person:voltaire

  • Citer un néo-nazi américain en prétendant que c’est du Voltaire, faut quand même pas être bien doué…
    https://en.wikipedia.org/wiki/Kevin_Alfred_Strom

    The statement “To learn who rules over you, simply find out who you are not allowed to criticize” is based on Strom’s writing in his program, “All America Must Know the Terror That is Upon Us” (1993) in which he writes: “To determine the true rulers of any society, all you must do is ask yourself this question: Who is it that I am not permitted to criticize?” However, on various websites, the misattributed quotation is often misattributed to Voltaire, the French writer, historian and philosopher during the Age of Enlightenment.

    Je crois que c’est Voltaire, d’ailleurs, qui a dit qu’il fallait se méfier des citations trouvées sur Internet (on doit pouvoir trouver la vidéo où il dit ça sur Youtube).

  • Voltairine de Cleyre: American Radical | JSTOR Daily
    https://daily.jstor.org/voltairine-de-cleyre-american-radical

    Born in Michigan in 1866, #Voltairine_de_Cleyre was named after Voltaire. By the time she died forty-five years later, she had lived up to the free-thinking and trouble-making reputation of her namesake. The famous activist Emma Goldman called de Cleyre “the most gifted and brilliant anarchist woman America ever produced.”

    #anarchisme

  • A quoi sert Kamel Daoud ? – Salimsellami’s Blog
    https://salimsellami.wordpress.com/2018/12/12/a-quoi-sert-kamel-daoud

    Kamel Daoud. D. R.                                                                                                                                                                                                                                                               
    Pour mes lectures estivales, je me suis fait violence, en glissant dans mes bagages les 464 pages de chroniques (2010-2016) publiées par Kamel Daoud chez Actes Sud. Je dois avouer ne pas avoir dépensé le moindre kopeck pour accéder aux écrits de cet ancien islamiste qui, quand cela est devenu lucratif, a découvert que « Dieu est athée ». Pas question donc de donner un centime de droits d’auteur à cette nouvelle, icône heureuse de nourrir l’orientalisme des néoconservateurs « atlantistes ». Un orientalisme qui est l’une des misères de l’histoire du monde arabe, un travers si bien dénoncé par notre merveilleux Edward Saïd.J’ouvre ce livre, juste après avoir lu le dernier chef-d’œuvre de Jean Ziegler : Le Capitalisme expliqué à ma petite-fille, publié aux éditions du Seuil. Le hasard, pour une fois, a bien fait les choses : lire le manuel de la générosité et de l’altruisme juste avant le grand traité de l’égoïsme met les idées à leur vraie place. Entre les deux livres, il y a un fossé, une tranchée genre 14/18. Daoud dangereux, peu fiable et néo-prosélyte comme tous les repentis, fait la promotion du capital et du libéralisme qui est son corolaire. Ziegler, lucide et généreux, dénonce ce monde de la finance sans lois et ses mortels ravages sur l’humanité. Deux mondes différents, et même opposés. Vieux baroudeur entre les destins de l’humanité, Jean Ziegler a vu trop d’hommes mourir, de faim et de guerre, pour un même effet, savoir que le libéralisme c’est la mort des pauvres, des peuples « en trop ». De ceux qui gênent. Kamel Daoud, à l’opposé, regrette l’absence d’un « capitalisme fort, de patronats puissants et créateurs de plus-values ».Une drôle de sensation m’habite, celle d’un barreur dans la nuit qui sait qu’il va croiser un iceberg. Daoud se dit Algérien, un peu comme moi, mais je ne retrouve en lui rien de notre bien commun, cet homme est de glace, froid et transparent. Du coup, je me sens Algérien comme Jean Ziegler. Alors que Daoud, tenancier de sa petite boutique « d’algérianité », vante une camelote de qualité « made in China » pour séduire les colons jamais guéris de Saint Germain des prés. C’est l’histoire dans l’autre sens, jadis c’est le « blanc » séduisait l’indigène avec de la verroterie. Au risque de perdre ses lecteurs, qui le prennent pour ce qu’il n’est pas, Daoud doit continuer de se poser en « Algérien », c’est son filon en or. Pensez donc, un Algérien musulman et athée, Arabe, qui déteste les Arabes et qui parle de tout cela « sans langue de bois », Netanyahou et Le Pen auraient rêvé de l’inventer. Pourtant, il est bel et bien là. Alors qu’il n’est qu’un ersatz de Bernard-Henri Lévy, une tête de gondole pour vendre des livres que personne ne lit, c’est-à-dire beaucoup de bruit pour rien, le vent de la barbe à papa. Lectures faites, je persiste et comprends mieux pourquoi Jean Ziegler n’est jamais promu par les médias qui se proclament « grands ».Invité à la télévision, Kamel Daoud est traité comme un saint, le tenant de la nouvelle lumière et du savoir avancé. Aux yeux des gogos, ce réactionnaire est « moderne » et « révolutionnaire ». C’est donc sans contradicteurs qu’il déroule sa pelote de lieux communs, l’image du bon nègre Banania qu’attendent les « néocons ». Récemment, je l’ai aperçu sur une chaîne de TV algérienne, avec toujours la même posture du penseur couché, criant : « Je sais me défendre. » Cependant, on ne sait contre quoi il se défend.Questionné sur l’invitation de Daoud, le nouveau commandeur, à l’ambassade de France lors de son passage en Algérie, E. Macron a répondu qu’il « veut entendre tout le monde ». Le Président français considère-t-il que Daoud c’est tout le monde ? Ou tous ceux qui résident dans le jardin des puissants ?Pour revenir à ce qui n’est pas de la littérature, disons que, dans son livre, Daoud nous invite à découvrir, ou redécouvrir, la crème de ses près de 2 000 textes écrits entre 2010 et 2016. Que seraient, nous affirme-t-il, les positions « des journaux et des élites contestataires ». Cette position est lacunaire puisque ce Don Quichotte algérien ne nous dit jamais ce qu’il conteste. Il n’a pas besoin d’exprimer de s’attacher aux détails du vrai : il est l’élite à lui seul, et doit être cru sur parole. Mais, patatras Daoud, par le contenu de son opus, atteint un objectif imprévu. Preuve à l’appui – l’existence de son livre –, il démontre que la censure qu’il prétend combattre n’existe pas en Algérie. En effet, comment publier impunément (et c’est tant mieux) autant d’ignominies sur un peuple et un pays « qui manquaient de la liberté de dire, de lire ou de regarder » ? Sacré Daoud, ce Daoud sacré.Si sa plume se fluidifie miraculeusement contre l’« Arabe et sa langue », le « musulman », et l’« Algérie », cela ne l’empêche pas de célébrer les « Printemps » alors qu’eux aussi sont censés être arabes. Il glorifie les révoltes sans citer un seul révolté. En réalité, il tente de nous faire croire que les révolutions se font sans révolutionnaires et que les chaos sont l’annonce des aubes nouvelles. Outre du Bernard-Henri Lévy ou du Debray, Daoud ne lit visiblement rien d’autre. Sans doute par crainte d’être chahuté par les mauvaises ondes de la vérité. Par exemple, il n’a pas pris connaissance de « la stratégie du choc », brillamment décrite par Naomie Klein, et il regrette sans rire et amèrement que l’anarchie, la destruction et la guerre civile n’aient pas déjà emporté l’Algérie.Chercheur, créateur de concepts, ce grand penseur nous indique avoir découvert que l’Occident a pour malheur d’avoir voulu incarner la Morale universelle. Sans doute voulait-il parler de l’extermination des Amérindiens, de la traite négrière, des colonisations, de l’utilisation de la bombe atomique sur des populations civiles à Hiroshima et Nagasaki ou encore du nazisme et du fascisme né en Occident ? Sacré Daoud.Et même lorsqu’il tente de dénoncer le traitement infligé aux migrants en Pologne, comme par instinct, sa plume fait une arabesque et va retrouver son sujet fétiche : l’Algérie. On peut en déduire que si les migrants sont mal traités en Pologne, c’est à cause de l’Algérie. Il en est de même d’une chronique sur la Roumanie puisque Daoud est universel. Pour lui, tous les chemins du malheur mènent à l’Algérie.Aux intellectuels et universitaires qui se sont opposés à ses positions (le mot idées serait flatteur), il répond, en se réfugiant dans un vocabulaire creux comme un tambour, que « c’est au nom de l’anticolonialisme et de l’inquisition qu’on lui interdit de penser ». Après sa tribune délirante sur des viols de Cologne qui n’ont jamais existé, dans laquelle il présentait l’Arabe comme une sorte d’être génétiquement violeur, les intellectuels qui ont protesté lui auraient organisé un procès stalinien. Il annonce même à grands fracas qu’il va quitter la scène, et prendre la porte. Ce qui serait une bonne idée, s’il la laisse ouverte, sera nous faire de l’air. Mais rassurez-vous, il y a le goût d’être sur les planches et celui des droits d’auteur : il revient par la fenêtre. Recyclant les clichés les plus éculés – mais toujours orientalistes –, il déverse incessamment une haine inégalée du « musulman ». Elle a un sens, son engagement dans la guerre du « choc des civilisations » le monstre agité par les forces les plus réactionnaires, celui qui marche main dans la main avec « le grand remplacement ».Il suffit de lire au hasard, avec rage et courage, cette phrase de Daoud : « Les derniers colons de ce pays plantaient plus d’arbres que ceux qui l’ont libéré… » Oubliant en passant la nature de celui qui tenait la pioche. Il va jusqu’à regretter l’attitude consensuelle montrée par Jean-Pierre Chevènement lors de son passage à Oran en septembre 2010, et plaide, lui Daoud, la cause des Français nostalgiques de « l’Algérie française ». Aidé de son cerveau servile, ce Zemmour algérien affirme, contre toute l’Histoire, que « c’est la France qui a décolonisé la terre ». Et le peuple algérien n’est pour rien dans la lutte pour une indépendance tombée du ciel colonial, une insulte à la vérité, à la mémoire, à l’histoire, aux universitaires, aux intellectuels. Ce concept de la « décolonisation » porté aussi par Daoud Kamel est, en fait, une ultime manœuvre coloniale. Avec Kamel Daoud, nous sommes dans le colonialisme d’outre-tombe. Son projet est clair, son flot de vomi, qui a pour but de flétrir tout ce qui est algérien, doit nous donner à croire que « l’indigène ne peut se libérer, on l’a donc décolonisé ».Moment de détente, ou de saine curiosité satisfaite, moi qui croyais pouvoir accéder à des confidences sur son passé « islamiste », j’ai été déçu par ce livre. Aucun signe, aucun mot, aucune confidence sur ses engagements auprès des forces violentes, qu’il qualifie lui-même de terroristes. Cette amnésie est confirmée, comme le démontre le livre Contre-Enquête (Editions Frantz-Fanon) d’Ahmed Ben Saada : Kamel Daoud est passé à autre chose, Allah est oublié.Jacques-Marie Bourget, journaliste français, et expert de notre monde, le qualifie de « grenouille autopsiée ». Pour Jacques-Marie Bourget, Daoud est « le supplétif des pires néoconservateurs français », « l’indigène alibi ». Et le grand et vrai écrivain Rachid Boudjedra a cloué le cercueil en le mettant à nu.Pour bien revendiquer son appartenance aux camps des civilisateurs, Daoud joint donc sa voix aux tenants du choc des civilisations, depuis en fait, depuis Mahomet et même avant, le seul but du musulman est de vaincre toute la planète. Ainsi, pour lui, pas de différence entre le sacrifice du militant anticolonial Ali La Pointe et le tueur toulousain Mohamed Merah. Pour bien nourrir les phantasmes et la haine, ce néo-harki de la pensée apporte sa contribution : il stigmatise les habitants des quartiers populaires, en s’interrogeant sur « les milliers de Mohamed Merah » qui sont « partout », « dans une salle de bains, l’arme au poing », ou quelque part, « debout au bas de l’immeuble ». Peut-être Daoud n’a-t-il pas lu les confidences d’Albert Chennouf-Meyer (Abel, mon fils, ma bataille. Ed. Du Moment, 2013), père d’Abel, l’une des victimes des tueries de Toulouse ? Et, suivant la doctrine et le mode de penser de ce nouveau philosophe, il est temps de nous poser, nous aussi, une question : « Combien de Daoud sévissent dans les rédactions des journaux algériens ? »Versant dans le tribalisme le plus rétrograde, il appelle de tous ses vœux, dans chaque région, à ne parler autrement qu’en dialecte local. Pour Kamel Daoud, la langue s’écrit « avec l’âme ». Dans une reptation de serpent, il veut voler ainsi à la rescousse de groupes qui prétendent dynamiter l’Algérie. Comme ces mouvements croupions et d’extrême droite qui prétendent défendre (sans doute mieux que Kateb Yacine) la langue et la culture berbères ! Puisqu’il ne lit que Debray et Bernard-Henri Lévy, il n’a pas ouvert le magnifique bouquin de Patricia M.-E. Lorcin Les Identités coloniales… une lecture capable de laver la tête de KD Kamel Daoud. Au-dedans. Le titre que mérite cette « somme » de Daoud est simple : « Chroniques de l’horreur. »Je n’ai trouvé qu’un point sur lequel on puisse gloser sur du Daoud, c’est quand il écrit : « On a détruit les libertés et les libérations acquises après le départ des colons. » Il est effectivement exact qu’un peuple martyrisé, abandonné dans le concert des nations, trop seul après sa révolution ait commis des erreurs et connu des errances. Il est effectivement exact que l’Algérie se cherche toujours. Mais oublier une guerre civile provoquée par les anciens Frères idéologiques de Daoud, ce n’est pas omettre un détail. Mais ce « lissage » permanent de l’histoire, sa recréation sont le carburant que permet à Kamel Daoud de poursuivre ses livres et chroniques de flagellations des « Algériens », de l’« islam », de l’« Arabe », du « régime ». Sans cette interminable mise à mort, le livre n’aurait que l’épaisseur d’un album à colorier.Il est drôle, piquant, amusant de retrouver soudain notre Kamel Daoud quand il revient à sa source d’inspiration première, le wahhabisme. Tout cela sur le mode mondain, chic-français, convenable. Notre immense écrivain, notre Hugo à nous, a découvert le Qatar et ses vertus, vertes comme le dollar. Pour Daoud, le Qatar n’est pas ce qu’il est, c’est-à-dire un pays sans Constitution, sans lois, corrupteur et esclavagiste ayant naguère condamné un poète à mort au prétexte qu’il avait souhaité la venue d’un « printemps » à Doha. Mais le Qatar, versus Bernard-Henri Lévy, n’est-il pas le prototype d’un islam moderne, compatible avec la démocratie et il distribue des prix littéraire, organise de généreux colloques ? Donc, pour Kamel Daoud, la monarchie du Qatar, c’est top. Je lis : « Le Qatar a réussi à exporter l’image d’un pays où l’on peut dire des choses, où l’on assume les relations internationales, même avec Israël, sans hypocrisie, où la liberté de culte n’est pas qu’une chasse aux casse-croûte et où les droits de la femme sont les plus respectés dans cette région du monde, la révolution Al-Jazeera a fini par ‘’enfoncer’’ encore plus le reste du monde ‘’arabe’’, en en soulignant, par contraste, le calendrier moyenâgeux. » Ce propos est outrancier dans un pays, je le répète, où le droit n’existe pas, sauf la Charia que l’on impose jusque dans le lycée, pourtant baptisé… Voltaire !Quel crédit accorder à ce faussaire erratique capable de célébrer Israël, tout en qualifiant cet Etat de « raciste » et « sans frontières ». Dans sa posture de penseur couché, il ne veut pas voir le droit international et islamise la cause palestinienne. Il l’arabise, l’islamise à sa façon, et n’irait pas jusqu’à lire les rapports de Goldstone et de Richard Falk ou tout simplement les livres de Shlomo Sand, Ilan Pappé et ceux du courant israélien des « Nouveaux historiens ». Pour Daoud, le summum de l’injustice, celle faite aux Palestiniens n’existe pas puisqu’il est impossible d’être « injuste » avec des « Arabes, des musulmans ». Peut-être, afin d’adoucir son regard, et rien que pour Kamel Daoud, l’Algérie devrait organiser un ghetto type « Gaza » ?Sans aucune honte, l’effroyable auteur bas de plafond ose écrire : « Le mort palestinien sera un homme tué lorsqu’il ne sera pas un barbu mort ou un Arabe bombardé. » Un passeport pour le crime et bientôt le génocide. Et ce n’est pas parce que dans sa bande Daoud n’est pas seul que l’effet de groupe constitue une excuse. Que valent au poids des piges, des cachets et des droits d’auteur, les plumitifs que l’on découvre à marée basse, au plus bas de l’humanité, rien d’autre que de la haine. Dans ma culture berbère universaliste (et non tribale), il existe un mot pour qualifier ce nuisible : azrem, le serpent                                        
        
    Par Boualem Snaoui                                                            https://www.algeriemondeinfos.com

  • Bonjour,

    Le 10 décembre 1948 était signée la Déclaration Universelle des Droits Humains, au lendemain d’une guerre qui avait fait sombrer l’humanité dans la pire des abjections, industrialisant le racisme et l’antisémitisme, organisant des États entiers autour de la haine de l’autre.

