaine.
    Le texte qui défend (à raison) la liberté de création mais en profite pour taper sur l’antiracisme. Le texte signé par tant d’ami.e.s que j’en perds mon latin. Le texte pour la défense du blackface pensé comme acte de création (quel talent). Le texte qui te ferait passer la valeur d’égalité pour du politiquement correct, le respect pour de la soumission au communautarisme, La lutte contre le racisme pour de l’identitarisme et la culture pour toutes et tous pour de la servitude volontaire. Si je suis habitué à avoir des ennemi.e.s, il est plus nouveau d’avoir des ami.e.s parmi les signataires qui se trompent autant... ou peut être, simplement se dévoilent : elles et eux qui attendaient qu’un spectacle universitaire amateur soit bloqué par deux ou 3 abrutis (je les condamne pour l’action tout autant que je comprends leur colère) pour monter l’événement en épingle, bien faire mousser, et enfin s’allier aux « on peut plus rien dire-on peut bien rigoler-yapasd’mal à se peindre en bamboula-c’est ma liberté de création-mon point de vu perso est universaliste alors ta gueule sale communautariste » et finalement vomir leur fiel trop longtemps contenu contre l’antiracisme.
    Pour info, contrairement à ce qui est écrit en intro de ce texte, le Cran n’était même pas présent sur ce blocage et ne l’a donc pas appelé de ses vœux. Mais bon, ma bonne dame, on n’est pas à un mensonge près quand on est idéologue.
    Bande de blaireaux !
    Alors oui, cher.e.s signataires (et parmi vous mes potes) vous avez le droit de vous peindre en noir.e.s pour jouer des noir.e.s. si ça vous fait kiffer, si ça vous flatte la liberté. Et personne ne devrait bloquer un spectacle, c’est vrai. Mais moi j’ai aussi le droit de vous dire que le faire, se déguiser en noir, en asiatique, en arabe... aujourd’hui, dans le contexte qui est le nôtre, en pleine conscience... ça fait de vous des ordures.
    C’est politiquement correct ça ?

    #Suppliantes #Eschyle #PrintempsRépublicain #Antiracisme

    • Pour Eschyle » L’almanach » Autour
      https://www.theatre-du-soleil.fr/fr/guetteurs-tocsin/pour-eschyle-103

      L’UNEF n’est pas en reste, qui exige des excuses de l’université, en termes inquisitoriaux : « Dans un contexte de racisme omniprésent à l’échelle nationale dans notre pays, nos campus universitaires restent malheureusement perméables au reste de la société, perpétrant des schémas racistes en leur sein. » Le 28 mars, après les réactions fermes de La Sorbonne, des Ministères de l’Enseignement Supérieur et de la Culture ainsi que d’une partie de la presse, dénonçant une atteinte inacceptable à la liberté de création, les mêmes étudiants commissaires politiques ont sécrété un interminable communiqué en forme de fatwa, exigeant réparation des « injures », entre autres sous forme d’un « colloque sur la question du “blackface” en France » : un programme de rééducation en somme, déjà réclamé par Louis-Georges Tin.

      #Islamophobie #Racisme

    • L’offensive des obsédés de la race, du sexe, du genre, de l’identité…
      https://www.marianne.net/societe/l-offensive-des-obsedes-de-la-race-du-sexe-du-genre-de-l-identite

      Les signaux sont nombreux qui montrent qu’un nouveau militantisme antiraciste confinant au racisme se propage dans notre société. Universités, syndicats, médias, culture, partis politiques… Ce courant de pensée né aux Etats-Unis "colonise" tous les débats.
      Les « racisés » souffrent d’« invisibilisation », ce qui devrait pousser à s’interroger sur les « privilèges blancs » et le « racisme d’Etat » en France. Si la triple relecture de cette phrase ne suffit pas à vous extirper d’un abysse de perplexité, c’est que vous n’avez pas encore fait la connaissance de la mouvance « décoloniale ».

      Vous n’êtes donc probablement pas un familier des organisations de gauche. Depuis plusieurs années, dans un mouvement qui s’accélère ces derniers mois, une idéologie nouvelle gagne ces milieux militants, qu’ils soient universitaires, syndicaux, associatifs, politiques ou artistiques. Sa dernière apparition spectaculaire remonte au 25 mars dernier, à l’entrée de la Sorbonne, sous les bannières de trois associations de défense des droits des personnes noires. Elles ont empêché la représentation d’une adaptation des Suppliantes, la pièce du poète antique Eschyle, dont certains comédiens blancs ont été accusés d’arborer du maquillage et des masques noirs pour interpréter une armée venue d’Afrique. Un blackface, c’est-à-dire un grimage raciste pour moquer les Noirs, ont expliqué ces manifestants. Le metteur en scène, Philippe Brunet, a eu beau rappeler ses engagements humanistes ou plaider pour qu’on puisse « faire jouer Othello [le personnage africain de Shakespeare] par un Noir ou par un Blanc maquillé », rien n’y a fait. « Il n’y a pas un bon et mauvais blackface », a rétorqué Louis-Georges Tin, président d’honneur du Conseil représentatif des associations noires (Cran).

      Sans que le grand public y prête encore attention, ces activistes, dont l’antiracisme confine souvent au racisme, conquièrent régulièrement de nouvelles organisations, comme le Planning familial, Act Up, qui lutte contre le sida, ou le syndicat SUD. Il ressort de l’enquête de Marianne que ces militants pointent également le bout de leur doctrine au Mouvement des jeunes socialistes, à la CGT, à la Ligue des droits de l’homme, dans les médias « progressistes » et dans les départements universitaires de...

      #Paywall (ça vaut peut-être mieux)

    • L’irruption du « classe, race, genre » à la Sorbonne - Libération
      https://www.liberation.fr/debats/2019/04/02/l-irruption-du-classe-race-genre-a-la-sorbonne_1718913

      La mise en scène des Suppliantes peut-elle échapper à la question de l’inscription de cette pièce dans l’Histoire ? Les Suppliantes posent non seulement la question de la représentation des « Noirs » au théâtre, mais celle du désir avec des femmes qui décident d’échapper au pouvoir des mâles, à leur société et qui, s’exilant, se mettent en situation d’émigrées déclassées et fragilisées. Nous sommes donc placés de façon contemporaine devant la question de l’intersectionnalité « classe, race, genre ». Les spectateurs d’aujourd’hui à la Sorbonne ne sont pas les Athéniens de cette époque-là. Ils ne peuvent faire abstraction des traites négrières transatlantiques, du colonialisme, des conceptions racistes sur « les Noirs » de Gobineau jusqu’au nazisme et l’Amérique du Ku Klux Klan, sinon au prix d’une déshistoricisation, dont on voit avec les Euménides qu’elle est une illusion.

      L’appel du Cran à organiser un colloque ouvert à la Sorbonne semble donc une bonne proposition. Il faut entendre ce que nous disent ces étudiants de la Sorbonne.

    • « Blackface », une histoire de regard - Libération
      https://www.liberation.fr/debats/2019/04/10/blackface-une-histoire-de-regard_1720559

      Qui est représenté, par qui, et qui regarde ? C’est à ce nœud-là que renvoie l’affaire des Suppliantes d’Eschyle, spectacle annulé à la Sorbonne le 25 mars sous la pression d’associations noires et de l’Unef, au motif que les actrices jouant les Danaïdes, originaires d’Egypte, étaient grimées. Le metteur en scène, Philippe Brunet, aurait fait la sourde oreille aux alertes répétées des étudiants et des militants depuis un an, puis aurait proposé de remplacer le maquillage par des masques, geste qui s’inscrit dans la tradition grecque et qui permettait de signifier mieux que de représenter. Mais cette option aurait aussi été rejetée par les protestataires. Un certain nombre d’entre eux a empêché la pièce d’être jouée, en s’opposant à l’entrée des acteurs et des actrices dans leurs loges.

      Le Conseil représentatif des associations noires (Cran), et son président d’honneur, Louis-Georges Tin, avaient appelé au boycott de la pièce, ce qui est une façon - et un droit - de protester sans interdire. Mais barrer l’entrée à des artistes, comme l’a fait un petit groupe, c’est faire œuvre de censure, et torpiller d’emblée un débat pourtant très nécessaire en France.

      Ce débat interrogerait la survivance plus ou moins inconsciente ou perverse de l’orientalisme, et de pratiques injurieuses contemporaines de l’esclavage, hors de propos au XXIe ; il poserait aussi la question passionnante des effets du travestissement au théâtre, qui est l’espace par excellence où les plus grandes libertés avec les conventions et avec l’actualité du monde ont été prises. En pleine crise des migrants en Europe, ce débat que n’importe qui devrait appeler de ses vœux relève bien de l’art, de la liberté de création, et des choix politiques qui les accompagnent nécessairement. L’ouvrir et en déplier les enjeux permettrait peut-être de dépasser ce clivage entre un « universalisme de surplomb » (Merleau-Ponty) européo-centré tout aussi crispé idéologiquement que les débordements de la pensée décoloniale. Il autoriserait aussi, qui sait, à trouver une issue à ce constat formulé par Nelson Mandela : « Ce que vous faites pour nous, sans nous, est toujours contre nous. »

    • Isabelle Barbéris : « Eschyle censuré, ou quand la moralisation de l’art tourne au grotesque »
      http://www.lefigaro.fr/vox/culture/2019/03/28/31006-20190328ARTFIG00044-isabelle-barberis-on-censure-eschyle-pour-crimina

      En creux, cette polémique révèle aussi une stratégie de criminalisation souterraine de la culture gréco-latine, par rétroactivité pénale. C’est une attaque contre la culture humaniste, contre le processus d’émancipation par la relecture des classiques. C’est enfin le symptôme d’une moralisation des arts (l’ « artistiquement correct »), transformant ces derniers en scène de tribunal ou d’expiation, ce qui à terme ne peut que les détruire. Les artistes qui répondent à ces attaques en entrant dans la justification ne comprennent pas que les accusateurs se moquent complètement de leur projet artistique ! Parfois, ils sont même responsables d’enclencher ce cycle infernal : la surenchère actuelle d’œuvres à messages manichéens, à base de postures flagellantes et de bonnes intentions, ne peut que réveiller l’appétit des commissaires du peuple - qui seront toujours mieux pensants qu’eux - et se retourner en censure.

      #grand_remplacement #Printemps_Républicain

    • Irène Bonnaud - Les gens qui animent l’institut dont il est...
      https://www.facebook.com/irene.bonnaud/posts/1137833263058040

      Les gens qui animent l’institut dont il est question ci-dessous sont des nazis, des vrais de vrais. L’article du Monde que je partage est encore bien trop gentil. Et quant à nos ami.e.s qui auraient l’idée de se mettre au diapason d’un Jean-Yves Le Gallou pour déclarer que les militants antiracistes sont racistes, que les militants antifascistes sont fascistes, que le noir est blanc et le blanc est noir, et qu’il faut se dresser pour défendre Eschyle contre l’extrême-gauche, ils feraient mieux de lire cet article, de jeter un œil sur ce site (https://institut-iliade.com) et d’y réfléchir à deux fois. Combien de fois faudra-t-il répéter que les gens du Printemps Républicain travaillent, "à gauche", à l’hégémonie culturelle de l’extrême-droite, aussi sûrement que les néo-conservateurs américains nous ont conduit jusqu’à Trump ? On peut s’engueuler sur les modes et méthodes d’intervention de tel ou tel groupe militant, mais s’aligner sur les thèses du "grand remplacement", même quand elles sont enrobées de vernis culturel, reste inadmissible. Non, la culture gréco-latine n’est pas menacée par l’antiracisme politique. Se livrer aux mêmes manipulations intellectuelles que ces crapules (en feignant de croire par exemple qu’Eschyle était visé à la Sorbonne, alors qu’il s’agissait de choix de mise en scène), c’est leur offrir une aide inespérée.
      –—
      Marion Maréchal, Génération identitaire et les anciens du Grece réunis dans un colloque d’extrême droite
      L’ancienne députée du Front national a participé samedi à Paris au sixième colloque annuel de l’institut Iliade.
      Par Lucie Soullier / Le Monde
      Publié hier à 19h14, mis à jour à 06h24
      Ils doivent avoir vingt ans, ou à peine plus. Se connaissent par des prénoms qui ne sont pas toujours les leurs, parce qu’« on ne sait jamais ». Lui a même supprimé toutes les photos de profil qui pourraient trahir, en ligne, sa véritable identité. Méfiant ? « Prudent. »
      Tous les quatre se sont retrouvés à Paris, en ce samedi 6 avril ensoleillé, pour assister à un colloque d’extrême droite à la Maison de la chimie (7e arrondissement). Loin d’être un rendez-vous clandestin, le sixième colloque annuel de l’institut Iliade a pignon sur la très chic rue Saint-Dominique. A deux pas de l’Assemblée nationale. La file qui s’étire sur des dizaines de mètres peut même admirer la pointe de la Tour Eiffel, pour patienter jusqu’à l’entrée.
      Nos quatre jeunes gens tuent le temps avec quelques convenances. « Ça a été ton trajet ? », s’enquiert la Parisienne en rouge auprès de son ami venu de l’Est. Sac sous le bras, il lui répond « ça va, ça va » avec un « mais » très appuyé : « J’avais le choix de m’asseoir entre un Noir et une personne dirons-nous… marron. » Bras en écharpe et blouson noir, son voisin enchérit tout aussi excédé : « Ah moi, je suis venu en taxi avec un bon gros… » Il ne finira pas sa phrase ; tous quatre s’accordent sur le terme « guadeloupéen ». La fille en rouge soupire, tout en jugeant que « les Noirs des îles, ça va ».
      Différence entre les peuples
      Fouille à l’entrée. Une matraque télescopique repose sur une table, confisquée « juste pour la journée ». Une chouette et un glaive flottent sur les drapeaux, emblèmes de l’institut Iliade. Idéologiquement à l’extrême droite, tendance identitaire européenne, à majorité païenne mais pas que, Iliade est l’héritier du Grece (Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne) pensé à la fin des années 1960 comme une « Nouvelle droite » identitaire et nationaliste prêchant la différence entre les peuples.
      Pour les fondateurs d’Iliade, la bataille culturelle est la mère de toutes les autres pour faire triompher ses idées. L’institut d’extrême droite organise donc formations, colloques et tente d’essaimer dans tous les milieux professionnel et politique qui peuvent lui permettre de diffuser son idéologie.
      Marion Maréchal était surtout venue soutenir son compagnon, Vincenzo Sofo, invité à discourir sur « les frontières ou les invasions barbares »
      Pas étonnant donc, finalement, d’y croiser Marion Maréchal, elle qui a tant utilisé la figure du penseur marxiste italien Antonio Gramsci – selon lequel toute victoire politique passerait d’abord par une conquête des esprits – pour expliquer sa décision de quitter la politique électorale en 2017, puis de fonder sa propre école de sciences politiques, à Lyon. En réalité, la jeune « retraitée » de la politique était surtout venue soutenir son compagnon, Vincenzo Sofo, un intellectuel de la Ligue italienne invité à discourir sur « les frontières ou les invasions barbares ».

      #Front_National #GRECE #ILIADE #Extrême_Droite #fascisme

    • Irène Bonnaud - En 2013, j’avais écrit une préface à ma traduction...
      https://www.facebook.com/irene.bonnaud/posts/1132136533627713

