• #Binet, #Toubon, #Zeniter : trois voix contre la #loi_immigration

    Inspirée de propositions d’extrême droite, la loi sur l’immigration a été votée le 19 décembre. 201 personnalités appellent à manifester partout en France dimanche. Dans « À l’air libre », #Sophie_Binet (CGT), #Jacques_Toubon (ancien Défenseur des droits), l’écrivaine #Alice_Zeniter et Edwy Plenel expliquent pourquoi ils en seront.

    EnEn décembre, la loi immigration votée par l’Assemblée nationale a provoqué un séisme politique. C’est surtout un choc moral car plusieurs de ses dispositions ont été inspirées par la droite dure et l’extrême droite. Le Conseil constitutionnel doit se prononcer le 25 janvier, il est probable que certains éléments de cette loi soient censurés. La loi sera ensuite promulguée par le président de la République.

    Dimanche 14 janvier, 400 collectifs de sans-papiers, syndicats, et partis politiques ont marché contre la loi partout en France pour dénoncer un texte « xénophobe » et « dangereux ». Et dimanche 21, 201 personnalités de tous horizons appellent à de nouvelles manifestations à la suite d’un appel publié sur Mediapart et dans L’Humanité. Les mobilisations partout en France sont à retrouver sur le site 21janvier.fr.

    Dans une émission spéciale de « À l’air libre », quatre personnalités nous disent pourquoi ils et elles iront manifester.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/180124/binet-toubon-zeniter-trois-voix-contre-la-loi-immigration

  • Nuove norme sull’immigrazione in Germania
    https://www.meltingpot.org/2024/01/nuove-norme-sullimmigrazione-in-germania

    Lo scorso 19 gennaio il Parlamento tedesco ha approvato una nuova legge in materia di immigrazione con l’obiettivo dichiarato di attrarre più manodopera qualificata nel Paese e, allo stesso tempo, inasprire le norme che regolano l’accoglienza dei richiedenti asilo e facilitarne l’espulsione in caso di rigetto della domanda. Saranno quindi abbassati da otto a cinque gli anni di residenza continuativa necessari a richiedere la cittadinanza tedesca, con possibilità di un’ulteriore riduzione a tre anni in casi particolari, e aumenteranno le possibilità di mantenere la doppia cittadinanza, circostanza fino ad ora poco frequente nell’ordinamento tedesco. Allo stesso tempo, sono state (...)

  • Loi « immigration » : « Le Conseil a manqué l’occasion de se prononcer sur les limites constitutionnelles aux atteintes portées aux droits des étrangers »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/28/loi-immigration-le-conseil-a-manque-l-occasion-de-se-prononcer-sur-les-limit

    Loi « immigration » : « Le Conseil a manqué l’occasion de se prononcer sur les limites constitutionnelles aux atteintes portées aux droits des étrangers »
    Tribune Samy Benzina Constitutionnaliste
    En censurant essentiellement les « cavaliers législatifs », le Conseil constitutionnel a laissé en suspens la question de la conformité de la « préférence nationale » aux droits et libertés constitutionnels, explique, dans une tribune au « Monde », Samy Benzina, professeur de droit public à l’université de Poitiers.
    La décision du Conseil constitutionnel restera comme l’une des plus habiles qu’ait rendues l’institution de la rue de Montpensier : elle lui a permis de se sortir de la situation inextricable dans laquelle l’avait injustement placée la majorité présidentielle. Le juge constitutionnel n’a en principe vocation qu’à contrôler la constitutionnalité des dispositions d’une loi adoptée par la majorité et contestée par l’opposition. Or, il s’est trouvé saisi d’un texte, fruit d’un compromis entre le gouvernement et les parlementaires de droite, dont des ministres et des membres de la majorité ont pointé publiquement, de manière inédite, les potentiels vices de constitutionnalité.
    L’objet du contrôle de constitutionnalité a priori s’en trouvait dès lors détourné : la majorité présidentielle (relative) entendait en faire un mécanisme lui permettant de remporter juridiquement ce qu’elle n’avait pas su obtenir politiquement. Voilà pourquoi le gouvernement n’a pas pleinement exercé sa fonction de défenseur de la constitutionnalité de la loi devant le juge constitutionnel : il s’en est remis, de manière inhabituelle, « à la sagesse du Conseil constitutionnel » à propos du nombre de dispositions introduites par les sénateurs républicains avec lesquelles il était en désaccord.
    Le Conseil constitutionnel se trouvait dès lors placé dans une impasse présentant des risques significatifs pour sa légitimité. Une censure des dispositions les plus sensibles du texte au regard de leur contrariété à certains droits ou libertés aurait conduit à la vive mise en cause de l’institution et au retour de l’antienne sur le « gouvernement des juges » – un risque bien réel au vu des attaques dont il avait fait l’objet, en 1993, à la suite de sa décision de censure d’une loi relative à l’immigration. A l’inverse, une déclaration de conformité aurait provoqué des doutes sur sa capacité à être un véritable gardien des droits et libertés constitutionnels.
    En choisissant de qualifier l’essentiel des dispositions les plus controversées de la loi de « cavaliers législatifs », le Conseil constitutionnel a privilégié une solution ingénieuse : tout en se fondant sur une jurisprudence bien établie et sur un raisonnement juridique en apparence imparable, il évite de se prononcer sur l’atteinte éventuelle de ces dispositions aux droits et libertés constitutionnels. Cette habileté du Conseil constitutionnel ne le préservera cependant pas de certaines critiques légitimes.
    D’abord, si la jurisprudence relative aux « cavaliers législatifs » est ancienne, elle a en effet été appliquée avec un zèle particulier dans le cadre du contrôle de cette loi, et ce en dépit de la révision constitutionnelle de 2008 qui avait justement vocation à desserrer son contrôle. Rappelons qu’en l’état du droit, lorsqu’il contrôle une disposition qui a été ajoutée par voie d’amendement, le juge constitutionnel doit contrôler qu’elle présente un lien, même indirect, avec le contenu du projet de loi initialement déposé devant le Parlement.
    La décision sur la loi « immigration » montre que ce contrôle n’est pas toujours exercé avec la même vigilance ou cohérence : dans sa décision sur la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, il avait ainsi admis des dispositions relatives à la nationalité sans y voir de « cavalier » alors qu’il vient de faire le contraire sans qu’on puisse objectivement expliquer cette différence.
    Ensuite, ce choix de censurer une grande partie de la loi pour un motif procédural surprend d’autant plus quand on le met en parallèle avec sa décision du 14 avril 2023 sur la loi de réforme des retraites. Dans cette dernière, le Conseil constitutionnel avait refusé de voir un quelconque vice de constitutionnalité dans l’emploi, par le gouvernement, d’un projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale et l’accumulation du recours aux mécanismes de rationalisation du parlementarisme, et ce alors même que cela avait largement tronqué les débats parlementaires.
    La décision de censurer plus d’un tiers des articles de la loi « immigration » largement issus d’amendements parlementaires donne de ce fait l’impression d’un deux poids, deux mesures : le Conseil paraît appliquer les règles procédurales de manière plus pointilleuse à l’égard des parlementaires que du gouvernement.
    Enfin, cette décision laisse en suspens la question de la conformité aux droits et libertés constitutionnels de certaines dispositions particulièrement controversées, comme l’article 19, qui instaure une « préférence nationale » en restreignant l’accès à certaines prestations sociales non contributives pour nombre d’étrangers. Certes, il y a peu de chance que ces articles soient de nouveau discutés à court terme : on imagine mal la majorité présidentielle soutenir la réintroduction de dispositions qu’elle a contestées publiquement et que le gouvernement n’a pas défendues devant le Conseil constitutionnel.
    La question de la constitutionnalité de certains dispositifs va cependant inévitablement se reposer, au moins dans le cadre des campagnes électorales, dès lors que certains partis défendent cette « préférence nationale ». Le juge constitutionnel a manqué l’occasion de se prononcer au fond sur les limites constitutionnelles aux atteintes portées aux droits des étrangers. Une telle décision aurait pu informer les citoyens sur la compatibilité du programme politique de certains partis avec la Constitution, information qui apparaît d’autant plus nécessaire que la révision de la Constitution n’est pas chose aisée. Ainsi, si la décision du Conseil constitutionnel a le mérite d’empêcher la promulgation de dispositions contestables, elle ne marque pas pour autant un progrès de l’Etat de droit.

    #Covid-19#migrant#migration#france#loiimmigration#constitution#preferencenationale#etranger#egalite#sante#droit

  • Ils sont gentils à Marianne...

    Quand le #Conseil_Constitutionnel ne dit rien, il est à la botte.

    Quand il s’exprime, il est vilain, #pabo. :-D :-D :-D

    #Loi_immigration : « Neuf juges peuvent donc balayer d’un revers de manche un énorme travail parlementaire »

    Ça s’appelle la #séparation_des_pouvoirs, et c’est pas trop mal comme ça... :-D :-D :-D

    #politique #société #France #loi #régulation #régularité #seenthis #vangauguin

    https://www.marianne.net/agora/tribunes-libres/loi-immigration-neuf-juges-peuvent-donc-balayer-dun-revers-de-manche-un-en

  • Loi « immigration » : « Le Conseil a manqué l’occasion de se prononcer sur les limites constitutionnelles aux atteintes portées aux droits des étrangers »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/28/loi-immigration-le-conseil-a-manque-l-occasion-de-se-prononcer-sur-les-limit

    La décision du Conseil constitutionnel restera comme l’une des plus habiles qu’ait rendues l’institution de la rue de Montpensier : elle lui a permis de se sortir de la situation inextricable dans laquelle l’avait injustement placée la majorité présidentielle.

    Le juge constitutionnel n’a en principe vocation qu’à contrôler la constitutionnalité des dispositions d’une loi adoptée par la majorité et contestée par l’opposition. Or, il s’est trouvé saisi d’un texte, fruit d’un compromis entre le gouvernement et les parlementaires de droite, dont des ministres et des membres de la majorité ont pointé publiquement, de manière inédite, les potentiels vices de constitutionnalité.

    L’objet du contrôle de constitutionnalité a priori s’en trouvait dès lors détourné : la majorité présidentielle (relative) entendait en faire un mécanisme lui permettant de remporter juridiquement ce qu’elle n’avait pas su obtenir politiquement. Voilà pourquoi le gouvernement n’a pas pleinement exercé sa fonction de défenseur de la constitutionnalité de la loi devant le juge constitutionnel : il s’en est remis, de manière inhabituelle, « à la sagesse du Conseil constitutionnel » à propos du nombre de dispositions introduites par les sénateurs républicains avec lesquelles il était en désaccord.

    Le Conseil constitutionnel se trouvait dès lors placé dans une impasse présentant des risques significatifs pour sa légitimité. Une censure des dispositions les plus sensibles du texte au regard de leur contrariété à certains droits ou libertés aurait conduit à la vive mise en cause de l’institution et au retour de l’antienne sur le « gouvernement des juges » – un risque bien réel au vu des attaques dont il avait fait l’objet, en 1993, à la suite de sa décision de censure d’une loi relative à l’immigration. A l’inverse, une déclaration de conformité aurait provoqué des doutes sur sa capacité à être un véritable gardien des droits et libertés constitutionnels.

    Motifs procéduraux

    En choisissant de qualifier l’essentiel des dispositions les plus controversées de la loi de « cavaliers législatifs », le Conseil constitutionnel a privilégié une solution ingénieuse : tout en se fondant sur une jurisprudence bien établie et sur un raisonnement juridique en apparence imparable, il évite de se prononcer sur l’atteinte éventuelle de ces dispositions aux droits et libertés constitutionnels.
    Cette habileté du Conseil constitutionnel ne le préservera cependant pas de certaines critiques légitimes.