    Un comité, présidé par Eleanor Roosevelt, avait préparé un texte, largement influencé par René Cassin et son secrétaire Stéphane Hessel. La signature du texte allait enclencher une dynamique juridique fondamentale, qui a par la suite été complétée par les deux Pactes (sur les droits civils et politiques, et sur les droits économiques et sociaux), et par la création d’un tribunal pénal international.

    Comme tout document juridique comportant des valeurs fondamentales, la DUDH pose des bases qui évoluent ensuite en fonction des situations. Aujourd’hui, compléter ces documents pour prendre en compte l’existence de l’Internet et la crise climatique semble nécessaire, même si la situation mondiale ne s’y prête guère.

    Les valeurs portées par la DUDH, prenant la suite et élargissant celles de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de la Révolution française gardent une actualité majeure. L’article premier indique « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits ». La portée du terme "dignité" mérite d’être pleinement réfléchie dans la situation actuelle, n’est-ce pas ?

    C&F éditions a décidé de fêter "dignement" cet anniversaire en publiant deux livres qui se situent dans le cadre de réflexion des Droits humains [1] :

    – « Révolution Paine : Thomas Paine penseur et défenseur des droits humains » revient sur la genèse et la défense de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
    https://cfeditions.com/paine

    Tom Paine est un personnage fascinant, comme le rappelle la courte biographie rédigée par Nicolas Taffin pour le livre et la longue présentation de Peter Linebaugh, historien spécialiste des communs. Le livre reprend les deux ouvrages écrits par Paine pour défendre la Révolution française et son texte juridique majeur. Brillant polémiste, Tom Paine, qui fut également député de l’Assemblée nationale, fait le lien entre l’indépendance des États-Unis à laquelle il a largement contribué et la Révolution française qu’il est venu soutenir.
    (Pour mémoire, ce livre s’inscrit dans un des thèmes de l’agrégation d’histoire de cette année et de l’an prochain...)

    – « Cyberstructure : L’internet, un espace politique », par Stéphane Bortzmeyer montre la manière dont les droits humains sont impactés par des décisions en apparence technique et de programmation informatique.
    https://cfeditions.com/cyberstructure

    Après une description rigoureuse, mais accessible, qui fera le bonheur des étudiant·e·s et des personnes intéressées à comprendre les enjeux politiques autant que techniques de l’Internet, Stéphane Bortzmeyer s’étend sur les relations entre l’architecture d’Internet et les Droits humains. Membre du groupe de travail sur l’Internet et les Droits humains de l’IETF (Internet, Engineering Task Force), il développe et rend accessibles les réflexions de ce groupe.

    Les Droits humains forment un socle essentiel à la vie en société, et un outil pour développer une culture de Paix. Avec ces deux livres, nous essayons de garder le lien historique entre la naissance de ce concept et son application à l’architecture de l’Internet.

    Bonne lecture,

    Hervé Le Crosnier

    PS : Pour fêter dignement l’anniversaire de la signature de la DUDH, nous invitons les parisien·ne·s à venir rencontrer Stéphane Bortzmeyer
    Lundi 10 décembre, de 18h à 20h,
    Librairie A Livr’ouvert
    171 bd Voltaire, 75011 Paris.

    [1] Nous avons choisi l’expression "Droits humains" pour traduire le terme officiel de la "Universal Declaration of Human Rights" (et non "Rights of Man", comme fut traduite en anglais la Déclaration de 1789). Cela nous semble mieux prendre en compte tout le genre humain, sans avoir besoin d’une capitale à Homme pour distinguer l’individu "abstrait" représentant tous les humain·e·s. En revanche, nous conservons évidemment l’écriture d’époque pour la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen.

    #DUDH #C&F_éditions #Shameless_autopromo

  • Au tribunal de Paris : de la prison en veux-tu en voilà pour les « gilets jaunes » / Mediapart

    On attendait des « casseurs », des vrais de vrais. Les juges ont découvert des ouvriers, des techniciens, des artisans, des jeunes venus à Paris, souvent pour leur première manifestation....

    #giletsjaunes #gilets_jaunes #casseurs #GJ #répression #justice #police #paris

    Au tribunal de Paris : de la prison en veux-tu en voilà pour les « gilets jaunes » 4 DÉCEMBRE 2018 PAR RACHIDA EL AZZOUZI ET FRANÇOIS BONNE

    Après les affrontements de samedi, 70 personnes ont été jugées en comparution immédiate, lundi, au tribunal de Paris. On attendait des « casseurs », des vrais de vrais. Les juges ont découvert des ouvriers, des techniciens, des artisans, des jeunes venus à Paris, souvent pour leur première manifestation et emportés par les vagues de violence. Les peines de prison – ferme ou avec sursis – sont tombées comme à Gravelotte avec des procureurs décidés à en découdre.

    On allait découvrir les « casseurs », les « pillards », les « factieux » et les « séditieux » ; tous ceux qui ont mis à sac la capitale, samedi 1er décembre, allant même jusqu’à saccager l’Arc de triomphe et offenser la République en éteignant la flamme du soldat inconnu. Les juges du tribunal correctionnel de Paris n’ont pas vu de tels individus, lundi, lors des premières audiences de comparutions immédiates, cette procédure qui permet de juger au plus vite les prévenus.

    Pas de « vrais » casseurs donc, ce lundi, mais un peuple d’ouvriers, d’artisans, de techniciens, d’intérimaires montés à Paris de toute la France pour crier leur colère. « Bah, les vrais casseurs, ils ne se font jamais pincer ! », notait un avocat, tandis qu’un magistrat assurait que des « dossiers lourds » viendraient à l’audience mercredi.

    Soixante-dix personnes ont comparu lundi lors d’une mobilisation exceptionnelle du tribunal : cinq salles d’audience. Et l’exercice devait se poursuivre ces mardi et mercredi. Le ministère de la justice a promis « une réponse pénale ferme », suivant les consignes d’Emmanuel Macron. La plupart des manifestants sont poursuivis au titre de l’article 222-14-2 du code pénal : « Participation à un groupement formé en vue de la préparation de violences contre les personnes et de dégradations de biens. » Né et appliqué pour la première fois en 2010 sous Sarkozy pour juguler la violence dans les stades de football, l’article 222-14-2 avait été dénoncé comme le moyen légal de criminaliser les manifestations.
    Plus rares sont ceux qui se retrouvent inculpés de port d’armes, rébellion, violence contre personnes dépositaires de l’autorité publique ou destruction et dégradations de biens. Mediapart a suivi lundi ces procès dans deux salles d’audience. Voici les portraits des manifestants poursuivis et presque toujours condamnés.

    Ryad, 41 ans, artisan, venu de Toulon (Var)

    Ryad n’aura pas eu le temps de manifester et pas même celui d’enfiler son gilet jaune. À 41 ans, cet artisan du bâtiment, ancien engagé dans la marine, ayant fait la guerre du Kosovo, décrit ses fins de mois difficiles, ses « revenus aléatoires » et la micro-entreprise de son père avec qui il travaille. Oui, il voulait manifester contre « les taxes » et est monté à Paris pour le premier défilé de sa vie.

    Dans la nuit de vendredi à samedi, il dort chez un cousin à Franconville (Val-d’Oise). Le matin, les deux hommes tentent de prendre le RER, qui ne marche pas ce jour-là (« Cela arrive souvent sur cette ligne », note la présidente). Ils se rendent en voiture à Paris et se garent vers la place des Ternes, non loin de l’avenue de Wagram. Une dizaine de policiers en civil portant des gilets jaunes les interpellent à peine sortis de voiture. Fouille du coffre : dans un sac, deux masques de ski, un casque de moto, des gants, des genouillères, un plastron… et un petit marteau.

    « Le marteau a toujours traîné dans le coffre de mon ami qui transporte régulièrement des outils pour son travail. Pour le reste, j’avais apporté ma tenue de moto-cross pour me protéger. C’est la première fois que je manifeste, j’ai vu les violences à la télé. J’avais peur, sincèrement, et je voulais me protéger si je me retrouvais coincé dans des affrontements. En plus, j’attends un enfant », explique-t-il.

    Pour la procureure, aucun doute : « Monsieur est venu pour en découdre et s’était équipé pour cela. » Elle demande six mois de prison avec sursis et une peine d’interdiction de séjour à Paris. Jugement : quatre mois de prison avec sursis, un an d’interdiction de Paris. « Je me suis trouvé au mauvais endroit, au mauvais moment. C’est la première et dernière fois que je manifeste », note Ryad.

    Steven, 24 ans, maçon-couvreur, venu de la Nièvre

    Steven travaille dans la petite entreprise de son père. 1 170 euros par mois, en CDD. « Une embauche, avec les taxes et tout, ça coûte cher », note-t-il, ajoutant qu’avec les crédits à la consommation et les loyers, il est en « difficulté financière ».

    Ce samedi, il est interpellé vers 20 h 45 faubourg Saint-Honoré. Non loin de là, le magasin Decathlon a été dévasté peu avant. « Des vélos, des trottinettes, du matériel traînaient partout dans la rue », raconte Steven. Et le voilà qui ramasse un casque de vélo dans le caniveau et se le met sur la tête. « Je l’ai pris pour me protéger. Ça partait de partout, des lacrymogènes, des grenades, des pavés, ça s’affrontait dans tous les sens », dit-il.

    Pourquoi n’être pas parti ? « Des batailles, il y en avait partout ! À ce point là, je n’aurais jamais pensé. J’étais coincé », répond-il. Vol caractérisé et participation à l’émeute, résume la procureure, qui demande trois mois de prison avec sursis. Jugement : trois mois de prison avec sursis.

    Jérémy, Billy, Geoffroy, Maxime et Frédéric, ouvriers et techniciens, venus de l’Essonne

    Voilà cinq copains et collègues de boulot. La plupart travaillent pour le grand groupe Safran, dans l’Essonne. Ils ont entre 27 et 35 ans, sont ouvrier-tourneur, soudeur, opérateur sur commandes numériques, cariste, inspecteur qualité. Quatre d’entre eux travaillent en 3 × 8 et les salaires tournent entre 1 300 et 2 500 euros par mois. Des loyers de 600 à 1 000 euros, des crédits pour payer la voiture, des pensions alimentaires parfois, et des parents ou des proches qu’il faut parfois aider : là encore, les fins de mois sont serrées.

    Pour eux, la manifestation n’aura pas lieu. Ce samedi matin, vers 10 h 30, ils garent leur voiture avenue des Ternes. L’un d’eux prend le soin de payer le stationnement. Est-ce le temps d’aller au parcmètre ? Des policiers leur tombent dessus. Fouille : des gants, des masques, quelques boîtes d’œufs, du liquide physiologique, des lunettes, des pétards (considérés comme « produit explosif et incendiaire »).

    « Ils avaient dit qu’on pouvait manifester sur les Champs, avec filtrage. On y allait pacifiquement. Bon, ben en fait, c’était interdit puisqu’on a été arrêtés en sortant de la voiture… », note Maxime. Peu ou prou, tous avancent les mêmes explications : il fallait se protéger vu les risques de violences. « Samedi dernier, j’avais déjà manifesté et j’ai été salement gazé, j’ai vu des personnes qui souffraient, raconte Geoffroy. J’ai acheté à Castorama une trentaine de masques légers, en tissu, pour moi et pour pouvoir les donner à d’autres manifestants si besoin. Et le liquide physiologique, c’est pareil : la semaine dernière, on m’en a donné et cela m’avait soulagé. »

    Pour Billy, ce devait être sa première manifestation (sa « première grève », dit-il). Lui aussi a un masque : « Je suis pas là pour mettre en danger ma santé. J’ai lu qu’il y avait du cyanure dans ces gaz, c’est dangereux tout de même », croit-il savoir. « Et les pétards, ce n’est pas dangereux ? », interroge la présidente. « C’est des petits pétards, comme pour le 14 Juillet, c’était pour mettre un peu d’ambiance, c’est pas des pétards genre à arracher les mains… », se défend-il. Ils ont été achetés au magasin « À la magie de Corbeil », et sont seulement « déconseillés » aux enfants de moins de 12 ans.

    « Je suis pacifiste, j’ai un boulot en or et trois gosses, vous croyez que je veux tout gâcher avec des conneries ? », insiste Frédéric. Des produits explosifs, insiste la procureure pour qui les cinq hommes voulaient en découdre, avaient le matériel pour cela et avaient choisi un endroit où les affrontements duraient déjà depuis deux heures… « Non, on manifeste là où il y a des gens, je ne vais pas aller où il n’y a personne ! », insiste Billy. Mais la procureure ne veut rien entendre qui pointe « la dangerosité manifeste des pétards » et la préparation méticuleuse. Elle demande des peines de trois mois de prison avec sursis à six mois ferme (pour ceux qui ont les pétards).

    Jugement : deux peines de quatre mois de prison avec sursis, deux peines de huit mois de prison avec sursis, une peine de trois mois de prison ferme (l’un des hommes était déjà sous le coup d’une légère condamnation avec sursis, qui est ainsi révoqué). Tous sont interdits de séjour à Paris pendant un an. L’homme condamné à la prison ferme s’écroule en larmes.

    « Si vous le condamnez, alors il faut condamner tous les manifestants »

    Florian, 37 ans, forgeron, venu des Ardennes

    Florian est un gros costaud, il travaille dans une entreprise de forge de 120 ouvriers, a trois enfants à charge, gagne 1 500 euros par mois, sa compagne est au chômage. « Quand on a des enfants, il faut se stabiliser », dit celui qui a visité l’Amérique latine et l’Afrique en sac à dos, vivant de petits boulots.

    Ce samedi, le voilà interpellé vers 17 heures, près des grilles du jardin des Tuileries. Dans son sac, des billes de peinture, un masque. Le procès-verbal d’interpellation signale qu’il a été vu jetant un morceau de bitume sur les forces de l’ordre. Il nie, assure même qu’il a rangé pavés et morceaux de goudron au fond d’une grosse poubelle et a prévenu la police, « parce que ça chauffait trop ». Florian demande à ne pas être jugé en comparution immédiate. Demande acceptée : il sera jugé en procédure normale au mois de janvier prochain. « Je serai là, dit-il au juge, mais sinon, je suis pas près de revenir à Paris ! »

    Florian, 21 ans, mécanicien, venu des Yvelines

    C’est sa première manifestation. Florian est venu avec un ami et devait rejoindre son père, ouvrier ajusteur, dans un autre endroit du cortège. Il est arrêté à 20 h 50, boulevard Malesherbes. Le P.-V. d’interpellation le décrit cagoulé, avec gants de motos, un masque, en train de jeter une barrière au milieu du boulevard, dans un groupe d’une quarantaine de casseurs.

    Le jeune homme nie énergiquement. Pas de gants de motos, mais de simples gants Nike, un masque donné par son père « qui avait été gazé la semaine dernière et était allé en acheter chez Leroy Merlin », et, non, il n’avait pas tiré sa capuche sur la tête et pas plus jeté des barrières. « Je venais pas pour mettre le bazar, je marchais avec mon ami et un groupe a couru sur le boulevard et s’est rapproché de nous, c’est tout. » Rien dans le dossier, assure son avocat : « Si vous le condamnez, alors il faut condamner tous les manifestants. » La procureure demande six mois de prison avec sursis. Jugement : relaxe.

    Alexandre, 36 ans, électricien, venu de l’Eure

    Alexandre a choisi ce samedi un des rares endroits calmes dans Paris : la place de la Bastille. Des gens ont pu manifester sans affrontements déchaînés en cet endroit. Cela ne l’empêche pas d’être interpellé vers 16 heures. La police trouve dans son sac un masque décrit comme de type NRBC. Un masque qui serait considéré comme une « arme de guerre ».

    « C’est un gilet jaune qui me l’a donné, je l’ai mis dans le sac au cas où et ne l’ai d’ailleurs jamais porté », dit Alexandre. « Mais comment voulez-vous que je sache que c’est une arme de guerre ? », insiste-t-il. La procureure demande six mois de prison ferme et un an d’interdiction de Paris. Jugement : huit mois de prison avec sursis et un an d’interdiction de séjour à Paris.

    Benoît, 34 ans, cariste, venu du Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis)

    Benoît est devant le tribunal le visage éraflé, le nez cassé, un œil tuméfié. De cela, les juges ne disent mot. L’homme a été arrêté samedi à 17 h 40, rue du Havre, à l’issue d’une charge des CRS. Benoît dit s’être alors jeté par terre et mis en boule : pas suffisant pour le protéger des coups. Mais cela n’intéresse pas le tribunal qui prend seulement note d’un certificat médical de cinq jours d’interruption temporaire de travail.

    Le juge s’intéresse aux dégradations de bâtiments. Benoît le reconnaît aisément, il n’est pas à l’aise avec la parole, alors il aime bien les tags au pochoir. Ce jour-là, avec un ami, ils arpentent les cortèges et bombent sur les planches qui protègent les vitrines et quelques murs un dessin et un slogan : le visage de Macron et l’éternel « Marche ou crève ». « “Marche ou crève” et le visage du chef de l’État, voilà une menace manifeste ! », s’emporte la procureure.