      En 2013, j’avais écrit une préface à ma traduction des Suppliantes d’Eschyle, et au texte de Violaine Schwartz, Io 467 (publiés aux Solitaires Intempestifs). Je la poste ici pour les très curieux, et aussi parce que je lis tant de bêtises, y compris accompagnées d’arguments d’autorité ("je suis professeur de Lettres Classiques, et je vous dis, moi, que c’est la culture qu’on assassine..."), que je suis obligée de réagir et d’apporter mon soutien aux étudiantes et étudiants de la Sorbonne qui, après s’être senti.e.s humilié.e.s par un système de représentation raciste, sont à présent insulté.e.s par les plus hautes autorités de l’Etat. Enfin, après 8 heures de Grand Débat avec des intellectuel.le.s, où personne n’a protesté avec la véhémence nécessaire contre l’augmentation de 1400% des droits d’inscription à l’Université pour les étudiant.e.s africain.e.s (parce que c’est de ça dont il s’agit), plus rien ne m’étonne.
      –—
      Passé / présent
      Des tragiques grecs dont on a conservé les pièces‚
      Eschyle est le seul à avoir vécu l’instauration de la
      démocratie à Athènes.
      Enfant‚ il vivait dans une cité qui était bourgade
      de province gouvernée par un despote‚ mais à 20 ans
      il vit Clisthène engager des réformes pour imposer
      le pouvoir des assemblées. À 35 ans il fut héroïque‚
      paraît-il‚ sur le champ de bataille de Marathon‚ puis
      à 45 ans triompha avec la flotte à Salamine : au géant
      perse qui venait envahir la Grèce‚ la petite Athènes‚
      forte de sa nouvelle démocratie et de ses navires‚ avait su
      résister et se retrouvait capitale d’un empire maritime.
      Huit ans plus tard‚ dans sa pièce Les Perses‚ racontant
      Salamine du point de vue des vaincus‚ Eschyle mit en
      scène leur stupéfaction devant ces Grecs « ni esclaves
      ni sujets d’aucun homme ». Et quand‚ en 461‚ Éphialte
      fit passer la réforme des institutions judiciaires pour
      ôter tout pouvoir politique au tribunal de l’Aréopage‚
      tenu par les aristocrates‚ Eschyle écrivit l’Orestie où
      Athéna vient appuyer ce coup de force de toute son
      autorité sacrée.
      Confiance provocatrice en la démocratie et confiance
      dans le théâtre pour raconter les histoires de son
      temps : les pièces d’Eschyle étaient aussi interventions
      directes dans les luttes intestines qui agitaient Athènes‚
      toujours sous la menace d’une restauration oligarchique
      ou d’une guerre civile.
      Les Exilées ne fait pas exception. Premier texte
      de l’histoire où apparaît l’alliance de mots « démocratie
       » pour décrire ce royaume d’Argos « où le
      peuple règne »‚ la pièce d’Eschyle transforme la ville
      des Pélages en démocratie modèle du ve siècle‚ avec
      assemblée des citoyens‚ parole qui persuade et vote à
      main levée. L’anachronisme est saisissant. Les filles de
      Danaos qui pensent s’adresser à un roi (« Seul ton vote
      compte / Un signe de tête suffit ») n’en croient pas leurs
      oreilles‚ avant d’être converties au nouveau système
      politique (« Peuple d’Argos / Conserve ton pouvoir
      sans trembler / Tu diriges la Cité avec prudence / Tu te
      soucies de l’intérêt de tous »).
      On s’est beaucoup trompé au sujet de la date des
      Exilées. De savants professeurs‚ et leurs commentaires
      repris ou réimprimés par beaucoup d’éditions bon
      marché‚ ont affirmé qu’il devait s’agir d’une pièce
      « primitive »‚ de la « jeunesse » de son auteur et des
      « balbutiements » du genre tragique. Pour l’esprit bourgeois
      des xviiie et xixe siècles‚ ce qui n’était pas théâtre
      des individus devait relever d’une « forme archaïque »
      de dramaturgie. Le rôle central du choeur dans la pièce‚
      le simple fait qu’un collectif puisse être au centre de
      l’action‚ paraissait inconcevable au goût littéraire de
      l’époque. C’était aussi le temps où on coupait les pièces
      de Shakespeare pour n’en garder que les tirades des
      protagonistes. Mais les théories sur l’« archaïsme » de
      la pièce d’Eschyle s’effondrèrent d’un coup quand‚
      un jour de 1951‚ un archéologue trouva un bout de
      papyrus au fond du désert égyptien : la pièce datait de
      463 av. J.‑C. et cette année-là‚ Eschyle avait 62 ans
      – comme Athènes‚ il était au sommet de son art.
      On était donc au printemps 463.
      Les démocrates athéniens s’agitaient pour faire
      passer leurs réformes‚ ils préconisaient une alliance
      sacrée avec Argos‚ la cité démocratique du Péloponnèse‚
      rivale de Sparte dans la région. Argos venait
      d’offrir l’asile à un héros d’Eschyle‚ Thémistocle‚ chef
      du parti démocratique au temps de sa jeunesse‚ l’homme
      qui avait osé vider Athènes de ses habitants pour attirer
      les Perses dans le piège de Salamine. Les aristocrates
      avaient poussé Thémistocle à l’exil et intriguaient pour
      qu’Argos livre son réfugié à Sparte‚ mais Argos‚ où
      la démocratie avait été restaurée l’année précédente‚
      tenait bon et ne cédait pas.
      Au même moment‚ en Égypte‚ occupée par l’Empire
      perse dont le gouverneur accablait d’impôts les
      paysans du delta‚ la révolte grondait. Inaros‚ chef des
      tribus libyennes‚ avait soulevé la population contre
      l’occupant et demandé l’aide d’Athènes contre l’oppresseur.
      Cette expédition se terminerait mal‚ mais
      pour l’heure‚ on se passionnait pour l’Égypte où les
      Grecs commerçaient depuis des siècles‚ où des villes
      grecques avaient été fondées dans le delta du Nil‚ où
      une déesse aux cornes de vache rappelait tant la légende
      de Io‚ et un dieu taureau‚ son fils Épaphos.
      Aucun événement historique de l’époque d’Eschyle
      n’apparaît de façon mécanique dans le texte‚ mais on
      voit bien comment un certain climat politique a pu
      le pousser à s’emparer de la légende des Danaïdes.
      Cinquante princesses noires du delta du Nil‚ persécutées
      dans leur pays‚ fuyant un mariage forcé avec
      leurs cousins‚ traversent la Méditerranée et viennent
      demander l’asile à Argos‚ patrie de leur aïeule‚ Io‚ qui
      a fui en sens inverse quelques générations plus tôt.
      Après avoir tergiversé‚ le roi prend fait et cause
      pour les étrangères et convainc les citoyens de voter un
      décret leur assurant asile et protection. On comprend à
      la fin du texte que l’hospitalité accordée à ces femmes
      « venues de loin pour demander l’asile »‚ comme le
      suggère le titre grec de la pièce‚ Hiketides‚ va déclencher
      une guerre entre Argos et les fils d’Égyptos.
      On ne sait pas grand-chose de la suite des événements
      car Les Exilées est la seule partie conservée de
      la trilogie d’Eschyle. D’après la légende et le résumé
      qu’en fait Prométhée dans Prométhée enchaîné‚ les
      fils d’Égyptos gagneront la guerre‚ le roi Pélasgos
      mourra au combat‚ Danaos‚ le vieux roi africain‚
      montera sur le trône d’Argos‚ et feignant de céder‚ il
      donnera ses filles en mariage à leurs ennemis. Mais la
      nuit de noces venue‚ chacune égorgera son chacun‚ à
      l’exception d’une seule qui préférera « être appelée
      lâche que sanguinaire ». Le couple survivant‚ amoureux‚
      héritera du trône d’Argos. C’est ce happy end
      sur fond de cadavres qui explique peut-être le seul
      passage conservé du reste de la trilogie‚ attribué à la
      déesse Aphrodite :
      Le ciel sacré veut pénétrer la terre
      Elle
      Prise de désir
      Attend son étreinte
      Il se couche sur elle
      Et du ciel tombe la pluie et engrosse la terre
      Pour les mortels
      Elle enfante
      Les prairies où paissent les troupeaux
      Les fruits de Déméter
      Et de leur étreinte humide
      Chaque printemps renaît la forêt
      De tout cela je suis la cause
      Le texte même des Exilées est objet de débats‚ des
      passages du manuscrit étant très corrompus : dans la
      scène entre l’éclaireur ennemi et les filles de Danaos
      ne surnagent que des mots épars et c’est comme si
      l’effondrement du texte mimait la panique ressentie
      et la violence de la scène. L’incertitude est grande aussi
      quant au final où le choeur paraît entrer en discussion‚
      et en contradiction‚ avec lui-même‚ peut-être pour
      annoncer l’heureux dénouement de la trilogie.
      Mais les incertitudes philologiques ne peuvent
      seules expliquer pourquoi la seule tragédie grecque
      ayant des femmes noires comme héroïnes est aussi
      l’une des plus méconnues et des moins jouées.
      Même si beaucoup de ses hypothèses sont sujettes
      à caution‚ on peut reconnaître à Martin Bernal et à sa
      Black Athena le mérite d’avoir rappelé l’idéologie
      raciste et coloniale des universités européennes aux
      xviiie et xixe siècles, au moment même où se constituaient
      les « sciences de l’Antiquité ». De la célébration
      des invasions doriennes au caractère « primitif » d’un
      chef-d’oeuvre d’Eschyle‚ la persistance diffuse de cette
      idéologie est d’autant plus grave qu’elle est inconsciente
      et invisible pour les non-spécialistes. Comment comprendre
      autrement que l’africanité du choeur‚ de Danaos‚
      de l’armée des fils d’Égyptos soit si souvent refoulée
      dans les traductions et les rares mises en scène de la
      pièce‚ alors que l’adjectif « noir » apparaît à plusieurs
      reprises et que Danaos‚ craignant un crime raciste‚
      exige une escorte pour entrer dans la ville ?
      Eschyle‚ qui avait déjà su faire parler les vaincus‚
      les barbares‚ les étrangers‚ dans Les Perses‚ confie
      le rôle principal à un choeur de femmes noires qui se
      défendent‚ argumentent‚ menacent‚ sans se laisser
      intimider ni par les conseils paternels (« parler haut
      ne convient pas aux inférieurs ») ni par les moqueries
      du roi d’Argos (« Vous vous pavanez avec des étoffes
      barbares / Des tissus dans les cheveux »).
      Un mariage forcé comme le refus de l’hospitalité
      sont‚ pour elles comme pour Eschyle‚ des impiétés
      qui mettront les dieux en colère :
      Comment serait pur
      Celui qui veut prendre une femme de force
      Contre son gré
      Celui qui fait cela
      Même mort et descendu chez Hadès
      Il sera encore accusé de crime
      Qu’importe les lois d’Égypte‚ puisqu’il s’agit d’une
      de ces « lois non écrites » voulues par les dieux. En
      lisant Eschyle‚ on comprend mal que les commentateurs
      de la pièce aient aussi consacré les trois quarts de leurs
      travaux à inventer les « vraies raisons » de la fuite des
      Danaïdes : rejet de la consanguinité‚ folie de naissance‚
      haine des hommes‚ complot de Danaos craignant un
      gendre assassin… Les hypothèses les plus fantasques
      ont été développées‚ sans qu’une seule ligne du texte
      ne vienne les soutenir‚ comme si le refus d’un mariage
      forcé et la crainte d’un viol n’étaient pas motifs suffisamment
      sérieux et qu’il fallait à toute force en trouver
      d’autres. Quand on compare Eschyle à certains de ses
      spécialistes‚ on s’interroge : qui notre contemporain‚
      qui à ranger au rayon des antiquités…

    • André Markowicz, le black face et le quant-à-soi de l’intelligentsia : Touraine Sereine
      http://tourainesereine.hautetfort.com/archive/2019/04/01/andre-markowicz-le-black-face-et-le-quant-a-soi-de-l-int

      Le blackface ? des dizaines de gens, à qui j’explique depuis plusieurs jours qu’il s’agissait d’une pratique courante dans les spectacles populaires français — au même titre que les publicités représentant des petits Africains se blanchir la peau grâce au savon des gentils Européens —, me rétorquent : « bah, on n’est pas aux Etats-Unis... »
      Bah oui, le racisme et la ségrégation, c’est Rosa Parks et Nelson Mandela. Ça n’a jamais existé chez nous.
      Ainsi, la manipulation à laquelle s’est livrée le metteur en scène Philippe Brunet, qui a tenté in extremis de remplacer par des masques plus conformes à l’esthétique antique le grimage racialiste et raciste d’actrices blanches, aura surtout montré la profonde inculture de l’intelligentsia française. On se sait de gauche, on s’est convaincu pour toujours de ne pas être raciste, et donc, même si des spécialistes de la question viennent vous rappeler que le grimage en noir, sur une scène théâtrale française, est une pratique analogue au black face, on dira que ce n’est pas vrai, que c’est de la censure.
      Notre pays n’a pas réglé sa dette vis-à-vis de son ancien Empire, ce qui permet notamment à la France de continuer à essorer ses anciennes colonies grâce au subterfuge scandaleux du franc CFA. C’est ce qui a permis à l’Etat français d’aider très efficacement au génocide rwandais en 1994. C’est ce qui permet aujourd’hui à tant d’universitaires et de gens de théâtre de s’asseoir sur l’histoire de la colonisation en taxant de « communautaristes » les opposants qui manifestent leur désapprobation quand un spectacle utilise une pratique indissociable d’un crime contre l’humanité.
      Et voilà comment des intellectuels, sans doute de bonne foi, se retrouvent, durant toute une semaine, à justifier le racisme institutionnel, aux cotés des Le Gallou et Zemmour dont ils se prétendent les adversaires.
      Cela me révolte et me révulse, mais cela n’a pas de quoi m’étonner : quoique je n’appartienne pas à une communauté racisée (ou que je ne fasse pas partie d’une minorité visible (aucune de ces formules ne me satisfait)), cela fait vingt-cinq ans que je travaille dans le domaine de la littérature africaine et que j’entends des collègues et des « intellectuels » tenir des propos d’un racisme souvent inconscient mais tout à fait audible. Il y a longtemps que des ami·es me demandent de raconter tout ce que j’ai entendu, mais ce serait le sujet d’une autre chronique.

    • Et encore...

      (1) Pièce d’Eschyle censurée : le contresens d’un antiracisme dévoyé - Libération
      https://www.liberation.fr/debats/2019/04/02/piece-d-eschyle-censuree-le-contresens-d-un-antiracisme-devoye_1718911

      Pièce d’Eschyle censurée : le contresens d’un antiracisme dévoyé
      Par Vigilance Universités

    • J’ai gardé le meilleur pour la fin

      TRIBUNE. Eschyle censuré : « l’UNEF est devenu un syndicat de talibans »
      https://www.nouvelobs.com/les-chroniques-de-pierre-jourde/20190409.OBS11306/tribune-eschyle-censure-l-unef-est-devenu-un-syndicat-de-talibans.html

      Totalitarisme de l’UNEF, qui réclame des camps de rééducation pour ces imbéciles de profs et d’employés universitaires, trop racistes, c’est bien connu, autrement dit la mise en place de « formations sur la question des oppressions systémiques ». Le crétin inculte veut toujours former plus intelligent que lui à son image.

      Je garde le meilleur pour la fin. La section de l’UNEF à la Sorbonne est dirigée par une femme voilée. L’obscurantisme religieux s’ajoute ici à l’obscurantisme culturel. N’oublions jamais que le voile est précisément exigé des femmes par des régimes religieux totalitaires qui leur refusent en même temps d’hériter, de conduire, de sortir seules d’avoir une vie libre et normale. Là-bas, on n’a pas le droit de ne pas le porter. Et les femmes qui cherchent à s’en libérer sont battues et fouettées, ou simplement agressées dans la rue, car une femme non voilée est une putain, bonne pour tout homme. Le voile en pays démocratique est une insulte à la lutte des femmes pour leur libération dans les pays où règne l’Islam le plus rétrograde. Le voile signifie que les cheveux de la femme sont impudiques. Que le corps de la femme est impudique car il risque de provoquer les hommes. On ne se contente pas toujours du voile, il faut que la femme soit entièrement empaquetée de noir jusqu’aux chevilles, et son visage même dissimulé. Ainsi elle n’agressera pas le désir des hommes (qui eux, bien sûr, sont libres d’aller tête nue). Voilée et inclusive à la fois ! Comprend qui peut.

      LIRE AUSSI > Comment peut-on être musulmane et féministe ?

      L’interdiction d’une grande pièce du répertoire antique est exigée par des étudiants à grands coups de fautes d’orthographe. L’égalité et le respect des Noirs sont défendus (hors de propos) par quelqu’un qui porte le signe de l’infériorité des femmes.

      Voilà où en est l’UNEF. Voilà où en sont les luttes étudiantes à la Sorbonne.

      #voile

    • Blackface : le Gouvernement et l’extrême droite sur la même ligne ? ‹ Le CRAN
      http://le-cran.fr/blackface-le-gouvernement-et-lextreme-droite-sur-la-meme-ligne

      « Nous soutenons les associations d’étudiant-e-s, qui demandent à ce qu’une rencontre soit organisée, entre le metteur en scène et le service culturel de la Sorbonne. Afin de s’assurer qu’il n’y aura plus de blackfaces et autres stéréotypes ou outils à connotations racistes, parmi les représentations soutenues ou accueillies par l’université », a déclaré Ghyslain Vedeux, le président du CRAN. M. Le chef du services culturel, mardi dernier (26 mars) a fait comprendre à des étudiants qu’il ne souhaitait pas s’entretenir avec eux. M. Riester et Mme Vidal apportent pourtant leur soutient, tout comme…l’extrême droite. C’est un signal inquiétant qui ne laisse aucun doute car certaines scènes, jouées en l’état, consciemment ou inconsciemment, renvoient à des représentations afrophobes et racistes », a poursuivi le président du CRAN.

      LIRE : Communique-final Réponse des Étudiantes et Étudiants de Sorbonne

      En effet, dans la même journée, plusieurs sites ultra comme « Résistance républicaine » avaient également apporté leur soutien embarrassant à Philippe Brunet. Et face à Louis-Georges Tin, président d’honneur du CRAN, Jean-Yves Le Gallou (ancien membre du FN, théoricien ayant élaboré le concept de « préférence nationale », et proche d’Henry de Lesquen), a affirmé qu’il rejoignait « les ministres macronistes ».

      #blackface #noirs #colonial

    • Blackface : le gouvernement « condamne fermement » l’annulation de la pièce Les Suppliantes - Le Figaro Etudiant
      https://etudiant.lefigaro.fr/article/a-sorbonne-universite-une-piece-de-theatre-antique-annulee-a-cause

      Dans un communiqué, la ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal et le ministre de la Cuture Franck Riester estiment qu’il s’agit d’une « atteinte sans précédent à la liberté d’expression et de création dans l’espace universitaire ». Ils font part de leur soutien à l’université ainsi qu’au metteur en scène et aux comédiens. Une nouvelle représentation des Suppliantes sera organisée « dans les prochaines semaines et dans de meilleures conditions » au sein du grand amphithéâtre de la Sorbonne, ont-ils également annoncé.

      #Racisme_d'Etat

    • (2) Ligue de défense noire africaine - Accueil
      https://www.facebook.com/liguededefensenoirafricainefrance

      Pour nous La LDNA le problème n’est ni Eschyle ni les Suppliantes mais le metteur en scène qui sous couvert d’antiracisme voulait grimer ses actrices en femmes noires ; puis suite à nos protestations souhaitait leur faire porter des caricatures de masques totémiques qui n’avaient de remarquables que leur laideur !
      Les vraies questions de notre action sur La Sorbonne et la pièce d’Eschyle sont :
      1) pourquoi le metteur en scène a-t-il choisit que les solutions qui outrageaient ?
      2) Pourquoi n’a-t-il pas recruté des actrices noires ?
      3) Pourquoi n’a t il pas utilisé de jolis masques stylisés ?

    • J’avoue ma perplexité devant ce dernier lien et cette remarque sur la joliesse des masques. C’est quoi des « jolis masques stylisés » ?
      Pour cette troupe de théatre de la sorbonne il me semble que c’est des étudiantes qui jouent, en amatrice·urs au sein de leur fac. sachant ceci je ne voie pas comment recruté 50 femmes noires. Est-ce qu’il faut interdire cette pièce pour toutes les compagnies de théâtre qui ne disposent pas de 50 femmes noires ?

    • Pour les masques : ceux envisagés pour le spectacle n’avaient rien à voir avec des masques antiques (à mon sens, ils ressortaient plutôt du style « Y a bon banania », mais comme je n’ai jamais compris comment on collait une image sur seenthis, je ne peux pas le prouver...). Effectivement, des masques absolument abstraits genre Bauhaus / Oskar Schlemmer ou des copies des masques grecs de l’antiquité n’auraient pas provoqué ces réactions. Là, selon l’aveu du metteur en scène lui-même, il s’agissait « d’exagérer les traits du visage ». Quand un metteur en scène blanc avec des actrices blanches décident de représenter des Africaines à l’aide de masques « accentuant les traits du visage », on peut être inquiet du résultat...

      Personne n’a besoin de 50 femmes pour jouer Les Suppliantes - il peut y en avoir deux ou trois, aucune importance, ou 12, comme dans l’Antiquité. C’est du théâtre, pas une reconstitution exacte de la mythologie grecque pour la télé. Il y a beaucoup de débats ces dernières années sur l’invisibilisation des personnes racisées sur les scènes de théâtre - comme le metteur en scène a voulu faire cette pièce, comme il le dit, pour parler du racisme, de l’identité, etc (c’est l’histoire de demandeuses d’asile africaines en Grèce, pour résumer à l’extrême), c’est étrange qu’il n’ait pas songé à trouver 2 ou 3 étudiantes noires à la Sorbonne. Mais admettons qu’il n’y ait aucune étudiante noire à la Sorbonne. La pièce a été mise en scène récemment par Gwenaël Morin à Lyon avec de jeunes comédiennes de toutes les origines, et par Jean-Pierre Vincent avec des amatrices des quartiers de Marseille, et ça n’a suscité aucune protestation parce que personne n’était « grimé en noir ».

    • D’autres photos circulent sur twitter, vraiment pires. Apparemment il y a eu passage d’une version « grimée » l’an passé à une version « masquée » (cette année).

    • Blackface à la Sorbonne : victoire du CRAN et de ses partenaires ‹ Le CRAN
      http://le-cran.fr/blackface-a-la-sorbonne-victoire-du-cran-et-de-ses-partenaires

      A la suite de ce boycott lancé le 21 mars dernier par le CRAN et repris par ses partenaires, les étudiants ont interpellé Philippe Brunet, le metteur en scène de la pièce. Dans un premier temps, il a proposé de faire jouer les scènes concernées avec « un masque noir ». En s’appuyant sur le travail du CRAN (voir site internet www.stopblackface.fr), les étudiants ont aisément démontré que cela ne réglait pas le problème tant les masques restaient grossiers, perpétuant les stéréotypes afrophobes et racistes.