    D’abord, si la jurisprudence relative aux « cavaliers législatifs » est ancienne, elle a en effet été appliquée avec un zèle particulier dans le cadre du contrôle de cette loi, et ce en dépit de la révision constitutionnelle de 2008 qui avait justement vocation à desserrer son contrôle. Rappelons qu’en l’état du droit, lorsqu’il contrôle une disposition qui a été ajoutée par voie d’amendement, le juge constitutionnel doit contrôler qu’elle présente un lien, même indirect, avec le contenu du projet de loi initialement déposé devant le Parlement.
    La décision sur la loi « immigration » montre que ce contrôle n’est pas toujours exercé avec la même vigilance ou cohérence : dans sa décision sur la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, il avait ainsi admis des dispositions relatives à la nationalité sans y voir de « cavalier » alors qu’il vient de faire le contraire sans qu’on puisse objectivement expliquer cette différence.

    Ensuite, ce choix de censurer une grande partie de la loi pour un motif procédural surprend d’autant plus quand on le met en parallèle avec sa décision du 14 avril 2023 sur la loi de réforme des retraites. Dans cette dernière, le Conseil constitutionnel avait refusé de voir un quelconque vice de constitutionnalité dans l’emploi, par le gouvernement, d’un projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale et l’accumulation du recours aux mécanismes de rationalisation du parlementarisme, et ce alors même que cela avait largement tronqué les débats parlementaires.

    Deux poids, deux mesures

    La décision de censurer plus d’un tiers des articles de la loi « immigration » largement issus d’amendements parlementaires donne de ce fait l’impression d’un deux poids, deux mesures : le Conseil paraît appliquer les règles procédurales de manière plus pointilleuse à l’égard des parlementaires que du gouvernement.

    Enfin, cette décision laisse en suspens la question de la conformité aux droits et libertés constitutionnels de certaines dispositions particulièrement controversées, comme l’article 19, qui instaure une « #préférence_nationale » en restreignant l’accès à certaines prestations sociales non contributives pour nombre d’étrangers. Certes, il y a peu de chance que ces articles soient de nouveau discutés à court terme : on imagine mal la majorité présidentielle soutenir la réintroduction de dispositions qu’elle a contestées publiquement et que le gouvernement n’a pas défendues devant le Conseil constitutionnel.

    La question de la constitutionnalité de certains dispositifs va cependant inévitablement se reposer, au moins dans le cadre des campagnes électorales, dès lors que certains partis défendent cette « préférence nationale ». Le juge constitutionnel a manqué l’occasion de se prononcer au fond sur les limites constitutionnelles aux atteintes portées aux #droits des #étrangers. Une telle décision aurait pu informer les citoyens sur la compatibilité du programme politique de certains partis avec la Constitution, information qui apparaît d’autant plus nécessaire que la révision de la #Constitution n’est pas chose aisée.
    Ainsi, si la décision du #Conseil_constitutionnel a le mérite d’empêcher la promulgation de dispositions contestables, elle ne marque pas pour autant un progrès de l’Etat de droit.

    Samy Benzina est professeur de droit public à l’université de Poitiers

    #loi_immigration

  • Loi « immigration » : avec finalement 51 articles, un texte plus fourni que le projet initial du gouvernement

    Le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a estimé, après la #censure partielle du Conseil constitutionnel, que la version définitive correspond au texte « voulu par le gouvernement ». La première mouture, de 27 articles, a cependant été augmentée par la droite sénatoriale. De nombreux articles continuent d’inquiéter juristes et associations.

    C’est une loi « immigration » composée de 51 articles que le président de la République, Emmanuel Macron, devrait promulguer de façon imminente. A l’issue de la censure partielle du texte par le Conseil constitutionnel, jeudi 25 janvier, environ 40 % de ses dispositions ont été invalidées, principalement pour des motifs de forme. Il s’agit quasi exclusivement d’éléments introduits par la droite parlementaire.

    La version définitive correspond donc au « texte voulu par le gouvernement », s’est félicité le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, jeudi soir sur TF1. « Jamais la République n’a eu une loi aussi dure contre les étrangers délinquants », a-t-il insisté, soulignant que les dispositions initialement prévues par le gouvernement sont contenues dans le texte final (26 articles sur les 27 du projet présenté en février 2023).

    Les juges constitutionnels ont, jeudi, estimé conformes dix mesures sur la quarantaine dont ils étaient saisis. Ainsi ont-ils validé la levée des protections à l’éloignement dont bénéficient certaines catégories d’étrangers, comme ceux arrivés en France avant l’âge de 13 ans. Cette disposition est censée permettre 4 000 expulsions supplémentaires de délinquants étrangers, promet la Place Beauvau. Elle est assimilée par ses opposants au rétablissement d’une forme de « double peine ».

    De même, le Conseil a jugé conforme à la Constitution la généralisation du juge unique, au détriment des formations collégiales de trois juges, pour statuer plus rapidement sur les demandes d’asile devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). La possibilité de recourir à des vidéoaudiences pour juger du maintien en rétention des étrangers a aussi été avalisée.

    Quatre instructions d’application immédiate

    Le Conseil a en outre déclaré conforme l’article imposant à l’étranger de signer un contrat d’engagement au respect des principes de la République. Alors qu’une disposition similaire avait été censurée dans la loi dite de lutte contre le séparatisme, en 2021, les juges constitutionnels ont cette fois considéré que le gouvernement avait listé les principes de la République de façon suffisamment détaillée, qui comprennent « la liberté personnelle, la liberté d’expression et de conscience, l’égalité entre les femmes et les hommes, la dignité de la personne humaine, la devise et les symboles de la République ».

    Des dispositions introduites par la droite sénatoriale ont également été approuvées, et notamment celles conditionnant la délivrance de visas à la bonne coopération des pays d’origine en matière de réadmission de leurs ressortissants en situation irrégulière.

    Validée aussi, la possibilité, ajoutée par la droite parlementaire, pour un département de refuser la prise en charge au titre de l’aide sociale à l’enfance des jeunes majeurs lorsqu’ils ont fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire (OQTF), ou encore la création d’un fichier des mineurs étrangers suspectés d’être des délinquants.

    Dans un registre satisfait, le ministre de l’intérieur a prévenu, jeudi soir sur TF1, qu’il réunirait dès vendredi 26 janvier les préfets pour leur transmettre au moins quatre instructions d’application immédiate. D’abord, M. Darmanin souhaite que l’intégralité des dossiers des étrangers délinquants soit réétudiée, afin d’envisager des expulsions sur la base de la nouvelle loi. Ensuite, il entend demander de régulariser certains travailleurs sans-papiers évoluant dans les secteurs en tension, ainsi que le facilite une disposition de la loi.

    M. Darmanin souhaite aussi s’appuyer sur la loi pour accentuer la lutte contre l’immigration irrégulière, contre les marchands de sommeil ou contre le travail des autoentrepreneurs sans-papiers, à l’image des livreurs à domicile. Le ministère de l’intérieur veut enfin appliquer sans attendre l’interdiction en métropole du placement en rétention des mineurs. Dans les faits, la mesure est déjà pratiquement à l’œuvre.

    « C’est un texte très mal rédigé »

    Du côté des associations et des juristes, si la censure partielle de la loi a été accueillie positivement car elle balaye les mesures les plus dures, de vives inquiétudes demeurent sur les dispositions du texte restantes. Président d’Amnesty International France, Jean-Claude Samouiller a appelé le gouvernement à ne pas mettre en œuvre les mesures qui, « si elles ne sont pas jugées comme anticonstitutionnelles, n‘en sont pas moins attentatoires aux droits et aux libertés des personnes exilées ».

    Par la voix de sa présidente, Adeline Hazan, l’Unicef France se dit également « préoccupé par le maintien de plusieurs dispositions qui, si elles n’ont pas été déclarées inconstitutionnelles, semblent toutefois incompatibles avec le respect des droits de l’enfant ». « Retour de la “double peine”, instauration d’un juge unique à la CNDA ou nouvelles conditions mises à la délivrance de titres de séjour. Ces dispositions, nous continuerons à les contester », a appuyé Dominique Sopo, le président de SOS Racisme.

    Une série de 41 articles n’ont en outre pas été soumis au contrôle des juges constitutionnels. Parmi ceux-là : la possibilité de placer en rétention certains demandeurs d’asile à la frontière ; le fait qu’un parent étranger doit s’engager à éduquer ses enfants dans le respect « des valeurs et principes de la République », ou encore le passage d’un examen de français pour l’obtention d’une carte pluriannuelle de séjour. « Le Conseil ne s’est pas prononcé sur de nombreux articles, comme les mesures spécifiques à Mayotte », regrette Marie-Laure Basilien-Gainche, professeure de droit à l’université Lyon-3 et « membre sénior » de l’Institut universitaire de France.

    « C’est un texte très mal rédigé, sa procédure d’adoption a été catastrophique », ajoute encore Samy Benzina, professeur de droit public à l’université de Poitiers, qui, comme d’autres de ses collègues, estime que la loi devrait engendrer de nombreux contentieux. « On peut déposer des questions prioritaires de constitutionnalité à l’occasion de la contestation des décrets d’application par exemple, prévient Serge Slama, professeur de droit public à l’université de Grenoble. Il peut aussi y avoir des contrôles de conventionnalité et de conformité au droit de l’Union européenne dans le cadre de contentieux individuels. » Des procédures qui prendront nécessairement du temps.

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/01/26/loi-immigration-avec-51-articles-au-final-un-texte-plus-fourni-que-le-projet

    #loi_immigration #conseil_constitutionnel #migrations #asile #réfugiés #France

    • Loi immigration : Un pouvoir de nuisance intact

      À l’issue d’un épisode inédit qui a vu l’exécutif se défausser sur le Conseil constitutionnel pour éliminer des dispositions nauséabondes qu’il avait lui-même complaisamment validées, reste une loi qui s’en prend violemment aux droits des personnes étrangères.

      Non seulement le tri opéré par le Conseil constitutionnel laisse subsister près des deux tiers d’une loi marquée du sceau de la suspicion envers un étranger présumé délinquant ou hostile aux principes de la République, mais celles qui ont été écartées ne l’ont été qu’au motif de leur absence de lien direct ou indirect avec l’objet de la loi. Autant dire que cette censure, aussi large soit-elle, ne dit rien de leur contrariété avec les principes constitutionnels. Elle ne peut donc rassurer personne.

      Le Conseil constitutionnel est satisfait : il a fait son travail.
      L’exécutif est satisfait : il a sa loi.
      Les commentateurs de tous bords sont satisfaits : les uns pensent tenir là l’occasion de crier haro sur la Constitution, les autres de crier victoire après « une large censure » de la loi.

      Qui pour évaluer et dénoncer les conséquences à venir, pour les personnes étrangères, des 27 articles du projet de loi initial, quasiment tous épargnés par la censure, auxquels s’ajoute un nombre équivalent de dispositions issues des surenchères xénophobes de la droite sénatoriale et qui restent dans la loi ?

      Un droit au séjour désintégré par des dispositions qui en limitent drastiquement l’accès, le mettent en sursis permanent ou en dégradent les conditions d’exercice.

      Des familles qui voleront en éclats sous les coups de boutoir d’une omni-présente « menace pour l’ordre public » valant blanc seing pour les préfets ou du simple fait de la perte du droit au séjour de l’un de leurs membres.

      Des obligations de quitter le territoire ouvrant la voie à la traque policière pendant trois ans et un arsenal répressif toujours plus fourni avec une « double peine » d’interdiction du territoire banalisée.

      Un parcours toujours plus restrictif et expéditif pour les demandeurs d’asile, privés de leurs droits au moindre accident et, pour nombre d’entre eux, assignés à résidence ou placés en rétention avant même d’avoir pu déposer leur dossier.