    Benoît explique ne rien avoir contre les forces de l’ordre, lui-même a été militaire sous contrat jusqu’en 2006. Il assure n’avoir fait que cinq ou six tags. « Nos paroles, on les écoute pas, donc j’écris… Oui, sans doute, je recommencerai, mais sur les planches, pas sur les murs », dit-il, un peu perdu dans le box des prévenus. Pourquoi manifester ? « J’étais au RSA, maintenant je suis cariste, préparateur de commande chez Amazon. C’est des contrats à la semaine, ça fait pas lourd à la fin du mois. J’habite chez ma grand-mère, je m’occupe d’elle pour faire les courses et tout ça… », dit-il. La procureure demande six mois d’emprisonnement avec sursis et 500 euros d’amende. Jugement : six mois de prison et 500 euros d’amende, avec huit mois d’interdiction de se rendre à Paris.

    Lilian, 19 ans, sans emploi, venu du Maine-et-Loire

    C’est un jeune homme qui semble un gamin, se raconte parfois des histoires et se dit lui-même « un peu immature ». Pour sa première manifestation, Lilian a vu les choses en grand. Un casque rouge bien voyant, gants, lunettes et masque : le meilleur moyen d’être arrêté par des policiers, samedi, vers 11 h 50, avenue de Friedland, qui l’ont vu jeter un pétard. Et voilà que le jeune homme a en plus dans son sac une bombe de laque. « C’était comme un explosif de dernier recours, si mon pronostic vital était engagé, avec tout ce qu’on voit sur internet et toutes les violences… », dit-il au juge. Il n’a visiblement pas compris qu’une telle bombe de laque allumée avec un briquet l’aurait immédiatement gravement brûlé.

    Lilian a volontiers donné son téléphone aux policiers. Prévenant, il leur a même signalé un message susceptible de les intéresser. « Moi, je vais grailler du CRS », écrit-il par texto à une amie. « Grailler, ça veut dire quoi ? », interroge la présidente. « Ben oui, ça veut dire manger, j’ai écrit cela pour impressionner une copine », répond le jeune homme.

    Mais qu’est-il allé faire dans cette galère ? « J’ai pas de boulot, je suis parfois en saisonnier en pépinière, vous comprenez, j’habite à la campagne et j’ai aucun moyen de déplacement », dit Lilian, qui a arrêté sa scolarité à 16 ans et ne fait pas grand-chose de sa vie depuis. Le père est ouvrier chez un sous-traitant automobile, la mère travaille en 2 × 8 en intérim. La procureure s’emporte contre l’« immaturité » du jeune homme, sa « dangerosité et son inactivité sociale » et demande un an de prison ferme avec mandat de dépôt (ce qui signifie une incarcération immédiate). Jugement : six mois de prison ferme, six mois de prison avec sursis et un an d’interdiction de séjour à Paris.

    « Je voulais me protéger. C’est trop dangereux de manifester »

    Maxime, 27 ans, saisonnier, venu de Carcassonne (Aude)
    Ce samedi, vers 21 heures, Maxime est repéré dans le quartier de la Défense. Sur son sac à dos, un casque de skateboard. Voilà qui mérite contrôle d’identité, palpations et fouille du sac. Les policiers découvrent un gilet jaune, des protège-tibias, des lunettes de skis, un masque en papier et tout au fond du sac un cutter. Bonne pioche, direction garde à vue puis tribunal !

    « Vu les violences du week-end d’avant, je voulais me protéger. C’est trop dangereux de manifester, mais je voulais le faire pour défendre les droits gagnés par mes parents et mes grands-parents. Quant au cutter, je ne savais même pas, je l’ai oublié dans ce sac avec lequel je transporte régulièrement des outils. Qu’est-ce que vous voulez que je fasse avec un cutter ? », explique-t-il.

    Maxime raconte avoir manifesté vers la porte Maillot, avoir aidé une vieille dame qui était blessée, par terre, et l’avoir conduite dans un hall d’immeuble. Oui, il a shooté dans une grenade lacrymogène pour l’éloigner. « Les CRS, c’est pas mon problème, je suis pas venu pour eux. Le week-end prochain, je manifesterai chez moi, à Carcassonne, tout se passe bien là-bas », ajoute-t-il. Et puis, il ira faire la saison d’hiver à Avoriaz comme serveur. « Je travaille dans les restaurants d’Annie Famose [ancienne championne de ski – ndlr] », dit-il fièrement. La procureure demande quatre mois de prison ferme et un an d’interdiction de séjour à Paris. Jugement : huit mois de prison avec sursis et un an d’interdiction de se rendre à Paris.

    Stéphane, 45 ans, boucher-charcutier, venu des Hautes-Alpes

    Stéphane vient « de la campagne », « d’un milieu agricole où on a toujours un couteau sur soi », « pour bricoler, couper le saucisson, le fromage » et aussi une lampe-torche. Il a 45 ans, un CDI de boucher dans un abattoir, un emprunt à rembourser, une fille qui vit avec sa mère dont il est séparé et à laquelle il verse une pension alimentaire. Samedi 1er décembre, il était « tout content » de vivre sa « première manifestation d’envergure » dans la capitale contre ce gouvernement « qui a enlevé 100 euros de retraite à nos anciens, nos parents, nos retraités ». Il avait roulé la veille depuis ses Hautes-Alpes jusqu’à Lyon avec les copains, puis pris le TGV jusqu’à Paris.

    Vu les scènes de violence regardées à la télé, la bande avait prévu « de se protéger ». Stéphane avait un casque de chantier avec visière, un masque de peinture. Arrivés de nuit à Paris, ils ont attendu que la manif commence en picolant parce qu’ils sont bons vivants et que ce voyage, ils le voulaient festif. Stéphane le concède : à une époque, il a eu un problème avec l’alcool. Mais plus maintenant. Vers 8 heures, ils se sont dirigés vers les Champs-Élysées. Mais ils n’ont jamais réussi à y accéder à cause des barrages de CRS aux alentours.

    Stéphane s’est mis en tête de convaincre les CRS « de rejoindre le peuple ». Ils ont refusé, l’ont repoussé. Et c’est là que tout s’est envenimé. « Je suis devenu con, je les ai trouvés tellement froids, j’ai foncé dans le barrage pour montrer à Macron que le peuple est plus fort que les CRS. » Stéphane en a oublié de mettre son casque de chantier pour se protéger. Il est ressorti à 8 h 50 menottes aux mains et avec un énorme cocard à l’œil droit. Le voilà maintenant dans ce box vitré du TGI de Paris à tirer sur ses poils de barbe après des heures en garde à vue et deux nuits à Fresnes. Lui qui a un casier vierge doit justifier pourquoi on a trouvé sur lui un Opinel et une lampe-torche alors qu’il faisait plein jour.

    Il veut parler de politique, de cette France oubliée qui travaille dur, le président l’arrête : « Ici, ce n’est pas une tribune politique. » Stéphane baisse la tête, penaud. Il dit qu’il est « au bord du suicide », s’excuse « d’avoir été con ». La procureure requiert six mois de prison ferme avec mandat de dépôt.

    Stéphane écope de quatre mois de prison ferme. « Nous ne prononçons pas de mandat de dépôt. Vous serez convoqué par le juge des applications des peines de Gap et vous verrez ensemble comment aménager la peine », lui dit le président. Mais Stéphane ne l’écoute déjà plus, sidéré, ne retenant plus que le mot « prison ».

    Jérôme, 26 ans, intérimaire, venu de la Nièvre

    Jérôme a 26 ans. Intérimaire, sans contrat pour le moment, il vit dans la Nièvre chez sa mère. Il a été interpellé samedi 1er décembre avec un masque de ski, un casque de vélo, cinq fioles de sérum physiologique et un lance-pierres. Peu loquace, il assure que c’était « pour se protéger, se défendre des grenades lacrymogènes ». « Mais pourquoi une fronde ? », relance le président. « Au cas où je me prends une grenade lacrymo, répond Jérôme, je n’étais pas là pour casser. »

    Il survit avec 200 euros de RSA mais on n’en saura guère plus sur sa vie. Comme dans plusieurs dossiers, l’enquête sociale rapide, dispositif clé de la chaîne pénale qui éclaire le parcours du prévenu, fait défaut. « Il y a trop d’enquêtes en cours en un laps de temps pour en faire une sur tous », s’excuse le président. La procureure demande 210 jours amende à 5 euros, soit 1 050 euros. C’est 5,25 fois le demi-RSA de Jérôme. Jérôme écope trois mois de prison avec sursis.

    Mickael, 30 ans, chômeur, SDF, venu de Chambéry (Savoie)

    Mickael ne comprend pas ce qui lui arrive. Il accueille sa peine sans réaction quand son avocate est abasourdie : six mois de prison dont la moitié ferme avec maintien en détention et l’autre assortie d’un sursis et d’une mise à l’épreuve pendant deux ans avec obligation de fixer son domicile dans un lieu déterminé et de rechercher un travail. C’est un peu moins lourd que les huit mois ferme requis par le parquet.

    Mickael, 30 ans, fils de bourgeois passé baba sans domicile fixe et sans travail, « créchant dans les gares ou les forêts », a été arrêté jeudi 29 novembre au soir à la gare de Lyon. Repéré par son sweat à capuche noire marquée ACAB, « All cops are bastards » (« Tous les flics sont des… »), il arrivait de Chambéry. Dans son sac à dos : un plastron, un casque, une cagoule et un lance-pierres professionnel avec 87 balles en plomb de 1,5 centimètre de diamètre. L’attirail parfait du « black bloc » de l’ultra-gauche. Sauf qu’il n’en est pas un, assure son avocate.

    La preuve : l’exploitation de son téléphone et les messages via Messenger sur la page Facebook du black bloc qui démontre son grand amateurisme. « On se retrouve où les gars pour la manif ? », demande le jeune homme, qui a gardé quelques dreadlocks au sommet de son crâne rasé. « Très cher, nous ne fonctionnons pas comme cela et nous ne communiquons jamais sur les réseaux sociaux », lui répond l’administrateur de la page. « Vous estimez qu’il serait allé à la manifestation. Mais rien ne le prouve dans le dossier ! », plaide son avocate. En vain.

    « Je me suis laissé emporter par mes émotions »

    Étienne, 27 ans, technicien, venu de Lyon (Rhône)
    « Je suis désolé. Je vous demande la clémence. Je me suis laissé emporter par mes émotions. Mon travail est très important. Je suis prêt à faire des travaux d’intérêt général. Vous ne me reverrez jamais plus dans une manifestation. » Étienne implore le tribunal de ne pas le condamner. Sans succès. Le ciel lui tombe sur la tête : six mois de prison ferme, trois mois de plus que les réquisitions du parquet. Maigre consolation : le mandat de dépôt, requis par la procureure, n’est pas retenu, Étienne va être relâché, sa peine aménagée dans la mesure du possible.

    Et s’il perdait son CDI à 27 ans « à cause de tout ça » ? Technicien pour une société privée, il travaille sur le chantier de l’automatisation du métro lyonnais pour 1 500 euros par mois. Sa mère, retraitée, pleure depuis le début de l’audience, discrètement au premier rang, et s’écroule : « Que se serait-il passé s’il avait cassé la vitrine d’un magasin ? Il aurait pris un an ? » Quelques minutes plus tôt, son avocate tonnait : « Où sont les casseurs des Champs-Élysées, de Dior, Chanel, Zadig & Voltaire, de tous ces grands magasins pillés ? »

    Étienne a été interpellé samedi 1er décembre au matin après la découverte de fumigènes et de pétards dans son sac. « Je les ai achetés sur internet pour me défendre après avoir subi des gazages abusifs le week-end dernier, répond Étienne. Avec ma mère, nous manifestions pacifiquement près de l’Arc de triomphe quand nous avons été gazés par un cordon de CRS qui n’a fait aucune différence entre les casseurs et les familles. C’était très violent. »

    Un grand-père parisien, venu assister à l’audience « par solidarité avec les gilets jaunes », glisse ce qui lui apparaît une évidence : « C’est parce qu’il est le seul Noir qu’ils le condamnent à autant de prison pour des pétards même pas utilisés. »

    Bruno, 31 ans, chauffeur de poids lourds, venu de Seine-et-Marne

    Bruno ne veut pas être jugé aujourd’hui. Il demande un renvoi. C’est son premier tribunal comme ses premières nuits en prison et il a le vertige. Il jure qu’on ne le reverra plus jamais dans une manif, veut retrouver sa vie de bon père trentenaire dans le petit bourg de Seine-et-Marne où il vit avec sa femme et leur fille dans le pavillon hérité de ses parents qui lui coûte des charges et des taxes. On lui reproche d’avoir voulu manifester avec des lunettes de protection, un masque à gaz et un couteau.

    Chauffeur poids lourds en CDI, il gagne entre 1 500 et 2 000 euros selon les mois. La procureure requiert un contrôle judiciaire en attendant sa comparution avec cependant une interdiction : celle de paraître à Paris. Bruno panique. Et s’il a des livraisons à faire dans la capitale intra-muros ? Le tribunal tranche. Il a interdiction de venir à Paris, seulement les week-ends du samedi minuit au lundi minuit.

    Maxime, 33 ans, chauffeur-routier, venu de la Marne

    Maxime aussi veut un délai pour préparer sa défense. Il vient de la Marne où il loue une petite maison mais sa terre natale, c’est la Creuse. Il a deux enfants et une amende au casier parce qu’un jour, il a admonesté deux jeunes qui avaient cassé le pare-brise de la voiture de sa femme. Chauffeur-routier, il est responsable d’équipe, soit trois camions, gagne 4 000 euros net par mois et passera en CDI à la fin de l’année.

    Samedi, il devait vivre sa « première manif » mais il a été contrôlé avec, dans le sac, des lunettes de natation, des protège-tibias, des gants coqués, un masque d’aide respiratoire et des pierres. Il dit que tout cela c’était « pour se protéger » et qu’il n’allait bien « évidemment pas jeter des pierres contre les forces de l’ordre ». Il est placé sous contrôle judiciaire jusqu’à sa comparution en janvier, avec interdiction de venir sur Paris.

    Thomas, 20 ans, intérimaire, venu de l’Eure

    Ce samedi à 20 h 45, Thomas est interpellé rue du Faubourg-Saint-Honoré. Dans sa poche, six paires de lunettes de grandes marques pour une valeur d’environ 1 300 euros. Un magasin d’optique a été pillé. Mais la police note sur son P.-V. d’interpellation que le jeune homme n’a pas participé à la casse ; il s’est servi après coup. « Je suis rentré dans le magasin tout cassé. J’ai pris des lunettes. Je sais pas, j’ai pas réfléchi, j’étais pris avec les autres », dit-il.

    Thomas était venu manifester avec sa copine et deux amis. Dans les tourbillons de violence qui ont emporté le quartier Concorde-Rivoli, il les a perdus, s’est retrouvé coincé entre deux groupes de CRS, explique-t-il. Son sweat-shirt était taché du sang d’un autre manifestant, « les grenades tombaient de partout, j’allais pas me rapprocher seul des CRS et il n’y avait pas de fuite possible ». Thomas a donc suivi les casseurs et est entré dans le magasin.

    Vendeur empilant les CDD dans un magasin de décoration et aujourd’hui à Intermarché, Thomas vit chez ses parents et a été condamné il y a quelques mois pour avoir revendu de la cocaïne et du cannabis. « Ça finançait ma consommation personnelle, mais j’ai tout arrêté depuis, seul et sans médicament », dit-il. La procureure demande quatre mois de prison ferme et deux mois supplémentaires au titre de la révocation du sursis de la peine précédente. Le jugement va au-delà des réquisitions : dix mois de prison ferme.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/041218/au-tribunal-de-paris-de-la-prison-en-veux-tu-en-voila-pour-les-gilets-jaun

  • #Montpellier : Dans la série « Fabre and the city », le musée Fabre fait parler les œuvres
    https://www.20minutes.fr/arts-stars/culture/2366363-20181106-montpellier-serie-fabre-and-the-city-musee-fabre-fait-par

    A l’ère de Netflix, le musée Fabre s’offre une série. Dès vendredi, l’amiral culturel montpelliérain diffusera sur Internet le feuilleton Fabre and the city, une série graphique en sept épisodes où les personnages tirés des œuvres du musée prennent vie.

    La première saison (car il y en aura une deuxième) transporte les spectateurs dans la préhistoire du musée, à la fin du XVIIIe siècle, alors qu’une Société des Beaux-Arts fait ses premiers pas à Montpellier. Accessible gratuitement sur l’application et la plate-forme dédiées, la série propose de se promener à son rythme dans l’intrigue, en balayant son doigt sur l’écran pour faire avancer les péripéties rencontrées par les protagonistes.

    Cépé, l’illustrateur montpelliérain qui a été sélectionné pour dessiner ce projet, a notamment donné vie à des bustes de Voltaire et de Rousseau, à l’Ecorché, imaginé par Jean-Antoine Houdon en 1778, au Vieillard, peint par François-Xavier Fabre en 1784 ou encore la Fillette, inspirée par une œuvre de 1725 de Jean-Baptiste Greuze.