      Puis, dans une seconde tentative peu convaincante, Philippe Brunet s’est hasardé à proposer que la pièce soit jouée avec… « des masques dorés ». Ne se laissant pas amadouer, les étudiants ont demandé à voir ces fameux « masques dorés » ; Philippe Brunet fut bien en peine de leur montrer les objets en question, et finalement, il dut se résoudre à annuler cette représentation.

      « Après notre appel au boycott du 21 mars, relayé par les étudiants et les associations de la Sorbonne, nous avons été entendus. A présent, avec nos partenaires, nous souhaitons que se tienne très bientôt un colloque sur l’histoire du Blackface en présence de ce metteur en scène, de la direction du centre culturel et du doyen de cette université. Ce sera une sorte de réparation », a conclu Ghyslain Vedeux, le président du CRAN.

    • Il y a quelques photos sur le tweet de Rokhaya Diallo

      dont la première datée de 2017

      également ceci au Figaro


      Pour éviter de se grimer en noirs, les comédiens avaient proposé de porter des masques de couleurs.
      Crédits photo : Culture-sorbonne

      (note : le site du Point fonctionne (plus ou moins…))
      EDIT : je vois que tu as essayé de poster cette même image. Tu as mis l’adresse du tweet (ce qui permet de la retrouver), pour avoir l’image il faut l’adresse… de l’image que tu obtiens par un clic droit sur celle-ci.

    • Quel rapport entre la direction de Paris IV et la culture populaire américaine, je voudrais bien le savoir...(pardon, je parle toute seule)

      A propos du « blackface » : politique, mémoire et histoire. – Le populaire dans tous ses états
      https://noiriel.wordpress.com/2019/03/31/a-propos-du-blackface-politique-memoire-et-histoire

      Or les travaux historiques qui ont été publiés récemment sur le blackface montrent que ces spectacles ont toujours été « ambigus ». Pour illustrer ce point, je m’appuierai sur des écrits publiés par des auteurs qu’on ne peut pas soupçonner de la moindre complaisance à l’égard du racisme. Il s’agit du livre de l’historien américain William T. Lhamon, Raising Caïn. Blackface performance from Jim Crow to Hip-Hop, publié par Harvard University Press en 1998. Il a été traduit en français sous le titre Peaux blanches, masques noirs. Performances du blackface de Jim Crow à Michael Jackson, édition Kargo et L’Eclat, 2008, avec une préface du philosophe Jacques Rancière.

      Il est regrettable, mais logique (vu la position hégémonique qu’occupent aujourd’hui dans le champ intellectuel les identitaires de tous poils) que ce très beau livre n’ait pas rencontré plus d’écho dans notre espace public. Dans sa préface, Jacques Rancière a clairement indiqué les raisons pour lesquelles cet ouvrage était important. Les spectacles en blackface, concoctés au début du XIXe siècle par des comédiens blancs grimés en noir dans de petits théâtres populaires new-yorkais, étaient typiques d’une « culture sans propriété ». William Lhamon la définit en réhabilitant un vieux mot anglais : « lore », terme qu’il détache du terme « folk-lore », lequel s’est imposé par la suite pour assigner une culture à un peuple. Rancière enfonce le clou en soulignant qu’une culture n’est la propriété d’aucun groupe ethnique, car elle est « toute entière affaire de circulation ». La circulation d’une pratique culturelle permet non seulement de la faire partager à d’autres publics, mais elle aboutit toujours aussi à des formes d’appropriations multiples et contradictoires. Ce qui fut le cas au début du XIXe siècle, car le public qui assistait à ces représentations était composé d’esclaves et d’ouvriers (blancs et noirs) de toutes origines.

      Pourtant, dès le départ, le spectacle blackface « a fait l’unanimité de tous les bien pensants » contre lui, ajoute Rancière, résumant l’une des thèses centrales du livre. Non seulement les bourgeois cultivés le rejetaient car ils le trouvaient trop vulgaire, mais il était dénoncé également par les antiracistes de l’époque. « Les champions de l’émancipation des Noirs comme Frederick Douglass, relayés plus tard par la tradition de gauche, dénonçant cette appropriation des chants et danses du peuple noir, transformés en caricatures racistes d’un peuple enfoncé dans sa minorité. C’est récemment seulement que les historiens du blackface ont commencé à complexifier cette vision du spectacle de ménestrels comme une caricature issue du Sud esclavagiste donnée par des Blancs pour conforter le racisme de leurs semblables ».

    • Des masques derrière lesquels le racisme ne peut se cacher, de l’art derrière lequel le racisme ne peut se cacher... Le racisme ne peut se cacher, il s’exprime et se subit, c’est tout.
      Je pense aussi à ça :
      https://seenthis.net/messages/772108
      L’"artiste" a déclaré ne pas vouloir se justifier et a fait le lien avec les « Suppliantes ».
      https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/herault/sete/accuse-racisme-artiste-setois-herve-di-rosa-reagit-vive

    • À noter car @cie813 est trop modeste sa traduction s’intitule “Les Exilées” (aux éditions Solitaires intempestifs, 2013)
      https://www.solitairesintempestifs.com/livres/467-les-exilees-9782846813.html

      Les Exilées, Les Suppliantes sont à vrai dire le même texte d’Eschyle. Irène Bonnaud, metteur en scène et traductrice l’a revisité en le rattachant à l’histoire immédiate de l’Europe vis-à-vis des migrants du sud et en prenant comme texte d’origine le point de vue des femmes. Aujourd’hui, un migrant vient forcément du sud. C’est la tragique loi du système économique mondialisé qui ne cesse de déposer des corps épuisés, échoués après une traversée indicible de malheurs.

      Un extrait et une belle carte chez @vacarme
      https://vacarme.org/article2240.html

    • Oui, ça vient de @reka, bien sûr (je ne comprends pas que Vacarme ne l’ait pas crédité, c’est bizarre - il doit l’être dans la version papier, enfin j’espère). C’est le parcours de Io pourchassée par le taon, la ligne en pointillée c’est le trajet de ses descendantes, les héroïnes des « Suppliantes », qui viennent demander l’asile à Argos, royaume d’origine de leur arrière-arrière grand-mère.
      Mais arrivée dans le delta du Nil, la princesse grecque Io a mis au monde l’enfant de Zeus, Epaphos, qui est noir et fonde les dynasties africaines (d’où la polémique qui nous occupe).

      Eschyle dans « Prométhée enchaîné » (ma traduction aux Solitaires Intempestifs - comme @fil a commencé à faire de la pub, je continue) :

      Il est une cité
      Canope
      Qui se dresse au bout de la terre d’Égypte
      Sur un talus formé d’alluvions du Nil
      Là Zeus te caressera
      Doucement
      Sans te faire peur
      Le geste de sa main te rendra la raison
      Et ce même geste
      Sans étreinte
      Te fécondera
      Tu mettras au monde un fils au visage noir
      Épaphos
      L’enfant-né-d’une-caresse
      Il régnera sur les terres qu’arrose le Nil au large cours

      Eschyle dans « Les Suppliantes / Les Exilées » :

      Choeur.

      Mon récit sera bref
      Mes paroles claires
      Nous sommes d’Argos
      Nous descendons d’une génisse qui enfanta des rois
      C’est la vérité
      Nous pouvons le prouver

      Roi d’Argos.

      Comment vous croire
      Étrangères
      Comment pourriez-vous être d’Argos
      Vous ressemblez à des Libyennes
      Pas aux femmes de ce pays
      Le Nil nourrit des plantes dans votre genre
      Vos traits rappellent aussi les statues de femmes
      Que des sculpteurs fabriquent sur l’île de Chypre
      Et on raconte des histoires sur des Indiennes nomades
      Elles font attacher des selles à dossier sur des chameaux
      S’y prélassent en avançant aussi vite qu’à cheval
      Et se promènent ainsi jusqu’aux villes d’Éthiopie
      Le pays au visage brûlé par le soleil
      Si vous aviez des arcs et des flèches
      Je pourrais vous prendre pour des Amazones
      Les femmes sans hommes
      Mangeuses de chair crue
      Mais instruisez-moi
      Comment votre famille pourrait être d’Argos

      Choeur.
      Tu as entendu parler de Io
      Une jeune fille qui officiait au temple d’Héra
      Ici à Argos

      Roi d’Argos.
      Il y a beaucoup d’histoires à son sujet

      Choeur.
      On raconte que Zeus coucha avec elle

      Roi d’Argos.
      Et qu’Héra les surprit en pleine étreinte

      Choeur.
      Dispute chez les rois de l’Olympe
      Tu sais comment elle finit

      Roi d’Argos.
      La déesse transforma la jeune femme en génisse

      Choeur.
      Mais Zeus retourna la voir
      Elle avait de belles cornes

      Roi d’Argos.
      On le dit
      Zeus prit la forme d’un taureau saillisseur

      Choeur.
      Que fit alors son épouse
      Ivre de fureur

      Roi d’Argos.
      Pour surveiller la génisse
      Elle trouva un gardien aux yeux innombrables

      Choeur.
      Ce bouvier qui pouvait tout voir

      Roi d’Argos.
      S’appelait Argos car il était né de cette terre
      Mais Hermès le tua

      Choeur.
      Quelle torture inventa Héra contre la pauvre génisse

      Roi d’Argos.
      Une mouche qui la poursuivait sans cesse

      Choeur.
      Au bord du Nil
      On l’appelle un taon

      Roi d’Argos.
      Il la chassa d’ici
      L’entraîna dans une longue errance

      Choeur.
      On nous a raconté la même histoire

      Roi d’Argos.
      Enfin elle arriva en Égypte
      À Canope ou à Memphis

      Choeur.
      Et Zeus la caressa
      De sa main il engendra un enfant

      Roi d’Argos.
      Qui était-ce
      Ce fils d’un dieu et d’une génisse

      Choeur.
      Épaphos
      L’enfant né d’une caresse
      Le nom est bien trouvé
      D’Épaphos est née Libye
      Reine de l’Afrique
      Le plus grand des continents

    • Tiens, Lundi AM s’aligne sur les positions de Marianne, on aura tout vu...(le texte n’a pas l’air signé, mais ça doit être un ami d’"Hervé" puisqu’il l’appelle par son prénom)

      Polémique autour d’une représentation des Suppliantes d’Eschyle
      https://lundi.am/Polemique-autour-d-une-representation-des-Suppliantes-d-Eschyle

      Pour ce qui concerne les accusations de perpétuer les représentations associées à l’esclavage et au colonialisme, la polémique la plus célèbre, avant celles concernant la mise en scène des Suppliantes et la toile d’Hervé, était celle dont Brett Bailey, metteur en scène d’Exhibit B, fut la cible, des associations tentant même d’obtenir l’interdiction de l’œuvre en justice.

    • Je perds patience (pourquoi j’ai commencé à archiver ces trucs, je me demande)

      « Quand ils s’en prennent à la création, les anti- “blackfaces” tombent souvent dans le contresens, historique comme esthétique »
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/03/29/quand-ils-s-en-prennent-a-la-creation-les-anti-blackfaces-tombent-souvent-da

      Comment qualifier ce qui s’est passé, lundi 25 mars, à la Sorbonne ? De grotesque ? D’affligeant ? D’inquiétant ? Des étudiants et des militants de la cause noire ont empêché par la force la tenue d’une pièce d’Eschyle, Les Suppliantes, au motif que des acteurs blancs portaient des masques sombres ou étaient grimés de noir. Le metteur en scène de la pièce entendait user d’un artifice ancré dans la tragédie grecque, mais aussi rendre hommage à l’influence de l’Afrique dans la Grèce antique. Mais pour les censeurs, ce blackface est raciste.
      Lire aussi A la Sorbonne, la guerre du « blackface » gagne la tragédie grecque
      Certains diront que ce n’est pas bien méchant, que c’était un spectacle confidentiel. C’est très grave. Pour de multiples raisons. La pièce devait se jouer dans la plus ancienne université française, un emblème de la Nation. Son metteur en scène, Philippe Brunet, est un helléniste respecté – il a essuyé des injures. Et puis cette entrave à la liberté de création n’a pas vraiment fait réagir les milieux culturels, pourtant épidermiques sur le sujet. Il a fallu près de deux jours, et des articles dans la presse, pour que les ministères de la culture et de l’enseignement supérieur publient un communiqué navré, promettant que la pièce se tiendra dans les semaines à venir.
      « Coup » prévisible 
      En fait les milieux culturels sont tétanisés. Ils font corps quand se dresse une censure venant de l’Etat, des cercles d’extrême droite ou catholiques. Mais là, leurs ennemis pourraient être leurs amis. Depuis quelques années, des communautés en France – ici des Noirs – adoptent une posture victimaire, estimant que l’Occident, par nature raciste, n’est pas légitime pour écrire leur histoire, passée et actuelle, et fustigent tout signe d’appropriation culturelle, qu’elle soit vernaculaire ou venant d’artistes blancs et dominants

    • Il ne manquait plus que lui pour notre série : "les bons anti-racistes sont les anti-racistes blancs, les autres sont des sauvages incultes"

      (20+) Eschyle, le « blackface » et la censure - Libération
      https://www.liberation.fr/politiques/2019/04/15/eschyle-le-blackface-et-la-censure_1721447

      Le metteur en scène, Philippe Brunet, proteste de ses convictions ouvertes et égalitaires. Mais c’est un individu éminemment louche puisqu’il est animé de valeurs humanistes et travaille depuis des lustres sur la langue grecque ancienne, cherchant à mettre en lumière – et à réhabiliter – les influences africaines sur la culture grecque de l’Antiquité. Un raciste qui s’ignore, donc, qui a eu la criminelle idée de rappeler que les « Suppliantes » avaient sans doute la peau cuivrée et qu’il a envisagé de leur brunir le visage avec un onguent, avant d’opter pour des masques de cuivre.

      #désinformation #fakenews

    • #merci @christopheld !

      @cie813, c’est effectivement assez désespérant mais la compilation est importante. D’ailleurs, il s’agit de
      • Michel Guerrin, rédacteur en chef au Monde (avec un #paywall)
      • Laurent Joffrin, directeur de la publication de Libération

      Par moment, je ne peux m’empêcher de comparer à la période de recomposition de l’échiquier politique des années 30, où la droite comme la gauche a eu à se situer vis-à-vis des fascismes mussolinien et hitlérien en démarrant des trajectoires qui ont débouché sur les attitudes pendant l’occupation. Aujourd’hui, c’est autour de l’islamophobie et de cette attaque de l’antiracisme que se recomposent droite et gauche. Quel en sera l’aboutissement ? Question plutôt angoissante…

      et donc #merci, @cie813

    • La présentation en partie fausse et lourdement orientée de France Culture (qui ne sait pas orthographier Libye par ailleurs)

      « Les Suppliantes » et le blackface : les nouvelles censures au théâtre
      https://www.franceculture.fr/emissions/signes-des-temps/les-nouvelles-censures-au-theatre


      Lundi 25 mars, la pièce d’Eschyle, Les Suppliantes montée par la compagnie Démodocos et programmée dans l’amphithéâtre Richelieu, à la Sorbonne, a été empêchée de jouer par une cinquantaine de militants de la Ligue de défense noire africaine (LDNA), de la Brigade anti-négrophobie, et du Conseil représentatif des associations noires (Cran), accusant la mise en scène de racisme. Motif : la pièce met en scène le peuple des Danaïdes venu d’Egypte et de Lybie demander asile aux Grecs de la ville d’Argos, les acteurs ont couvert leur visage d’un maquillage par-dessus lequel ils se sont couverts de masques cuivrés et non pas noirs, comme cela se faisait dans la Grèce antique. Cela a suffi pour que les militants crient au « blackface », du nom de ce genre de maquillage théâtral américain du 19ème siècle ou des acteurs blancs se maquillaient pour caricaturer les noirs, et décident d’agir.

      « C’est un procès d’intention et un contresens total », a aussitôt dénoncé la présidence de l’université. « Une partie de la troupe a été séquestrée par des excités venus là pour en découdre », a accusé, de son côté, le metteur en scène et directeur de la compagnie Philippe Brunet, qui dénonce par ailleurs des pressions physiques de la part des militants de la Ligue de défense noire et du Cran sur des actrices en larmes et envisage de porter plainte. Neuf mois après les débats provoqués notamment dans cette émission par les attaques contre la pièce du Canadien Robert Lepage Kanata accusée de racisme, voici que la polémique fait retour sur un nouveau cas de censure et de violence au théâtre.

    • Ah un texte intéressant sur cette affaire, et de quelqu’un qui a vraiment lu la pièce, contrairement à nos républicains qui veulent sauver la culture (et c’est écrit par une universitaire américaine, spécialiste en « gender studies » !)

      Classics at the Intersections : The (Black)Faces of Aeschylus’ Suppliants
      https://rfkclassics.blogspot.com/2019/03/the-blackfaces-of-aeschylus-suppliants.html

      Over the last two weeks, I’ve given a series of talks on Aeschylus’ play and asked myself the question of whether in its original context it was a play about welcoming refugees or about the benefits of the Athenian empire (and so ’colonialist propaganda), or if it was really about the threat and danger of immigrants to Athens. Because audiences aren’t monolithic, I think it probably can legitimately be interpreted as all three, depending on who is in your audience.

      I’ve been trying to think of the play within the context of Athens’ descent in the 460s and 450s into anti-immigrant policies and strict monitoring of citizenship. The play was performed around 463 BCE, around the time that the new category of ’metic’ (translated as ’immigrant’ or ’resident foreigner’) was created and only a decade before Athens began racializing its citizenship with the passage of the law requiring double Athenian parentage for citizenship and emphasizing its autochthonous birth.

      #colonialisme #métèques #migrants #blackface

    • Bon, c’est l’UNI (mais ce qui est inquiétant, c’est le nombre de gens qui s’alignent sur ces délires désormais)

      L’indifférence de militants de l’Unef devant Notre-Dame, ou le vrai visage des enfants de Bourdieu
      http://www.lefigaro.fr/vox/politique/l-indifference-de-militants-de-l-unef-devant-notre-dame-ou-le-vrai-visage-d

      C’est sous l’influence de cette idéologie que le syndicat défend désormais les séminaires en non-mixité, fait interdire la pièce de théâtre, les Suppliantes d’Eschyle, en se basant sur les concepts décolonialistes de « blackface » et « d’appropriation culturelle », ou encore lance une vaste campagne sur les campus français pour dénoncer « une société organisée pour les blanc.he.s » et « les programmes d’histoire occidentaux-centrés ».

    • « Masques cuivrés », « interdire », « une pièce d’Eschyle » - au concours du plus grand nombre de fake news au centimètre carré, la gagnante est...

      NOTRE-DAME ET LE BRASIER IDENTITAIRE – Caroline Fourest
      https://carolinefourest.wordpress.com/2019/04/25/notre-dame-et-le-brasier-identitaire

      Décidément, les membres de l’Unef méritent leur nouvelle réputation de talibans en culottes courtes. Quand il ne soutient pas le « hijab day » à Sciences-Po, le syndicat se bat pour faire interdire une pièce d’Eschyle à la Sorbonne parce que mettre des masques cuivrés pour raconter la tragédie des migrants – en l’occurrence des Danaïdes – serait un blackface ! Pire que les hébertistes qui brisaient les icônes pendant la Révolution, les iconoclastes d’aujourd’hui sont bigots quand il s’agit de religion et analphabètes quand il s’agit de culture. Exactement comme les identitaires racistes qu’ils dénoncent, mais à qui ils ressemblent comme des frères jumeaux sous un autre masque. A les lire, ce n’est pas seulement notre patrimoine et notre idéal universel qu’il faut protéger de leurs incendies, mais toute une culture politique qu’il faut rebâtir.