      Qui se souvient que le gouvernement prétendait « intégrer par le travail » en donnant un titre de séjour d’un an aux sans-papiers travaillant dans les métiers en tension ? Inutile de souligner qu’il ne reste rien de ce dispositif : là encore c’est l’arbitraire des préfets qui fera loi.

      Une fois passée la colère, il restera à forger les outils destinés, dans les tribunaux et ailleurs, à enrayer le fol engrenage qui prend les personnes étrangères pour cibles.

      http://www.gisti.org/article7167

  • Décision n° 2023-863 DC du 25 janvier 2024 | Conseil constitutionnel
    https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2024/2023863DC.htm

    Loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration
    Non conformité partielle - réserve

    Apparemment, le Conseil Constitutionnel a décidé de mettre noir sur blanc la feuille de route du gouvernement afin de pouvoir avancer sur ses projets les plus importants du quinquennat : la suppression de tout ce qui permettra d’appliquer pour de bon la loi immigration.

    #loi_immigration

    (oui, j’ai mauvais esprit ; sous des airs de victoire de l’état de droit, je ne peux m’empêcher d’y voir une victoire à la Pyrrhus)

    • Détail des rejets, et des conformités... Ci-dessous, les saloperies déclarées conformes...

      https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/01/25/loi-immigration-ce-que-le-conseil-constitutionnel-a-censure-et-pourquoi_6212

      Les conformes :

      Article 2
      Précision sur les conditions de réacheminement à la frontière

      Article 35
      Suppression des protections contre l’expulsion pour certains étrangers

      Article 37
      Obligation de quitter le territoire français (OQTF) possible contre des étrangers protégés

      Article 39
      Création d’un fichier des mineurs non accompagnés délinquants

      Article 42
      Allongement de la durée d’assignation à résidence des étrangers

      Article 44
      Exclusion de certains étrangers de l’aide sociale à l’enfance s’ils sont visés par une OQTF

      Article 46
      Instauration d’une condition de « respect des principes de la République » pour obtenir un titre de séjour

      Article 66
      Elargissement des cas dans lesquels le bénéfice des conditions matérielles d’accueil peut être retiré

      Article 70
      Fin de la collégialité par principe des jugements de la Cour nationale du droit d’asile

      Articles 72 et 76
      Extension du recours à la visioconférence pour les audiences dans les centres de rétention

      Article 77
      Allongement à quarante-huit heures du délai du juge pour statuer dans les zones d’attente

  • Mohamed Mbougar Sarr. « Loi immigration, la centrale du tri »
    "... une loi immigration dont la dureté et l’injustice contre les immigrés n’envient rien aux propositions de l’extrême droite française, laquelle a d’ailleurs vu dans cette décision, dont elle s’est félicitée qu’elle fût adoptée, « une victoire idéologique ».

    Cette revendication seule eût pu suffire à en signer la honte et à embarrasser la majorité. Mais nous n’en sommes plus là : plus aucune haine documentée, plus aucun passé d’indignité, plus aucune peste n’est infréquentable politiquement. Il serait aisé, peut-être trop, d’accabler le seul espace politique. C’est aussi dans la société, dans ses profondeurs, que les digues anciennes ont peu à peu reculé avant de rompre totalement. Mais le monde politique a accepté, accéléré, institutionnalisé ce mouvement en lui donnant une légitimité, en l’embra(s)sant au lieu de le combattre. Que s’est-il produit, pour que les vieux loups bruns passent aujourd’hui pour des agneaux blancs ? Qui porte la responsabilité de cette déchéance-là ?"

    https://www.mediapart.fr/journal/france/250124/mohamed-mbougar-sarr-loi-immigration-la-centrale-du-tri#at_medium=custom7&

    #loi_immigration #immigration

  • [Exclusif] À Brest, le sous-préfet sucre la subvention d’une télé associative au nom de la loi séparatisme - Splann ! | ONG d’enquêtes journalistiques en Bretagne
    https://splann.org/brest-prefet-subvention-association-loi-separatisme

    Non-respect du contrat d’engagement républicain. C’est la justification, inédite en Bretagne, apportée par le sous-préfet de Brest au retrait d’une subvention à la télé associative Canal Ti Zef. Le média y voit une sanction politique liée à son implication auprès de l’Avenir, un squat culturel rasé sous escorte policière durant l’été 2023. Cette piste est d’autant plus sérieuse que trois autres associations ayant soutenu ou relayé cette lutte viennent également de perdre un financement de l’État.

  • La #piscine municipale, un #bien_commun en voie de disparition
    https://metropolitiques.eu/La-piscine-municipale-un-bien-commun-en-voie-de-disparition.html

    La piscine municipale est un bien commun. Voici la thèse de la sociologue suisse Cornelia Hummel, qui analyse de façon sensible ce lieu de vie populaire, aujourd’hui menacé dans nombre de villes à la suite de l’augmentation des coûts de maintenance et alors qu’en parallèle se multiplient les piscines privées. Si l’intérêt des ethnologues s’est depuis longtemps porté sur le proche, et que l’on recense de nombreuses enquêtes en immersion dans des espaces partagés, des rues aux places publiques, du métro aux #Commentaires

    / bien commun, #eau, #loisirs, piscine, #sport

    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met_hachet.pdf

  • En France, les opposants à la loi immigration durcissent le ton contre sa promulgation - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/54655/en-france-les-opposants-a-la-loi-immigration-durcissent-le-ton-contre-

    Actualités
    En France, les opposants à la loi immigration durcissent le ton contre sa promulgation
    Par FRANCE 24 Publié le : 22/01/2024
    Dernier coup de pression sur l’exécutif quatre jours avant une décision très attendue du Conseil constitutionnel. Entre 75 000 et 150 000 opposants à la loi sur l’immigration ont manifesté partout en France dimanche contre la promulgation d’un texte assimilé à une victoire idéologique « de l’extrême droite ».
    Plusieurs milliers d’opposants à la loi immigration sont descendus, dimanche 21 janvier, dans les rues de Paris, Bordeaux, Toulouse, Lille et ailleurs en France pour maintenir la pression contre la promulgation d’un texte qui consacre, selon eux, la victoire idéologique « de l’extrême droite » avant la décision du Conseil constitutionnel, le 25 janvier.
    En se ralliant à l’appel lancé initialement par 201 personnalités, les opposants veulent rassembler au-delà de la sphère militante traditionnelle pour faire pression sur l’exécutif, qui pourrait promulguer rapidement le texte voté mi-décembre notamment avec les voix du Rassemblement national, sauf censure complète et surprise par les Sages.
    Quelque 75 000 manifestants, selon le ministère de l’Intérieur, 150 000 pour la CGT, se sont ralliés partout en France à l’appel lancé initialement par 201 personnalités, pour faire pression sur l’exécutif, qui pourrait promulguer rapidement le texte voté mi-décembre notamment avec les voix du Rassemblement national, sauf censure complète et surprise par les Sages le 25 janvier
    Plus de 160 marches étaient prévues dans toute la France. Entre 3 000 et 4 000 manifestants selon les organisateurs, ont défilé dans les rues de Toulouse samedi. Plusieurs centaines de personnes se sont réunies à Metz dimanche matin. À Caen, les syndicats ont revendiqué dimanche matin entre 1 500 et 2 000 manifestants.
    À Lille, environ 2 000 personnes ont défilé avec en tête de cortège des travailleurs de communautés Emmaüs du Nord, en grève depuis six mois pour dénoncer leurs conditions de travail et demander leur régularisation.
    Dans la manifestation parisienne, qui s’est élancée en début d’après-midi de la place du Trocadéro, quelques milliers de personnes étaient présentes dès le départ, avec plusieurs responsables de gauche. La préfecture de police y a comptabilisé 16 000 participants. La CGT, 25.000."Ca fait mal de voir qu’on nous a vendu le barrage républicain et que finalement le gouvernement calque le programme du Rassemblement national", a déploré Ethan Marie, lycéen en région parisienne.Manon Aubry (LFI), Marine Tondelier (Ecologistes), Fabien Roussel (PCF) et Olivier Faure (PS) ont fustigé un exécutif « qui a ouvert le pont levis aux idées de l’extrême droite », selon le premier secrétaire du PS. « Cette loi c’est une rupture avec les principes français depuis 1789 pour le droit du sol et depuis 1945 pour l’universalité de la protection sociale », a expliqué la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet qui a appelé à la mobilisation avec son homologue de la CFDT, Marylise Léon.
    Au milieu des pancartes brandies par les manifestants, « Immigration une chance pour la France », « La France est un tissu de migration », Mady Cissé, Sénégalais de 59 ans, intérimaire dans le bâtiment, apprécie un « soutien important » mais « aussi logique ». « On forme une seule et même société : sans nous, le pays ne fonctionnerait pas, c’est nous qui nous levons à 5 h du matin pour aller travailler dans le bâtiment, pour sortir les poubelles... même les bureaux des préfectures qui nous refusent les papiers, c’est nous qui les nettoyons ! », observe l’ouvrier qui dispose d’un titre de séjour temporaire.
    « Cette loi est une dérive vers l’extrême droite, sur le plan politique », a observé l’ancien ministre RPR et ex-Défenseur des Droits Jacques Toubon présent à Paris, "et sur le fond vers la préférence nationale, qui n’est pas conforme à nos principes fondamentaux et constitutionnels."Les auteurs de l’appel à manifester, dont de nombreuses personnalités du monde de la culture comme la comédiennes Josiane Balasko et l’autrice Alice Zeniter, demandent à Emmanuel Macron de ne pas promulguer la loi.En cause, les nombreux ajouts du Parlement au texte initial du gouvernement, donnant une coloration très à droite à cette loi qui devait initialement reposer sur deux volets, l’un répressif pour les étrangers « délinquants », l’autre favorisant l’intégration.
    Désormais, le texte comprend de nombreuses mesures controversées, comme le durcissement de l’accès aux prestations sociales, l’instauration de quotas migratoires, ou le rétablissement du « délit de séjour irrégulier ».
    Interrogée dimanche dans l’émission « Questions politiques » diffusée simultanément sur France Inter, FranceinfoTV et Le Monde, la ministre déléguée à l’Égalité hommes/femmes, Aurore Bergé, a nié que le texte mette en place « la préférence nationale ».
    La ministre a renvoyé à ses opposants la responsabilité de la montée du RN qui arrive actuellement en tête des sondages pour les futures élections européennes. « Instiller l’idée qu’on est en train de reprendre les thèses et les thèmes du Rassemblement national, là, c’est sûr, on leur donne une victoire idéologique », a-t-elle déclaré.

    #Covid-19#migrant#migration#france#loiimmigration#manifestation

  • Faute d’accès aux préfectures, une centaine de sans-papiers saisissent la justice
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/01/22/faute-d-acces-aux-prefectures-une-centaine-de-sans-papiers-saisissent-la-jus

    L’objectif : « Contraindre les préfectures à respecter un délai raisonnable pour instruire les dossiers », justifie dans un communiqué le collectif Bouge ta préfecture, qui accompagne les requérants et que composent plus de vingt organisations, parmi lesquelles La Cimade, le Secours catholique ou encore Réseau Education sans frontières.

    Actuellement, selon Bouge ta préfecture, « le délai moyen d’attente entre le dépôt de la demande de rendez-vous et la réponse à la demande de titre de séjour est de deux à trois ans ».