    Le site officiel de la websérie :
    http://fabreandthecity.montpellier3m.fr

    Il y aura aussi (demain) une app de visite géolocalisée en ville, replaçant l’histoire des prémices du musée dans des lieux emblématiques.

  • Julien Benda et la dérive intellectuelle des modernes
    http://www.dedefensa.org/article/julien-benda-et-la-derive-intellectuelle-des-modernes

    Julien Benda et la dérive intellectuelle des modernes

    Dans un livre célèbre, et recensé en son temps par René Guénon (il lui reprocha de confondre clerc et intellectuel), la Trahison des clercs, l’intellectuel juif peu orthodoxe Julien Benda tordait le cou justement à l’intelligentsia moderniste. La lèpre nationaliste, pour reprendre l’expression de Stefan Zweig dans son émouvant Monde d’hier, devait en effet emporter la vieille Europe libérale-élitiste d’Ortega et son cadre traditionnel d’avant quatorze (comme disait Bernanos on traversait l’Europe avec une carte de visite). Conditionné depuis Napoléon par un siècle de programmation et de bourrage de crâne social-chauvin, l’européen acceptera la boucherie héroïquedont se moque déjà Voltaire dans Candide. Mais on le reprogrammera après la guerre : (...)

  • Goethe et les entropies du monde moderne
    http://www.dedefensa.org/article/goethe-et-les-entropies-du-monde-moderne

    Goethe et les entropies du monde moderne

    Une note sublime - et si juste - pour commencer :

    « Les apôtres de liberté m’ont toujours été antipathiques, car ce qu’ils finissent toujours par chercher, c’est le droit pour eux à l’arbitraire. »

    Je n’avais pas touché à Goethe depuis plus de quinze ans, trop écœuré peut-être parce qu’est devenue l’Allemagne de la mégère inapprivoisée. Et puis, le génie du web aidant (Gallica BNF), j’ai relu avec émerveillement ses conversations avec Eckermann, qui sont un des livres les plus extraordinaires du monde. Imaginons qu’Homère, Shakespeare ou Rabelais aient eu cette chance ; ou même Nietzsche, Tocqueville ou Voltaire... La chance d’un Eckermann…

    Nous sommes à la fin des années 1820, quand le « satanisme de l’aventure industrielle » (Drieu) se dessine, et que les (...)

  • « Les crêpes que j’ai mangé » : un nouvel accord pour le participe passé - Libération
    http://www.liberation.fr/debats/2018/09/02/les-crepes-que-j-ai-mange-un-nouvel-accord-pour-le-participe-passe_167613

    La fédération Wallonie-Bruxelles souhaite modifier les règles du fameux « accord du participe avec l’auxiliaire avoir », jugées complexes et grammaticalement peu pertinentes. Et invite les autres pays francophones à la suivre.

    « Employé avec l’auxiliaire avoir, le participe passé s’accorde en genre et en nombre avec le complément d’objet direct quand celui-ci le précède (les crêpes que j’ai mangées). Mais si le complément suit le participe, il reste invariable (j’ai mangé les crêpes). »

    A l’école les enfants se demandent : pourquoi avant et pas après ? Souvent, les enseignants savent expliquer comment on accorde, mais pas pourquoi. L’incohérence des règles traditionnelles les empêche de donner du sens à leur enseignement. Le temps moyen consacré aux règles actuelles est de 80 heures, pour atteindre un niveau dont tout le monde se plaint. Il serait tellement plus riche de le consacrer à développer du vocabulaire, apprendre la #syntaxe, goûter la littérature, comprendre la morphologie ou explorer l’étymologie, bref, à apprendre à nos enfants tout ce qui permet de maîtriser la langue plutôt qu’à faire retenir les parties les plus arbitraires de son code graphique.

    Pourquoi l’esprit critique s’arrête-t-il au seuil de l’orthographe ? Parce tout le monde a appris à ne plus se demander pourquoi. Enfin, pas tout le monde. La fédération Wallonie-Bruxelles, en accord avec ses instances linguistiques, envisage sérieusement d’instaurer l’invariabilité du participe passé avec l’auxiliaire avoir. Elle s’appuie pour cela sur les avis du Conseil de la langue française et de la politique linguistique de la Fédération Wallonie-Bruxelles (#CLFPL) et du Conseil international de la langue française (#Cilf). Elle suit aussi les recommandations d’André #Goosse, successeur de Maurice #Grevisse au Bon Usage, du groupe de recherche #Erofa (Etude pour une rationalisation de l’orthographe française d’aujourd’hui), de la Fédération internationale des professeurs de français et de sa branche belge, de certains membres de l’Académie royale de Belgique et de l’Académie de langue et de littérature françaises de Belgique, ainsi que des responsables des départements de langue, de littérature et de didactique du français de la plupart des universités francophones… Quant à l’Académie française, n’étant pas composée de linguistes, elle n’est jamais parvenue à produire une grammaire décente et ne peut donc servir de référence.

    Pour comprendre les raisons de ce changement, revenons au Moyen Age. Les moines copient alors au fil de la plume. Quand ils écrivent, par exemple : « Les pieds que Jésus a lavés », un simple regard vers la gauche permet d’identifier ce que Jésus a lavé. Il a lavé quoi ? Les pieds. Donc le moine accorde. Par contre, quand il écrit : « Jésus a lavé », il s’interroge. Jésus a lavé quoi ? Je ne sais pas, je vais attendre la suite du texte. Le moine poursuit : « Avant la fête de Pâques, sachant que son heure était venue, lorsque le diable avait déjà inspiré au cœur de Judas Iscariote, fils de Simon, le dessein de le livrer, et patati et patata, … les pieds. » A tous les coups, quand le moine est arrivé à « les pieds », il a oublié qu’il avait un participe à accorder, ou il n’a plus la place pour écrire le « s » parce qu’au Moyen Age, les mots sont souvent attachés les uns aux autres. C’est cet oubli qui est à l’origine de la règle des accords avec l’auxiliaire avoir. Au XVIe siècle, Clément Marot, constatant le même phénomène en italien, en fait la promotion à l’aide d’un joli poème, ce qui fera dire à Voltaire : « Il a ramené deux choses d’Italie : la vérole et l’accord du participe passé. Je pense que c’est le deuxième qui a fait le plus de ravages ». Le Bescherelle désigne cette règle comme « la plus artificielle de la langue française ». Elle entraînera une cohorte de complications, comme les fameux accords des verbes exclusivement, essentiellement ou accidentellement pronominaux qu’on retrouve dans les quatorze pages d’exceptions du Bon Usage de Grevisse.

    Voici donc la nouvelle règle sur laquelle s’appuyer : « Le participe passé, avec l’auxiliaire être, s’accorde comme un adjectif (c’est-à-dire avec le mot auquel il se rapporte). Avec l’auxiliaire avoir, il ne s’accorde pas. » L’invariabilité du participe avec avoir peut heurter certaines personnes, que nous renvoyons à la formulation complète que le Cilf a proposé. Ainsi, dans cette dernière phrase, « la formulation que le Cilf a proposé », rien ne permet de considérer qu’il y a une faute grammaticale car le participe avec avoir n’a plus valeur d’adjectif, contrairement à ce qui se passe quand on utilise l’auxiliaire être.

    L’usage oral s’est fait l’écho de cette logique. L’invariabilité est une tendance en augmentation dans tous les milieux, dans tous les médias et dans tous les pays francophones. Parce que cet accord n’est plus porteur de sens. Il ne s’agit pas de justifier une faute, mais de rappeler que cet usage est légitime et qu’il serait injuste de le sanctionner. Les linguistes vous le diront : l’orthographe n’est pas la langue, mais l’outil graphique qui permet de transmettre, de retranscrire la langue, comme les partitions servent la musique. Puisque les langues évoluent, leur code graphique devrait en faire autant, ce qu’il n’a cessé de faire en français. Il serait absurde de croire que notre orthographe aurait atteint un degré de perfection intangible. Cela reviendrait à la considérer comme morte.

    Evitons les faux dilemmes. Il ne s’agit pas de tout changer, de déstabiliser tout le système ou de supprimer ce qui est porteur de sens dans notre orthographe, mais de maintenir une norme unique, renforcée dans sa cohérence. Il est surprenant de constater le peu de rigueur dont nous faisons preuve envers l’orthographe elle-même. La plupart des formes ou des règles sont justifiables, mais d’autres le sont moins, voire pas du tout. Tout dans l’#orthographe ne peut avoir la même valeur. Osons l’affirmer : les règles d’accord du participe passé actuelles sont obsolètes et compliquées jusqu’à l’absurde. Compte tenu du fait qu’elles ne sont pas fautives, qu’elles suivent l’usage, qu’elles libèrent du temps scolaire, qu’elles sont recommandées par toutes les instances officielles d’avis sur la langue et les universités, on est en droit de se demander pourquoi ces règles ne sont pas appliquées.
    Plus d’informations et liste des soutiens sur www.participepasse.info.
    Arnaud Hoedt et Jérôme Piron Anciens professeurs de français

    Vive les Belges !

    les fameux accords des verbes exclusivement, essentiellement ou accidentellement pronominaux qu’on retrouve dans les quatorze pages d’exceptions du Bon Usage de Grevisse

    ça c’est une règle qui m’a toujours tuée !!!

    #grammaire #linguistique #Belgique #Wallonie #participe_passé

    • Je suis un peu lent : est-ce que ça veut dire que tu aurais dû conclure par « ça c’est une règle qui m’a toujours tué » ?

      Si je me souviens bien, selon la règle classique :
      – « c’est une règle qui a toujours tué ma personne »
      – « c’est une règle qui m’a toujours tuée » (moi qui suis une fille)
      et si je comprends l’article, c’est cette incohérence entre le COD avant et le COD après qu’il s’agit de résoudre.

      Et donc... si je pousse, on se retrouverait à supprimer encore plus d’occasions d’utiliser le féminin ? (Dites-moi que j’ai tort.)

  • La Convivialité (Théâtre/Conférence)
    https://www.laconvivialite.com

    Page d’accueil du site de la conf.

    L’#orthographe de la plupart des livres français est ridicule. (...) l’habitude seule peut en supporter l’incongruité. L’écriture est la peinture de la voix : plus elle est ressemblante, meilleure elle est.
     
    Voltaire, Dictionnaire Philosophique, 1771


    L’orthographe est plus qu’une mauvaise habitude, c’est une vanité
     
    Raymond Queneau, Batons, chiffres et lettres, 1950


    L’orthographe, divinité des sots.
     
    Stendhal, Lettres à Pauline, 1804


    Orthographe : Y croire comme aux mathématiques. N’est pas nécessaire quand on a du style.
     
    Gustave Flaubert, Dictionnaire des idées reçues, 1913


    Je crains bien que nous ne nous débarrassions jamais de Dieu, puisque nous croyons encore à la grammaire
     
    F. Nietzsche., Crépuscule des idoles, 1888
     

    Pour un historien de la langue, les accidents de l’orthographe française sont explicables : chacun a sa raison, analogique, étymologique ou fonctionnelle ; mais l’ensemble de ces raisons est déraisonnable, et, lorsque cette déraison est imposée, par voie d’éducation, à tout un peuple, elle devient coupable. Ce n’est pas le caractère arbitraire de notre orthographe qui est choquant, c’est que cet arbitraire soit légal.
     
    Roland Barthes, Le Monde de l’Education, 1976.

    #la_convivialité

  • Le président Grant et le messianisme mondialiste en 1873
    http://www.dedefensa.org/article/le-president-grant-et-le-messianisme-mondialiste-en-1873

    Le président Grant et le messianisme mondialiste en 1873

    On parle souvent de Pike et de Mazzini pour expliquer le pseudo-nouvel ordre mondial actuel. Or le nouvel ordre mondial commercial et britannique est déjà célébré par Voltaire dans son poème scolaire Le Mondain. L’unification planétaire est une vieille lune. On va voir avec un autre exemple prestigieux.

    On connaît le président Ulysse S. Grant grâce aux feuilletons télé (les Mystères de l’Ouest, qui constituaient une réflexion sur les agences secrètes), à la guerre de Sécession et à la Conquête de l’ouest. Mais ce qu’on ne sait pas c’est que, comme Dostoïevski (voyez Les Possédés), le président Grant décrit le nouvel ordre mondial à venir.

    Dans une adresse présidentielle, Ulysse S. Grant donc évoque l’unification électromagnétique du monde par les réseaux, (...)

  • Les femmes restent meilleures en orthographe que les hommes

    https://www.francetvinfo.fr/societe/droits-des-femmes/les-femmes-restent-meilleures-en-orthographe-que-les-hommes_2786595.htm

    Les femmes restent meilleures en orthographe que les hommes, d’après le baromètre Voltaire 2018, publié mardi 5 juin, confirmant les conclusions des trois études précédentes. Les femmes maîtrisent 50,3% des règles d’orthographe de la langue française, contre 46,4% pour les hommes. Plus on est âgé, mieux on s’en sort. Les plus de 55 ans maîtrisent 63,5% des règles, contre 43,7% pour les moins de 18 ans.

    Autre constat du baromètre Voltaire, les meilleurs en orthographe sont les Français bilingues, ceux qui ont étudié le latin ou le grec, ou ceux qui lisent le plus.

    Plus surprenant, les personnes qui n’ont pas le sens de l’orientation sont plus fortes en orthographe que la moyenne. L’étude avance une hypothèse : cela viendrait de notre cerveau, de l’hippocampe plus précisément, siège du sens de la navigation. Celles qui ont le sens de l’orientation, écrit l’étude, mémorisent des repères visuels ou sensoriels sur leur trajet, tandis que les autres suivent un itinéraire mécaniquement (tourner à droite, deux fois à gauche). Les personnes qui n’ont pas le sens de l’orientation se sentent plus à l’aise dans un univers stable avec des repères bien établis, et les règles de grammaire forment un univers stable.

  • Lycées et universités toujours mobilisés | L’Actualité des Luttes
    https://actualitedesluttes.info/?p=3429

    Dans l’émission de ce jour, nous faisons un tour d’horizon sur les mobilisations dans les université et lycées. Nous sommes en plateau avec Camille et Emma, actuelle et ancienne lycéennes au lycées Voltaire de Paris. Dans le courant de l’émission , nous serons rejoint au téléphone, par différentes facs de Paris et région parisienne. Durée : 1h04. Source : Fréquence Paris Plurielle

    http://actualitedesluttes.info/wp-content/uploads/2018/05/180524.mp3

  • Lycée Arago : « On a voulu faire de nous un exemple » - Libération
    http://www.liberation.fr/france/2018/05/24/lycee-arago-on-a-voulu-faire-de-nous-un-exemple_1654001

    Parents, camarades et enseignants se sont rassemblés, jeudi, devant le tribunal pour accueillir les lycéens sortant de garde à vue, après 36 heures éprouvantes.

    « Libérez nos camarades ! » Devant le #tribunal de grande instance (#TGI) de Paris, c’est sous les applaudissements et en chantant que, jeudi après-midi, élèves, étudiants, parents, enseignants et syndicats ont accueilli les jeunes placés en garde à vue mardi, à l’issue de la manifestation à l’appel des syndicats de la fonction publique et rejointe par les étudiants mobilisés contre la loi ORE et des cheminots contre la réforme du rail. Un important comité d’accueil qui n’a pas hésité à narguer les forces de l’ordre en jouant sous leur nez à « 1,2,3 soleil ».

    Enlacée par plusieurs de ses amis, Anna, 20 ans, étudiante à Nanterre, a été l’une des premières à ressortir du tribunal : « On m’a convoquée à un procès en octobre. » Motif : « intrusion non autorisée dans un établissement scolaire commise en réunion dans le but de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement. » Epuisée, elle raconte : « A la fin de la manifestation [de mardi], on a entendu un appel à soutenir les lycéens en bloquant le lycée Arago de manière pacifique. On a sonné et le gardien nous a ouvert la porte. Très vite, on a été encerclés par les CRS. On a alors commencé à bloquer les escaliers et à monter dans les étages. Les CRS ont forcé une porte, et là ça a commencé à être la panique. On s’est barricadés dans une salle, ils ont déboulé dans la pièce et ont attrapé une personne par la gorge. »Les jeunes ont alors l’idée de s’asseoir et de dégainer leurs smartphones pour filmer la scène. L’initiative calme immédiatement les forces de l’ordre.