    • Pour dire la même chose, on peut compter sur Eugénie Bastié pour Le Figaro/Vox (avec #paywall : si quelqu’un l’a en entier ?)

      Pièce de théâtre interdite, Finkielkraut insulté  : ce sectarisme qui monte à l’université
      http://www.lefigaro.fr/vox/societe/eschyle-interdit-finkielkraut-insulte-sectarisme-a-l-universite-20190424

      Pièce de théâtre interdite, Finkielkraut insulté : ce sectarisme qui monte à l’université

    • Sylvie Chalaye, pédagogue

      Eschyle à la Sorbonne : pourquoi condamner le blackface ? | Africultures
      http://africultures.com/eschyle-a-la-sorbonne-pourquoi-condamner-le-blackface

      Les pratiques anciennes ne sont pas automatiquement légitimes. On doit pouvoir les reconsidérer à la lumière des expériences que l’humanité a traversées depuis cette époque. La traite, l’esclavage, la colonisation… sont passés par là. Ne pas reconnaître l’humiliation qui fait résurgence dans certains gestes dont on ne sait pas la portée et qui touchent les afrodescendants est un manque d’humilité dommageable.

    • « Blackface » ou le théâtre de la question raciale - Libération
      https://www.liberation.fr/debats/2019/05/06/blackface-ou-le-theatre-de-la-question-raciale_1725284

      Pourtant, cette conception de l’autorité créatrice qui fixe le sens de l’œuvre n’a-t-elle pas été remise en cause par la théorie littéraire depuis cinquante ans ? En 1968, Roland Barthes s’attaque à la critique qui « se donne pour tâche importante de découvrir l’Auteur (ou ses hypostases : la société, l’histoire, la psyché, la liberté) sous l’œuvre » ; il lui oppose l’écriture. Et de conclure : « La naissance du lecteur doit se payer de la mort de l’Auteur. » L’année suivante, Michel Foucault prolongera cette analyse de la « fonction-auteur », qui « est la figure idéologique par laquelle on conjure la prolifération du sens ».

      Pour trancher les conflits d’interprétation, on revient aujourd’hui à l’autorité du metteur en scène, relais de l’auteur. Pourquoi ce retour porte-t-il sur la question raciale ? C’est en réaction à l’évolution de nos conceptions du racisme et de l’antiracisme. Dans les années 80, la montée du FN pouvait s’interpréter selon une définition idéologique du racisme. Mais, à partir des années 90, la prise de conscience des discriminations systémiques amène à penser un racisme structurel. Il n’est plus possible de réduire le racisme à la seule intention ; à partir de ses conséquences, on appréhende le racisme en effet.

      Dès lors, la question n’est plus uniquement de savoir si tel ou telle, au fond, est raciste ; on considère les choses du point de vue des personnes dites « racisées », car assignées à leur couleur ou leur origine par des logiques de racialisation qui dépassent les intentions et idéologies, bonnes ou mauvaises. Pour combattre les violences de genre, on a fini par l’accepter, mieux vaut se placer dans la perspective des victimes. On commence à le comprendre, il en va de même du racisme : l’intention n’est pas tout.

    • Pour une liberté de création partagée par tous – sur l’affaire des Suppliantes | AOC media - Analyse Opinion Critique
      https://aoc.media/opinion/2019/05/03/liberte-de-creation-partagee-laffaire-suppliantes

      THÉÂTRE
      Pour une liberté de création partagée par tous – sur l’affaire des Suppliantes
      Par Bérénice Hamidi-Kim

      SOCIOLOGUE DU THÉÂTRE
      Fin mars à la Sorbonne, des manifestants ont interrompu une représentation des Suppliantes d’Eschyle. En soutien au metteur en scène, l’helléniste Philippe Brunet, de nombreux artistes et intellectuels ont, à l’initiative du Théâtre du Soleil, co-signé une tribune récusant les accusations de blackface. Et si l’on en profitait pour amorcer un débat dans lequel il serait possible d’imaginer davantage que deux points de vue qui s’affrontent ?
      Qu’est-ce qui a eu lieu le 25 mars 2019 à Paris ? « Les faits sont connus », présuppose d’emblée la tribune intitulée « Pour Eschyle » initiée par le théâtre du Soleil, qui parle de « censure » et d’« agression grave », après l’interruption par des manifestants d’une mise en scène des Suppliantes à la Sorbonne. Mais le sont-ils vraiment ? On peut en douter, tant les faits sont en l’occurrence pris à parti pour servir de preuve et d’arme dans un conflit qui oppose, avec une violence assez spectaculaire, deux camps. Et justement, la présentation et la mise en récit des événements joue un rôle décisif pour chacun de ces camps, qui s’en sert pour asseoir la légitimité de sa position et pour qualifier ou plutôt disqualifier le camp adverse. Politique, le conflit est aussi un conflit de valeurs et un conflit de légitimité qui se joue également sous la forme d’un conflit de narrations. Comme au théâtre, justement, le sens découle de la manière de cadrer l’action, de distribuer les rôles, de raconter l’histoire, ou ici, l’Histoire.

      Pour le Soleil et ses soutiens, l’affaire est simple et la cause est entendue. L’événement qui a eu lieu ce jour-là consiste dans l’interruption d’une représentation d’un projet théâtral innocent et même bien intentionné sur les questions raciales : la mise en scène par l’helléniste Philippe Brunet des Suppliantes d’Eschyle, dans le cadre d’un atelier de théâtre antique soucieux de restituer la part méditerranéenne et africaine de l’auguste civilisation grecque et de son théâtre. Et cette agression est doublement brutale, parce qu’elle a recouru à la force physique et parce qu’elle aurait eu lieu sans sommation.

      Au contraire, pour ceux qui se sont opposés au spectacle, et parmi eux ceux qui ont assumé de vouloir empêcher la bonne tenue de la représentation, cette opposition se justifie par le refus de dialoguer dont aurait fait preuve le metteur en scène depuis… un an. Car tout ne se superpose pas de manière aussi simple et binaire que la tribune tend à le faire croire, et les moyens d’action ont fait débat au sein du camp des opposants. L’opposition se justifie aussi par le refus catégorique du metteur en scène d’accréditer leur qualification de son geste artistique : un blackface. Comprendre : que des personnes blanches se maquillent le visage en noir pour caricaturer des personnes noires, les diaboliser ou les tourner en dérision, en tout cas les déshumaniser.

      Pour le Soleil, il ne s’agit pas de blackface pour deux raisons. La première raison est que la mise en scène recourt à des masques – à quoi les opposants rétorquent que dans une première étape de la création, celle qui avait mis (discrètement alors) le feu aux poudres, il s’agissait uniquement de maquillage. Ce n’est de fait que dans un second temps que le metteur en scène a ajouté le port de masques noirs et cuivrés (ornés, en guise de cheveux, d’extensions capillaires de couleur noire) ce qui, pensait-il, était de nature à apaiser les choses. La seconde raison est que le blackface ne serait pas affaire de geste mais d’intention. D’où l’idée, que l’on retrouve dans plusieurs autres textes de soutien à Philippe Brunet, que les opposants feraient un « contresens » total sur le texte d’Eschyle et sur le projet du metteur en scène.

      L’opposition serait donc aussi entre personnes dotées de capacités d’intellection et de culture, et personnes incultes. Pourtant, comme les opposants, le Parlement Européen choisit de ne pas considérer l’intention et de s’en tenir au geste, quand il déclare que « la pratique consistant à se noircir le visage perpétue des idées préconçues bien ancrées au sujet des personnes d’ascendance africaine, et peut ainsi exacerber les discriminations », et manifeste « la persistance de stéréotypes discriminatoires ». Pourquoi ? A cause de ce fait historique qui est que « les injustices à l’égard des Africains et des personnes d’ascendance africaine qui ont jalonné l’histoire, comme la réduction en esclavage, le travail forcé, la ségrégation raciale, les massacres et les génocides qui se sont produits dans le contexte du colonialisme européen et de la traite transatlantique des esclaves, sont très peu reconnues et prises en compte par les institutions des Etats membres ».

      C’est donc à ces institutions – et donc notamment aux institutions culturelles – que le Parlement européen en appelle quand il « invite les Etats membres à dénoncer et à décourager le maintien de traditions racistes et afrophobes ». Un texte émanant des institutions politiques européennes, écrit au nom des valeurs démocratiques, et qui condamne l’usage du blackface quelles que soient les intentions de qui y recourt… voilà qui pourrait ébranler quelques certitudes quant à la simplicité axiologique de la répartition des camps. Avec ce texte, les élus politiques cherchent à agir sur le cours de l’histoire, car c’est à cela aussi que peuvent servir les politiques publiques. Et pour cela, elles s’appuient souvent, faut-il le rappeler, sur les luttes menées auparavant par les mouvements d’émancipation : mouvement ouvrier, suffragettes, Front Populaire, mouvement des droits civiques etc… sans ces luttes et les femmes et les hommes qui se sont battus parfois au péril de leurs vies, pas de droit du travail, pas de droit de vote des femmes, pas de décolonisation, pas de politiques de lutte contre les discriminations, pas d’actualisation des valeurs démocratiques.

      Bref, c’est peu dire que toute cette affaire est complexe. Il faudrait donc prendre le temps d’investiguer les faits, les concepts (blackface[1], mais aussi appropriation culturelle, censure, boycott, liberté de création/d’expression) et plus largement, les formes qu’a pris ce conflit de narration et de légitimité, ce qu’il révèle, et ce qu’il cache. Pour l’heure, je voudrais m’attacher précisément à la tribune rédigée par le Soleil. Pourquoi ? Elle a rassemblé un nombre impressionnant de signataires, artistes et universitaires dont la liste produit un effet de légitimité incontestable – même si une des particularités notables de cette tribune est que parmi les signataires se côtoient des gens qui ont à dire vrai peu de raisons de se rassembler, tant ils tiennent sur les questions brûlantes des discriminations – du racisme, du sexisme et de l’homophobie – des positions divergentes. Serait-ce justement le signe que « l’affaire est grave » et mérite donc un front uni, en l’occurrence un front démocratique et républicain ? Face à quoi ?

      Revendiquant de parler « pour », la tribune est de fait surtout écrite contre. Un premier trouble vient de l’omniprésence d’une rhétorique que le texte dit dénoncer mais qu’il reprend à son compte. « Vocabulaire digne d’un tribunal ecclésiastique médiéval », « juges autoproclamés du Bien et du Mal » : le texte érige comme menace principale sur la démocratie l’intégrisme, mêlant l’intégrisme religieux (le texte cite les mouvements catholiques ayant demandé l’interdiction du spectacle de Castellucci mais parle aussi de « fatwa ») ou l’intégrisme politique, qui serait à l’œuvre ici, au motif que la « logique identitaire » serait « la même » – ce qui reste à démontrer. Il agite aussi en toile de fond d’autres repoussoirs, certains venus du passé : le stalinisme (« commissaire politique ») voire le nazisme (« autodafés »), et un autre qui serait propre à notre présent, « le catéchisme de la société prétendument « inclusive », qui en réalité fixe et cloître chacun dans une « identité » d’appartenance et dicte aux uns et aux autres la place qu’ils ne doivent pas quitter ».

      Dire que le camp d’en face est celui des barbares – littéralement, ceux qui ne comprennent pas notre langue ou celle d’Eschyle, mais aussi, ceux qui sont des « autres », des étrangers aux valeurs de « notre » communauté, n’est-ce pas une façon bien commode de se mettre dans le camp du bien ? Et une façon bien problématique de binariser les oppositions : démocrates contre barbares, esprits des lumières contre obscurantistes, universalistes contre identitaires, laïques contre intégristes, cultivés contre ignares, Printemps républicain contre Parti des Indigènes de la République… nous contre eux…

      Ce qui m’a gênée dans cette tribune, c’est qu’elle m’a semblé faire exactement ce qu’elle dénonce, usant du ton d’un tribunal, condamnant sans souci des faits, et sans même accorder aux accusés un procès équitable. C’est également le fait que ceux qui ont initié la tribune m’ont semblé pour tout dire juge et partie, le spectacle Kanata mis en scène par Robert Lepage avec la troupe du Soleil ayant été au cœur d’une autre polémique – des associations d’artistes autochtones avaient estimé que le spectacle relevait d’une forme « d’appropriation culturelle »[2] puisqu’il représentait leur histoire, et ce faisant se l’appropriait et en tirait des bénéfices économiques et symboliques, sans les inclure et sans les consulter.

      C’est enfin, c’est surtout que les auteurs comme les signataires, dont la liste et les titres ne peuvent qu’impressionner, sont en position de force pour imposer leur conception du partage des rôles et des positions – et font comme s’ils ne le savaient pas. En bref, c’est le fait que cette tribune construit un espace énonciatif d’intimidation, qui empêche et même interdit de penser. S’y exprime un « nous » en majesté et en mode majeur, qui dit défendre la liberté d’expression et de création mais use de tactiques autoritaires, et cherche à faire taire tout doute et toute objection. Je voudrais précisément formuler à présent deux objections, relatives à la caractérisation du « eux » repoussé et à une contradiction dans les valeurs défendues et dans l’appel à la liberté de création en général et du théâtre public en particulier.

      « Le théâtre est le lieu de la métamorphose, pas le refuge des identités. » Philippe Brunet en une phrase exprime l’enjeu de cet art – de tout art : pouvoir se sentir être autre que « soi-même » – à travers des personnages, des histoires, et rejoindre ainsi toute l’humanité », dit la tribune. Or, justement, c’est précisément ce que réclament nombre d’artistes noirs et plus largement non blancs aujourd’hui : d’avoir le droit, eux aussi, de pouvoir incarner l’humanité et de ne pas se voir cantonnés à des rôles stéréotypés toujours dévalorisants[3], écrits et mis en scène par des personnes qui n’ont aucune idée de leurs expériences de vie. Quel mépris, que de dire à ces personnes qu’elles n’auraient rien compris au théâtre. Quelle violence, que de faire semblant de ne pas comprendre qu’il s’agit justement de réclamer le droit à la même part de liberté, à la même possibilité que le théâtre devienne le lieu de la métamorphose, et non une autre scène où se répètent et se redoublent la domination et les discriminations.

      Car le vrai scandale est là : la persistance de discriminations raciales insupportables, dans la société, et donc aussi, bien sûr, dans les mondes artistiques, et dans les représentations. C’est ce scandale qui justifie la recommandation du Parlement Européen, et qui explique sans doute la véhémence du ton de ceux qui subissent ces injustices, parce qu’il n’est jamais facile d’oser prendre la parole en tant que victime, d’autant plus quand sa parole individuelle et collective est si violemment et si continument discréditée. Être noir, aujourd’hui – comme être femme, être homosexuel – renvoie non pas à une identité génomique mais à un statut social : cela signifie être assigné à résidence identitaire, être relégué au rang de l’altérité et du particulier, et ne pouvoir prétendre être intégré au cœur de la communauté qu’à la condition de performer justement sa différence et ses particularismes, comme le montre si bien dans ses travaux Réjane Sénac[4], et jamais en tant que semblable, en tant qu’égal. Et ce n’est pas une situation qui émane de ces « sous »-groupes particuliers, tout simplement parce qu’ils ne sont pas en position d’établir les normes ! Car l’« universel » est encore trop souvent le cache-misère d’une domination par des personnes qui ont la peau blanche et qui sont des hommes, qui pensent pouvoir justement incarner l’humanité toute entière alors qu’ils sont eux aussi, comme les autres, dans une position particulière… une position dont on comprend qu’ils ne veuillent pas la quitter, d’ailleurs, car c’est une position fort plaisante : une position de pouvoir. Pouvoir économique, mais aussi bien sûr pouvoir symbolique : pouvoir d’établir les catégories, de décider (ce) qui est particulier, (ce) qui est raciste et (ce) qui est universel, d’édicter les normes. Etre renvoyé au fait qu’on n’incarne pas l’universel mais la domination est désagréable à entendre, sans doute. Reste que le pointer n’est pas formuler une revendication identitaire. C’est au contraire demander que se concrétisent les valeurs universalistes.

      La tribune nie l’existence des discriminations, de leur histoire, comme elle nie l’histoire des représentations racistes, donc. Mais elle fait également fi de l’histoire théâtrale, traversée de querelles qui ont presque toujours mêlé enjeux esthétiques et enjeux politiques, et où la question de l’autonomie de l’œuvre et de l’artiste à l’égard du contexte dans lequel il crée est complexe. Car c’est bien pour sa valeur politique, civique, que cet art est devenu un « théâtre public » financé avec l’argent de la collectivité. Cette mission politique du théâtre est même une antienne que l’on retrouve dans toutes les plaquettes de saison, dans le discours des artistes comme dans les textes de loi des pouvoirs publics[5]. Le théâtre public se veut un théâtre politique, et se veut même un mode d’action politique. Par les questions qu’il soulève, par le cadre collectif de la représentation qui fait des spectateurs un public qui débat de la chose publique, avec elle-même, par sa capacité à opérer, à l’occasion, comme contre-pouvoir.

      Comment oublier les combats militants menés par Mnouchkine elle-même, dans ses œuvres mais aussi avec d’autres outils de lutte (manifestations, grève de la faim, occupation d’églises) contre les politiques migratoires, contre l’inaction des pouvoirs publics face à la guerre en ex-Yougoslavie, contre la Loi travail ? Elle incarne par là le mythe du théâtre public, qui a construit sa légitimité depuis un demi-siècle en tant qu’il serait une des formes de l’espace public, autrement dit, une des institutions vitales de la démocratie et de la République française. D’où le caractère incongru de la ligne de défense de Brunet consistant à dire « qu’on est libres de se grimer en noir, en cuivre, en rose » et que « le théâtre n’a pas à correspondre à des règles de bienséances morales »[6], comme s’il était question d’une querelle esthétique sans cause ni effet dans le réel d’aujourd’hui. A revendiquer que l’art du théâtre n’a aucun compte à rendre au présent.

      Pour finir, je voudrais en venir à la fameuse « liberté d’expression et de création » que la tribune entend défendre, et à laquelle les opposants au spectacle contreviendraient, faisant donc acte de « censure ». Pour rappeler d’abord, s’agissant du dernier mode d’action choisi par les opposants au spectacle, à savoir la perturbation physique de la représentation, que ce geste, pas plus que l’appel au boycott, ne constitue de manière évidente une entrave à la liberté de création et un acte de censure. Tout simplement car pour censurer, il faut être en position de pouvoir institutionnel. Il peut d’ailleurs sembler étonnant que ce point ait échappé à Ariane Mnouchkine, fondatrice en 1979 de l’AIDA (Association Internationale de Défense des Artistes victimes de la répression dans le monde).

      Certes, certains plaident aujourd’hui pour une redéfinition de la notion de censure, qu’ils voudraient plus ajustée aux menaces qui pèseraient spécifiquement dans nos démocraties, gangrénées par des « censures légales ». L’Observatoire de la liberté de création, créé par la Ligue des Droits de l’Homme, considère ainsi que « censurer la création, c’est porter atteinte à la faculté de chacun de pouvoir jouir des arts et des œuvres, et porter atteinte au débat et à la faculté critique ». Mais ne peut-on discuter cette définition qui fait l’économie de la qualification de ce qui « porte atteinte au débat et à la faculté critique », et de la précision de qui est habilité à juger de ces atteintes ?