    Toutes les personnes déposant un recours sont éligibles à une régularisation, à raison de leur vie privée et familiale ou du travail qu’elles exercent.

    https://justpaste.it/fvjmc

    #sans-papiers #demande_de_titre_de_séjour #titre_de_séjour #régularisation #droit_du_séjour #préfecture #référés #T.A

    • Mobilisation contre la loi asile et immigration
      https://www.gisti.org/article7163

      Même censuré de quelques dispositions jugées anticonstitutionnelles, ce texte, le plus hostile aux personnes étrangères depuis 1945, ne fera qu’aggraver la précarité de dizaines de milliers de personnes : il facilitera l’enfermement et l’expulsion de personnes parfois installées de longue date, rendra impossible le droit de mener une vie de famille et ne favorisera pas l’intégration des personnes.

      Ces dernières sont déjà confrontées à un système administratif très complexe, qui limite leur accès à des droits fondamentaux déjà réduits au minimum. Pourtant, nous le savons bien : l’augmentation des inégalités sociales et le durcissement d’un système administratif discrétionnaire et judiciaire dégradé ne conduiront jamais à davantage de sérénité et de cohésion.

      Nous, personnes concernées et acteur·rice·s de la société civile, exigeons le retrait de cette loi et l’adoption de dispositions législatives garantissant enfin le respect des droits des personnes étrangères et leur accueil digne en France .

      Plutôt que de laisser nos responsables politiques diviser notre pays, construisons ensemble un destin positif, qui doit commencer par le retrait de cette loi de la honte que nous rejetons collectivement.

      Rassemblement le jeudi 25 janvier
      à 16h, Place du Louvre

      #immigration #loi_immigration

  • « La loi “asile et immigration” réduit les personnes étrangères au statut d’une force de travail »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/19/la-loi-asile-et-immigration-reduit-les-personnes-etrangeres-au-statut-d-une-

    « La loi “asile et immigration” réduit les personnes étrangères au statut d’une force de travail »
    Johanna Dagorn Sociologue
    Corinne Luxembourg Géographe
    Mars 2020, 20 heures, les applaudissements aux balcons saluent l’engagement professionnel de femmes et d’hommes qui œuvrent pour que perdure la vie : soin, ravitaillement, hygiène, parfois même éducation… Le pays découvrait ces personnes indispensables à la solidité et au fonctionnement de notre société, à nos communs. Mais l’applaudimètre n’a pas signifié une reconnaissance sociale, et encore moins financière. Une fois cette parenthèse passée, le monde n’a pas changé : les invisibles ont été ramenés à leur ancienne invisibilité.
    Ces femmes et ces hommes nettoient les rues, les bureaux ou livrent des repas. Leur réalité est marquée par des horaires de travail fragmentés, rendant leur temps libre pratiquement inutilisable. Pour la plupart, ils appartiennent à ces minorités visibles, indépendamment de leur nationalité. En 2021, selon l’Insee, 14 % des immigrés en emploi ont le statut d’indépendant. Les jeunes hommes qui livrent des repas à domicile sont dans des conditions de travail extrêmement précaires. La contractualisation à travers des plates-formes électroniques et les discriminations à l’embauche les rendent particulièrement vulnérables.
    Les dangers de la circulation, les conditions météorologiques difficiles et la baisse de revenus de 10 % à 30 % actuellement constatée par les livreurs des plates-formes accentuent encore leur vulnérabilité. Les livreurs doivent couvrir des distances de plus en plus grandes pour tenter de maintenir leurs revenus. Dans ce contexte, le faible coût de livraison imposé par les plates-formes place les personnes consommatrices dans la position d’être servies presque instantanément, leur permettant d’employer de fait une domesticité systématiquement « invisibilisée ».
    Quant aux femmes, elles occupent une part significative des emplois liés au secteur des soins à la personne, le « care » : d’après une étude de la Dares, en 2021, 13 % des femmes immigrées en emploi travaillent comme agentes d’entretien. Ce chiffre est plus élevé que celui des femmes non immigrées en emploi, qui est de 6 %. Les femmes immigrées représentent par ailleurs 6 % des aides à domicile et aides ménagères et 9 % des aides-soignantes et assistantes maternelles.
    En utilisant comme base de l’octroi aux sans-papiers du titre de séjour « métiers en tension » la liste de ces métiers par région publiée au Journal officiel, la loi « asile et immigration » votée le 20 décembre 2023 réduit les personnes étrangères au statut d’une force de travail. Anonymes et réinvisibilisés, déchus de cette fugace reconnaissance nationale, ces femmes et ces hommes ne sont considérés que comme des bras et des corps dévolus à l’économie. Ils vivent de plus en plus souvent l’injonction à rejoindre un auto-entrepreneuriat aux allures de salariat déguisé pour les hommes, ou les métiers de service à la personne mal considérés et mal rémunérés pour les femmes immigrées, qui, au lieu de connaître le plafond de verre, butent sur un plancher collant.
    La loi « asile et immigration », si elle est promulguée, renforcera les inégalités sociales et discriminatoires entre les hommes, les femmes et les personnes désignées comme « éloignées de l’emploi » ou réduites à leur employabilité. Dans une logique adéquationniste, il reviendrait une nouvelle fois aux personnes les plus faibles de répondre aux exigences du marché. Au lieu de poser les bonnes questions, comme celle de la reconnaissance sociale et économique des métiers qui soutiennent nos sociétés, le « marché », soutenu par le législateur, va trier les « bons » et les « mauvais » immigrés, c’est-à-dire ceux qui s’adapteront ou non à cette logique adéquationniste. Cette approche, outre qu’elle pose des questions de justice sociale et économique, néglige une réflexion sur la véritable valeur de ces métiers pour nos sociétés.
    L’ambivalence de cette loi réside dans sa capacité à escamoter le besoin économique dans un tour de passe-passe idéologique tout en rendant visibles, mais sous un autre angle, ces personnes invisibles. Voilà les anciens « premiers de corvée » du Covid-19 à nouveau désignés comme la source principale des problèmes nationaux. Criminalisés par la loi « immigration », ils seront discriminés, au sens de la loi du 16 novembre 2001 sur les vingt-cinq critères de discrimination, puisque, au titre d’une origine nationale non communautaire, le droit pénal ne s’appliquera plus de la même façon sur le sol national.
    En pratique, cette loi interdira durant cinq ans l’obtention de prestations sociales, telles les allocations logement ou familiales. Elle établira des quotas annuels pour les entrées sur le territoire, durcira les conditions d’obtention du titre de séjour, exigera une caution pour les étudiants étrangers, donnant de fait la priorité aux étudiants ayant des ressources financières. De plus, elle vise à instaurer la primauté au droit du sang sur le droit du sol.
    Les législateurs ayant voté cette loi ont donc décidé de rendre ces personnes définitivement visibles d’un point de vue pénal. De plus, ils ont entaillé la lutte institutionnelle contre les discriminations en s’attaquant à l’un des critères de la loi de 2001. Cette approche soulève des préoccupations quant à l’équité et à la justice, remettant en question la protection des droits fondamentaux. Le vote de ce texte va au-delà d’un simple renforcement des frontières ethniques. Il représente une fissure dans le pacte républicain d’égalité.
    Johanna Dagorn est sociologue (université de Bordeaux) ; Corinne Luxembourg est géographe (université Sorbonne-Paris-Nord)

    #Covid-19#migrant#migration#france#loiimmigration#economie#maindoeuvre#discrimination#droit#travailleurmigrant#egalite

  • Lutte de classe n° 237 / février 2024 | Le mensuel
    https://mensuel.lutte-ouvriere.org

    Au sommaire
    #Gaza  : les Palestiniens face au #terrorisme_d’État israélien
    La #loi_Immigration, inspirée par l’extrême droite, contre tous les travailleurs
    L’an II du gouvernement #Meloni
    Le capitalisme chinois face à ses contradictions et à l’impérialisme
    Des BRICS aux #BRICS+  : une alliance de bric et de broc
    Afrique du Sud  : en 2024, des élections sans enjeu pour la classe ouvrière
    Trois livres sur #Lénine (1870-1924), mort il y a 100 ans

  • Loi Darmanin : le 25 janvier, bloquons le pays ! | Marche des Solidarités
    https://blogs.mediapart.fr/marche-des-solidarites/blog/180124/loi-darmanin-le-25-janvier-bloquons-le-pays

    Les seuls vainqueurs de sa promulgation seront les racistes et les fascistes. Les racistes parce que la loi les conforte. Les fascistes, Marine Le Pen en tête, parce qu’elle dira que le pouvoir est inconséquent et ne va pas jusqu’au bout.
    Les manifestations du 14 janvier ont montré qu’il existait les germes d’une riposte profonde et combative unifiant les Sans-papiers et celles et ceux qui ont des papiers, les Français·e·s et les immigré·e·s. Partout, à l’initiative des Collectifs de Sans-papiers, rejoints par plus de 500 organisations dont beaucoup de structures locales, les manifestations ont montré par leur nombre et la nature de la mobilisation que quelque chose se passait.

    La manifestation parisienne a été emblématique dirigée et animée par les #collectifs de #Sans-papiers avec des cortèges de quartier, des cortèges d’école en lutte contre la loi, des féministes, des cortèges LGBTQI, des activistes du Soulèvement de la terre, d’Extinction rébellion, des clubs de foot et la FSGT (fédération sportive).
    Des lycéens et lycéennes s’organisent, les blocages de lycées reprennent à Paris, Rennes ou Nantes. Les assemblées étudiantes se multiplient dans plusieurs villes. Des Assistantes d’éducation se sont mis en grève à Charenton. Les banderoles contre la loi fleurissent devant des écoles. Des professionnels de la santé commencent à se coordonner.
    Il faut le dire car cela a une importance pour la suite. Les manifestations du 21 janvier ont été organisées sur le dos des collectifs de Sans-Papiers et en concurrence avec les manifestations du 14 janvier. Heureusement ce n’est pas la logique qui domine dans de nombreux endroits. Mais là où il faut construire une unité de lutte, les principales organisations syndicales ont semé les graines de la division avec celles et ceux qui se battent depuis des mois contre cette loi abjecte.
    A Paris, les Collectifs de Sans-papiers se sont sentis humiliés par ce mépris. C’est pourquoi ils ont décidé de ne pas participer à la manifestation parisienne, par dignité et pour dire que la lutte ne peut gagner sans les premiers et premières concerné·e·s.

    #Loi_immigration #syndicats #artistes

  • la loi immigration, une préférence pour la pauvreté qui touchera au moins 110 000 personnes dont 30 000 enfants
    https://nosservicespublics.fr/preference-nationale

    Cette note, issue du travail d’agents publics, d’économistes et de statisticiens spécialistes du système de protection sociale, propose de chiffrer et d’illustrer les conséquences qu’aurait le volet “préférence nationale” de ladite loi dans la vie des habitantes et habitants de notre pays.

    #loi_immigration #préférence_nationale

  • « Incompétence des “juges”, absence d’indépendance réelle : les entorses du Conseil constitutionnel à la démocratie »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/17/incompetence-des-juges-absence-d-independance-reelle-les-entorses-du-conseil

    Le fait que nous nous soyons habitués à vivre au rythme des décisions du Conseil constitutionnel (un rythme qui s’est pris avec les lois adoptées pendant la pandémie de Covid-19, prolongé par l’épisode des retraites, et aujourd’hui la #loi_sur_l’immigration) ne signifie pas que celui-ci soit digne de la mission qui lui est confiée : protéger les #droits et #libertés garantis par la #Constitution.

    Avant qu’il rende sa décision sur le projet de loi « contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » adopté par le Parlement le 19 décembre 2023, il importe de rappeler que des entorses de principe à la démocratie résultent de la composition et du fonctionnement du Conseil constitutionnel : partialité et incompétences des « juges », absence d’indépendance réelle vis-à-vis des pouvoirs qu’il contrôle, graves insuffisances dans la rédaction de ses décisions.