    Mise en examen.
    L’étudiante poursuit : « On a été encerclés comme du bétail dans la cour. Les CRS nous ont dit que si on les suivait, il n’y aurait pas de suite. Ils nous ont fouillés et palpés avant de nous faire monter dans des bus. » Débutent alors plusieurs heures difficiles : « On était parqués dans ce bus, sans pouvoir aller aux toilettes, boire ou manger. Certains n’en pouvaient plus et ont uriné à l’intérieur. » Jade (1), 16 ans, en seconde dans un lycéen parisien, a été mise en examen pour les mêmes motifs. Elle ajoute : « On y est restés près de cinq heures. On était plus de 60, tous les uns sur les autres. On avait à peine assez d’air pour respirer. Je ne savais même pas que j’étais en garde à vue, on nous avait dit qu’on nous laisserait sortir si on obéissait. A ce moment-là, je pouvais encore entrer en contact avec mes proches, ce qui me rassurait. Mais dès 3 heures du matin, je n’ai fait qu’être déplacée de cellule en cellule jusqu’à passer devant le tribunal. Je n’avais qu’une hâte, sortir. J’étais seule, sans rien pour m’occuper, à part dormir… C’est vraiment aberrant, ce qui s’est passé. On n’a fait que me répéter de ne plus faire de manifestations, ce n’est pas pour autant que je vais arrêter. » Son père, Thomas (1) : « On va saisir le Défenseur des droits et j’appelle personnellement à la démission de Jean-Michel Blanquer et de Gérard Collomb. Cette mise en examen, c’est une mesure politique. Le juge, gêné, nous a affirmé qu’elle était requise par le procureur. » Anna ne compte pas en rester là : « On a voulu faire de nous un exemple pour stopper la mobilisation des jeunes, mais je vais continuer à me mobiliser, même davantage. J’ai été choquée par le dispositif déployé, l’agressivité des forces de l’ordre et les conditions de détention. »

    Inquiétude.

    Devant le TGI, Sophie, mère d’un ado de 17 ans du lycée Voltaire, peine à contenir son émotion : « On a eu des nouvelles lorsqu’il était dans le lycée, puis dans le bus. On est allés rue de l’Evangile [XVIIIe arrondissement] où les cars étaient, en espérant qu’ils les laisseraient partir. Sans succès. On a appris à 5 heures du matin qu’il était déplacé dans un commissariat, sans nous dire le lieu. L’attente a été terriblement longue et angoissante. On n’a su qu’à 19 h 30 où il était et je n’ai pas pu lui parler depuis l’interpellation. Certains parents n’ont même pas été prévenus. On n’avait jamais vu ça en France. » La prof d’histoire-géo à Voltaire Marianne Cabaret-Rossi se mobilise : « Dans mon établissement, deux tiers des élèves sont en attente sur #Parcoursup. Le blocus est un moyen qu’ils ont trouvé pour montrer leur inquiétude. On veut les empêcher de s’exprimer, on pense que la répression va marcher, mais il y aura un retour de bâton. » A noter que selon ses confrères d’#Arago, contrairement à ce qui a été notifié par la proviseure dans un mail aux parents, aucun dégât important n’a été constaté. Seule une fenêtre aurait été brisée.
    L’étudiante poursuit : « On a été encerclés comme du bétail dans la cour. Les CRS nous ont dit que si on les suivait, il n’y aurait pas de suite. Ils nous ont fouillés et palpés avant de nous faire monter dans des bus. » Débutent alors plusieurs heures difficiles : « On était parqués dans ce bus, sans pouvoir aller aux toilettes, boire ou manger. Certains n’en pouvaient plus et ont uriné à l’intérieur. » Jade (1), 16 ans, en seconde dans un lycéen parisien, a été mise en examen pour les mêmes motifs. Elle ajoute : « On y est restés près de cinq heures. On était plus de 60, tous les uns sur les autres. On avait à peine assez d’air pour respirer. Je ne savais même pas que j’étais en garde à vue, on nous avait dit qu’on nous laisserait sortir si on obéissait. A ce moment-là, je pouvais encore entrer en contact avec mes proches, ce qui me rassurait. Mais dès 3 heures du matin, je n’ai fait qu’être déplacée de cellule en cellule jusqu’à passer devant le tribunal. Je n’avais qu’une hâte, sortir. J’étais seule, sans rien pour m’occuper, à part dormir… C’est vraiment aberrant, ce qui s’est passé. On n’a fait que me répéter de ne plus faire de manifestations, ce n’est pas pour autant que je vais arrêter. » Son père, Thomas (1) : « On va saisir le Défenseur des droits et j’appelle personnellement à la démission de Jean-Michel #Blanquer et de Gérard #Collomb. Cette mise en examen, c’est une mesure politique. Le juge, gêné, nous a affirmé qu’elle était requise par le procureur. » Anna ne compte pas en rester là : « On a voulu faire de nous un exemple pour stopper la mobilisation des jeunes, mais je vais continuer à me mobiliser, même davantage. J’ai été choquée par le dispositif déployé, l’agressivité des forces de l’ordre et les conditions de détention. »
    (1) Les noms ont été modifiés.
    Marlène Thomas

    Bien sûr que cette garde à vue collective est faire pour l’exemple et pour empêcher la moindre contestation de prendre de l’ampleur. Mais le "On n’avait jamais vu ça en France" de la part d’une parent d’élève est complètement à côté de la plaque. Si on estime que tous les quartiers populaires et autres cités peuplées de noirs et d’arabes ne font pas partie de la France, c’est peut-être vrai mais dans les cités c’est un traitement fréquent réservé aux jeunes parfois dès le collège et depuis longtemps. Alors c’est comme les violences policières, quand on s’aperçoit que ce qui était jusqu’à présent réservé au lumpen prolétariat arrive même aux enfants de cadre (lycée parisien quand même) ben on commence à faire la gueule.
    Et on s’aperçoit que c’est une loi de 2009 proposée par Estrosi (http://www.assemblee-nationale.fr/13/propositions/pion1641.asp) qui voyait des hordes de barbares déferler partout (prenez le temps de juste lire les motifs, c’est très connoté) qui sert à justifier ces mises en examen.
    La morale c’est que toute loi destinée au départ à criminaliser une minorité aura vocation à être utilisée contre n’importe qui au moment où le pouvoir en a besoin (c’est comme le fichage ADN). Dans les cités on est déjà passé à autre chose avec les lois contre les terroristes, euh les islamistes, non les barbus, enfin je veux dire les musulmans, bref… les noirs et les arabes. Et ça craint carrément.

    https://www.politis.fr/articles/2018/05/reprimes-pour-lexemple-38864
    #garde_à_vue #répression #sélection

  • Mineurs interpellés au lycée Arago : « Ils m’ont mis dans un bus avec les autres… J’ai eu très peur »

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/05/25/mineurs-interpelles-au-lycee-arago-ils-m-ont-mis-dans-un-bus-avec-les-autres

    Sur la quarantaine de jeunes arrêtés à Paris mardi, vingt-sept ont été déférés devant la justice et quatorze devraient être présentés à un juge des enfants. Leurs familles dénoncent des « mesures disproportionnées », l’institution assume.

    La dernière fois que Sophie a reçu un message de son fils, Paul [son prénom, comme tous ceux des mineurs cités, a été modifié], c’était un peu avant 20 h 30, mardi 22 mai. « Ils m’ont mis dans un bus avec les autres. Je ne sais pas où ils nous envoient, je garde espoir mais j’ai très peur », disait le texto.

    L’adolescent parisien de 17 ans, arrêté avec une centaine d’autres personnes – dont une quarantaine de mineurs – mardi dans la soirée, lors de l’occupation du lycée Arago (12e arrondissement de Paris), survenue après la dispersion du cortège de manifestants place de la Nation, a continué de correspondre avec son père, Christophe, jusque tard dans la nuit. « Après, sans doute que son téléphone s’est éteint », souffle celui-ci.

    « A 4 h 30 du matin, un coup de fil du commissariat nous a appris son placement en garde à vue », racontent les parents de cet élève au lycée Voltaire. En arrivant, jeudi au matin, devant le tribunal parisien où le cas de leur fils devait être examiné à 15 heures, le couple contenait difficilement son angoisse.

    Un « mouvement de foule »

    Pour Cécile et Christophe, comme pour les autres parents de mineurs déférés ce jeudi, la « situation est kafkaïenne ». On peut reprocher à leur enfant d’avoir été « au mauvais endroit au mauvais moment », assurent-ils. Mais pas d’avoir « anticipé une intrusion » ni même « voulu de la casse » – motifs pour lesquels la direction du lycée Arago a fait appel, « en codécision » avec le rectorat de Paris, aux forces de l’ordre.

    « Il y a eu un mouvement de foule, c’est pour ça que je me suis réfugié au lycée [Arago] », écrit Paul à ses parents ce mardi, vers 18 heures, comme pour justifier sa présence dans un établissement qui n’est pas le sien. « Ils tentent de barricader [les accès]. On est trop nombreux, ils ne pourront pas nous arrêter. J’ai peur mais il n’y a pas de casse », envoie-t-il à 18 h 34. Trois minutes plus tard, nouveau texto : « Ça va, c’est pacifique. J’ai juste peur d’un mouvement de foule. » 18 h 47 : « Apparemment ils vont juste nous jarter. » 18 h 52 : « Je ne suis pas bien mais je ne panique pas. »

    Peu avant 19 heures, Paul reprend : « On a décidé que quand les CRS arriveraient, on s’assiérait par terre, pacifiquement. J’espère juste qu’ils ne vont pas tarder et que je vais pouvoir sortir. » 19 h 29 : « Ils sont entrés et nous ont dit : on veut pas vous faire de mal. »

    Car et fourgonnettes

    D’un message à l’autre, le récit de l’arrestation prend forme : les occupants du lycée Arago sont évacués par petits groupes ; après contrôle de leur identité, ils sont rassemblés dans un car et des fourgonnettes.

    Pendant plusieurs heures, ils ignorent s’ils vont être relâchés ou non, disent leurs parents. Entassés, ils n’ont « pas accès aux toilettes », affirment certains, sont « laissés dans le noir », assure telle maman, n’ont « pas toujours à boire », avance une autre.

    « Au début, Margaux ne semblait pas inquiète, elle ne voyait pas pourquoi elle ne serait pas libérée rapidement », raconte la mère de cette lycéenne de 16 ans, élève au lycée Hélène-Boucher « pas du tout politisée », selon elle.

    « Mardi, elle n’avait pas participé à la manifestation, elle était simplement venue devant Arago, avec une camarade, pour retrouver un ami commun. » C’est un mouvement de foule qui la pousse à « se réfugier » dans l’établissement, assure sa maman. Entre elles deux aussi, le contact est maintenu par textos. Dans le bus, la panique gagne l’adolescente. « On est hyperstressés, on ne sait pas où ils nous emmènent », écrit-elle.

    Pierre, père d’un lycéen de 17 ans qui « n’en est plus à sa première manif », reconnaît-il, a lui aussi ressenti l’anxiété monter. « Au début, même dans le car, il est resté calme. Une rumeur circulait parmi les jeunes arrêtés : passées trois heures dans le bus, les policiers seraient obligés de les relâcher. Ils ont dû déchanter. »

    Des gardes à vue levées

    Leurs familles aussi qui, ce jeudi, attendaient au tribunal d’en savoir plus sur l’issue des gardes à vue, finalement toutes levées dans l’après-midi. Dans l’intervalle, une centaine de lycéens les avaient rejoints, porte de Clichy, pour manifester leur soutien aux cris de « Libérez nos camarades » ou de « Tout le monde déteste la police ».

    Pour canaliser l’émotion, sur le parvis du tribunal, parents et enseignants s’essayaient au recensement, difficile, de la « part d’élèves » parmi la centaine d’occupants du lycée Arago. « Une part très faible », défend-on au rectorat. De fait, seulement trois élèves arrêtés seraient scolarisés à Arago – un chiffre non confirmé par l’académie –, trois ou quatre autres au lycée Hélène-Boucher, deux viendraient du lycée Voltaire, deux de Victor-Hugo… Une dizaine de lycéens seraient venus de Montreuil.

    Leur devenir s’est précisé dans la soirée. Sur les vingt-sept mineurs déférés, quatorze devraient être présentés à un juge des enfants aux fins de mise en examen, a-t-on appris du parquet, et treize être présentés à un magistrat du parquet ou à un délégué du procureur pour rappel à la loi ou mesure de réparation pénale.

    Pour les autres – les mineurs non déférés –, quatre se sont vu notifier une convocation devant le juge des enfants, et sept une convocation devant le délégué du procureur. Une procédure a été classée et un mineur devrait être reconvoqué ultérieurement.

    Des salles vidées

    Des « mesures disproportionnées », aux dires des familles mobilisées. Mais pas pour l’institution. Car le récit que fait de l’« intrusion » dans son lycée la direction d’Arago n’a rien de « l’occupation pacifique » relatée par les familles.

    « Le lycée a été occupé en fin de manifestation par environ 130 personnes extérieures à l’établissement, a écrit la proviseure, le 22 mai, dans un courriel adressé aux enseignants, que nous avons pu consulter. Ils ont forcé l’accès principal du lycée côté Nation. Ils se sont répandus dans tout le lycée et en quelques minutes ont vidé treize salles de leur mobilier pour bloquer tous les accès extérieurs et ériger des barricades ».

    Gilles Pécout, recteur de Paris joint jeudi soir, fait lui aussi état d’une « intrusion violente et brutale » : « La réquisition a été décidée pour protéger l’établissement, affirme ce haut fonctionnaire, protéger le lycée, ses personnels, mais aussi les jeunes eux-mêmes, même si c’est parfois difficile pour eux de le comprendre. » Un dépôt de plainte a eu lieu, fait par ailleurs valoir le recteur.

    Polémique politique

    Dans les rangs du SNPDEN-Unsa, principal syndicat de chefs d’établissements, l’épisode n’est pas pris à la légère. « J’étais sur place le lendemain pour aider les collègues à remettre en état le lycée, témoigne Nicolas Bray, secrétaire académique adjoint de ce syndicat à Paris. Les dégâts sont importants ».

    « Et pourtant, le lendemain, à 8 heures, la plupart d’entre nous étions présents pour faire cours, témoigne Sylvie Vincent, professeure au lycée Arago syndiquée au SNES-FSU. Des dégradations, j’en ai vu. Dans ma salle, par exemple, il manquait l’estrade. Mais je n’ai pas constaté de tags, de portes fracturées ni même de vols de tablettes ou de matériel signalés suite à l’occupation ». En « salle des profs », les avis sont partagés, reconnaît-elle, autant sur les conséquences de l’occupation que sur la réponse apportée.

    La polémique a aussi rebondi sur le terrain politique : « Les interminables gardes à vue de lycéens sont un message clair », a estimé sur Twitter le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon. « Parmi les gens qui commettent des actes violents, vous avez aussi des mineurs, donc, à partir de là, les forces de police font respecter la loi », a rétorqué le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, interrogé en marge d’un déplacement dans le Gard.

    « Faire un exemple »

    Devant le tribunal de Paris, en revanche, l’analyse relayée ce jeudi, des parents aux enseignants en passant par les lycéens et les étudiants présents, allaient plutôt dans le même sens. « Pourquoi une telle sévérité, sinon pour marquer l’opinion ? », interroge Anne Nogard, parent d’élèves de la fédération FCPE, en évoquant une « manœuvre d’intimidation destinée à étouffer dans l’œuf les prochaines mobilisations de la jeunesse ».

    « L’Etat joue les cow-boys », renchérit Jo, étudiante juriste se présentant comme membre de la « team juridique de la mobilisation à la fac de Nanterre ». « Des lycées qui se mobilisent à un mois du baccalauréat, alors que tombent les premiers résultats de Parcoursup, ça peut être dangereux pour lui, souligne la jeune femme. Symboliquement, il joue le coup de force pour canaliser tout ça ».

    Analyse peu différente au sein de l’Union nationale lycéenne (UNL) : « Un lycée occupé, rejoint par des étudiants, ça faisait planer la menace d’un Tolbiac 2, avance son président Louis Boyard. Il fallait faire un exemple. »

  • The Hoochie Coochie Circus #4 « le blog Hoochie Coochie
    https://www.thehoochiecoochie.com/blog/2018/05/the-hoochie-coochie-circus-4-9-10-juin-2018

    rendez-vous les 9 et 10 juin à la Générale (Paris, bd Voltaire) pour cette nouvelle session d’un festival assez chouette. Si on a fini de découper, sérigraphier, patatograver, plier et coudre nos propres cochonneries, C. de Trogoff et moi y présenterons nos dernières expériences micro-éditoriales. Sinon, c’est bien quand même, faut venir (y’aura une expo Bertoyas, c’est déjà une raison suffisante pour se déplacer, non ?)

  • Explaining the Unexplainable - Issue 60: Searches
    http://nautil.us/issue/60/searches/explaining-the-unexplainable-rp

    During the Enlightenment, the French philosopher Voltaire called superstition a “mad daughter” and likened it to astrology. The leading thinkers of the time espoused reason and sought to explain the world through the scientific method. Today, we take a certain pride in approaching the world analytically. When faced with a confusing event, we search for its cause and effect. If we can determine why one action follows another, we can explain why it happened and when it might recur in the future. This makes the outcome reliable.The fact is that any of us can become superstitious given the right circumstances. You included.Take batters in baseball. Many sports fans believe that batting in professional baseball is the most difficult task in sports. Even the best batters only manage to get a (...)

  • Qui est Cunégonde ?

    https://fr.wikisource.org/wiki/Candide,_ou_l%E2%80%99Optimisme/Beuchot_1829/Chapitre_27

    Cunégonde et la vieille servent chez ce prince dont je vous ai parlé, et moi je suis esclave du sultan détrôné. Que d’épouvantables calamités enchaînées les unes aux autres ! dit Candide. Mais, après tout, j’ai encore quelques diamants ; je délivrerai aisément Cunégonde. C’est bien dommage qu’elle soit devenue si laide.