      Dans Nouvelles morales, nouvelles censures, le juriste Emmanuel Pierrat en appelle lui aussi à une extension du domaine de la censure, du fait d’un « paradoxe » qui selon lui envahirait nos démocraties, où certaines demandes d’égalité formulées par des groupes discriminés – il donne en exemple les personnes victimes de sexisme (des femmes, donc) et de racisme (des personnes non blanches, donc), pourraient aboutir à des demandes de « censure morale ». Demandes de censure, concède-t-il toutefois, et non acte de censure en soi. Car ces demandes d’élargissement de ce que censurer veut dire butent sur le fait que pour qu’il y ait censure, il faut tout de même que ceux qui cherchent à empêcher l’œuvre ou leurs alliés en aient les moyens légaux. La censure ne peut donc jamais être totalement « privatisée », pour reprendre l’expression de Pierrat, elle doit passer par des personnes morales dotées du pouvoir d’établir des normes et des lois et de les faire appliquer, autrement dit, la censure implique des institutions – l’Etat et/ou l’Eglise par exemple[7].

      Par ailleurs, la tribune choisit d’en appeler non à la simple liberté d’expression mais à la liberté de création, tout en refusant de réfléchir à l’enjeu essentiel de cette création juridique fort récente, consacrée par la loi du 7 juillet 2016. Il faut commencer par rappeler que, comme la liberté d’expression avec laquelle elle présente beaucoup – et, pour de nombreux juristes, trop – de points communs, la liberté de création souffre en France des limites légales, qui interdisent la formulation publique de certains discours racistes, antisémites, sexistes, homophobes, d’apologie du terrorisme, d’incitations à la discrimination, qui ne sont pas de simples opinions mais des délits. Ces limites, qui n’existent pas par exemple aux Etats-Unis, où prévaut le caractère sacré d’une liberté individuelle n’admettant aucune entrave, ont été formulées par le législateur français précisément au nom des valeurs républicaines. Ce qui fait que, par exemple, ce serait un contresens juridique – et une contravention à ces principes – que de considérer qu’une demande d’interdiction d’une œuvre au motif qu’elle serait raciste, serait un acte de censure.

      Par ailleurs, tout l’apport de cette notion tient à ce en quoi elle diffère légèrement de la simple liberté d’expression. Non par le fait que les artistes auraient une liberté d’expression supérieure ou plus sacrée que le reste des citoyens, ce qui serait assez contraire aux valeurs démocratiques. Mais le fait qu’il n’est plus seulement question de la liberté d’expression du sujet individuel professionnellement habilité à créer (l’artiste donc), mais aussi de la liberté collective du public ou plutôt des publics. Car cette loi a aussi et surtout été pensée comme une loi de rénovation des politiques culturelles et, dans la continuité de la loi NOTRe de 2015, elle incorpore – d’une manière que l’on pourrait d’ailleurs discuter – cette norme jusque là absente des politiques culturelles à la française que sont les droits culturels. Or, ceux-ci entendent insister sur le droit du public, c’est-à-dire des différentes composantes de la population, à prendre part à la vie culturelle, comme bénéficiaires, mais aussi comme créateurs. Autrement dit, cette norme juridique renforce la légalité des revendications de celles et ceux qui ne se sentent pas assez représentés dans les œuvres, et qui estiment qu’il y a là un problème.

      Les valeurs au cœur de ces différents textes sont-elles en contradiction ? Qui peut en juger ? Toutes ces questions sont ouvertes. Alors, oui, bien sûr que, comme le demandent les opposants, et y compris pour leur apporter la contradiction, il faut des colloques, il faut des espaces de réflexion et des espaces de débat intellectuel et politique. Réunissant universitaires, artistes et professionnels de la culture, militants, et élus politiques. Un débat où puissent se faire entendre des voix plurielles, bien au-delà des deux camps certes commodément médiatiques, en phase avec l’ère du « clash » où une idée ne vaut que si elle tient en deux mots et si elle est caricaturale, et s’oppose caricaturalement à une autre. Nous avons besoin d’un débat où plus de deux points de vue s’expriment. Et s’affrontent, bien sûr, le cas échéant. Car la démocratie, c’est le débat, musclé, si besoin, agonistique. Mais ce ne saurait être la réduction et la disqualification méprisante des positions avec lesquelles on n’est pas d’accord. Ne pouvons-nous nous accorder sur ce point ? Et sur le fait que cette affaire soulève des questions parmi les plus urgentes de notre présent historique et que, de notre capacité, avant même de chercher des réponses et des solutions, à formuler les questions et les problèmes, dépendra notre possibilité de faire société ? Si oui, au travail. Il est temps.

      [1] W.T. Lhamon Jr Peaux blanches, masques noirs, Paris, L’Eclat, 2008 (Raising Cain. Blackfaces from Jim Crow to hip hop, Harvard University Press, 1998). Voir aussi, sur cette pratique, Sylvie Chalaye, « Eschyle à la Sorbonne : pourquoi condamner le blackface ? », Africultures, 18 avril 2018.

      http://africultures.com/eschyle-a-la-sorbonne-pourquoi-condamner-le-blackface

      [2] Sur les enjeux de la notion d’appropriation culturelle, voir notamment Eric Fassin, « L’appropriation culturelle, c’est lorsqu’un emprunt entre les cultures s’inscrit dans un contexte de domination », entretien, Le Monde, 2 novembre 2018 et Aureliano Tonet, « Dans la culture, des identités sous contrôle », Le Monde, 18 avril 2019.

      [3] Voir à ce sujet Aïssa Maïga (dir.), Noire n’est pas mon métier, Le Seuil, 2018 et le documentaire d’Amandine Gay, La Mort de Danton, Mille et une films, 2011.

      [4] Voir Réjane Sénac, L’égalité sous condition, Presses de Sciences Po, 2015 et L’Egalité sans condition, L’Echiquier, 2019.

      [5] Sur ce point je me permets de renvoyer à mon livre, Les Cités du théâtre politique en France depuis 1989, préface de Luc Boltanski, Montpellier, 2013. Voir aussi Olivier Neveux, Contre le théâtre politique, Paris, La Fabrique, 2019.

      [6] Philippe Brunet in Léa Mormin-Chauvac, « Philippe Brunet, masque de protection », Libération, 18 avril 2019.

      [7] Voir à ce sujet la recension par Jean-Baptiste Amadieu de Robert Darnton, De la censure. Essai d’histoire comparée, Paris, nrf Gallimard, 2016. Jean-Baptiste Amadieu, « Dialogue avec les censeurs », La Vie des idées, 2 mai 2016, ISSN : 2105-3030. URL : http://www.laviedesidees.fr/Dialogue-avec-les-censeurs.html

    • Racisme dans les arts : Lipanda Manifesto, tribune des 343 racisé·e·s | Le Club de Mediapart
      https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/270419/racisme-dans-les-arts-lipanda-manifesto-tribune-des-343-racise-e-s

      Les médias se sont formidablement illustrés ces derniers temps comme vitrine des arguments pleurnichards de réactionnaires blancs bourgeois, qui persistent à faire la sourde oreille et aller à l’encontre des revendications féministes et antiracistes, tout en faisant leur pain sur les systèmes de privilèges. On se souvient de la tribune des 100 femmes défendant la « liberté d’importuner ». Cette fois-ci, c’est à la « liberté de création » que s’accrochent misérablement les arguments de la tribune prétendument pour Eschyle.

      Personne n’est libre tant que d’autres personnes sont opprimées. C’est ce dont parle Audre Lorde en 1981 dans son discours L’Utilité de la colère : les femmes répondent au racisme*. Liberté d’importuner, liberté de création, liberté d’expression : génération je fais ce que je veux, quand je veux, comme je veux, et personne n’a le droit de me contredire. Mais quelle est cette liberté qui s’appuie sur le dos de celle.ux qui n’en disposent pas ? On pourrait croire à une mauvaise farce tant ça devient redondant, et pourtant.

      Et pourtant aujourd’hui encore, le monde de l’art et de la culture française s’assoit sur les revendications des personnes racisées.

      Aujourd’hui, nous sommes outré·e·s, mais surtout fatigué·e·s. Nous n’avons pas l’énergie de vous rappeler que la censure est un outil d’Etat, et non pas le fait de quelques militant·e·s usant de leur droit à la protestation et à l’insurrection face à des représentations négrophobes et racistes.

      Nous sommes épuisé·e·s de dire que la tentative d’inversion des responsabilités qui consiste à transformer l’action légitime des militants en « grave agression » est une pratique bien rodée des instances de pouvoir. Et au cas où, la militante britannique Munroe Bergdorf nous le rappelle : « Drawing attention to a social divide is not the same thing as creating one. Activists are often considered to be divisive or troublemakers by those who have become accustomed to the privileges that social divides provide them. »

      Aujourd’hui, nous sommes lassé·e·s de devoir constamment démonter vos hypocrisies : non, pour nous, personnes racisé·e·s, le théâtre n’est pas le « lieu de la métamorphose » pour nous, lorsque nous sommes constamment empêché·e·s de créer par les mécanismes discriminatoires et éliminatoires de ce milieu.

      Oui, nos identités sont des cloîtres, lorsque, montant sur un plateau, nos corps sont des objets exotiques venant d’ailleurs. Non, nous ne pouvons pas créer librement, lorsque l’on nous dénie la possibilité d’être neutre, et que nous sommes perpétuellement et violemment renvoyé·es à la réalité de notre racisation par le système. Oui, le théâtre est « refuge des identités » : lorsque nos scènes françaises sont occupées majoritairement par des spectacles créés par des hommes blancs, avec des hommes blancs, regardés, critiqués ou acclamés par d’autres hommes blancs, on peut clairement parler de communautarisme. Une communauté qui ne se dit, ni ne se voit comme telle, et qui pourtant, monopolise nos scènes, nos récits, et verrouillent les portes à toutes celleux qui n’appartiennent pas à leur monde.

      Aujourd’hui, nous sommes usé·e·s de constater que ce théâtre est celui de privilégié·es, où s’amuser à singer « l’Autre » est un loisir, tout en retirant à cet “autre” son droit légitime — si ce n’est son devoir — de s’insurger contre le spectacle de son identité tournée en mascarade. Ce même théâtre qui se proclame « intellectuel, humaniste, helléniste ». Un théâtre qui a le culot de croire, et de se faire croire, que la culture blanche bourgeoise est universelle. Qu’elle touche à ce qu’il y a de commun en chaque être humain. Mais comment n’avez-vous pas remarqué que vos salles de théâtres étaient si vides de diversité ? Se peut-il sérieusement que vous persistiez à ne pas voir que votre théâtre n’intéresse que celles et ceux à qui il ressemble, cell.eux qui y sont représentés, celle.eux qui peuvent s’y identifier ? Qui sont les citoyen·nes que vous prétendez servir ?

    • Islamo-gauchisme, décolonialisme, théorie du genre... Le grand noyautage des universités
      http://www.lefigaro.fr/actualite-france/enseignement-superieur-le-grand-laboratoire-de-la-deconstruction-20190510

      ENQUÊTE - Infiltrées par les syndicats d’étudiants, noyautées par des groupuscules « indigénistes », paralysées par la lâcheté de la hiérarchie de l’enseignement supérieur, les facultés et certaines grandes écoles sont aujourd’hui le théâtre d’un bras de fer idéologique. Les pressions et menaces y sont fréquentes et tous les coups semblent permis.
      (...)
      Dans un autre registre, Olivier Beaud, professeur de droit public à Panthéon-Assas, vient de dénoncer la campagne d’un groupe d’universitaires et d’étudiants de l’EHESS contre leurs collègues « coupables » d’avoir participé au grand débat organisé le 18 mars à l’Elysée par Emmanuel Macron. En novembre 2018, Le Point a publié un texte dans lequel 80 intellectuels décrivaient le « décolonialisme » comme une « stratégie hégémonique » à l’œuvre dans l’enseignement supérieur. Parmi les signataires, Elisabeth Badinter, Alain Finkielkraut, Pierre Nora et Mona Ozouf. Leur appel a eu bien peu d’écho, tant auprès de Frédérique Vidal que du corps enseignant.
      La ministre n’a pas eu un mot de soutien pour Laurent Bouvet, par exemple, quand ce professeur de science politique à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines a eu l’imprudence de tweeter en mai 2018 à propos du voile islamique porté par une dirigeante de l’Unef qui commentait les blocages des facs : « A l’Unef, la convergence des luttes est bien entamée. C’est la présidente du syndicat à l’université Paris-Sorbonne qui le dit. » Aussitôt, l’Unef a sorti un communiqué condamnant « un déferlement de haine raciste, sexiste et islamophobe » et demandant que Laurent Bouvet soit sanctionné. Une vidéo a même circulé, montrant une AG où près de 200 étudiants vociféraient « Ta gueule, Bouvet ! » pendant de longues minutes.

      L’institution marche sur des œufs

      Le politologue, cofondateur du Printemps républicain, est l’une des cibles privilégiées des indigénistes pour avoir théorisé l’« insécurité culturelle » française et dénoncé l’obsession racialiste de la « gauche identitaire ». Le président de l’université l’a assuré de sa sympathie en privé, mais n’a rien fait pour le soutenir publiquement. Aucun de ses collègues ne s’est d’ailleurs manifesté. L’Unef profite de cette lâcheté généralisée pour militer activement en faveur des thèses indigénistes. Récemment, elle s’est jointe à d’autres associations pour empêcher une représentation de la pièce d’Eschyle Les Suppliantes à la Sorbonne. De son côté, le CRAN (Conseil Représentatif des associations noires de France) de Louis-Georges Tin, maître de conférences à l’université d’Orléans, a appelé au boycott de la pièce. Motif : des acteurs blancs portaient des masques noirs, ce que les contestataires assimilaient à la pratique du « blackface » visant à ridiculiser les Noirs. Pour une fois, l’université a condamné la tentative de censure.

    • Deux mois après la polémique sur le « blackface », la pièce « Les Suppliantes » se déroule dans le calme
      https://www.franceculture.fr/theatre/deux-mois-apres-la-polemique-sur-le-blackface-la-piece-les-suppliantes

      « C’est la victoire de l’art, de la liberté d’expression sur la bêtise au front bas, se félicite l’écrivain Pierre Jourde. Ils utilisent une cause juste, l’antiracisme, à des fins stupides. La preuve, c’est que de grands metteurs en scène ont pris la défense de Philippe Brunet. »

      encore une fois #ta-gueule-jourde

    • Je vous ai épargné jusque-là les 6 ou 7 posts d’André Markowicz sur FB, mais vous pourrez les retrouver aisément grâce à cette réponse (en commentaire).

      André Markowicz
      https://www.facebook.com/andre.markowicz

      Adeline Rosenstein :
      Excusez-moi : vous ne vivez donc pas avec des artistes ou des étudiant.e.s qui vous parlent du racisme subi dans les milieux culturels ? Vous ne ressentez pas la colère de vous retrouver impuissant à les défendre tellement les gens bien intentionnés ne voient pas de quoi s’alarmer ? Pourquoi mettre tout votre savoir écrire au service de leur décrédibilisation ? Vous, justement, traducteur, savez mieux que les autres, pourquoi parfois on crie, vous savez tendre l’oreille quand les experts et autres assis discréditent la personne qui apporte une information gênante. Vous savez mieux qu’un autre qu’on dit de la victime qu’elle exagère quand on ne veut pas l’accueillir, qu’elle menace, quand on veut la faire taire, qu’elle est un danger physique, quand on veut que les gendarmes nous en débarrassent. Une injustice hurle à votre porte, demande votre attention et vous la ridiculisez ? ses représentants parlent mal ? mais cette question devrait vous intéresser immédiatement ; vous ne voulez quand-même pas parler comme ce que vous avez toujours combattu : l’ordre - non ?Observez le dédain que vous exprimez à l’endroit de personnes qui en ont juste marre d’être caricaturées sur scène et tenues à l’écart de toute discussion. Comment est-ce possible ? Observons et racontez- moi comment ça marche, comment ça marche, ce scandale, votre dédain, qu’avec Mnouchkine et Vinaver, enfants de l’exil sans accent, vous vous retrouviez côté CRS, ministres, amphi, je ne le conçois pas. C’est pourquoi je vous prie de reconsidérer cette position au nom de tous les personnages que vous avez traduits alors qu’en France, considérant qu’ils ne « savaient pas aligner deux phrases », on voulait les anéantir - on n’avait rien compris, vous vous rappelez ? Reconsidérez ces doutes « ils nous font douter » mais oui car pour moi c’est ça, penser, c’est penser contre soi mais surtout contre le groupe ou l’amphi qui nous enferme avec ministres dedans, d’où on ne on veut pas entendre la plainte. C’était un spectacle d’étudiants mais il y a un autre problème, vous savez, notre environnement, notre lenteur à changer, vous parlez d’une gauche en danger et je vous parle de sa difficulté historique à reconnaître ses erreurs. Les militants antiracistes et les victimes du racisme en milieu culturel ne s’adressent pas à des ennemis politiques mais à des gens de theatre qui veulent pouvoir se dire antiracistes à leur tour et disent je combats à tes côtés, tiens-toi bien là, attends, ôte-toi, ne dis rien, laisse-moi faire, je vais leur dire, laisse-moi finir mon verre, ma blague, mon rôti, ma sieste, mon spectacle antiraciste, mon interview, mes conférences, mes mémoires, ma vie sans toi et je viendrai te chercher.

    • Ce qui est dit ci-dessous n’a pas été raconté sérieusement par aucun journaliste (si j’ai bien compris, on est passé, grâce au rapport de forces instauré par les militants, du grimage noir aux masques noirs grotesques, puis aux masques dorés/cuivrés, etc.) Mais ce qui n’est pas dit, c’est que cette représentation « d’art officiel », déplaçant le fameux spectacle dans le Grand Amphithéâtre de la Sorbonne, avec deux ministres de sortie et les CRS qui vont avec, applaudie par le tout Paris intellectuel bourgeois blanc, d’A.Bastié à A.Mnouchkine, de R.Enthoven à O.Rollin, est le symptôme de l’hégémonie toujours plus forte de la pensée d’extrême-droite au nom de « la liberté d’expression » ou de « la liberté artistique ». Après la défense forcenée des pires unes de Charlie et la campagne contre les « islamogauchistes », à présent haro sur « les identitaires d’extrême-gauche » et « le fascisme des antifascistes » (comme on l’a entendu en Italie au moment du Salon du Livre de Turin et à l’occasion des meetings chahutés de Salvini).

      Blackface à la Sorbonne. Hier soir, Philippe... - Louis-Georges Tin
      https://www.facebook.com/louisgeorges.tin/posts/10161903836565644?hc_location=ufi

      Blackface à la Sorbonne. Hier soir, Philippe Brunet a joué son spectacle à la Sorbonne, les Suppliantes d’Eschyle. Mais cette fois, pas de déguisements raciaux, pas de Blackface, pas de maquillage en noir pour représenter les Africains : juste des masques dorés. M. Brunet qui avait fièrement clamé qu’il rejouerait son spectacle avec du maquillage en noir a finalement tiré les leçons de l’expérience. Le CRAN qui avait appelé au boycott du spectacle (non au blocage) se réjouit donc de cette victoire collective et définitive. Malgré un mois d’hystérie générale, nous avons tenu bon, et finalement, nous avons obtenu gain de cause. La voix des premiers concernés a été entendue.