    Ces critiques ont déjà été portées, mais le constat demeure. Une affaire nous en donne l’occasion. La situation du Conseil se trouve actuellement examinée par un comité des Nations unies, le comité d’Aarhus, dont la mission est de suivre l’application de la convention du même nom. Cette convention porte notamment sur la question de l’accès à la justice à des fins de protection de l’environnement. Ce sont les trois associations France Nature Environnement, La Sphinx et Greenpeace France qui ont porté l’incurie du Conseil constitutionnel devant cette instance.

    Celui-ci avait en effet rendu une décision le 1er avril 2022 à propos de la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (loi ELAN) sur une question prioritaire de constitutionnalité posée par l’association La Sphinx (décision n° 2022-986 #QPC). Le Conseil confirma alors la constitutionnalité de la disposition qui privait les associations de la possibilité d’exercer un recours contre les permis de construire, dès lors qu’elles étaient constituées depuis moins d’un an.

    Règles de procédure inadéquates

    Parmi les griefs adressés par les trois associations au Conseil constitutionnel devant le comité onusien figurent les conditions dans lesquelles il a rendu sa décision du 1er avril 2022 : est ainsi mise en avant l’absence d’impartialité de la cour, une absence aggravée par des règles de procédure inadéquates et une forme de dépendance aux pouvoirs contrôlés.

    A ce sujet, nous avons formulé des observations devant le comité onusien, car nous sommes conscients de l’impérieuse nécessité démocratique de mettre un terme aux pratiques du Conseil constitutionnel, contraires aux standards d’une justice équitable, indépendante et impartiale. Cette occasion est importante, il ne faut pas la manquer.

    Nous avons d’abord fait observer que la plupart des neuf membres qui composent cette cour constitutionnelle sont d’anciennes personnalités politiques (premiers ministres, ministres ou parlementaires). Cette situation est quasiment inédite dans le monde. Le plus souvent, ces personnalités ont été concernées comme politiques par les textes législatifs qu’ils « jugent » ensuite au Conseil constitutionnel. C’était le cas dans l’affaire « La Sphinx », puisque deux anciens ministres, Jacques Mézard et Jacqueline Gourault, étaient concernés par la loi en cause et ont participé au jugement.

    Dans le cadre de ses fonctions antérieures, Jacques Mézard a été chargé de la déclaration relative à la loi contestée (une loi dont le gouvernement avait pris l’initiative) devant l’Assemblée nationale le 3 octobre 2018, déclaration à l’issue de laquelle il indique que « la loi ELAN va pouvoir devenir une réalité et je le crois améliorer le quotidien des Français, de tous les Français sur l’ensemble du territoire de la République ».

    Dans le cadre de ses fonctions gouvernementales, Jacqueline Gourault a eu la charge toute spécifique de rédiger la circulaire d’application de la loi contestée (circulaire du 21 décembre 2018), dont le contenu ne laisse pas de doute sur l’accord de son auteur avec le dispositif contesté : l’article 80 de la loi, indique la circulaire, « vise à sécuriser les autorisations de construire, accélérer les délais de jugement et mieux sanctionner les recours abusifs ».

    Jacques Mézard et Jacqueline Gourault ont ainsi tous deux exprimé une pensée en accord avec la loi contestée, mais, surtout, en ont défendu le principe dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions antérieures à celles de juges, et alors qu’ils n’étaient ni l’un ni l’autre soumis à des exigences d’indépendance et d’impartialité : l’un a défendu la loi devant l’Assemblée nationale qui devait voter la loi, et l’autre l’a défendue auprès des administrations qui devaient l’appliquer.

    Il s’agit là d’une situation de #partialité incompatible avec les standards de l’organisation de la justice en pays démocratique. Ces standards sont le fruit de l’histoire de la justice et de la démocratie et ont été également formulés par la Cour européenne des droits de l’homme. Pourtant, il existe un mécanisme destiné à l’éviter, celui du #déport, par lequel quelqu’un ne participe pas au jugement parce qu’il se trouve dans une situation « objective » de partialité. Mais la pratique du déport au sein du Conseil reste insuffisante, et cette affaire le rappelle.

    Obligation de quorum

    Nous avons également fait valoir que la composition problématique du Conseil constitutionnel était aggravée par certaines règles de procédure à suivre. Est d’abord visée l’obligation de quorum, une règle applicable à toute juridiction : pour juger valablement, sept au moins des neuf membres doivent être présents. Mais le nombre de personnalités susceptibles d’être en situation objective de conflit d’intérêts vis-à-vis de la loi jugée est fréquemment supérieur à deux.
    Cela fait que le Conseil est conduit à juger à six ou à cinq, ce qui n’est pas souhaitable pour un pays tel que le nôtre. Dans cette situation par exemple, la cour constitutionnelle d’Allemagne n’a tout simplement pas le droit de juger. Le Conseil français, lui, invoque l’idée de « force majeure », la vidant complètement de son sens puisque, en droit, la force majeure correspond à un événement imprévisible et irrésistible .
    Une autre règle de procédure, enfin, a spécifiquement posé problème dans cette affaire. Jacqueline Gourault est entrée en Conseil constitutionnel, et a participé à la décision du 1er avril 2022, après que le délai dont disposait La Sphinx pour demander la récusation de l’un des membres du Conseil constitutionnel avait expiré.

    Autrement dit, il n’était plus possible de demander que Jacqueline Gourault ne participe pas au jugement pour cause de situation de partialité, tout simplement parce qu’elle a intégré le Conseil alors que l’affaire était déjà en cours. Là encore, il y a une contrariété aux principes élémentaires de la justice, et la situation est systémique au Conseil constitutionnel.
    Tout le long de nos observations, nous avons donc essayé de montrer que ces manquements aux standards du fonctionnement des juridictions ne sont pas, hélas, le fait de la décision du 1er avril 2022, mais participent de la structure même de notre Conseil constitutionnel, une situation qui ne fait pas honneur à la prétention française à être leader dans le domaine des institutions démocratiques et de l’Etat de droit.

    Lauréline Fontaine est professeure de droit public à l’université Sorbonne-Nouvelle, autrice de La Constitution maltraitée (Ed. Amsterdam, 2023) ; Thomas Perroud est professeur de droit public à l’université Paris-II Panthéon-Assas (Cersa CNRS) ; Dominique Rousseau est professeur émérite de droit public à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne.

    https://seenthis.net/messages/1036314

  • Loi « immigration » : le risque d’une généralisation des droits différenciés pour les étudiants étrangers

    La loi sur l’immigration inscrit dans le #code_de_l’éducation des #droits_d’inscription plus élevés pour les étudiants non européens. Une mesure qui existe depuis 2019, mais qui était en pratique peu appliquée.

    C’était l’une des mesures les plus décriées du plan « #Bienvenue_en_France », présenté par l’ancienne ministre de l’enseignement supérieur Frédérique Vidal. Depuis 2019, les étudiants étrangers doivent s’acquitter de droits d’inscription plus élevés que les candidats européens. Plusieurs universités s’étaient jusqu’ici engagées à ne pas mettre en place ce principe, mais la récente loi « immigration », en inscrivant celui-ci dans le code de l’#éducation, rendrait obligatoire son application.

    En déplacement au salon d’orientation postbac de Paris-La Villette, vendredi 12 janvier, #Sylvie_Retailleau, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, reconduite au sein du nouveau gouvernement, a assuré avoir obtenu des engagements « forts » auprès du président de la République, Emmanuel Macron. Une manière de rassurer la communauté universitaire, qui avait fermement condamné les dispositions de la loi « immigration », dont la généralisation des #droits_différenciés. Ceux-ci ne sont pas une nouveauté. Depuis 2019, les étudiants extracommunautaires (hors Union européenne) qui souhaitent s’inscrire à un diplôme national de licence, de master ou de cycle d’ingénieur doivent débourser 2 270 euros pour une licence et 3 770 euros pour un master, contre 170 et 243 euros pour le reste des candidats.

    Le ministère avait cependant accordé, par décret, aux facultés la possibilité d’exonérer de droits d’inscription 10 % de leurs étudiants. Un dispositif que les présidents ont massivement choisi d’utiliser en faveur des candidats extracommunautaires. Ainsi en 2023, 57 % des universités (soit 42 d’entre elles) ont exonéré l’intégralité des étudiants étrangers, selon un décompte publié par l’agence de presse spécialisée AEF. Elles sont 16 (22 %) à en exonérer une partie, selon des critères académiques, de nationalités ou linguistiques. Seules 13 universités (18 %) appliquent complètement les frais majorés.
    Selon la vice-présidente de l’université Paris-II Panthéon-Assas, Emmanuelle Chevreau, à la rentrée 2023, ces frais majorés, mis en place par l’administration précédente, ont concerné 900 étudiants – sur les 3 000 candidats étrangers accueillis. Ces derniers peuvent ensuite faire une demande d’exonération partielle. « Ensuite, 50 % des demandes sont acceptées selon des critères économiques et sociaux. Cette année, seuls 10 % des étudiants en ont fait la demande », indique-t-elle.
    En pratique, rares sont les étudiants qui payent l’intégralité des frais : sur les 96 600 étudiants inscrits à la rentrée 2021, ils ne sont même que 6 %, indique une note du service statistique et analyse de l’enseignement supérieur parue en mars 2023. Près de 17 % en sont totalement exonérés, le reste bénéficiant d’exonérations partielles, décidées par l’établissement ou via des bourses du gouvernement et d’ambassade. A l’université de Limoges, jusqu’en 2021, la présidence avait refusé de faire payer davantage aux étudiants étrangers. Mais la nouvelle équipe, elle, a fait un autre choix. « Nous avons simplement décidé de respecter la loi », souligne le vice-président de l’établissement, Laurent Bourdier, qui réfute « toute considération idéologique ».
    « Nous avons essayé de faire quelque chose d’équilibré en mettant en place plusieurs garde-fous et surtout en jouant sur le jeu des exonérations par le biais d’attribution de bourses d’excellence », détaille-t-il. Sur les 2 000 étudiants étrangers accueillis sur le campus de Limoges, seuls 420 se sont bien acquittés des frais dans leur intégralité. « Le système reste imparfait, il y a eu quelques remous, ça a été difficile d’introduire les droits d’inscription différenciés auprès de nos équipes, reconnaît M. Bourdier. Je ne minimise pas le fait qu’il s’agit de frais importants qui peuvent freiner certains candidats. »
    Ces droits différenciés avaient été présentés par le ministère comme une manne financière devant permettre un meilleur accueil de ces étudiants. « Nous avons un devoir d’exemplarité envers tous ceux qui s’acquittent de ces frais », assure le responsable. A Limoges, ce sont donc 90 000 euros qui sont consacrés à l’accompagnement « individualisé » des étudiants étrangers. Entre 600 000 et 700 000 euros sont dévolus à l’agrandissement du campus international. En tout, les droits d’inscription différenciés rapporteraient environ 900 000 euros à l’établissement.
    D’autres universités arguent qu’elles n’ont pas d’autre choix que d’appliquer ces droits. C’est le cas à l’université de Strasbourg, où pour la première fois, en 2024, l’établissement appliquera les droits différenciés pour les étudiants étrangers puisque le seuil d’exonération de 10 % devrait être dépassé. Une règle a toutefois été décidée : exonérer complètement les étudiants en licence mais faire payer ceux arrivant en master. Certaines universités résistent pourtant tant bien que mal. A Rennes-II, les candidats étrangers représentent 15 % de la population étudiante (23 000) et 85 % d’entre eux sont des étudiants extracommunautaires. Vincent Gouëset, le président de l’université, s’était opposé, dès 2019, à la mise de cette mesure en pointant du doigt la « rupture d’égalité » pour les étudiants étrangers issus de milieux défavorisés. « Le choix de ne pas appliquer ces droits différenciés nous conduit à dépasser le seuil des 10 % autorisé, c’est un choix assumé qui répond aux valeurs d’inclusion et de justice sociale portées par l’établissement, le rectorat en est informé et ne nous a rien dit », déclare le président, conscient que l’adoption de la loi sur l’immigration pourrait pousser le rectorat à lui imposer une application plus stricte des textes.