    Une première réponse
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Candide#Cun%C3%A9gonde

    Voltaire était ami avec une dame allemande, comtesse dans une minuscule principauté endettée. Ses déboires et son caractère auraient servi de source d’inspiration quand Voltaire inventa le personnage de Cunégonde. En réalité ce fut une femme extraordinaire féministe avant le mot.

    Charlotte Sophie von Bentinck Aldenburg
    http://www.correspondance-voltaire.de/html/bentinck.php

    Bentinck, Charlotte Sophie Gräfin von
    * 5.8.1715 Varel (Oldenburg), † 4.2.1800 Hamburg. (reformiert)
    https://www.deutsche-biographie.de/sfz3764.html

    Charlotte Sophie, countess Bentinck, her life and times, 1715-1800 : Le Blond, Aubrey, Mrs : Internet Archive
    https://archive.org/details/charlottesophiec01lebliala

    Full text of "Charlotte Sophie, countess Bentinck, her life and times, 1715-1800"
    https://archive.org/stream/charlottesophiec01lebliala/charlottesophiec01lebliala_djvu.txt

    CHARLOTTE SOPHIE, Countess Bentinck, nee Countess of Aldenburg, Sove-reign Lady of Varel, Kniphausen, etc. (to give her, once for all, her full title), lived in an extremely interesting period of European history. During the eighty-five years of her life from 1715 to 1800 France passed from Louis XIV
    through the age of Voltaire and Rousseau to the Revolution, and when Charlotte Sophie died Napoleon held all Europe in his grip. The Empire, under Marie Therese, and Prussia, under Frederick the Great, entered on the long struggle of the Seven Years* War, and Russia was for many years in the hands of Catherine II. Of what transcendent interest passing events must have been to a woman who was personally acquainted with all the people involved

    Charlotte Sophie von Aldenburg Bentinck (comtesse de, 1715-1800) : nom d’alliance
    http://data.bnf.fr/13174416/charlotte_sophie_von_aldenburg_bentinck

    Charlotte Sophie Bentinck – Wikipedia
    https://de.wikipedia.org/wiki/Charlotte_Sophie_Bentinck


    L’article en allemand est assez complèt contrairement à l’entrée en anglais.

    In Hamburg (ab 1768)
    Nachdem sich Charlotte Sophie mit mehreren deutschen Höfen überworfen hatte, zog sie 1768 nach Hamburg, wo sie über dreissig Jahre wohnte - länger als an keinem anderen Ort. Hier wohnte sie in prominenter Lage am Jungfernstieg Nr. 3, Ecke Neuer Wall und zog später ins ländliche Eimsbüttel. Wegen der engen persönlichen Beziehungen zur aristokratischen Gesellschaft der Generalstaaten und wegen ihrer zahlreichen Verwandtschaft in England verstand sie sich als Repräsentantin des Adels. In ihrem Salon, den sie aufgrund ihrer vielseitigen literarischen Bildung veranstaltete, verkehrten Diplomaten, die in Hamburg akkreditiert waren und dem Adel angehörten und nach 1789 Angehörige des französischen Adels, die vor den Schrecken der Revolution geflohen waren. Mit ihrem Salon bildete sie einen anerkannten Gegenpol zu den bürgerlichen Zirkeln in Hamburg. Einer dieser Zirkel, genauer der von Elise Reimarus und Margaretha Büsch, gab sich zum Zwecke der Abgrenzung den Namen „Theetisch“.

    Hamburg, Jungfernstieg 4-5, la maison Jungfernstieg 3 sur la Alster a fait place à un pavillon touristique.
    https://www.openstreetmap.org/search?query=Hamburg%20Jungfernstieg%204#map=19/53.55198/9.99343
    https://www.google.de/maps/place/Jungfernstieg+3,+20095+Hamburg/@53.5537658,9.9917507,3a,75y,48.88h,100.46t/data=!3m6!1e1!3m4!1sH2GLvHSTkbo8XIocg7cCeA!2e0!7i13312!8i6656!4m5!3m4!1s0x47b

    Schloss Bückeburg
    https://de.wikipedia.org/wiki/Schloss_B%C3%BCckeburg

    Les secrets de fabrication de « Candide »
    http://www.lefigaro.fr/livres/2007/11/08/03005-20071108ARTFIG00104-les-secrets-de-fabrication-de-candide.php?mode=im

    Voltaire a parlé de Ragotski dans le chap. XXII du Siècle
    de Louis XIV
     ; voyez tome XX. Ragotski est mort en 1785. B.

    François II Rákóczi — Wikipédia
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_II_R%C3%A1k%C3%B3czi


    Un admirateur et protégé de Louis XIV. , personnage dont se sert Voltaire pour ironiser la cour de Versailles et sa politique. Dans Candide il est mentionné comme le roi déchu Ragotski .

    Rákóczi, « L’Autobiographie d’un prince rebelle. Confession • Mémoires »
    https://www.notesdumontroyal.com/note/449

    Rákóczi Ferenc II Prince of Transylvania 1676-1735 [WorldCat Identities]
    http://www.worldcat.org/identities/lccn-n80019655

    Works: 679 works in 1,228 publications in 10 languages and 4,540 library holdings
    Genres: History Sources Biography Records and correspondence Fiction Art Pictorial works
    Roles: Author, Honoree, Editor, Other, Creator, Dedicatee, Signer
    Classifications: DB932.4, 943.91

    Candide ou le détour oriental de monsieur de Voltaire, Abdel Aziz Djabali, p. 93-112
    http://books.openedition.org/cedej/234

    #histoire #littérature #philosophie #politique

  • Gregory Klimov. The Terror Machine. Chapter 07
    http://g-klimov.info/klimov-pp-e/ETM07.htm

    In The Control Commission

    One afternoon General Shabalin sent for me. When I reported he handed me an invitation from American headquarters, asking him and his coworkers to take part in a conference at Frankfurt-on-Main to discuss the liquidation of the I.G. Farben Industry. “Take my car,” he said, “and drive to Zehlendorf. Hand in the list of our delegation, and find out when the plane leaves. If there isn’t a plane, obtain passes for us to use our cars for the journey.”

    It was five-fifteen when I arrived outside the American headquarters. ’Well, now I shall have to wait an hour for an interview,’ I pondered. ’And I’ve got to see Eisenhower’s economic adviser, but I haven’t any letter of introduction, only my personal documents.’

    I stopped the car at the gate and took out my documents. The American guard, in white helmet, white canvas belt, and white gaiters, raised his white-gloved hand in salute and seemed to be completely uninterested in my documents. To give some excuse for stopping the car, I asked him some meaningless question. Without speaking, he pointed to a board with an arrow and the one word: ’Information’. I drove past the Information Bureau slowly, and glanced back casually to see whether anybody was watching me. ’I’ll find what I want, myself; it’s a good opportunity to have a look round without trouble. I’ll see what sort of fellows these Americans are. They may not pull me up at once. And if necessary I’ll simply say I took the wrong way.’

    I strictly ordered Misha to remain in the car and not stir a step. Who knows whether he might be kidnapped, and then I’d lose my head!

    I went along a corridor. All the doors were wide open, the rooms were empty. Here and there German women cleaners were sweeping the floors. On each door was an ordinary tablet: ’Major So-and-so’ or ’Colonel So-and-so’, and the name of the department. What on earth did it all means? Not a sign of security precautions. We Soviet authorities did not hang out name-boards on the doors to inform our internal and external enemies who was inside.

    I felt a little uncomfortable, almost queer, with anxiety. As though I had got into a secret department by accident and was afraid of being caught. In search of the right room I looked at one nameplate after another and felt as though I was a spy going through the card index of an enemy General Staff. And I was in full Soviet uniform, too!

    One of our officers had once told me there was no point in visiting an American office after five p. m. “After that they’re all out with German girls,” he explained, and I couldn’t be sure whether his words expressed contempt or simply envy of American methods. “They think anyone who sits in an office after office-hours doesn’t know how to work or arrange his time.”

    ’He was right,’ I thought now. ’The Americans obviously don’t intend to work themselves to death. General Shabalin’s working day really begins at seven in the evening. I suppose I must apply to “Information” after all.’

    In the Information Bureau I found two negroes extended in easy chairs, their feet on the desk. They were chewing gum. I had some difficulty in getting them to understand that I wanted to speak to General Clay. Without stopping his chewing one of them called something incomprehensible through a small window into the next room. Even if I had been President Truman, Marshal Stalin, or a horned devil, I doubt whether he would have removed his feet from the desk or shifted the gum from his right to his left cheek. And yet ’Information’ functioned perfectly: a sergeant behind the window said something into a telephone, and a few minutes later an American lieutenant arrived and courteously asked me to follow him.

    In General Clay’s outer office a woman secretary was turning over the pages of a glossy magazine. ’She’ll probably put her feet on the typewriter too,’ I thought, and prudently sat down at a safe distance. While I was wondering whether to remain silent or enter into conversation with the ’Allies’, a long-nosed little soldier burst through the door leading to the general’s room. He tore through the outer office and snatched his cap down from a nail, saying a few hurried words to the secretary.

    ’The general must be a bit of a martinet, if his men rush about like that,’ I thought.

    At that moment the soldier held out his hand to me and let loose a flood of words which overwhelmed my weak knowledge of English. “General Clay,” the secretary said in an explanatory tone behind my back. Before I could recover my wits the general had vanished again. He wasn’t a general; he was an atom bomb! All I had under-stood was ’Okay’; and that the necessary order had already been issued. And in addition, that here it wasn’t at all easy to tell the difference between a general and a GI The privates stretched themselves out with their feet on the desk while the generals tore around like messenger boys.

    Another officer appeared at the same door, and invited me into his room. This time I prudently glanced at his tabs. Another general! Without offering me a chair, but not sitting down himself, the general listened to me with cool efficiency. Then he nodded and went out.

    I looked round the room. A modest writing desk. Modest inkstands. A thick wad of newspapers. A number of pencils. Nothing unnecessary. A room to work in, not to catch flies in. When a writing desk adequate for General Shabalin’s rank was required, all Karlshorst and all the booty warehouses were turned upside down. The inkstands were obtained specially from Dresden for him.

    A little later the American general returned and told me, apparently on the basis of a telephone conversation, when the aeroplane would be ready. I had plenty of opportunities to see later on that where we Soviet authorities would demand a ’document’ signed by three generals and duly stamped, the Americans found a telephone conversation sufficient.

    I did not have to present the list of the Soviet delegation at all. Here everything was done without resort to a liaison service and without any counter-check by the Ministry of Internal Affairs! The general handed me a packet of materials on the I.G. Farben Industry, so that we could familiarize ourselves with the tasks of the conference.

    Next morning the Soviet delegation, consisting of General Shabalin, Lieutenant-Colonel Orlov, Major Kuznetsov, two interpreters, and myself went to the Tempelhof landing ground. There the sergeant on duty explained that he had been fully informed concerning us, and spent a little time in phoning to various offices. Then he asked us to wait, as our plane would be starting rather later than arranged. I had the feeling that the Americans were holding up our departure for some reason. Machines rolled slowly on to the tarmac in the distance, but not one of them showed the least intention of taking us with it. The general swore, and, as he did not know whom to vent his anger upon, he turned to me. “What did they really say to you yesterday? Why didn’t you get it in writing?”

    “I was quite clearly informed,” I answered; “this morning at ten, the Tempelhof airground. A special machine would be waiting for us, and the airport commandant was notified.”

    The general clasped his hands behind his back, drew his head down between his shoulders, and marched up and down the concrete road outside the building without deigning to give us another glance.

    To pass the time. Major Kuznetsov and I began to make a closer inspection of the landing ground. Not far away an American soldier in overalls was hanging about, giving us inquisitively friendly glances, and obviously seeking an excuse to speak to us. Now a blunt-nosed Douglas rolled up to the start. During the war these transport machines had reached the Soviet Union in wholesale quantities as part of the lend-lease deliveries; every Russian knew them. The American soldier smiled, pointed to the machine, and said:"S-47."

    I looked to where he was pointing, and corrected him: “Douglas.” He shook his head and said: “No... no. S-47. Sikorsky... Russian constructor....”

    ’Was it really one of Igor Sikorsky’s designs?’ I wondered. Sikorsky had been the pioneer of Russian aviation in the first world war, and the constructor of the first multi-engine machine, Ilya Mourometz. I knew that, like Boris Seversky, he was working in the field of American aviation, but I had not known that the Douglas was his job. It was interesting that Pravda hadn’t taken the opportunity to make a big song of it.

    The soldier pointed his finger first at the clock, then into the sky. With his hand he imitated a plane landing, and explained as he pointed to the ground: “General Eisenhower.”

    ’Well, if General Eisenhower’s arriving,’ I thought, ’that probably explains why we couldn’t start.’

    While we were talking to the soldier a machine grounded just behind us, and a group of cheerful old gentlemen poured out of it. Like a horde of children just out of school they surrounded General Shabalin and began to shake his hand so heartily that you would have thought it was the one thing they had flown from America for. The general was carried away by their exuberance and shook their hands in turn. Later it transpired that they had mistaken Shabalin for General Zhukov. Meanwhile, Lieutenant-Colonel Orlov had found out somewhere that these gay old boys were American senators, who were on their way to Moscow. He whispered this news into the general’s ear, but it was too late. Shabalin had already exchanged cordial handshakes with these sworn enemies of the communist order.

    All around them, camera shutters were clicking. The senators seemed to get a great kick out of posing with General Shabalin, holding his hands. The general had little wish to be photographed in such compromising company, but he had to put a good face on it. He was quite convinced that all these photos would find their way into the archives of some foreign secret service, and thence into the archives of the Narcomvnudel. And then the fat would be in the fire.

    Major Kuznetsov asked Lieutenant-Colonel Orlov incredulously: “But are they really senators?”

    “Yes, and the very worst of them all, the Senate Political Commission,” Orlov replied.

    “But they don’t look at all like capitalists.” Kuznetsov still felt dubious.

    “Yes, they look quite harmless; but they’ve got millions in their pockets. They’re cold-blooded sharks,” Orlov retorted. Evidently he regarded it as a mortal sin to have money in one’s pocket. But then, he was a dyed-in-the-wool party man.

    “So they’re the lords of America, and they behave like that. Now if one of our ministers....” Kuznetsov’s reflections were interrupted by the arrival of a column of closed cars, which drove straight on to the landing ground. A group of Soviet officers stepped out. The gold braid on their caps and the red piping on their coats showed that they were generals.

    “Now we’re in for a parade!” Kuznetsov muttered. “That’s Marshal Zhukov and all his staff. We’d better take cover in the bushes.”

    General Shabalin seemed to be of the same opinion. He had not been invited to this meeting, and to be an uninvited guest of Marshal Zhukov was rather a ticklish matter. But his general’s uniform made it impossible for him to hide behind others’ backs.

    In this hour of need the lively old gentlemen from America came to the rescue. With unreserved ’Hellos’, friendly handshakes and back-slayings, an unstained, friendly atmosphere was created. “I like these senators!” Kuznetsov enthused. “They slap hands together like a lot of horse-dealers at a market. Great old boys!” He licked his lips as though he had just drunk to brotherhood with the American senators.

    Marshal Zhukov, a medium-sized, thickset man with a prominent chin, always dressed and behaved with unusual simplicity. He took hardly any notice of the bustle all around him, but seemed to be waiting for the moment when they would come at last to business. Unlike many other generals who owed their career to the war, by all his bearing he clearly showed that he was only a soldier. It was characteristic of the man that, without any encouragement from official Kremlin propaganda, he had become known all over Russia as the second Kutuzov, as the savior of the fatherland in the second great patriotic war.

    The airground grew more and more animated. Forces of military police in parade uniforms marched on. The servicing personnel hurried to and from. A guard of honor took up its position not far from us.

    A four-engine machine landed quietly. The swarm of autograph hunters suffered disillusionment: double rows of guards swiftly and thoroughly cut them off from the landing spot.

    Major Kuznetzov looked at the guards and remarked: “Clean work! Look at those cutthroats. They must have been taken into the army straight from gangsterdom.”

    The first line of military police was certainly an impressive lot. They looked pretty sinister, even though they were clean-shaven. The second line might well have been pugilists and cowboys, mounted not on horses but on motorcycles that made more noise than aeroplanes.

    Meanwhile the guard of honor had begun to perform some extraordinary exercise. The men raised their arms shoulder-high and spread out as though about to do Swedish gymnastics. Decidedly inept and un-military by our standards. “It reminds me of operetta,” Kuznetsov said to the lieutenant-general. “What are they doing that for?”

    Orlov waved his hand contemptuously. “Like senators, like soldiers! They’re chocolate soldiers. Give them black bread to eat and they’d be ill.”

    “Are you so fond of black bread then?” Kuznetsov sneered. “Or are you simply concerned for well-being of your fellowmen, as usual?”

    Orlov ignored the questions. He was attached to our delegation as a legal expert. Also, he was public prosecutor to the military court, and knew well enough what might be the consequences of talking too frankly.