    • Quelle salade - selon le Figaro/Vox, voilà l’université menacée par le danger islamo-féministe...

      Carole Talon-Hugon : « Une nouvelle prohibition étend son contrôle sur l’art »
      http://www.lefigaro.fr/vox/culture/carole-talon-hugon-une-nouvelle-prohibition-etend-son-controle-sur-l-art-20

      Traditionnellement, les agents de censure sont politiques ou religieux. Ils sont récemment sournoisement devenus économiques (impératifs d’insertion professionnelle, de recherche appliquée, etc.). Ce qui se passe avec les affaires Chénier ou Eschyle, c’est l’arrivée très préoccupante d’un risque venu d’ailleurs que de ces foyers classiques ou plus récents : de groupes de pression et d’associations communautaires. La liberté académique ne doit certes pas être sans contrôle ; elle est « liberté de poursuivre sa recherche professionnelle à l’intérieur d’une matrice de normes de la discipline définies et appliquées par ceux qui sont compétents pour comprendre et appliquer de telles normes » (O. Beaud). Ce qui revient à dire qu’elle ne connaît qu’une forme de censure légitime, celle réalisable par des pairs à l’intérieur d’un domaine d’expertise partagé, et que toutes celles venues d’ailleurs sont usurpatoires et sapent les fondements de l’université.

    • Une bonne tribune du Monde qui a tout à voir avec ce qui précède

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/08/28/le-marxisme-culturel-fantasme-prefere-de-l-extreme-droite_5503567_3232.html

      C’est là le lien avec ce que la droite radicale entendra bientôt par « marxisme culturel ». Le terme prend alors une valeur péjorative : il désigne la prétendue volonté des disciples de l’école de Francfort de nuire à la culture occidentale et de s’attaquer à la société traditionnelle en se servant du féminisme, de l’homosexualité et du multiculturalisme. « Au tournant des années 1990, alors que le communisme vient de s’effondrer, les milieux ultra-conservateurs américains voient dans la mondialisation une menace pour l’Occident chrétien, remarque Jérôme Jamin, politiste et philosophe belge, spécialiste des populismes. Ils s’inquiètent aussi de la montée, sur les campus universitaires, du “politiquement correct” qu’ils assimilent à une attaque contre la liberté d’expression ayant pour but d’empêcher les discours ne reconnaissant pas la pleine égalité entre les hommes et les femmes, les Noirs et les Blancs, les hétérosexuels et les homosexuels, etc. » Le terme se diffuse au sein des milieux extrémistes de droite.

  • Attacks by White Extremists Are Growing. So Are Their Connections. - The New York Times
    https://www.nytimes.com/interactive/2019/04/03/world/white-extremist-terrorism-christchurch.html

    In a manifesto posted online before his attack, the gunman who killed 50 last month in a rampage at two mosques in Christchurch, New Zealand, said he drew inspiration from white extremist terrorism attacks in Norway, the United States, Italy, Sweden and the United Kingdom.

    His references to those attacks placed him in an informal global network of white extremists whose violent attacks are occurring with greater frequency in the West.

    An analysis by The New York Times of recent terrorism attacks found that at least a third of white extremist killers since 2011 were inspired by others who perpetrated similar attacks, professed a reverence for them or showed an interest in their tactics.

    The connections between the killers span continents and highlight how the internet and social media have facilitated the spread of white extremist ideology and violence.

    In one instance, a school shooter in New Mexico corresponded with a gunman who attacked a mall in Munich. Altogether, they killed 11 people.

    #extrême_droite #agression #terrorisme #cartographie #visualisation

  • Maryse Condé : « La France est l’un des pays les plus racistes au monde »97land | 97land
    http://97land.com/maryse-conde-la-france-est-lun-des-pays-les-plus-racistes-au-monde

    Pour ABC, quotidien espagnol fondé en 1903 et tiré à 280 000 exemplaires, Inés Matin Rodrigo a réalisé l’interview de Maryse Condé, Nobel Alternatif de Littérature à l’occasion de la sortie de ses mémoires d’enfance dans la langue de Cervantes. Extraits.

    #racisme #Maryse-Condé

  • Contre les théories du « grand remplacement » : rompre avec la rationalité eurocentrique | João Gabriell
    https://joaogabriell.com/2019/03/24/contre-les-theories-du-grand-remplacement-%EF%BB%BF-rompre-avec-la-rat

    Contre les théories du « grand remplacement », plutôt qu’un amoncellement de preuves factuelles contradictoires, il faut rompre avec la rationalité eurocentrique qui les fondent, à la fois en imposant un autre type de débats que ceux qui ont cours, et en renforçant nos luttes politiques contre l’impérialisme occidental. Source : Le blog de João

    • Le « grand remplacement », généalogie d’un complotisme caméléon

      Trouvant ses racines dans la chrétienté médiévale, qui considère juifs et musulmans comme une menace, la théorie d’une « submersion » de la France par un prétendu « envahisseur étranger » convoque et adapte toutes les idéologies présentes et passées – racialistes, antisémites et nationalistes – aptes à servir son propos.

      La pensée du « grand remplacement », propagée principalement par l’écrivain #Renaud_Camus, figure des milieux identitaires, et le candidat d’extrême droite à l’élection présidentielle #Eric_Zemmour, ne repose pas simplement sur un délire démographique. Elle s’appuie sur tout un système de représentations, où s’entremêlent des sources clairement identifiables et un imaginaire plus diffus, constitué au fil des siècles et constamment revisité.

      Le « grand remplacement » ne laisse pas toujours deviner son âge, tant il adopte des formules modernes ou des exemples contemporains. C’est par exemple le cas chez Renaud Camus. Ainsi écrit-il dans Le Grand Remplacement (La Nouvelle Librairie, 2021) : « L’expression de “grand remplacement” désigne, certes, essentiellement, le remplacement d’un peuple, le peuple français indigène, par un ou plusieurs autres ; celui de sa culture par la déculturation multiculturaliste ; celui de sa civilisation si brillante et admirée par la décivilisation pluriethnique (le village global), elle-même en rivalité âpre avec l’intégrisme musulman, la conquête et la conversion islamique. »

      [...] Aujourd’hui, les musulmans sont vus comme les acteurs d’une conspiration mondiale menée « par les princes et par les masses, par les multimilliardaires du pétrole et par les “jeunes” sans emploi », croit savoir Camus. (...)

      Après la seconde guerre mondiale, l’extrême droite est contrainte à un renouvellement idéologique. La fin des colonies et la rapide croissance économique se traduisent par la montée d’une immigration venue du Sud vers l’Europe. Et alors, la peur de la submersion démographique qui était jusque-là davantage du domaine de la fiction, commence à se diffuser.
      L’idée de remplacement de la population est exprimée par René Binet, un ancien SS français, qui écrit dans son livre Théorie du racisme (1950) que« la “Révolution” n’a, jusqu’ici, été que l’accession de races inférieures au pouvoir, en remplacement de races supérieures dégénérées ». Camus ne s’inspire pas de ce livre, mais il s’inscrit néanmoins dans ce courant de pensée. Il rend en effet un hommage appuyé à celui qui travailla le plus à développer ses idées, l’essayiste Dominique Venner. Après son suicide en 2013, Camus le décrit comme un « grand intellectuel ». Pour Stéphane François, professeur de science politique à l’université de Mons, en Belgique, et historien des idées, « Venner joue un rôle central, car il se situe à l’avant-garde intellectuelle, il tente de sortir d’un nationalisme étroit par l’adoption d’un pan-nationalisme européen. Il est notamment l’auteur d’Histoire et tradition des Européens. 30 000 ans d’identité [#éditions_du_Rocher, 2002], dans lequel il affirme qu’existe une continuité culturelle en Europe, de la préhistoire à aujourd’hui… On trouve en outre chez lui l’idée que l’immigration est une invasion, que les nouveaux arrivants venus du Sud ne peuvent pas s’intégrer, à cause de leur violence ».

      (...) L’immigration est une « contre-colonisation ». Un large usage est donc fait d’un auteur anticolonialiste tel le psychiatre martiniquais Frantz Fanon. On le transforme en ce qu’il n’est pas : une espèce d’apôtre du « chacun chez soi » identitaire.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/01/28/le-grand-remplacement-genealogie-d-un-complotisme-cameleon_6111330_3232.html

      https://justpaste.it/28s9i

      source démocratique et CAC 40, #Alain_Finkielkraut pas cité #extrême_droite #histoire #chrétienté_médiévale #1492 #Joseph_de_Maistre #Ernest_Renan #Maurice_Barrès #Édouard_Drumont #Dominique_Venner #antisémitisme #islamophobie #racisme #complotisme #immigration #différentialisme #Enoch_Powell #Alain_de_Benoist #Nouvelle_droite

  • The New Zealand Shooter’s White, Islam-Free Europe is Imaginary - But European Islamophobia is Frighteningly Real | Opinion
    https://www.newsweek.com/islamophobia-christchurch-manifesto-breivik-europe-1365089

    American cultural anthropologist Talal Asad puts it best: “Muslims are present in #Europe and yet absent from it. The problem of understanding #Islam in Europe is primarily, so I claim, a matter of understanding how “Europe” is conceptualized by Europeans. Europe (and the nation-states of which it is constituted) is ideologically constructed in such a way that Muslim immigrants cannot be satisfactorily represented in it. I argue that they are included within and excluded from Europe at one and the same time in a special way.”

    #musulmans #islamophobie

  • Je dois avouer que je suis un peu surpris par l’indécence crasse des éditorialistes venant défendre la légitimité de la théorie du grand remplacement au lendemain du massacre de Christchurch. Non pas le fait qu’il y ait des islamophobes en roue libre dans nos médias (ça, dirais-je, on a l’habitude), mais le fait qu’au lendemain d’un massacre aussi horrible, ils viennent se lâcher aussi ouvertement dans leurs émissions et sur leurs flux Twitter, sans même faire semblant d’attendre ne serait-ce qu’une petite période symbolique de respect pour les victimes. Le fait qu’il ne semble y avoir aucune vague d’indignation vertueuse de l’intérieur du système après un tel niveau de dégueulasserie fait partie, également, de l’aspect insupportable de ces interventions (on se souvient, à l’inverse, des interminables commentaires indignés quand tout le monde n’était pas au garde-à-vous après le massacre de Charlie Hebdo) – l’idée qu’on vienne défendre ouvertement la théorie du « Grand remplacement » au lendemain même d’un massacre que l’assassin justifie lui-même par la théorie du « Grand remplacement », ça n’a pas l’air de provoquer une large indignation médiatique.

    Pour le coup, je suis sidéré par cette attitude aussi ouvertement et immédiatement dégueulasse et irrespectueuse.

    Je vais te dire : j’y vois un marqueur de suprématisme blanc, cette façon de cracher à la gueule des « autres » en affichant sciemment son mépris raciste. Une signe des temps typiquement MAGA. Je veux dire que l’affichage du mépris raciste n’est pas un élément secondaire de leur comportement raciste, mais c’est l’élément central de leur communication. Il ne s’agit pas simplement de dire une saloperie raciste (ce qui se fait déjà très bien depuis longtemps dans notre culture), il s’agit désormais de le faire ostensiblement, avec la « fierté blanche » d’un facho bas du front.

    Dans le racisme ambiant usuel, on passe à la télé 7 jour sur 7 pour balancer les phrases codées du genre : « non mais on a bien le droit de critiquer l’islam ». Dans le suprématisme blanc en voie de banalisation, on passe spécifiquement à la télévision au lendemain du massacre d’une cinquantaine de fidèles dans une mosquée pour commenter l’évènement sous l’angle « ça ne doit pas nous interdire de critiquer l’islam et le grand remplacisme ».

  • 2 chercheuses de l’université de Stanford se sont posées la question des effets de cette interdiction sur le devenir des jeunes filles qui, après 2004 n’avaient plus le droit de porter le voile - baignant ainsi dans un environnement scolaire des plus « laïque »

    Political Secularism and Muslim Integration in theWest: Assessing the Effects of the French HeadscarfBan∗

    PDF : https://vfouka.people.stanford.edu/sites/g/files/sbiybj4871/f/abdelgadirfoukajan2019.pdf

    Do bans on religious expression affect minority integration? In this paper we system-atically investigate the effects of the 2004 French headscarf ban and show that theintegration of Muslim women was negatively impacted by the law along a number ofdimensions. Affected cohorts of Muslim women are less likely to complete secondaryeducation, more likely to drop out of secondary school after the law’s enactment, andmore likely to take longer to complete secondary education. Long-term socioeconomicoutcomes and attitudes are also affected. Treated cohorts have lower rates of labor forceparticipation and employment, and are more likely to have more children. A combina-tion of quantitative and qualitative evidence suggests that these results are primarilydriven by two mechanisms. The first one is discrimination, either through the policyitself or through negative attitudes surrounding and accompanying its implementation.This manifested in school, with direct consequences for educational performance andenrollment, but also in university and in the labor market. The second mechanism isthe strengthening of Muslim identity and the weakening of ties with France, which ledwomen affected by the ban to retreat into their communities and avoid interaction withthe broader society.

  • Decathlon et le hijab : la France est-elle devenue folle ? | Ilyes Ramdani
    https://www.bondyblog.fr/opinions/decathlon-et-le-hijab-la-france-est-elle-devenue-folle

    Ce mardi 26 février, une polémique nourrie par des responsables politiques de La République en marche et du parti Les Républicains ont amené Decathlon à renoncer à commercialiser un « hijab de running ». Loin d’être anecdotique, cet événement en dit long sur la névrose d’une frange de la société française autour de l’islam et du voile. Source : Bondy Blog

  • #Kokopelli...

    ... est-ce que quelqu’un en sait plus sur ces critiques ?

    Nous n’irons plus pointer chez Gaïa. Jours de travails à Kokopelli

    Essentiellement constitué de #témoignages, cet ouvrage est l’aboutissement d’une réflexion collective.

    Il est le fruit de la solidarité entre des jardinières d’Ariège et des travailleuse exploitées au sein d’une asociation « écolo », Kokopelli, dont l’objet est de diffuser des semences.

    http://leseditionsduboutdelaville.com/index.php?id_product=6&controller=product
    #livre #critiques

    Et ça :

    #Dominique_Guillet, fondateur de Kokopelli, complotiste et antisémite

    https://twitter.com/Paris_luttes/status/1098879618113777665

    Dominique Guillet, fondateur de Kokopelli, complotiste et antisémite

    Côté face, Dominique Guillet est le fondateur de Kokopelli, une association faisant la promotion des semences libres. Côté pile, #Xochipelli (son pseudonyme) publie des propos hallucinants sur son blog : complotisme, antisémitisme, #islamophobie... tout y passe, accentuant un peu plus l’image controversée de Kokopelli, déjà pointée du doigt pour ses méthodes.

    https://paris-luttes.info/dominique-guillet-fondateur-de-11695
    #antisémitisme

  • Loi Blanquer : quand les parlementaires se défoulent
    https://blogs.mediapart.fr/b-girard/blog/160219/loi-blanquer-quand-les-parlementaires-se-defoulent

    Dans un contexte brutalement populiste de remise en cause du principe parlementaire, l’Assemblée nationale, avec la discussion du projet de loi #Blanquer, est en train d’apporter à ses détracteurs la pire réponse qui soit : brutale et populiste.

    Sur le fond comme sur la forme, c’est une semaine de défoulement que se sont offerte les députés. Des amendements à la pelle chaudement défendus sur des sujets comme l’uniforme scolaire (et la tenue vestimentaire des enseignants), la présence des symboles nationaux (un lever des couleurs chaque matin dans les écoles ?), la suppression de l’éducation sexuelle, du principe d’égalité entre hommes et femmes, de l’enseignement de l’anglais en primaire, la possibilité d’une amende de 450 euros (!) pour toute insulte proférée par un élève, bien sûr l’incontournable question du foulard etc : les préoccupations reflétées par ces propositions, discutées ou pas, adoptées ou non en quelques minutes, voire en quelques secondes, donnent une bien piteuse image de la représentation nationale. Et lorsqu’au fil des débats, on en arrive à une question aussi lourde de conséquences que « l’école du socle », qui porte en germes le risque d’absorption de l’enseignement primaire par le secondaire - une question donc fondamentale mais qui n’a fait l’objet d’aucune étude préalable, d’aucune concertation – il ne faut néanmoins pas plus d’une demi-heure à une poignée de parlementaires pour en adopter le principe.

    Méconnaissance du sujet (par exemple l’ignorance crasse des députés sur les programmes scolaires), dogmatisme et incapacité réelle à prendre en considération la complexité des choses, refus du débat, mépris pour l’opinion d’autrui, conception abusive de la majorité (les plus nombreux ont nécessairement raison), inclination à satisfaire momentanément ses électeurs plutôt qu’à œuvrer pour l’intérêt général : en proie au populisme le plus débridé, les députés ont fait le choix de décisions insensées qui engagent l’avenir pour de longues années.

    Face à un projet de loi ministériel porté par une idéologie lourdement réactionnaire, les parlementaires non seulement n’ont pas joué leur rôle de contrôle du gouvernement mais ils ont renforcé le ministre dans son arrogance et son sentiment de toute puissance. Arrogance et sentiment de toute puissance qui ne tombent pas de nulle part mais qui ont été incontestablement encouragés par le silence ou la complaisance qui accompagnent Blanquer depuis bientôt deux ans : brutal et doctrinaire, il l’était déjà à sa nomination. Mais l’on est bien forcé de constater que ses premières mesures, ses premières annonces – suspension de la réforme du collège, retour à la semaine de quatre jours en primaire, encouragement au redoublement etc – n’avaient guère suscité de critiques, pas davantage que son mode opératoire fait d’une communication forcenée et d’annonces démagogiques. Tradition bien française : il aura fallu la réforme du lycée et celle du bac pour faire émerger de la quasi confidentialité une contestation qui n’avait sans doute pas jugé nécessaire (ou suffisamment digne…) de s’appliquer aux autres niveaux d’enseignement.

    Alors que les parlementaires font l’objet de menaces et d’agressions personnelles difficilement justifiables même dans une démocratie aussi étriquée que la 5e république, que le Palais-Bourbon a été la cible d’une attaque qui n’est pas sans évoquer les émeutes factieuses de février 34, que la contestation politique se noie dans l’hystérie verbale et la violence physique, que certains syndicats ne voient pas d’inconvénients à défendre leur cause au côté d’irresponsables aventuriers, la question éducative mérite sans doute une autre approche. Il y a urgence, même…

    #éducation #nationalisme #classisme #sexisme #islamophobie #réactionnaires #école

    • Plus de détails ici
      http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2019/02/14022019Article636857263009013863.aspx

      Le rapport de la seconde journée dit

      Proximité idéologique LR - Blanquer

      Face à ces amendements, JM Blanquer ne se braque pas. Bien au contraire, il répond avec beaucoup de tact. « Vous avez raison il faut une carte de France », répond-il à D Lorion(LR). « L’amour du pays doit être partagé et c’est mon rôle de ministre de l’éducation. Mais ce débat nous amènerait à tapisser toutes les salles de classe de nos bonnes intentions ». Sur l’uniforme : « j’ai vu les bienfaits de l’uniforme. Je continue à l’encourager ». La proximité idéologique est telle qu’une députée LR, Mme Kuster, invite JM BLanquer à la rejoindre. « Vous vous retenez. Lâchez vous. Allez jusqu’au bout. On a besoin de vous ».