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/01/15/loi-immigration-le-risque-d-une-generalisation-des-droits-differencies-pour-
    #loi_immigration #étudiants_étrangers #migrations #université #étudiants #inégalités #discrimination

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    ajouté à la métaliste sur les augmentations des #taxes_universitaires prévues en #France dès la rentrée 2019-2020

  • Loi « immigration » : le risque d’une généralisation des droits différenciés pour les étudiants étrangers
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/01/15/loi-immigration-le-risque-d-une-generalisation-des-droits-differencies-pour-

    Loi « immigration » : le risque d’une généralisation des droits différenciés pour les étudiants étrangers
    Par Minh Dréan
    C’était l’une des mesures les plus décriées du plan « Bienvenue en France », présenté par l’ancienne ministre de l’enseignement supérieur Frédérique Vidal. Depuis 2019, les étudiants étrangers doivent s’acquitter de droits d’inscription plus élevés que les candidats européens. Plusieurs universités s’étaient jusqu’ici engagées à ne pas mettre en place ce principe, mais la récente loi « immigration », en inscrivant celui-ci dans le code de l’éducation, rendrait obligatoire son application.
    En déplacement au salon d’orientation postbac de Paris-La Villette, vendredi 12 janvier, Sylvie Retailleau, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, reconduite au sein du nouveau gouvernement, a assuré avoir obtenu des engagements « forts » auprès du président de la République, Emmanuel Macron. Une manière de rassurer la communauté universitaire, qui avait fermement condamné les dispositions de la loi « immigration », dont la généralisation des droits différenciés. Ceux-ci ne sont pas une nouveauté. Depuis 2019, les étudiants extracommunautaires (hors Union européenne) qui souhaitent s’inscrire à un diplôme national de licence, de master ou de cycle d’ingénieur doivent débourser 2 270 euros pour une licence et 3 770 euros pour un master, contre 170 et 243 euros pour le reste des candidats.
    Le ministère avait cependant accordé, par décret, aux facultés la possibilité d’exonérer de droits d’inscription 10 % de leurs étudiants. Un dispositif que les présidents ont massivement choisi d’utiliser en faveur des candidats extracommunautaires. Ainsi en 2023, 57 % des universités (soit 42 d’entre elles) ont exonéré l’intégralité des étudiants étrangers, selon un décompte publié par l’agence de presse spécialisée AEF. Elles sont 16 (22 %) à en exonérer une partie, selon des critères académiques, de nationalités ou linguistiques. Seules 13 universités (18 %) appliquent complètement les frais majorés.
    Selon la vice-présidente de l’université Paris-II Panthéon-Assas, Emmanuelle Chevreau, à la rentrée 2023, ces frais majorés, mis en place par l’administration précédente, ont concerné 900 étudiants – sur les 3 000 candidats étrangers accueillis. Ces derniers peuvent ensuite faire une demande d’exonération partielle. « Ensuite, 50 % des demandes sont acceptées selon des critères économiques et sociaux. Cette année, seuls 10 % des étudiants en ont fait la demande », indique-t-elle.
    En pratique, rares sont les étudiants qui payent l’intégralité des frais : sur les 96 600 étudiants inscrits à la rentrée 2021, ils ne sont même que 6 %, indique une note du service statistique et analyse de l’enseignement supérieur parue en mars 2023. Près de 17 % en sont totalement exonérés, le reste bénéficiant d’exonérations partielles, décidées par l’établissement ou via des bourses du gouvernement et d’ambassade. A l’université de Limoges, jusqu’en 2021, la présidence avait refusé de faire payer davantage aux étudiants étrangers. Mais la nouvelle équipe, elle, a fait un autre choix. « Nous avons simplement décidé de respecter la loi », souligne le vice-président de l’établissement, Laurent Bourdier, qui réfute « toute considération idéologique ».
    « Nous avons essayé de faire quelque chose d’équilibré en mettant en place plusieurs garde-fous et surtout en jouant sur le jeu des exonérations par le biais d’attribution de bourses d’excellence », détaille-t-il. Sur les 2 000 étudiants étrangers accueillis sur le campus de Limoges, seuls 420 se sont bien acquittés des frais dans leur intégralité. « Le système reste imparfait, il y a eu quelques remous, ça a été difficile d’introduire les droits d’inscription différenciés auprès de nos équipes, reconnaît M. Bourdier. Je ne minimise pas le fait qu’il s’agit de frais importants qui peuvent freiner certains candidats. »
    Ces droits différenciés avaient été présentés par le ministère comme une manne financière devant permettre un meilleur accueil de ces étudiants. « Nous avons un devoir d’exemplarité envers tous ceux qui s’acquittent de ces frais », assure le responsable. A Limoges, ce sont donc 90 000 euros qui sont consacrés à l’accompagnement « individualisé » des étudiants étrangers. Entre 600 000 et 700 000 euros sont dévolus à l’agrandissement du campus international. En tout, les droits d’inscription différenciés rapporteraient environ 900 000 euros à l’établissement.
    D’autres universités arguent qu’elles n’ont pas d’autre choix que d’appliquer ces droits. C’est le cas à l’université de Strasbourg, où pour la première fois, en 2024, l’établissement appliquera les droits différenciés pour les étudiants étrangers puisque le seuil d’exonération de 10 % devrait être dépassé. Une règle a toutefois été décidée : exonérer complètement les étudiants en licence mais faire payer ceux arrivant en master. Certaines universités résistent pourtant tant bien que mal. A Rennes-II, les candidats étrangers représentent 15 % de la population étudiante (23 000) et 85 % d’entre eux sont des étudiants extracommunautaires. Vincent Gouëset, le président de l’université, s’était opposé, dès 2019, à la mise de cette mesure en pointant du doigt la « rupture d’égalité » pour les étudiants étrangers issus de milieux défavorisés. « Le choix de ne pas appliquer ces droits différenciés nous conduit à dépasser le seuil des 10 % autorisé, c’est un choix assumé qui répond aux valeurs d’inclusion et de justice sociale portées par l’établissement, le rectorat en est informé et ne nous a rien dit », déclare le président, conscient que l’adoption de la loi sur l’immigration pourrait pousser le rectorat à lui imposer une application plus stricte des textes.

    #Covid-19#migration#migrant#france#loiimmigration#etudiant#inegalite#université

    • « Dans la logistique, la loi immigration va faire des ravages ». Billet de Pierre, ouvrier
      https://www.revolutionpermanente.fr/Dans-la-logistique-la-loi-immigration-va-faire-des-ravages-Bill

      Fin décembre, le gouvernement a imposé ce qui est sans doute la loi la plus brutale et la plus raciste de l’Histoire de la V° République. Une loi qui va avoir d’énorme conséquences dans le monde du travail et notamment la logistique. Billet de Pierre, ouvrier et délégué syndical dans le secteur de la logistique.

      L’année 2023 s’est terminée avec l’adoption de l’une des lois les plus brutales envers les immigrés que la 5eme république ait connu. La loi immigration constitue une énorme offensive réactionnaire du gouvernement, avec l’appui de la droite et de l’extrême-droite. Remise en cause du droit du sol, durcissement des conditions de regroupement familial, modification de la « régularisation par le travail » : cette loi est une attaque globale qui touche aujourd’hui des millions de personnes en France, en particulier des travailleuses et des travailleurs des secteurs les plus précaires, des salariés du bâtiment jusqu’aux ouvrières et ouvriers du nettoyage, des CDI jusqu’aux intérimaires. Ces fameux travailleurs essentiels qui font des travaux difficiles et mal payés, ce sont eux qui seront les premiers attaqués.

      Concrètement, dans l’entrepôt de logistique ou je travaille, la grande majorité de mes collègues sont issus de l’immigration. Mais ce n’est pas une réalité seulement dans mon entrepôt. Comme l’explique la sociologue du travail Carlotta Benvegnù dans un article de Socialter les salariés dans la logistique « sont aujourd’hui environ 800 000, et même 1,5 million en comptant le transport. 80 % sont des hommes, pour la plupart racisés, et la grande majorité sont des ouvriers. En 2021, 13 % des emplois ouvriers en France relevaient ainsi du secteur de la logistique ». Il faut ajouter qu’« en France, le secteur de la logistique fait un recours massif au travail temporaire, avec près d’un quart des effectifs ouvriers en intérim, auxquels s’ajoutent 10 % de contrats à durée déterminée (CDD) » d’après une étude publiée par la Dares en 2020. Ces quelques données suffisent à comprendre que, dans la logistique, c’est une majorité des ouvrières et ouvriers qui sont directement concernés par les mesures de la loi immigration.

      Alors que la loi n’est pas encore promulguée, la situation est déjà catastrophique, avec des cas variés, du travailleur sans-papiers à la personne en attente du renouvellement de carte de séjour. Comme si cela ne suffisait pas, nombre de collègues sont aussi touchés « indirectement », que cela soit pour des membres de leurs familles présents en France, des proches ou des amis. Dans ce cadre, l’annonce de la loi et le durcissement des conditions pour obtenir des papiers, titres de séjour etc. va rendre la situation plus dramatique pour ceux déjà touchés… et mettre en difficulté des travailleurs étrangers supplémentaires En d’autre terme, dans la logistique comme ailleurs, la loi immigration va faire des ravages.

      Mais la nouvelle loi alimente aussi deux mythes qu’il faut déconstruire :

      Le premier est de penser que la demande de régularisation serait plus facile en tant que travailleur. En effet, parmi les mesures de la loi, il n’y aura plus besoin du certificat de l’entreprise pour une régularisation par le travail dans les métiers « en tension », ce qui est le cas pour la logistique. Certains collègues voient ce changement comme plutôt positif puisqu’il ne sera plus nécessaire de demander ce document à son patron. Malheureusement, cette disposition s’accompagne d’une batterie de mesures rendant plus difficile l’accès à la régularisation par le travail : non seulement les autres conditions nécessaires sont durcies (notamment le nombre de mois consécutifs au travail) mais surtout le pouvoir des préfets pour valider ou non ces régularisations sera renforcé ! Il ne faut pas se faire d’illusions quant au rôle des préfets qui sont sous l’autorité directe du ministre de l’Intérieur. Tout sauf une amélioration donc…

      Le deuxième mythe, alimenté par une propagande médiatique intense et sans interruption, serait que cette loi ne concernerait que les travailleurs étrangers. Derrière ça, le gouvernement cherche à nous diviser, surtout après les récents mouvement sociaux où on a vu que les travailleurs pouvaient s’unir pour s’opposer au gouvernement notamment contre la réforme des retraites. En réalité, laisser passer cette loi qui s’attaque à des travailleurs en leur conditionnant des aides selon leur nationalité c’est ouvrir la voie à toutes les attaques qui sont déjà annoncées contre les plus précaires, sur le RSA ou l’assurance chômage, ou bien encore la « nouvelle loi travail » qui attaquera l’ensemble des travailleurs, quelque soit leur nationalité.

      Au contraire, se battre tous ensemble contre la loi immigration, c’est refuser leur jeu de la division et potentiellement infliger un recul à un gouvernement anti-travailleur, pour mieux préparer les combats à venir dans les prochains mois. Il faudra être nombreux à dénoncer cette loi dans la rue. Aussi dans nos entreprises, ça va être décisif de dénoncer la loi immigration comme on l’a fait avec notre syndicat CGT ID Logistics Région Ouest pour montrer à nos collègues qu’ils ne sont pas seuls à affronter ces attaques racistes.