    General Eisenhower stepped out of the plane, wearing a soldier’s greatcoat, the usual broad grin on his face. He greeted Marshal Zhukov. Then he signed a few autographs, asked where they could have breakfast, and took Zhukov off with him.

    Hardly had the distinguished guests departed when the dispatcher announced that our plane was ready to start. Now we knew why we had had to wait so long.

    A man in the uniform of an American brigadier-general addressed General Shabalin in the purest of Russian. Apparently he had learnt that we were flying to Frankfurt, and now he offered us his services. He spoke better Russian than we did, if I may put it so. He had left Russia thirty or more years before, and spoke the kind of Russian common in the old aristocratic circles. Our speech had been modified by the new conditions, it was contaminated with jargon and included a mess of new words.

    I had no idea why Eisenhower and Zhukov were flying to Russia. The Soviet papers carried no official communiqué on the subject. A week later, as I was making my usual report to General Shabalin, he asked me: “Do you know why Eisenhower flew to Moscow?”

    “Probably to be a guest of honor at the recent parade,” I answered.

    “We know how to be hospitable,” the general said. “They entertained him with such excellent vodka that he sang songs all night. Arm in arm with Budionny. They always bring out Budionny as an ornament on such occasions.” Apparently that was all the general knew about Eisenhower’s visit to Moscow; but he put his finger to his lips, then wagged it admonitorily.

    Such small incidents clearly revealed the true position of the man who was deputy head of the S. M. A. He was really nothing but an errand-boy, and only by accident knew what was happening ’above’.

    An American officer stepped into Major Kuznetsov’s room. He thrust his cap in the hip pocket of his trousers, then swung his hand up to his uncovered head in salute. After which he introduced himself in the purest of Russian: “John Yablokov, captain of the American Army.”

    Kuznetsov was a very intelligent man, but he was also a humorist and a bit of a wag. He replied to the American with: “Greetings, Ivan Ivanovich! How do you do!”

    The American Ivan Ivanovich seemed to be no greenhorn, and he did not allow the major’s sneering smile to put him out. In fact, it transpired later that John Yablokov was one of those men who are the life and soul of the party. Either to please us or to show that, although American, he was a progressive; he rejoiced our ears with a flood of Russian oaths that would have brought down the Empire State Building. But that was later. At the moment Captain Yablokov had arrived on an official visit to invite General Shabalin to the first organizational conference of the Control Commission Economic Directorate. The general twisted the invitation and the agenda paper (both were in English) between his fingers. Trying not to reveal that English was all Greek to him, he asked: “Well, what’s the news your way?”

    A second American officer who had accompanied Captain Yablokov answered also in Russian: “Our chief, General Draper, has the honor to invite you to a...” He did not seem very well acquainted with the terminology of Red conferences, and was forced to fall back on the wording of the invitation: “... to a meeting, General.”

    Now the general was seated comfortably in the saddle. He did not know English, but he knew the Stalinist terminology thoroughly. He gave the American the sort of look he had given subordinate Party officials in his capacity as secretary of the Sverdlovsk District Party Committee, and explained in a hortatory tone: “We have to work, not attend meetings.”

    That was a standing Stalinist phrase, which all party officials used as a lash. But at this juncture it sounded rather rude. However, the general held to the principle that too much butter can’t spoil any bread, and that Stalin’s words can never be repeated enough.

    I sat in a corner and enjoyed myself immensely. The general would be starting to give the Americans a lecture on party training next. As was his habit in intercourse with foreigners, he observed the unwritten law never to trust one interpreter and always to apply the method of cross-examination, especially when the interpreter belonged to the other camp. While the Americans did their best to explain what they meant by a ’meeting’, I, too, attempted to help. The general never liked being prompted, but he always snorted afterwards: “Why didn’t you say so before?” So I tactfully observed: “It’s not really important, Comrade General. Let them hold their meeting and we’ll work.”

    After we had settled a number of minor questions the Americans went back to their Chevrolet and drove home. Major Kuznetsov remarked: “But they could talk excellent Russian. The one with the little mustache looked like Douglas Fairbanks.” The general pulled him up: “You can see at once what sort of birds they are. That fellow strikes me as Chinese. They’re spies.”

    The general appeared to fathom the true nature of his future colleagues extraordinarily well! A few days later, during a talk, Captain Yablokov informed me quite frankly that he had formerly worked in the American secret service in China. He did not appear to think he was in any way betraying service secrets. If a Soviet officer had mentioned such a fact he would have been committing a serious breach of his duty.

    Some days later we drove to the first meeting of the Control Commission; we went with the firm intention of working and not holding meetings. The Allied Control Commission had taken over the former Palace of Justice in Elshoizstrasse. The conference hall was almost empty; the delegations were only just beginning to assemble. I felt genuinely afraid that I would be exposed to ridicule: we had no interpreter with us, and I didn’t know English too well. When I mentioned this to the general he told me curtly: “You should know!” Another Party slogan, but it didn’t make things any easier for me. Until the meeting was officially opened we relied on German, for all the Allies without exception could speak German more or less well.

    When the general noticed that I was talking to French and English colleagues he barked at me as he passed: “You wait, Major, I’ll cure you of your mock modesty! You and your ’don’t know English’! Now you’re talking away, even to the French, nineteen to the dozen, but you never told me you knew French.” It was hopeless to think of explaining. And the general would probably stick me in a comer to exercise control over the French interpreters too, as he had done with the Americans.

    That, too, was due to the general’s Party experience. It is a common thing in the Soviet Union for specialists and experts to dodge responsible posts. Gifted engineers, or former directors of large trusts and combines, get appointments as ’technical managers’ to some small factory or a cooperative of war-wounded, which employs only five or six workmen. In such positions they are less exposed to the risk of being flung behind the bars as ’saboteurs’, and so they keep quiet about their abilities and their diplomas. The Party officials are aware of this trick, and do their utmost to round up the ’pretenders’. And so even if you try to escape responsibility you’re in the wrong: you’re a ’passive saboteur’.

    I breathed a sigh of relief when I discovered that the American and British delegations had first-class Russian interpreters.

    Another difficult problem for me was my uniform. I looked as though I had covered the entire journey from Stalingrad to Berlin crawling on my belly. My uniform had been washed in all the rivers of Russia and Eastern Europe, the color had faded from it completely; in addition, I was wearing ordinary military boots. Before we drove to the conference General Shabalin gave me a critical look up and down and snarled: “Haven’t you got any shabbier-clothes you can wear?” He knew quite well that I had left my good uniforms in Moscow as an iron reserve.

    Many of us took the view that, after all, the army wasn’t a puppet-show, and in any case children were running about naked at home. One man had a little sister, another a young nephew. Warm clothes or breeches could be made for them out of a uniform, and the kids would be hugely delighted: “Uncle Gregory has fought in this uniform,” the child would say, pointing proudly to the holes left by the pins of orders. I, too, had left several complete outfits in Moscow. In any case I would be getting the so-called ’Foreign Equipment’ when I reached Berlin. Only I had overlooked the possibility that I would have to take part in meetings of the Control Commission before the new equipment arrived.

    As our Administration for Economy developed its organization and activities, more and more men arrived from Moscow to work with us. Usually, deputies of the People’s Commissars for the corresponding Moscow commissariats were appointed heads of the S. M. A. departments, which in practice were functioning as the ministries of the Soviet zone. One and all, these men were old Party officials, specialists in the running of Soviet economic affairs. When they took over their new posts one could hardly avoid laughing: they were pure crusaders of communism.

    In due course we were rejoiced at the sight of the newly appointed head of the Industrial Department, Alexandrov, and his deputy, Smirnov. They both wore squeaking, highlegged boots of Stalin pattern, which its creator had himself long since discarded. Above the boots they had riding breeches of heavy overcoating material, and to crown this rigout they had dark blue military tunics dating from the period of revolutionary communism. At one time such attire was very fashionable among Party officials, from the local chairmen of Machinery-Tractor Stations right up to People’s Commissars, for it was symbolical not only of outward, but of inward devotion to the leader. For a long time now the People’s Commissars had been wearing ordinary European clothes, and one came across antiquated garb chiefly in remote collective farms. I can imagine what sort of impression these scarecrows made on the Germans; they were exact copies of the Hitlerite caricatures of bolsheviks.

    It was not long before these over-zealous Party crusaders them-selves felt that their historical costumes were hardly suited to the changed conditions, and gradually began to adapt themselves to their surroundings. Later still, all the civilian personnel of the S. M. A. were dressed in accordance with the latest European fashions, and even with a touch of elegance. All the leading officials, especially those occupied in the Control Commission, received coupons en-titling them to ’foreign equipment’ corresponding with their position.

    I stood at a window, talking to the head of the French delegation, General Sergent. Our conversation was on quite unimportant subjects, and I prudently tried to keep it concentrated on the weather. Prudence was always advisable; this Frenchman might be a communist at heart, or in all innocence he might repeat our conversation to someone, and in the end it would find its way... I knew too well from my own experience how thoroughly our secret service was informed of all that went on among the Allies.

    When we Soviet officers working in the Control Commission discussed our impressions some time later I realized why we were all cautioned against talking with foreigners. A captain remarked: “All these stories about spies are only in order to make us keep our mouths shut. It’s to prevent our giving away other secrets.” He said no more; we didn’t talk about those secrets even to each other.

    The Control Commission session began punctually at ten o’clock. After settling the details of the agenda relating to the work of the Economic Directorate, the times of meeting, and the rotation of chairmanship, we turned to drawing up the agenda for the next meeting. The head of the American delegation, which was chairman at this first meeting, proposed that the first item on the agenda should be: ’Working out of basic policy for the economic demilitarization of Germany.’

    The Potsdam Conference had ended the previous week; at the conference it had been decided to demilitarize Germany economically, so that restoration of German military power would be impossible, and to draw up a peacetime economic potential for the country. The decision was remitted to the Allied Control Commission to be put into effect.

    The interpreters now translated the chairman’s phrase into Russian as: ’Working out the policy of economic demobilization.’ Another of those borderline cases in linguistics! The English formula had used the word ’policy’. The interpreters translated this literally into the Russian word ’politik1, although the English word had a much wider meaning, and the Russian phrase for ’guiding principles’ would have been a more satisfactory translation.

    At the word ’politick’ General Shabalin sprang up as though stung. “What ’politick’? All the political questions were settled at the Potsdam Conference!”

    The American chairman. General Draper, agreed: “Quite correct, they were. Our task is simply to translate the decision into action, and so we have to lay down the guiding policy...”

    The interpreters, both American and English, again translated with one accord: “... ’Politick’.”

    General Shabalin stuck to his guns: “There must be nothing about politics. That’s all settled. Please don’t try to exert pressure on me.”

    “But it’s got nothing to do with politics,” the interpreters tried to reassure him. “The word is ’policy’.”

    “I see no difference,” the general objected. “I have no intention of revising the Potsdam Conference. We’re here to work, not to hold meetings.”

    That was the beginning of the first hour-long battle round the oval table. Solely and simply over the awkward word ’policy’, which General Shabalin was not prepared to see in the agenda or in the minutes of the meeting.

    It was often said in the economic spheres of the S. M. A. headquarters that the Kremlin regarded the decisions of the Potsdam Conference as a great victory for Soviet diplomacy. The Moscow instructions emphasized this aspect at every opportunity. At the Potsdam Conference the Soviet diplomats won concessions from the Western Allies to an extent that the diplomats themselves had not expected. Perhaps this was due to the intoxication of victory and an honorable desire to recompense Russia for her heroic exertions and incredible sacrifices. And perhaps it was due to the circumstance that two new Allied representatives took part in the conference, and that President Truman and Mr. Attlee had not yet got to the bottom of the methods of Soviet diplomacy.

    The Potsdam Agreement practically gave the Soviet Union the right of disposal of Germany. Its terms were expressed in very subtle language, and they were open to various constructions later on, whenever it seemed desirable. The task of the S. M. A. now was to extract full value from the advantages won by Soviet diplomacy. “Nothing of politick!” General Shabalin defended himself like a bear threatened with a javelin. And in all probability he was thinking: ’Do you want to send me to Siberia?’ Once more the old reaction of even the highest of Soviet officials, not to do anything on their own responsibility and risk. One reason why all decisions is made from above.

    Subsequently I myself saw that the American or the British delegation could change its decisions in the actual course of negotiations. But the Soviet delegation always came and went with previously formulated decisions, or else with red questionmarks on the appropriate document, which the general kept in a red document-case always under his hand. At the Control Council he acted more like a messenger than an active partner. A question that arose in the course of discussion was never decided the same day, it was only discussed.

    Then the general would return to his office and make direct telephonic contact that night with Moscow. Usually Mikoyan, a member of the Politburo and plenipotentiary extraordinary for Germany under the Ministerial Council of the U. S. S. R., was at the Moscow end of the line. He was in effect the Kremlin’s viceroy for Germany. And during those telephone conversations the decisions were taken, or rather the orders were issued, on which the Allied delegations later broke their teeth.

    Even at that first meeting with the Allies one could not help noticing a great difference between them and us. They welcomed us as joint victors and sincere allies in war and peace. Each of their delegations approached questions from the national aspect. And they considered that there could be no conflict of national interests or antagonisms among us victor powers, neither then nor in the immediate future. They assumed that this was a simple fact that must be as clear to us as it was to them.

    We, on the other hand, regarded the ’Allies’ as the opposing party, as enemies with whom we had to sit at the one table only for tactical reasons. We decided questions from the ideological aspect. The Allies believed that Marx and Lenin were dead. But now the shades of these two men stood behind us in the Control Commission conference hall. The Allies could not understand that? So much the worse for them!

    Generally speaking, the members of the delegations not only represented their state interests, but were also unusually typical representatives of their respective nations. Of course this doesn’t mean that Dimitry Shabalin smoked the coarse Russian Mahorka tobacco or that William Draper chewed gum. Not, at any rate, during the sessions.

    The American delegation was headed by the American director in the Economic Directorate, General William Draper: a thin, athletic figure, with angular, swarthy features-a lively and energetic man. When he laughed, he revealed the spotless white of strong, wolfish teeth beneath his black mustache. Better not put your finger between those teeth! He set the tone at the sessions, even when he was not in the chair. He had an abundance of the healthy energy peculiar to young, self-confident nations. I don’t know how many millions General Draper really had in his pocket, I know only that General Shabalin remarked more than once: “Ah! A millionaire! A shark!” It would have been interesting to know what he based his remark on: his communist beliefs or the reports of our secret service.

    The head of the British delegation and the British director of the Economic Directorate were Sir Percy Mills. A typical Briton. He gave off the smell of fog and Trafalgar Square. He wore a military uniform of thick cloth, with no insignia of rank. From the way everybody deferred to his opinion it was obvious that he was a recognized authority in the economic field. According to General Shabalin he was a director of the large British firm of Metro-Vickers. He was painfully clean-shaven; if he ever thought it necessary to smile, only the folds around his mouth came into action, while his eyes remained fixed on his documents and his ears listened closely to his numerous advisers.

    In the person of Sir Percy Mills, Great Britain worked hard, but always paid attention to the voice of its young ally and victorious rival, America.

    At the conference table of the Control Commission the historical changes that had occurred in the world influence of the various great powers were very perceptible. Great Britain had played out her role, and now, with a pride born of self-confidence, was surrendering her place to the younger and stronger. As befitted a gentleman!

    France was the reflection of all the greatness to be found in European culture. But only the reflection. Her representatives were the successors to Bonaparte and Voltaire, the contemporaries of Pierre Petain and Jean-Paul Sartre. Existentialism. How to keep one’s head above water. The French director of the Economic Directorate, General Sergent, had nothing better to do than to maneuver as tactfully as possible, and not agree too completely with the West, nor be too much in opposition to the East.

    The great Eastern Ally was represented by General Shabalin, a man who had a mortal terror of the word ’politick’, and by Major Klimov, who simultaneously performed the duties of secretary, interpreter, and general adviser. The Soviet side could have been represented just as successfully by one man to act as a postman. However, in those days I still naively believed that something was really being decided in those meetings. And, although we were armed to the teeth with communist theory, I felt really uncomfortable when I noted the large size of the other delegations and the sort of men who composed them.

    ’Nothing new in the West.’ The Allies, as one man, clung to the word ’policy’, while for three hours General Shabalin repeated: “Nothing of politick... At the Potsdam Conference....” In confirmation of his views he took a newspaper from his document-case and pointed to a passage underlined in red. Then his fellow-members in the commission also brought out newspapers and began to compare the texts. Truly, it was very interesting to take part in one session of the Control Commission; it was more interesting than the operetta. But to take part in them week after week was dangerous: one might easily have a nervous breakdown. Half a day spent in fighting over one word in the agenda for the next meeting!

    The members of the other delegations looked more and more frequently at their watches. The Western European stomach is used to punctuality. At last even General Shabalin lost his patience and he officially demanded: “What is it you really want to do to me: violate me? Yes?” The interpreters wondered whether they had heard aright, and asked irresolutely, not knowing whether to regard his remark as a joke: “Are we to translate that literally?”

    “Of course, literally,” the general obstinately replied.