      L’occasion est rapidement trouvée de secondes retrouvailles. Les Républicains et la majorité se mettent d’accord sur un amendement commun sur des sanctions pour les harceleurs (amendement 1134).

      Aussi l’amendement de V Petit (LREM) en faveur des parents homosexuels passe t-il sans autre réaction que celle ,indignée, de Mme Thill (LREM). Cet amendement demande que les questionnaires de l’éducation nationale parlent de « parent 1 » et « parent2 » au lieu de père et mère (834).

      Lors de la seconde séance ,
      http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2019/02/13022019Article636856375738954541.aspx
      le débat se porte sur l’histoire nationale, ou plutôt le roman national, et la priorité donnée aux familles en éducation sur l’Etat. A Ramadier veut qu’on apprenne les grands hommes de l’histoire de France et JM Blanquer rappelle qu’il a changé les programmes. L’EMC est particulièrement ciblée car portant une éducation morale qui devrait rester l’apanage des parents. Ce qui est enseigné à l’école doit l’être « dans le respect de l’éducation qu’il reçoit dans sa famille ». « Personne ne nie le rôle primordial des parents », répond JM Blanquer.

      Je ne comprend pas bien la phrase sur les #grand_homme que j’ai graissé. Quand Blanquer dit qu’il a changé les programmes, est-ce que ca veut dire qu’il a déjà renforcé la place des grands hommes dans les programmes d’enseignement ?

  • Rôle des intellectuel·les, universitaires ‘minoritaires’, et des #porte-parole des #minorités

    La publication du billet de Gérard Noiriel sur son blog personnel[1] est révélatrice de la difficulté de mener, au sein du champ académique, une réflexion sur la #production_de_savoirs relatifs à la « #question_raciale[2] » et sur leurs usages sociaux dans l’#espace_public. Il est clair que le champ académique n’a pas le monopole de cette réflexion, mais l’intérêt de s’y consacrer est qu’elle peut se mener, a priori, selon les règles et procédures dudit champ. En effet, il semble que les débats liés aux concepts de « #racialisation », « #intersectionnalité », « #postcolonial », « #nouvel_antisémitisme » ou encore « #islamophobie » aient tendance à se dérouler par tribunes de presse interposées, et non par un dialogue via des articles scientifiques[3]. Si ces questions trouvent un espace dans la sociologie ou la science politique, elles peinent encore à émerger dans des disciplines comme le #droit ou l’#économie.

    Durant la période charnière 2001-2006, où la question coloniale et raciale est devenue centrale dans l’espace public – notamment du fait du vote, en 2001, de la « #loi_Taubira » reconnaissant la #traite et l’#esclavage en tant que #crime_contre_l’humanité, de l’impact des rébellions urbaines de 2005, de la référence par le législateur au rôle « positif » de la #colonisation [4] et de la création de nouvelles organisations de minoritaires telles que le #Conseil_représentatif_des_associations noires (#CRAN) –, la #disputatio_académique semblait encore possible. On pense notamment, en #sciences_sociales, aux programmes ANR Frontières, dirigé par Didier Fassin, et #Genrebellion, dirigé par Michelle Zancarini-Fournel et Sophie Béroud, où les concepts de racialisation ou d’intersectionnalité pouvaient être utilisés sans susciter une levée de boucliers.

    La publication des ouvrages collectifs De la question sociale à la question raciale ? et Les nouvelles frontières de la société française (La Découverte, 2006 et 2010), dirigés par Didier et Éric Fassin pour le premier, et par D. Fassin pour le second, constituent de ce point de vue des moments importants du débat scientifique français, qui ont permis de confronter des points de vue parfois divergents, mais esquissant une forme de dialogue. On y retrouve les contributions d’universitaires tels que Pap Ndiaye, Éric Fassin, Stéphane Beaud ou Gérard Noiriel qui, par la suite, via des tribunes dans Mediapart ou Libération, ont tous poursuivi la discussion dans le champ médiatique, notamment lors de l’« affaire des quotas » révélée par Mediapart en 2011[5]. Alors que P. Ndiaye et E. Fassin dénonçaient la catégorisation raciale des joueurs au sein de la Fédération française de football, et notamment la caractérisation de « prototypes » des « Blacks » par le sélectionneur Laurent Blanc[6], S. Beaud et G. Noiriel, tout en reconnaissant le caractère discriminatoire des quotas fondés sur la race, refusent « d’instruire des procès en hurlant avec la meute ». Ils considèrent qu’il faut prendre en compte le langage ordinaire du monde du football et, de manière tout à fait discutable, que le mot « Black » « renvoie moins à une catégorie raciale qu’à une catégorie sociale[7] ». Les récents commentaires de G. Noiriel sur le débat Mark Lilla / Eric Fassin (Le Monde, 1er octobre 2018) correspondent au dernier épisode d’une polémique qui court depuis une dizaine d’années.

    Ce mouvement allant d’une disputatio académique à une controverse médiatique est, nous semble-t-il, problématique pour la sérénité de la réflexion collective sur la question raciale. L’objectif de cette contribution est de soulever plusieurs questions à partir de l’article de G. Noiriel, sans entrer dans une logique polémique. Tout d’abord, on focalisera notre attention sur le rôle des intellectuel.le.s et leurs relations avec les porte-parole des minorités, et sur les différentes conceptions de l’intellectuel.le (« critique », « engagé.e » ou « spécifique »). Ensuite, on analysera le sort réservé aux universitaires appartenant à des groupes minorisés (ou « universitaires minoritaires ») travaillant sur la question raciale. En accusant ceux-ci de se focaliser sur la question raciale au détriment d’autres questions – la question économique par exemple (et non « sociale »), G. Noiriel porte le soupçon de « militantisme » et les perçoit comme des porte-parole de minorités. Or il est nécessaire de contester cette assignation au statut de porte-parole et la tendance générale à relativiser la scientificité des universitaires minoritaires qui, on le verra, subissent un certain nombre de censures voire de discriminations dans le champ académique. Il s’agit enfin de réfléchir au futur en posant la question suivante : comment mener des recherches sur la question raciale et les racismes, et construire un dialogue entre universitaires et organisations antiracistes sans favoriser les logiques d’essentialisation et tout en respectant l’autonomie des un.e.s et des autres ?
    Engagements intellectuels

    Tout en se réclamant tous deux de l’héritage de Michel Foucault, E. Fassin et G. Noiriel s’opposent sur la définition du rôle de l’intellectuel.le dans l’espace public contemporain. Ce débat, qui n’est pas propre aux sciences sociales[8], semble s’être forgé à la fin des années 1990, notamment lors de la controverse publique sur le Pacte civil de solidarité (Pacs). Tout en s’appuyant sur les mêmes textes de Foucault rassemblés dans Dits et écrits, E. Fassin et G. Noiriel divergent sur la posture d’intellectuel.le à adopter, l’un privilégiant celle de l’intellectuel.le « spécifique », selon l’expression de Foucault, l’autre celle de l’intellectuel.le « engagé.e ».

    E. Fassin publie en 2000 un article pour défendre la posture de l’intellectuel.le « spécifique »[9]. Celui-ci se distingue de l’intellectuel.le « universel.le », incarné notamment par la figure de Sartre, qui intervient dans l’espace public au nom de la raison et de principes universels, et souvent au nom des groupes opprimés. L’intellectuel.le spécifique appuie surtout son intervention sur la production d’un savoir spécifique, dont la connaissance permet de dénaturaliser les rapports de domination et de politiser une situation sociale pouvant être considérée comme évidente et naturelle. En ce sens, l’intellectuel.le spécifique se rapproche du « savant-expert » dans la mesure où c’est une compétence particulière qui justifie son engagement politique, mais il ou elle s’en détache pour autant qu’il ou elle « se définit (…) comme celui qui use politiquement de son savoir pour porter un regard critique sur les usages politiques du savoir[10] ». Critique, l’intellectuel.le spécifique « rappelle la logique politique propre à la science[11] ». L’expert.e prétend parler de manière apolitique au nom de la science pour maintenir l’ordre social dominant, tandis que l’intellectuel.le spécifique s’appuie sur un savoir critique de l’ordre social, tout en reconnaissant sa dimension politique. C’est dans cette perspective foucaldienne qu’E. Fassin critique la posture du « savant pur », qui revendique une « science affranchie du politique » : « Désireux avant tout de préserver l’autonomie de la science, [les savants purs] se défient pareillement de l’expert, réputé inféodé au pouvoir, et de l’intellectuel spécifique, soupçonné de militantisme scientifique[12] ». Le savant pur renvoie dos-à-dos les usages normatif et critique de la science comme si la science avait une relation d’extériorité avec le monde social. Or, selon E. Fassin, « pour des raisons tant politiques que scientifiques, (…) le partage entre le savant et le politique s’avère illusoire : de part en part, le savoir est politique. C’est pourquoi celui qui se veut un savant « pur » ressemble d’une certaine manière à l’expert qui s’aveugle sur la politique inscrite dans son savoir. En revanche, d’une autre manière, il rappelle aussi l’intellectuel spécifique, désireux de préserver l’autonomie de la science ; mais il ne le pourra qu’à condition d’en expliciter les enjeux politiques. (…) l’autonomie de la science passe non par le refus du politique, mais par la mise au jour des enjeux de pouvoir du savoir[13] ». Autrement dit, on distingue deux conceptions relativement divergentes de l’autonomie de la science : le.la savant.e pur.e veut la « protéger » en s’affranchissant du politique et en traçant une frontière claire entre le champ académique et le champ politique, tandis que l’intellectuel.le spécifique considère qu’elle n’est possible qu’à la condition de mettre en lumière les conditions politiques de production du savoir.

    G. Noiriel répond à E. Fassin dans son livre Penser avec, penser contre publié en 2003[14], où il soutient la nécessité d’adopter la posture du « chercheur engagé » : « Après avoir longtemps privilégié la posture de l’« intellectuel spécifique », je pense aujourd’hui qu’il est préférable de défendre la cause du « chercheur engagé », car c’est en s’appuyant sur elle que nous pourrons espérer faire émerger cet « intellectuel collectif » que nous appelons de nos vœux depuis trente ans, sans beaucoup de résultats. Les « intellectuels spécifiques », notamment Foucault et Bourdieu, ont constamment annoncé l’avènement de cette pensée collective, mais celle-ci n’a jamais vu le jour, ou alors de façon très éphémère[15] ». Selon lui, cet échec s’explique par le fait que « cette génération n’a pas vraiment cru que la communication entre intellectuels soit possible et utile », d’où la nécessité de prêter une attention particulière aux deux conditions de la communication entre intellectuel.le.s : « clarifier les langages qui cohabitent aujourd’hui sur la scène intellectuelle » et « la manière d’écrire », c’est-à-dire « montrer sa générosité en restituant la cohérence du point de vue qu’il discute, au lieu d’isoler l’argument qu’il propose de détruire » et « désigner par leur nom les collègues de la microsociété qu’il met en scène dans son récit ».

    Or, ces conditions ne seraient pas remplies par la posture de l’intellectuel.le « spécifique » dans la mesure où il tendrait à « privilégier les normes du champ politique » et ne parviendrait pas à « introduire dans le champ intellectuel les principes de communication qui sous-tendent le monde savant ». Les intellectuel.le.s spécifiques critiquent l’usage de la science par les experts visant à maintenir l’ordre social alors qu’« il n’est pas possible [selon G. Noiriel] de concevoir l’engagement uniquement comme une critique des experts. Paradoxalement, c’est une manière de cautionner leur vision du monde, en donnant du crédit à leur façon d’envisager les « problèmes ». Pour les intellectuels « spécifiques », il n’existe pas de différence de nature entre les questions politiques et scientifiques. Pour eux, le journaliste, l’élu, le savant parlent, au fond, le même langage[16] ». Autrement dit, l’engagement des intellectuel.le.s spécifiques tendrait à relativiser les spécificités des formes du discours savant, censé être soumis à des contraintes propres au champ académique et peu comparable aux formes de discours politiques ou militants soumis aux règles du champ politique ou de l’espace des mobilisations.

    Pourquoi le fait d’insister, comme le fait E. Fassin après Foucault, sur la dimension politique de la production de savoir, reviendrait-il à mettre sur le même plan discours scientifiques et autres formes de discours ? Ne pourrait-on pas envisager la posture de l’intellectuel.le spécifique sans « confusion des genres » ? Comment maintenir une exigence en termes scientifiques dans un espace médiatique structuré par la quête de l’audimat et qui fait la part belle au sensationnel ? C’est une vraie question qui traverse l’ensemble du champ académique. Si G. Noiriel ne fournit dans ce texte de 2003 aucun exemple qui permettrait d’évaluer la véracité de cette confusion, son engagement dans le Comité de vigilance des usages de l’histoire (CVUH, créé en 2005) et dans le collectif DAJA (Des acteurs culturels jusqu’aux chercheurs et aux artistes, créé en 2007) est justement présenté comme un mode d’intervention dans l’espace public respectant l’exigence scientifique. Mais il fournit un exemple plus précis en commentant la controverse M. Lilla / E. Fassin autour de la catégorie de « gauche identitaire ». M. Lilla utilise cette dernière catégorie pour désigner (et disqualifier) les leaders politiques démocrates, les universitaires de gauche et les porte-parole des minorités qui auraient abandonné le « peuple » et le bien commun au profit de préoccupations identitaires et individualistes. La « gauche identitaire » est donc une catégorie politique visant à dénoncer la « logique identitaire » de la gauche étasunienne qui s’est progressivement éloignée de la politique institutionnelle pour privilégier les mouvements sociaux n’intéressant que les seul.e.s minoritaires préoccupé.e.s par leur seule identité, et non ce qu’ils et elles ont de « commun » avec le reste de la communauté politique : la citoyenneté[17].

    E. Fassin critique cette catégorie qui vise explicitement à établir une distinction entre le « social » et le « sociétal », et une hiérarchie des luttes légitimes, la lutte des classes étant plus importante que les luttes pour l’égalité raciale. La notion de « gauche identitaire » serait donc, si l’on en croit E. Fassin, un nouvel outil symbolique analogue à celle de « politiquement correct », utilisé pour délégitimer toute critique des discours racistes et sexistes. Ainsi, E. Fassin se réfère-t-il à la posture de l’intellectuel.le « spécifique » afin de critiquer l’argument développé par M. Lilla. G. Noiriel renvoie dos à dos E. Fassin et M. Lilla en affirmant qu’ils partagent le « même langage » et au motif que « ce genre de polémiques marginalise, et rend même inaudibles, celles et ceux qui souhaitent aborder les questions d’actualité tout en restant sur le terrain de la recherche scientifique ».

    En effet, même si l’on ne peut en faire le reproche à E. Fassin qui est un acteur de la recherche sur la question raciale[18], cette polémique qui a lieu dans le champ médiatique participe de l’invisibilisation des chercheur.e.s et enseignant.e.s-chercheur.e.s qui, justement, travaillent depuis des années sur la question raciale, les minorités raciales et leurs rapports avec la gauche française, et les mouvements antiracistes[19]. Tous ces travaux veillent à définir de façon précise et sur la base d’enquêtes sociologiques les processus de racialisation à l’œuvre dans la France contemporaine. Ils le font en outre en opérant l’interrogation et la déconstruction de ces « entités réifiées » que G. Noiriel évoque dans son texte. On mesure, ce faisant, tout l’intérêt de réinscrire les questions sur la race, qu’elles soient d’ordre méthodologique ou empirique, dans le champ académique.

    Un autre exemple donné par G. Noiriel concerne le début des années 1980 où, affirme-t-il, les « polémiques identitaires » ont pris le pas sur la « question sociale » dans l’espace public :

    « Ce virage a pris une forme spectaculaire quand le Premier Ministre, Pierre Mauroy, a dénoncé la grève des travailleurs immigrés de l’automobile en affirmant qu’elle était téléguidée par l’ayatollah Khomeiny. C’est à ce moment-là que l’expression « travailleur immigré » qui avait été forgée par le parti communiste dès les années 1920 a été abandonnée au profit d’un vocabulaire ethnique, en rupture avec la tradition républicaine (cf. l’exemple du mot « beur » pour désigner les jeunes Français issus de l’immigration algérienne ou marocaine). On est passé alors de la première à la deuxième génération, de l’usine à la cité et les revendications socio-économiques ont été marginalisées au profit de polémiques identitaires qui ont fini par creuser la tombe du parti socialiste ».

    La période 1981-1984 est en effet cruciale dans le processus de racialisation des travailleur.se.s immigré.e.s postcoloniaux.ales et la transformation, par le Parti socialiste, des conflits ouvriers en conflits religieux[20]. Or ce discours de racialisation, qui assigne les travailleur.se.s immigré.e.s maghrébin.e.s à leur identité religieuse putative, provient des élites politiques, patronales et médiatiques, et non des travailleur.se.s immigré.e.s et de leurs descendant.e.s. Il est vrai que certains mouvements de « jeunes immigrés » s’auto-désignaient comme « beurs » mais cela relevait du processus bien connu de retournement du stigmate. D’un côté, les élites assignent une identité permanente religieuse, perçue comme négative, pour disqualifier un mouvement social tandis que, de l’autre, des enfants d’immigré.e.s maghrébin.e.s affirment une identité stigmatisée positive. Peut-on mettre sur le même plan le travail de catégorisation et d’assignation raciale mené par « le haut » (l’État, les institutions, les élites politiques et médiatiques) et le retournement du stigmate – c’est-à-dire la transformation et le ré-investisssement de la catégorie d’oppression pour affirmer son humanité et sa fierté d’être au monde[21] – d’en bas ? Le faire nous semble particulièrement problématique d’un point de vue scientifique. La distinction entre racialisation stigmatisante et construction d’une identité minoritaire stigmatisée doit être prise en compte dans l’analyse sociologique des relations entre majoritaires et minoritaires.

    En revanche, il est avéré que SOS Racisme, succursale du Parti socialiste, a participé à l’occultation de la question économique pour penser l’immigration[22]. Mais SOS Racisme ne représente pas l’ensemble des organisations minoritaires de l’époque. Au contraire, la nouvelle génération de militant.e.s « beurs » s’est majoritairement opposée à ce qu’elle a perçu comme une « récupération » du « mouvement beur »[23]. Par ailleurs, l’on sait que, parmi les revendications initiales de la Marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983, les revendications portaient à la fois sur la question raciale et sur les conditions matérielles de vie, de travail et de logement : droit à la vie (ne pas se faire tuer dans l’impunité), droit au travail, droit au logement, etc.[24] Et il ne faut pas oublier que, parmi les rares militant.e.s ayant soutenu les travailleurs immigrés en grève, on retrouve les fondatrices/fondateurs du « Collectif Jeunes » ayant accueilli la Marche à Paris, c’est-à-dire les leaders du « mouvement beur ». Aussi, l’opposition entre vocabulaire ethnique et revendications socio-économiques est-elle loin d’être suffisante pour comprendre la période 1981-1984.

    Une « histoire des vaincus accaparée » ?