  • Panorama des #mesures régissant l’entrée et le séjour des étrangers en #France (1972-2023)

    A l’heure de l’adoption de la révoltante « #loi_Darmanin », le #collectif_Ruptures publie une #recension de toutes les #lois régissant l’entrée et le séjour des étrangers en France. Loi après loi, #décret après décret, dispositif après #dispositif, année après année, ce panorama de la « #gestion_des_flux_migratoires » sur la période 1972-2023 vient compléter la brochure Lois répressives et autres bagatelles (France, 1974-2022) que nous avons édité au printemps.

    Ce tome 2 de Bagatelles est intégralement téléchargeable ici, et son introduction est lisible ci-dessous :
    https://collectifruptures.files.wordpress.com/2024/01/brochure_bagatelles2.pdf?force_download=true

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    Introduction

    Le 27 décembre 2023, Didier Leschi, directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) s’exprime dans Le monde sur la dernière loi votée huit jours plus tôt.
    Selon lui, « les mesures adoptées en France demeurent plus ouvertes que dans les principaux pays de l’Union européenne », et « la prise en charge de la santé des sans-papiers bien meilleure comparée à l’Allemagne, l’Autriche, la Suède, le Danemark, aux Pays-Bas ou à l’Espagne ».
    On veut bien le croire. Et le remercier de nous confirmer que la montée de la gestion comptable de l’humain et de son traitement comme un simple rouage qu’on peut utiliser ou jeter selon les besoins économiques n’est pas propre à la France. En effet tous les pays cités par le directeur de l’OFII sont gérés depuis des décennies par de « bons pères de familles », tout à fait démocratiques, libéraux et propres sur eux. Remercions donc Didier Leschi pour cet éclaircissement.
    Mais pour mieux comprendre quelles sont ces « mesures », nous proposons ici de prendre un peu de recul historique, à l’échelle des cinquante dernières années.

    C’est pourquoi cette brochure recense l’ensemble des lois migratoires régissant l’entrée et le séjour des étrangers en France mises en place de 1972 à 2023.
    Elle constitue le deuxième volet d’un travail destiné à comprendre la montée d’une société de #surveillance_généralisée, mais sans les oripeaux du #fascisme historique, de façon libérale-autoritaire (1). La première partie, publiée en mai 2023, était consacrée aux lois, #arrêtés et décrets régissants la créations de fichiers informatiques et le travail de la police. Une troisième partie suivra, qui sera une recension de l’inflation technologique qui s’articule avec l’inflation juridique.
    Si le sort des Français et des étrangers est intimement lié, ils subissent un traitement différencié de la part de l’Etat. Nous avons décidé de consacrer une partie spécifique au traitement des étrangers en France pour une raison très pragmatique : la quantité très importante de lois visant spécifiquement l’entrée et le séjour des étrangers en France (d’où l’épaisseur de cette brochure : 128 pages !).

    Pourquoi avons-nous mené un tel travail ? Rappelez-vous l’été 2021 et la mise en place du pass sanitaire. Cette mesure, qui a motivé la création de notre collectif, nous est apparue comme la « goutte de trop ». Il nous a alors paru logique de nous livrer au travail de recension de toutes les gouttes précédentes, afin d’offrir un panorama de l’évolution de la législation et de mettre en perspective historique les mesures sanitaires de 2020-2021. En effet, toute personne qui s’intéresse à la surveillance, au contrôle, à la répression et la limitation de circulation des individus ne peut que constater qu’il est difficile – quasi-impossible – de suivre l’inflation de l’arsenal juridique qui régit les pratiques policières, les fichiers de collecte de données et les lois sur le séjour des étrangers. Dans nos sociétés prétendues « libérales » et « démocratiques », en matière de restriction de libertés et de répression, une loi s’empile sur la précédente, ce qui est annoncé comme un « simple projet » devient souvent rapidement une proposition de loi, puis une réalité juridique… et en route pour la suivante ! Cette brochure se veut donc une mise en perspective historique pour mieux comprendre les lois du présent.
    Précisons que nous ne proposons pas ici d’analyse, ou très peu, mais une simple #chronologie qui permet à chacun et chacune d’avoir accès à ces informations dispersées (2).

    Ruptures
    décembre 2023

    (1) Lire Grégoire Chamayou, La société ingouvernable, La fabrique, 2018.
    (2) Nos analyses sont quant à elles développées dans le journal La nouvelle vague, que nous publions régulièrement depuis décembre 2021. Voir en particulier « Réflexions sur l’autoritarisme et l’extrême-droite » (dans La nouvelle vague n°4).

    https://collectifruptures.wordpress.com/2024/01/01/loi-darmanin-et-avant
    #histoire #lois #dispositions #migrations #asile #réfugiés #séjour #frontières #ressources_pédagogiques #répression #liste

    via @karine4

  • « Le Conseil constitutionnel n’a jamais défendu les droits des étrangers », Danièle Lochak [Gisti]

    Que peut-on attendre de la saisine actuelle du Conseil constitutionnel à propos de la loi immigration ?

    Danièle Lochak : Il y a trois éléments à prendre en compte. D’abord un élément de contexte général : on ne peut pas attendre grand-chose du Conseil constitutionnel lorsqu’il s’agit des droits des étrangers. Historiquement, à quelques nuances et réserves d’interprétation près, il a toujours validé l’ensemble des mesures votées par le législateur et accompagné sans ciller toutes les évolutions restrictives en la matière.

    Ainsi en matière d’enfermement – ce qu’on appelle aujourd’hui la rétention – le Conseil constitutionnel a d’abord dit en 1980 que sa durée devait être brève et placée sous le contrôle du juge judiciaire, garant de la liberté individuelle. Mais la durée maximale de rétention a été progressivement étendue : de sept jours, elle est passée à dix en 1993, puis douze en 1998, puis 32 en 2003, puis 45 jours en 2011, et enfin, 90 jours en 2018 , sans que le Conseil constitutionnel y trouve à redire.

    Il a affirmé que la lutte contre l’immigration irrégulière participait de la sauvegarde de l’ordre public, dont il a fait un objectif à valeur constitutionnelle. On voit mal, dans ces conditions, comment des mesures qui ont pour objectif proclamé de lutter contre l’immigration irrégulière pourraient être arrêtées par le contrôle de constitutionnalité…

    Autre exemple : en 1993, lors de l’examen de la loi Pasqua, le Conseil constitutionnel a affirmé que les étrangers en situation régulière bénéficient du droit de mener une vie familiale normale. Mais une fois ce principe posé, il n’a censuré aucune mesure restreignant le droit au regroupement familial. Ainsi, même lorsqu’il a rappelé des principes et reconnu que les étrangers devaient bénéficier des garanties constitutionnelles, il a toujours trouvé des aménagements qui ont permis de valider les dispositions législatives restrictives.

    Le président du Conseil constitutionnel Laurent Fabius a tancé le gouvernement, et rappelé que l’institution n’était pas « une chambre d’appel des choix du Parlement ». Le Conseil ne va-t-il pas se montrer plus sévère qu’à l’accoutumée ?

    D. L. : En effet, le deuxième élément qui change la donne est le contexte politique, avec un gouvernement qui annonce d’emblée que certaines dispositions sont contraires à la #Constitution et charge le Conseil constitutionnel de « nettoyer » la loi. C’est bien entendu grotesque : en élaborant la loi, les responsables politiques sont censés respecter la Constitution.

    Surtout, le Rassemblement national (#RN) s’est targué d’une « victoire idéologique ». C’est très habile de sa part. En réalité, voilà quarante ans que l’ombre portée du Front national (RN maintenant) pèse sur la politique d’immigration française. Depuis 1983 et l’élection partielle de Dreux où le #FN, allié à la droite, l’a emporté sur la liste de gauche menée par Françoise Gaspard, la droite court après l’extrême droite, et la gauche, de crainte de paraître laxiste, court après la droite sur les questions d’immigration.

    Hormis quelques lois, dont la loi de 1981 adoptée après l’arrivée de la gauche au pouvoir et celle de 1984 sur la carte de résident, ou encore la loi Joxe de 1989, la politique de la gauche n’a été qu’une suite de renoncements, maintenant l’objectif de « maîtrise des flux migratoires » et de lutte contre l’immigration irrégulière. Il n’y a que sur la nationalité qu’elle n’a jamais cédé.

    Cela étant, la revendication de victoire de la part du RN va probablement inciter le Conseil constitutionnel à invalider un plus grand nombre de dispositions de la loi que d’habitude, même si on ignore lesquelles.

    Dans la saisine du Conseil constitutionnel sont invoqués beaucoup de « cavaliers législatifs », des dispositions qui n’ont pas de rapport avec l’objet du texte. Le garant de la constitutionnalité de la loi va-t-il trouver là des arguments faciles pour censurer certaines dispositions ?

    D. L. : Oui, et c’est le troisième élément à prendre en considération dans les pronostics que l’on peut faire. La présence de nombreux cavaliers législatifs va faciliter la tâche du Conseil constitutionnel, car invalider une disposition pour des raisons procédurales est évidemment plus confortable que de se prononcer sur le fond. Le projet initial portait sur l’entrée, le séjour et l’éloignement des étrangers. Or le texte final, « enrichi » d’une multitude d’amendements, est loin de se limiter à ces questions.

    Le Conseil constitutionnel peut très bien estimer que les dispositions sur la #nationalité, pour ne prendre que cet exemple, qui relèvent du Code civil, sont sans rapport avec l’objet du texte, et les invalider. Alors même qu’en 1993, il avait validé le retour à la manifestation de volonté pour acquérir la nationalité française à partir de 16 ans pour les enfants d’étrangers nés en France, mesure phare de la loi Pasqua1.

    Il peut aussi invoquer « l’incompétence négative », qui désigne le fait pour le Parlement de n’avoir pas précisé suffisamment les termes de certaines dispositions et laissé trop de latitude au gouvernement pour les mettre en œuvre, sans compter les dispositions qui sont manifestement inapplicables tellement elles sont mal conçues.

    Mais si les dispositions sont invalidées sur ce fondement, rien n’empêchera leur retour dans un prochain texte puisque le Conseil constitutionnel aura fait une critique sur la forme et ne se sera pas prononcé sur le fond. Et puis il faut être conscient que, même s’il invalide un plus grand nombre de dispositions que d’habitude, il restera encore suffisamment de mesures iniques qui rendront la vie impossible aux étrangers résidant en France, fût-ce en situation régulière et depuis de très longues années.

    Le Conseil constitutionnel a tout de même consacré le principe de fraternité en 2018, et mis fin – au moins partiellement – au #délit_de_solidarité_ qui punit le fait d’aider les exilés dans un but humanitaire.

    D. L. : Oui, c’est un exemple qu’on met souvent en avant. Le « délit de solidarité » – ce sont les militants qui l’ont nommé ainsi, bien sûr – punit l’aide à l’entrée, au séjour et à la circulation des étrangers en situation irrégulière sur le territoire français. A l’époque, les avocats du militant Cédric Herrou avaient posé une question prioritaire de constitutionnalité (#QPC) au Conseil constitutionnel en invoquant le principe de fraternité, qui figure dans la devise républicaine.

    Le Conseil constitutionnel a en effet consacré la valeur constitutionnelle du principe de fraternité, et son corollaire, la liberté d’aider autrui dans un but humanitaire sans considération de la régularité de son séjour. Mais il a restreint la portée de cette liberté en n’y incluant pas l’aide à l’entrée sur le territoire, alors qu’à la frontière franco-italienne, par exemple, l’aide humanitaire est indispensable.

    Vous dressez un constat pessimiste. Cela vaut-il la peine que les associations continuent à contester les politiques migratoires devant les juges ?

    D. L. : Il faut distinguer les modes d’action. La saisine du Conseil constitutionnel après le vote de la loi est le fait de parlementaires et/ou du gouvernement, ou du président de la République.