    L’article de G. Noiriel pose une seconde question, légitime mais néanmoins complexe, relative au lien entre champ académique et champ politique / espace des mobilisations. Il débute par l’affirmation suivante :

    « Dans l’introduction de mon livre sur l’Histoire populaire de la France, j’ai affirmé que ‘le projet d’écrire une histoire populaire du point de vue des vaincus a été accaparé par des porte-parole des minorités [(religieuses, raciales, sexuelles) pour alimenter des histoires féministes, multiculturalistes ou postcoloniales,] qui ont contribué à marginaliser l’histoire des classes populaires’. Il suffit de consulter la bibliographie des articles et ouvrages publiés en histoire ces dernières années ou de regarder les recrutements sur des postes universitaires pour être convaincu de cette remarque[25] ».

    Malheureusement, il ne fournit pas d’exemples de bibliographies, d’ouvrages et de profils de postes universitaires permettant de vérifier la véracité du propos[26]. Concernant les recrutements en histoire (section 22), il est clair que, depuis une trentaine d’années, l’histoire culturelle et l’histoire politique ont été privilégiées au détriment de l’histoire sociale[27]. Cependant, y a-t-il en France pléthore de profils de poste « histoire des minorités raciales » ? Rien n’est moins sûr[28].

    De plus, le constat de G. Noiriel sous-entend – on n’en est pas sûrs à cause de l’ambiguïté du propos – un lien entre l’« accaparement » de l’histoire populaire par les « porte-parole des minorités » et l’évolution des thèmes de recherche en sciences sociales. Ainsi, la position de G. Noiriel est paradoxale. D’une part, il avait à plusieurs reprises reconnu l’importance du rôle d’acteurs associatifs pour faire avancer la recherche scientifique, notamment concernant l’histoire de la Shoah ou de la guerre d’Algérie. Histoire et mémoire ne s’opposent pas forcément. N’est-ce pas parce que la question des discriminations raciales est devenue un enjeu politique dans l’espace public que G. Noiriel s’est lancé dans l’écriture de l’histoire du clown Chocolat[29] ? D’autre part, il critique les « porte-parole des minorités » non identifiés qui se seraient appropriés l’histoire des vaincus à leur propre profit et auraient considérablement influencé les orientations de la recherche scientifique. À défaut d’exemple précis, il est difficile de discuter cette affirmation mais, dans un entretien daté de 2007[30], G. Noiriel est plus explicite et critique les entrepreneurs de mémoire tels que les leaders du CRAN : « Les intellectuels qui sont issus de ces groupes ont toujours tendance à occulter les critères sociaux qui les séparent du monde au nom duquel ils parlent, pour magnifier une origine commune qui légitime leur statut de porte-parole auto-désignés ». En fait, il « critique les usages de l’histoire que font les entrepreneurs de mémoire qui se posent en porte-parole autoproclamés de tel ou tel groupe de victimes, mais [il] relativise par ailleurs l’importance de ces querelles ». Il semble que G. Noiriel ait changé d’avis sur l’influence réelle de ces porte-parole puisqu’ils auraient désormais un impact sur le monde de la recherche.

    Dans le cas de l’affaire Pétré-Grenouilleau, qui a vu l’historien en poste à l’université de Bretagne attaqué en justice par le Collectif DOM en 2005 pour avoir affirmé dans une interview que les traites négrières ne constituaient pas un génocide, force est de constater que l’affaire a nourri la recherche en tant que controverse et événement important dans l’analyse des enjeux mémoriels en France[31]. L’impact sur la recherche scientifique n’est pas allé dans le sens d’une auto-censure, mais a constitué un épisode analysé pour son inscription dans l’espace des mobilisations antiracistes, dans les reconfigurations des relations entre l’État et les associations de Français d’outre-mer ou dans la sociologie politique de la mémoire. La recherche sur l’esclavage et les traites est depuis une dizaine d’années particulièrement dynamique. L’affaire n’a ainsi nourri ni « repentance » ni appel au « devoir de mémoire », mais a servi à éclairer un phénomène majeur : l’articulation entre mémoire et politique dans les sociétés contemporaines.
    Le fantôme minoritaire dans l’académie

    Une troisième question que soulève le billet publié par G. Noiriel porte sur l’assignation des universitaires minoritaires au statut de porte-parole des minorités. En 2004, G. Noiriel affirme que l’engagement des minoritaires dans la recherche est une manière de « canaliser » leur « disposition à la rébellion » : « On oublie généralement que les dispositions pour la rébellion que l’on rencontre fréquemment dans les milieux issus de l’immigration s’expliquent par le fait qu’ils cumulent les formes les plus graves de souffrance sociale. Bien souvent ces personnes ne peuvent construire leur identité qu’en cultivant le potentiel de révolte qu’ils ont en eux. L’investissement dans l’écriture, dans la recherche, dans les activités culturelles en rapport avec l’expérience vécue peut être une façon de canaliser ce potentiel dans des formes qui soient compatibles avec le principe de la démocratie, avec le respect des biens et des personnes[32] ». La réduction de la professionnalisation des minoritaires dans le monde académique à une révolte non-violente pose question. Assigner leur travail scientifique à une émotion, la révolte, n’est-ce pas nier le fait que les minoritaires peuvent tout à fait être chercheur.e sans qu’ils.elles soient déterminé.e.s par une improbable disposition à la rébellion ?[33]

    Cette manière d’interpréter l’entrée d’outsiders dans le monde académique participe à faire des universitaires minoritaires des porte-parole « hétéro-proclamés » des groupes minoritaires et, de manière plus générale, renvoie à leur disqualification en « chercheur.e.s militant.e.s »[34]. Plusieurs travaux britanniques et étasuniens ont documenté l’expérience vécue par les universitaires minoritaires, marquée par les procès d’intention, les micro-agressions et les censures publiques qu’ils subissent au quotidien, leur rappelant qu’ils ne sont pas totalement à leur place ou qu’ils.elles ne sont pas des universitaires à part entière[35]. Au regard de certains faits avérés, il serait intéressant de mener le même type d’investigation dans le monde académique français[36]. Par exemple, une controverse a traversé le comité de rédaction de la revue Le Mouvement social autour de la parution d’un article théorique de Pap Ndiaye sur la notion de « populations noires »[37], à tel point que le rédacteur en chef a décidé de démissionner et qu’un des membres du comité a publié, plusieurs mois après, chose rare, une « réponse » à l’article de Ndiaye. En 2016, sur la mailing-list de l’ANCMSP (Association nationale des candidats aux métiers de la science politique), A. Hajjat a fait l’objet d’une campagne de dénigrement en raison de ses travaux sur l’islamophobie. En 2017, la journée d’études « Penser l’intersectionnalité dans les recherches en éducation » (Université Paris-Est Créteil) a été l’objet d’une campagne de disqualification par l’extrême-droite et certains universitaires parce que le programme traitait des usages politiques du principe de laïcité dans une logique d’exclusion. Certains organisateurs ont été menacés de sanction disciplinaire et d’exclusion de leur laboratoire pour avoir signé une tribune sur les libertés académiques, et l’un d’entre eux n’a pas obtenu un poste qu’il aurait dû avoir. En 2018, le colloque « Racisme et discrimination raciale de l’école à l’université » a également fait l’objet d’une campagne visant son annulation au motif qu’il relèverait du « racialisme indigéniste ». À l’heure où nous écrivons cet article, l’hebdomadaire français Le Point publie une tribune et un article contre les supposés « décolonialisme » et « racialisme » des chercheur.e.s travaillant sur la question raciale, et mène une véritable chasse aux sorcières contre elles.eux en demandant leur exclusion du monde académique[38].

    Bref, l’autonomie de la recherche est remise en cause quand il s’agit de parler de la question raciale dans le monde académique, et les universitaires minoritaires sont directement ciblé.e.s et individuellement discrédité.e.s par certains médias. C’est bien le signe là encore, qu’il faudrait réintégrer la question raciale dans le champ académique et, lorsqu’elle fait l’objet de points de vue, prendre soin d’en mentionner a minima les principaux travaux. L’usage social ou militant d’une recherche ne peut, de ce point de vue, être mis sur le même plan que la recherche proprement dite.

    Aussi, le débat sur les figures de l’intellectuel.le tend-il à occulter tout un pan de la réflexion théorique menée par les études féministes et culturelles sur le « savoir situé »[39]. Il est nécessaire de préserver l’autonomie de la recherche en jouant totalement le jeu de la réflexivité, entendu comme la mise au jour de la relation avec un objet de recherche au prisme de la trajectoire et de la position dans l’espace social. Les études féministes et les cultural studies ont depuis longtemps abordé cet enjeu majeur de la production du savoir. Tou.te.s les universitaires minoritaires ne se pensent pas comme tel.le.s. Ils.elles ne souhaitent pas nécessairement manifester leur engagement politique en prenant appui sur l’autorité de leur savoir et de leurs fonctions. Leurs formes d’engagement, lorsque celui-ci existe, sont, il faut bien l’admettre, multiples et ne passent pas forcément par la mobilisation d’un savoir spécifique avec le souhait de transformation sociale. Il faut donc se garder d’avoir une vision totalisante des « universitaires minoritaires » et de les assigner « naturellement » à la thématique de la question raciale, comme si l’universitaire minoritaire devait se faire le porte-parole de sa « communauté », voire d’un concept-maître (classe sociale, genre, nation).
    Revenir au terrain

    Pour conclure, il nous semble que la recherche sur les processus de racialisation, de stigmatisation, les racismes et les discriminations mérite mieux que les querelles médiatiques – il y a tant à faire ! – alors qu’on observe un manque criant de financements pour mener des enquêtes de terrain. Par exemple, le basculement politique de la région Ile-de-France a débouché sur la disparition de ses financements de contrats doctoraux, postdoctoraux et de projets de recherche sur la question des discriminations. Dans un contexte de montée en puissance des forces politiques conservatrices, s’il y a un chantier commun à mener, c’est bien celui de la pérennisation du financement de la recherche sur la question raciale.

    De plus, il est tout à fait envisageable de penser des relations entre universitaires et organisations minoritaires qui respectent l’autonomie des un.e.s et des autres (on pourrait élargir le propos aux institutions étatiques chargées de combattre les discriminations quelles qu’elles soient). Que l’on se définisse comme intellectuel.le spécifique, engagé.e ou organique, ou que l’on se définisse comme militant.e minoritaire ou non, l’enjeu est de nourrir la réflexion globale pour élaborer une politique de l’égalité inclusive, allant au-delà de la fausse opposition entre revendications « identitaires » et revendications « sociales », et qui prenne en compte toutes les formes de domination sans établir de hiérarchie entre elles.

    En effet, si l’on fait des sciences sociales, on ne peut pas cantonner l’identitaire ou le racial en dehors du social. La question raciale tout comme la question économique sont des questions sociales. Nous ne sommes pas passés de la « question sociale » à la « question raciale » pour la simple et bonne raison que le racial est social. Faire comme si l’on pouvait trancher la réalité à coup de gros concepts (« sociétal », « identitaire », « continuum colonial », etc.), c’est déroger aux règles de la méthode scientifique lorsqu’on est universitaire, et à celles de la réalité du terrain lorsqu’on est acteur.trice politique. Stuart Hall posait à ce titre une question toujours d’actualité : « comment vivre en essayant de valoriser la diversité des sujets noirs, de lutter contre leur marginalisation et de vraiment commencer à exhumer les histoires perdues des expériences noires, tout en reconnaissant en même temps la fin de tout sujet noir essentiel ?[40] ». Autrement dit, que l’on soit chercheur.e ou militant.e, il est nécessaire de refuser toute logique d’essentialisation exclusive. Si universitaires et organisations minoritaires peuvent travailler ensemble, c’est à la condition de faire l’éloge du terrain, c’est-à-dire d’œuvrer à la compréhension de la complexité des rapports sociaux, et de faire avancer la politique de l’égalité de manière collective.

    http://mouvements.info/role-des-intellectuel%C2%B7les-minoritaires
    #université #intellectuels #science #savoir #savoirs

  • Quand l’anti-féminisme débarque de France pour donner des leçons en Argentine | Marie Bardet
    http://www.contretemps.eu/anti-feminisme-france-argentine

    Je lis l’intervention de Catherine Millet, invitée à donner la conférence d’ouverture du Festival International de Littérature de la ville de Buenos Aires la semaine dernière, dans un auditorium du MALBA (Museo de Artes Latinoamericano de Buenos Aires) plein à craquer, selon l’article qui retranscrit la conférence. Source : Contretemps

  • « Il faut avoir la vraie discussion... on a une insécurité culturelle parce que notre culture est de moins en moins forte. Mais la raison pour laquelle notre culture est de moins en moins forte c’est pas parce que c’est menacée par l’Islam ou par une femme voilée, c’est parce que notre culture est menacée par une système économique qui fait qu’on va juste travailler, travailler, travailler, consommer puis aller se coucher, puis que tout ce qui est dans le chemin d’argent on va le tasser. Puis, la culture est dans le chemin de l’argent, ça fait pas de cash ! Fait que tant on va laisser notre culture s’affaiblir, on va avoir peur des autres. » —Catherine Dorion
    #politics #politique #xenophobia #racisme #québec

    https://youtu.be/muZKkT2fNXg?t=743

  • « Un buzz malveillant à des fins politiques et commerciales. »
    http://www.editionslibertalia.com/blog/veronique-decker-a-propos-de-inch-allah-davet-lhomme-181022

    Véronique Decker à propos du livre Inch’ Allah. L’islamisation à visage découvert, par Ivanne Trippenbach, Célia Mebroukine, Romain Gaspar, Hugo Wintrebert et Charles Delouche, sous la direction de Gérard Davet et Fabrice Lhomme (Fayard, octobre 2018)

    Ce qui me pose souci, ce ne sont pas seulement les conditions de la fabrication du livre, avec des « témoins » qui ne sont pas autorisés à relire les passages les citant alors que des extraits étaient commentés à la télévision, à la radio, dans un hebdomadaire réac-publicain ou sur les réseaux sociaux. Ce qui me pose souci, c’est le projet politique douteux du livre, c’est l’accumulation d’anecdotes non datées, mettant bout à bout dans un inventaire à la Prévert un rebouteux islamique, une femme de ménage mécontente d’avoir à passer l’aspirateur dans une salle pleine de tapis, une école salafiste, des hommes qui refusent de serrer la main des femmes, 143 absents dans une école le jour de l’Aïd, des jeunes croulant sous une montagne de préjugés… sans aucune réflexion. Mais avec des incises tendancieuses, comme le fait de me présenter comme « une enseignante soldat », ou pire : d’imaginer que mon projet serait de « contenir l’islam ».

    #médias #presse #journalisme #islamophobie

  • L’#invasion_noire de #Capitaine_Danrit

    Il y a 120 ans, #Émile_Driant, un officier français auteur de fictions militaires sous le pseudonyme de #Capitaine_Danrit, avait, au moment où les puissances européennes imposaient à la planète entière un leadership incontesté, imaginé que l’Occident croulerait un jour sous les assauts militaires d’une guerre raciale et religieuse menée par les masses musulmanes africaines et proches-orientales.


    http://comptoirdesediteurs.com/romans/36-l-invasion-noire-9782370040039.html
    #mythe #préjugés #invasion #livre #histoire #Afrique #islamophobie #racisme

    –-> un livre qui aurait inspirée les théories de #Huntington sur le #choc_des_civilisations

    –-> J’ai découvert ce sordide personnage lors de la 3ème #balade_décoloniale (photos suivent) qui a été organisée hier, le 13.10.2018 à Grenoble.
    A cette occasion, la rue dédiée à #Driant a été débaptisée en rue #Paulette_Nardal :


    https://fr.wikipedia.org/wiki/Paulette_Nardal
    #toponymie

    ping @reka

  • “I got a right to say FUCK YOU!!!” is how the new and third album from veteran guitarist Marc Ribot’s trio #Ceramic_Dog starts off, with Ribot howling in anger at corruption, tyranny, life in general, and nothing in particular. If you’ve got a serious case of outrage fatigue, Ceramic Dog’s explosive cocktail of balls-to-the-wall abandon, chameleonic disregard for style constraints, political commentary, and absurdist humor is just the shot in the ass (or kick in the arm?) you might need. In fact, Ceramic Dog’s new album — whose title:YRU Still Here? is directed in equal parts at themselves, the commander in chief, and the listening public — arrives just in time to remind us that now is a moment when anger is not only necessary, and unavoidable, but also good for houseplants.

    YRU Still Here? careens from punk to funk to flamenco to surf to rock ‘n roll — all turned on their heads and smudged, allowing us to imagine an alternate history where punk icons Jello Biafra and Ian MacKaye fronted no-wave lounge bands on alternate Tuesdays at the Teaneck New Jersey Holiday Inn.


    http://marcribot.com/latest-news/14276084

  • Dalai Lama says ‘Europe belongs to the Europeans’ and suggests refugees return to native countries | The Independent
    https://www.independent.co.uk/news/world/europe/dalai-lama-europe-refugee-crisis-immigration-eu-racism-tibet-buddhist

    The Dalai Lama has sparked anger after declaring that “Europe belongs to the Europeans”.

    The Tibetan Buddhist spiritual leader also said that refugees should return to their native countries and assist with developing them.

    The 14th Dalai Lama was speaking at a conference in Malmo, Sweden which is home to a large immigrant population, according to the Business Times.

    “Receive them, help them, educate them ... but ultimately they should develop their own country,” the 83-year-old said, when speaking about refugees.

    “I think Europe belongs to the Europeans.”

    #migrants

  • Neuer Eklat: AfD fordert „islamfreie Schulen“

    Bei der Landtagswahl in Bayern setzt die AfD auf „islamfreie Schulen“. Das Netz ist entsetzt und sieht Parallelen zum „judenfrei“-Begriff der Nationalsozialisten.


    http://www.heute.at/welt/news/story/Eklat--AfD-fordert--islamfreie-Schulen--54841083


    https://twitter.com/ThomasWieder/status/1038345665548611586

    #Allemagne #extrême_droite #affiche #poster #campagne #AfD #burka #islamophobie #école #voile #racisme #xénophobie #culture_allemande #bikini #règles #normes

    On pourra parler de l’#image de la #femme sur le poster « burka » ???
    #femmes #féminisme

    « Protéger les #droits_des_femmes », disent-ils...

    Et... au niveau du #droit_à_l'image...
    pensez-vous que les personnes reconnaissables ont accepté d’être sur des posters de l’AfD ?

  • Baby-Loup : l’ONU condamne le licenciement d’une salariée voilée
    Le Figaro, le 25 août 2018
    http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2018/08/25/97001-20180825FILWWW00096-baby-loup-l-onu-condamne-le-licenciement-d-une-sa

    Le Comité des droits de l’Homme de l’ONU a condamné le licenciement d’une salariée voilée de la crèche française Baby-Loup, estimant qu’il s’agit d’une « atteinte à la liberté de religion », et a demandé à la France de l’indemniser. Licenciée en 2008, Fatima Afif avait été déboutée à deux reprises par les tribunaux.

    #France #ONU #discrimination #islamophobie #femme #voile #Baby-Loup

    On notera aussi le refus d’écrire #Droits_humains, ce qui donne des titres absurdes comme « La France n’a pas respecté les droits de l’Homme en autorisant le licenciement d’une femme voilée », dans le journal 20 Minutes...