    Les membres de la « société civile » (associations, avocats, professeurs de droit…) peuvent déposer des contributions extérieures, qu’on appelle aussi « portes étroites » . Celles-ci n’ont aucune valeur officielle, et le Conseil constitutionnel, même s’il les publie désormais sur son site, n’est obligé ni de les lire, ni de répondre aux arguments qui y sont développés.

    Les saisines officielles ont été accompagnées, cette fois, de très nombreuses portes étroites. Le #Gisti, une association de défense des droits des étrangers créée en 1972 et dont j’ai été la présidente entre 1985 et 2000, a décidé de ne pas s’y associer cette fois-ci, alors qu’il lui était arrivé par le passé d’en rédiger.

    Outre que le Gisti ne fait guère confiance au Conseil constitutionnel pour protéger les droits des étrangers, pour les raisons que j’ai rappelées, l’association a estimé que la seule position politiquement défendable était le rejet de la loi dans sa globalité sans se limiter aux dispositions potentiellement inconstitutionnelles. Elle ne souhaitait pas non plus prêter main-forte à la manœuvre du gouvernement visant à instrumentaliser le contrôle de constitutionnalité à des fins de tactique politicienne.

    Cela ne nous empêchera pas, ultérieurement, d’engager des contentieux contre les #décrets_d’application ou de soutenir les étrangers victimes des mesures prises sur le fondement de cette loi.

    Les associations obtiennent-elles plus de résultats devant le Conseil d’Etat et la Cour de Cassation ?

    D. L. : Les recours devant le Conseil d’Etat ont été historiquement la marque du Gisti. Il a obtenu quelques beaux succès qui lui ont valu de laisser son nom à des « grands arrêts de la jurisprudence administrative ». Mais ces succès ne doivent pas être l’arbre qui cache la forêt car, dans l’ensemble, ni le #juge_administratif – le plus sollicité – ni le #juge_judiciaire n’ont empêché la dérive constante du droit des étrangers depuis une quarantaine d’années.

    Ils n’ont du reste pas vraiment cherché à le faire. Les juges sont très sensibles aux idées dominantes et, depuis cinquante ans, la nécessité de maîtriser les flux migratoires en fait partie. Dans l’ensemble, le Conseil d’Etat et la Cour de Cassation (mais le rôle de celle-ci est moindre dans des affaires qui mettent essentiellement en jeu l’administration) ont quand même laissé passer moins de dispositions attentatoires aux droits des étrangers que le Conseil constitutionnel et ont parfois refréné les ardeurs du pouvoir.

    Il est vrai qu’il est plus facile pour le juge administratif d’annuler une décision du gouvernement (un décret d’application, une #circulaire), ou une mesure administrative individuelle que pour le juge constitutionnel d’invalider une loi votée par le parlement.

    Les considérations politiques jouent assurément dans le contentieux administratif – on l’a vu avec l’attitude subtilement équilibrée du Conseil d’Etat face aux dissolutions d’associations ou aux interdictions de manifestations : il a validé la #dissolution du CCIF (Collectif contre l’islamophobie en France) et de la (Coordination contre le racisme et l’islamophobie), mais il a annulé celle des Soulèvements de la Terre.

    Ces considérations jouent de façon plus frontale dans le contentieux constitutionnel, devant une instance qui au demeurant, par sa composition, n’a de juridiction que la fonction et craint d’être accusée de chercher à imposer « un gouvernement des juges » qui fait fi de la souveraineté du peuple incarnée par le Parlement.

    En s’en remettant au Conseil constitutionnel et en lui laissant le soin de corriger les dispositions qu’il n’aurait jamais dû laisser adopter, le gouvernement a fait assurément le jeu de la droite et de l’extrême droite qui vont évidemment crier au gouvernement des juges.

    Quelles seront les solutions pour continuer à mener la bataille une fois la loi adoptée ?

    D. L. : Les mêmes que d’habitude ! Le Conseil constitutionnel n’examine pas la conformité des lois au regard des conventions internationales, estimant que ce contrôle appartient à la Cour de cassation et au Conseil d’Etat. On pourra alors déférer à ce dernier les décrets d’application de la loi.

    Même si ces textes sont conformes aux dispositions législatives qu’ils mettent en œuvre, on pourra tenter de démontrer qu’ils sont en contradiction avec la législation de l’Union européenne, avec des dispositions de la Convention européenne telles qu’elles sont interprétées par la Cour de Strasbourg ou encore de la convention sur les droits de l’enfant.

    Ultérieurement, on pourrait envisager de demander à la Cour européenne des droits de l’homme la condamnation de la France. Mais on ne peut le faire qu’à l’occasion d’une affaire individuelle, après « épuisement » de tous les recours internes. Donc dans très longtemps.

    https://www.alternatives-economiques.fr/daniele-lochak-conseil-constitutionnel-na-jamais-defendu-droi/00109322

    (sauf pour les questions et la mention D.L., le graissage m’est dû)

    #loi_Immigration #xénophobie_d'État #étrangers #droit_du_séjour #lutte_contre_l’immigration_irrégulière #regroupement_familial #carte_de_résident #droit_du_sol #acquisition_de_la_nationalité #rétention #droit_des_étrangers #contentieux_administratif #Conseil_constitutionnel #Conseil_d'État #jurisprudence #jurisprudence_administrative #Cour_de_cassation #CEDH #conventions_internationales #Convention_européenne #convention_sur_les_droits_de_l’enfant

  • Loi sur l’immigration : « Le marchandage portant sur l’aide médicale d’Etat est surréaliste, pour ne pas dire obscène »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/10/loi-sur-l-immigration-le-marchandage-portant-sur-l-aide-medicale-d-etat-est-

    Loi sur l’immigration : « Le marchandage portant sur l’aide médicale d’Etat est surréaliste, pour ne pas dire obscène »
    Tribune Smaïn Laacher Sociologue
    Marie Rose Moro Pédopsychiatre
    La nouvelle loi « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » n’est pas un texte « fasciste » ou « raciste » comme cela a été dit ici et là. Elle est cependant indéniablement restrictive au sens où elle complique, rend aléatoires, voire supprime des droits fondamentaux.Bien entendu, si on la compare avec l’arsenal juridique en matière d’immigration et d’asile d’un certain nombre de pays de l’Union européenne (UE), il ne sera pas difficile de trouver « pire » que la France. C’est la Hongrie qui a construit une clôture de près de 4 mètres de haut à sa frontière avec la Serbie pour s’opposer au passage des migrants dans les Balkans.
    Alors que l’Assemblée nationale votait la loi relative à l’immigration le 19 décembre 2023, les représentants des vingt-sept Etats membres de l’UE parvenaient, le lendemain, à un accord sur le futur pacte migratoire.
    Mais ce qui apparaît à la limite de la caricature de la part de nos politiques et de nos législateurs, c’est le marchandage quasi surréaliste, pour ne pas dire obscène, portant sur l’aide médicale d’Etat (AME). Pourquoi considérer l’AME comme un « cavalier législatif » [un amendement dépourvu de lien, même indirect, avec le texte de loi examiné] ? Pourquoi les enjeux de santé des migrants sont-ils détachés des enjeux de santé liés aux conditions d’existence des fractions les plus précaires des classes populaires ?
    L’Organisation mondiale de la santé affirme que les questions de santé ne se caractérisent pas nécessairement par l’absence de maladie ou d’infirmité. Pour cette institution, la santé représente « l’un des droits fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou sociale ». On peut parler de la « santé des migrants ». Mais si l’on veut être un tant soit peu rigoureux, nous devrions parler d’inégalités dans les domaines de la santé publique et de la santé au travail. Il suffit de prendre un seul exemple souvent cité lors de la pandémie de Covid-19 : celui des « livreurs ».
    De grandes villes comme Paris, en 2021, et Bordeaux, en février 2023, ont mis à la disposition de ces travailleurs ultra-précaires des plates-formes de livraison des lieux d’accompagnement appelés « Maisons des livreurs ». Médecins du monde et la Maison des livreurs à Bordeaux ont alerté sur « les morts brutales, la souffrance physique et psychique des livreurs ».
    Combien sont-ils à perdre la vie au « travail » ? Combien se blessent en chutant de leur moyen de locomotion ? Personne ne le sait. Et pour cause, ce ne sont pas des salariés, mais des « indépendants » non couverts par la branche accidents du travail et maladies professionnelles, qui disparaissent des statistiques. Ils ont généralement moins de 30 ans et sont le plus souvent sans titre de séjour. Des « clandestins » qui livrent députés, élus, hauts fonctionnaires, familles, etc.
    Comment cette inégalité de soins se traduit-elle concrètement ? De la manière suivante : si les livreurs ne se rendent pas chez un médecin, c’est parce qu’ils passent parfois quinze heures par jour sur leur vélo, six jours sur sept, par tous les temps. Se rendre chez le médecin parce qu’on est saisi de troubles musculo-squelettiques ou même d’une pathologie infectieuse, c’est ne plus rouler, et donc perdre une somme vitale pour survivre. Ce constat est établi par tous les professionnels de santé.Les Républicains et le Rassemblement national ont exigé d’une même voix la suppression de l’AME pour les sans-papiers. Quelle hypocrisie ! La droite estime que l’AME est trop généreuse par rapport aux dispositifs en vigueur dans l’UE et qu’elle constitue, argument central, un « appel d’air » pour tous les immigrés de la terre. Cette notion d’appel d’air est, n’ayons pas peur des mots, une escroquerie intellectuelle. Les enquêtes statistiques de l’Organisation de coopération et de développement économiques montrent que, plusieurs années après leur arrivée, de nombreux immigrés (entre 30 % et 50 %) sont partis ailleurs. Dans le Calaisis [Pas-de-Calais et Nord], les étrangers en situation irrégulière, dans leur écrasante majorité, n’ont qu’un seul désir : partir au Royaume-Uni.
    L’appel d’air n’est donc pas un fait avéré. Ce qui est démontré, c’est que l’aide médicale d’urgence, qui remplacera probablement l’AME, lorsqu’elle sera votée, provoquera inexorablement « une augmentation du recours aux soins hospitaliers urgents, plus complexes et plus coûteux ». Ce sont des professionnels, dotés d’une solide et longue expérience, qui l’affirment dans un texte commun signé notamment par de nombreuses sociétés savantes médicales et par le syndicat SAMU-Urgences de France.
    Dans le total des dépenses de l’AME, l’hôpital tend à diminuer au profit de la médecine de ville : il représentait environ 62 % des dépenses en 2020, contre environ 69 % en 2010. Dans ces dépenses hospitalières, la psychiatrie et les soins de suite représentent respectivement 14 % et 12 %, selon un rapport de l’ancien ministre Claude Evin et du haut fonctionnaire Patrick Stefanini. Il n’est pas difficile de percevoir l’enjeu fondamental : il y a un accès très inégal à la médecine non seulement d’urgence, mais dans le soin portant sur les conséquences somatiques et psychiques de ce que les migrants ont vécu dans leur pays d’origine et, particulièrement pour les femmes et les enfants, sur le chemin de l’exil.
    Nous pensons qu’il est infondé de réduire les migrants à des êtres « vulnérables » en quête de soins. Cette vision du migrant vulnérable n’a rien à voir avec l’intégration. Il ne s’agit pas, socialement et politiquement, de la question de la fragilité individuelle des migrants, mais, bien plus largement et fondamentalement, de la capacité d’une société à insérer socialement les plus fragilisés à cause de ce qu’ils ont vécu, à cause de ce qu’ils vivent. Autrement dit, il s’agit de les aider à construire, individuellement et collectivement, du lien social. Si l’on privilégie la faiblesse personnelle, alors le danger est grand de faire porter à l’individu seul la défaillance de nos systèmes d’intégration sociale.

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