    Sir Percy Mills tried to indicate that he found it highly amusing, and twisted his lips into a smile. The chairman for the session, General Draper, rose and said: “I propose that we adjourn the meeting. Let’s go and have some eats.” It was difficult to tell whether he really was hungry or whether he was fed up with Soviet diplomacy. Everybody breathed more easily, and the sitting ended.

    We departed as victors. We had won a whole week. The same night General Shabalin would be able to ask Comrade Mikoyan whether the word ’politick’ could be included on the agenda or not.

    While we were holding our meeting, the Special Committee for Dismantling, and the Reparations Department, with General Zorin at its head, was hard at work. The Allies would be faced with an accomplished fact. Okay! In the last resort each defends his own interests.

    The Control Commission gave me my first opportunity to get to know our Western Allies personally. During the war I had come across, or rather seen, many Americans and British in Gorky, and later in Moscow. But I had then had no official excuse for personal contact with them, and without the special permission of the Commissariat for Internal Affairs even the most harmless acquaintance, even a conversation with a foreigner, is sheer lunacy in the Soviet True, there is no open interdiction, but every Soviet citizen knows exactly what unfortunate consequences are entailed by such thoughtless behavior. Give a foreigner a light for his cigarette in the street and you are hauled immediately before the Ministry for Internal Affairs and subjected to strict interrogation. That, at the best. At the worst, one disappears into a Minvnudel camp, for ’spying’, and thus one helps to fill out the labor reserve.

    To stop all contact between Soviet people and foreigners, the Kremlin spreads the story that all foreigners are spies. So anybody who has any contact with a foreigner is also a spy. It’s as simple as that.

    One of the Soviet government’s greatest achievements has been to raise lawlessness to a law, with all the paralyzing fear of ’authority’ that follows from it. Every individual lives in a state of anxiety. The Kremlin exploits this mood as a highly effective means of training and guiding the masses. Not even the members of the Politburo are free from it.

    Once, after one of the usual fruitless debates in the Control Commission, Sir Percy Mills proposed that we adjourn, and then invited the members of the other delegations to lunch with him.

    General Shabalin went and rode with his British colleague. I had received no instructions whatever so I got into the general’s seat in our car and ordered Misha to drive immediately behind the one in which our chief was traveling. I entered Sir Percy’s house with decidedly mixed feelings. All the guests left their hats and document-cases on a small table or on the hallstand. The maid-servant took my cap from me, and held out her hand to take my document-case. I was at a loss to know what to do; it was the general’s red case that I was carrying. It had nothing of importance in it: just the minutes of the last sitting, which on this occasion had been sent to us by the British. I couldn’t leave the case in the car, but to leave it on the hall table with the others would have been a crime against the State. Yet to take it with me looked rather silly.

    General Shabalin himself rescued me from my awkward situation. He came across to me and said quietly:

    “What are you doing here. Major? Go and wait for me in the car.”

    I felt relieved, went out, got into our car, and lit a cigarette. A few minutes later a British captain, Sir Percy Mills’ adjutant, came to the door and invited me in again. I tried to get out of it by saying I wasn’t hungry, but he stared at me in such bewilderment that there was nothing to be done but follow him. As I entered the hall where the guests were waiting the general gave me a sidelong look, but said nothing. Later it transpired that our host had asked his permission to send the adjutant for me. The British are justly famous as the most tactful people in the world.

    I gave the document-case to the general. Of all the idiotic possibilities that seemed the most harmless. Let him feel a fool!

    I stood at a great Venetian window looking out on to the garden, and talked to Brigadier Bader. The brigadier was a real colonial wolf. Sandy, sunbleached hair and eyebrows, gray, lively eyes behind bleached eyelashes, a complexion dry with the tropical sun. According to General Shabalin’s amiable description he was nothing less than one of the cleverest of international spies. And now I had the honor of chatting with this distinguished person. We talked in a mixture of English and German.

    “How do you like being in Germany?” he asked.

    “Oh, not bad!” I answered.

    “Everything’s kaput,” he went on.

    “Oh yes, ganz kaput,” I agreed.

    After disposing of German problems we turned to others. The summer of 1945 was unusually hot, and I asked:

    “After the English climate, don’t you find it very hot here?”

    “Oh no, I’m used to the heat,” he smiled. “I’ve spent many years in the colonies, in Africa and India.”

    I carefully avoided addressing my companion directly. What form of address was I to use? ’Herr’? That was rather awkward. To our ears ’mister’ sounds contemptuous. ’Comrade’? No, for the time being I kept off that word.

    Just then I noticed General Shabalin’s eyes fixed on me. In all probability my chief was afraid the brigadier was already enrolling me as his agent. At that very moment a maid came up to us with a tray. Bader took one of the small glasses of colorless fluid, raised it to eye-level, and invited me to help myself. I put the glass to my lips, then set it down on the windowsill. While the brigadier had his eyes turned away for a second I threw the whisky out of the window. Stupid, I know, but it was the only thing to be done. And the worst of it was that the general would never believe I had performed such a patriotic act. Whether flung down my throat or out of the window, that whisky would be put to the debit side of my personal account.

    An air of open cordiality and hospitality reigned in the room where we were waiting for Sir Percy Mills to take us to lunch. This inter-national assembly felt no constraint in face of that variety of uniforms and babel of tongues. Only the Soviet delegate Kurmashev, head of the S. M. A. Fuel and Power Department, sat alone in his easy chair, one leg crossed over the other, and apparently suffering torments. He felt more uncomfortable than a missionary among cannibals; he wiped the sweat from his forehead and looked again and again at the clock. When we were invited to the dining room he clearly heaved a sigh of relief. I am sure he would have been only too glad to talk to his neighbor, even if he had had to resort to sign language; he would have been delighted to laugh and toss off a couple of whiskies. But he was not a man like other men. He was the representative, and the slave, of communist philosophy.

    At table General Shabalin sat on the right hand of his host, who conversed with him through an interpreter. His uniform gave him confidence and certainly more sureness than was possessed by Kurmashev, who was a civilian. But in his civilian clothes Kurmashev tried to show that he was completely indifferent to all that went on around him, and tackled his food with the utmost ferocity. It was no easy task to fill your mouth so full that you couldn’t talk with your neighbors.

    My chief smiled formally and forced out a laugh at Sir Percy’s jokes. But for his part he made no attempt to keep the conversation going. No wonder the British think it difficult to talk to Russians not only at the conference, but even at the dining table. At one time we contemptuously called the English narrow-minded; now the boot is on the other foot.

    I was sitting at the far end of the table, between Brigadier Bader and the British adjutant. As I chanced to look up from my plate I met General Shabalin’s eyes gazing at me keenly. The longer the lunch continued the more the general eased his bolshevik armor plate, and finally he went so far as to propose a toast to our host. But meanwhile he gave me frequent interrogative glances.

    Of course I knew the general was in duty bound to keep an eye on me. But I noticed that he was not so much watching me as attempting to decide whether I was watching him. He was firmly convinced that I had been set to watch over him. Kurmashev was afraid of the general, the general was on his guard against me, and I distrusted myself. The higher one climbs in the Soviet hierarchy, the more one is gripped by this constant fear and distrust.

    And the one who suffers most of all from this remarkable system is its creator. When one observed how Soviet higher officials suffered from fear and distrusts one lost all desire to make a Soviet career. General Shabalin had been unquestionably a much happier man when he was minding sheep or tilling the soil.

    After lunch we all gathered again in the hall. Brigadier Bader offered me a thick cigar with a gold band, and wrapped in cellophane. I turned it over curiously in my fingers. A real Havana! Hitherto I had known them only from caricatures, in which millionaires always had them stuck between their teeth. With the air of an experienced cigar-smoker I tried to bite off the tip, but that damned cigar was tough. I got a mouthful of bitter leaf, and to make matters worse I couldn’t spit it out.

    “How did you like the food?” the brigadier asked genially.

    “Oh, very good!” I answered as genially, carefully blowing the bluish smoke through my nose.

    At that moment General Shabalin beckoned to me. I asked the brigadier’s pardon, prudently stuck the cigar in a flowerpot, and followed my chief. We went out into the garden, as though we wanted a breath of fresh air.

    “What have you been talking about with that...?” the general muttered, avoiding mention of any name.

    “About the weather, Comrade General.”

    “Hm... hm....” Shabalin rubbed his nose with the knuckle of his forefinger, a trick of his during conversations of a semi-official nature. Then he unexpectedly changed his tone:

    “I think there’s nothing more for you to do here. Take a day off. Have my car and go for a drive through Berlin. Take a look at the girls....”

    He made a very frivolous remark, and smiled forcibly. I listened closely as I walked with him about the garden. What did all this condescension and thought for me mean?

    “Call up Kuznetsov this evening and tell him I shall go straight home,” was the general’s final word as he went up the verandah steps.

    So he had no intention of returning to the office today. There all the ordinary routine was waiting for him, to keep him as a rule till three in the morning. That was not compulsory, it was his duty as a bolshevik. He must be around in case the ’master’ called him up in the middle of the night. But now, after a very good lunch and a few glasses of wine, he felt the need to be a man like other men for a few hours at least. The comfort of the villa and the open cordiality of the company had had its effect even on the old Party wolf. Just for once he felt impelled to throw off the mask of an iron bolshevik, to laugh aloud and smack his colleagues on the shoulders, to be a man, not a Party ticket. And he thought of me as the eye and ear of the Party. So he was dismissing me on the pretext of being kind to me.

    I returned to the house, picked up my cap as unobtrusively as possible, and went out. Misha was dozing at the wheel.

    “Ah, Comrade Major!” He gave a deep sigh as I opened the door. “After a lunch like that, what man wouldn’t like to stretch himself out on the grass and sleep for an hour or two!”

    “Why, have you had some lunch too?” I asked in surprise.

    “What do you think! I’ve eaten like a prince.”

    “Where?”

    “Why, here. A special table was laid for us. Like in the fairy story. And do you know what, Comrade Major?” He looked sidelong at me, with all the air of a conspirator. “Even our general doesn’t have such good grub as I’ve had today.”

    After seeing Sir Percy Mills’ house, I could not help comparing it with General Shabalin’s flat. In the Control Commission the habit developed for the directors to take turns in inviting their colleagues home. The first time it was Shabalin’s turn to issue the invitations he ignored the habit, as though he had forgotten it. The real reason was that he had no place to which he could invite the foreigners.

    Of course he could have requisitioned and furnished a house in conformity with his rank. But he could not bring himself to do this on his own responsibility, while the head of the Administrative Department, General Devidov, simply would not do it for him, since under the army regulations such luxury was incompatible with the position of Soviet generals. The authorities had got to the point of providing special ’foreign equipment’, but nobody had yet thought of suitable residences. Shabalin had exchanged his small house for a five-roomed apartment in the house where most of the workers in the Administration for Economy were accommodated. Nikolai, his orderly, and Misha, the chauffeur, had collected furniture and all sorts of lumber from all over the district for the apartment, but it looked more like a thieves’ kitchen than a general’s home. It was impossible to receive foreign guests there: even Shabalin was conscious of that.

    Once more, the contradiction between bolshevik theory and bolshevik practice. The Kremlin aristocracy had long since discarded the proletarian morals they still preached, and lived in a luxury that not every capitalist could afford. They could do so without embarrassment because their personal lives were secured from the people’s eyes by several walls. The smaller leaders tended to follow the same course. The Party aristocracy, men like Shabalin, lived a double life; in words they were ideal bolsheviks, but in reality they trampled on the ideals they themselves preached. It was not easy to reconcile these two things. It all had to be done secretly, prudently, one had continually to be on guard. Here in Germany there was no Kremlin and no area forbidden to the public, here everything was comparatively open. And supposing the lords of the Kremlin started to shout!

    At first General Shabalin had taken his meals in the canteen of the Soviet Military Council-in other words, in the generals’ casino. But now Dusia, his illegal maidservant, was taking the car to the canteen three times a day and bringing the food home. Yet even in such circumstances the general could not invite any guests to his apartment, and visitors, especially foreigners, were not allowed in the canteen.

    Even here, in occupied Germany, where we were not restricted by problems of living space or rationing, and where we could literally pick up everything we liked, even here we kept to our Soviet way of life.

    A little later the S. M. A. staff accommodated itself to circumstances and solved the problem in the old Potiomkin fashion. (Prince Gregory Potiomkin, favorite of Empress Catharine, who organized show-places and even ’model villages’ to impress the Empress. - Tr.). A special club was set up, in which the leading officials of the S. M. A. could hold receptions for their western colleagues. In each separate case an exact list of the proposed guests had to be sent in advance to the S. M. A. liaison service, to be carefully checked by the Narcomvnudel, and to be countersigned by the S. M. A. chief of staff". Of course such a simple form of invitation as that of Sir Percy Mills-"come and have lunch with me, gentlemen", and including even the chauffeurs-was quite impossible in such circumstances.

    During those early meetings with the Western Allies I was seriously afraid that I would be asked too many questions that I could not, or rather that I dared not, answer. But the longer I worked in the Control Commission the less was I able to understand their behavior. The representatives of the democratic world not only made no attempt to ask us political questions, as I had thought was simply bound to happen when representatives of completely opposed state systems came together, but they displayed a perfectly in-comprehensible indifference to the subject.

    At first I thought this was out of tactfulness. But then I felt sure it must be due to something else. The average western man was far less interested in politics and all that goes with it than the average Soviet man. The men of the West were much more interested in the number of bottles of champagne that had been drunk at a diplomatic reception in the Kremlin, and in the evening gown Madame Molotov had worn on the occasion. This was in the best case, but usually they confined their interests to sport and the beautiful girls on the covers of magazines. To any man living in normal conditions this seemed perfectly natural. If the Soviet men could have chosen they would have done the same.

    At that stage the West had no idea of the extraordinary dichotomy of Soviet existence. In thirty years we have changed fundamentally, to a certain extent we are Sovietized. But while becoming Sovietized we have simultaneously become immunized against communism. The West has no suspicion of this. It is with good reason that the Politburo has begun to underpin the Soviet edifice with the old national foundations, which proved themselves so well during the war. After the war the process of giving the rotting state organism a blood transfusion was continued. The method will doubtless meet with success for a time; it will confuse some and arouse illusory hopes in others. But the Kremlin’s plans will not be modified to any extent.

    A small but characteristic example: in occupied Germany all the Russian soldiers and officers suddenly began to use the word ’Rossiia’-’Russia’. The movement was quite spontaneous. Some-times out of habit one would let ’U. S. S. R.’ slip out; but it was corrected to ’Rossiia’ at once. We ourselves were surprised at this fact, but it was so. Yet for twenty-five years anyone who used the word ’Rossiia’ was liable to be accused of chauvinism, and quite possibly to be charged under the corresponding article of the Narcomvnudel code. One could not help noticing this seemingly small detail when one found the word ’Rossiia’ coming to every soldier’s lips.

    Unconsciously he was emphasizing the difference between the concepts ’Soviet’ and ’Russian’. As though in spite, the foreign press confused these concepts. What we ourselves couldn’t stand they called ’Russian’; all that was dear and precious to us they described as ’Soviet’. The Soviet people neither wish to nor do they need to teach foreigners their political ABC. Why risk one’s head simply to satisfy a stranger’s idle curiosity?

    How constrained Soviet people feel in intercourse with ’foreigners’ is shown by the following incident.

    One day, during an interval in the sittings of the Control Commission, several members of various delegations were discussing what they would like to do on the following Sunday. Kozlov, the chairman of the Soviet delegation in the Industrial Committee, let slip the unwise admission that he was going hunting with a group of colleagues. Kozlov’s foreign colleagues were enthusiastic at the idea of spending a Sunday all together, and said they would gladly join the party. Kozlov had to behave as though he were delighted beyond measure.

    On the Sunday the hunters set out in several cars. During the journey the Soviet members of the party racked their brains over the problem of how to give their Allies the slip. But the need to show some courtesy, plus the excellence of the western cars, gave Kozlov no chance of getting away from his unwanted friends. At the rendezvous the Allies got out and lay about on the grass, with the idea of having a little snack and a little chat. To avoid this, Kozlov and the other Russians slipped off through the bushes, and wandered about the forest all day, cursing Fate for pushing such politically unreliable companions on to them.

    In order to secure himself against the possibility of being reprimanded, Kozlov spent all the following week cursing and swearing to other members of the Administration for Economy about his bad luck, and carefully emphasizing his own ’vigilant* conduct. We could not enter freely into intercourse with the West. But what was the West doing to obtain information on Soviet problems?

    I had several opportunities of observing how the West obtained knowledge of Soviet Russia from ’reliable and competent’ sources. Those sources were usually journalists. The American and British journalists went to great trouble to get together with their Soviet colleagues, for they were convinced that these colleagues could and would answer their questions exhaustively and truthfully. Naive fellows! One can no more expect truth from a Soviet journalist than chastity from a prostitute.

    The American journalists in Berlin tried hard to get together with their Soviet brothers, free of constraint. But the Soviet journalists did their best to avoid any such meeting. Finally it had to be arranged: they had to invite the foreigners to their Press Club. It was at least a step forward that the Americans took the opportunity to ask questions which even the very adroit Soviet journalists could not easily answer. All they could do was keep their mouths shut. It was also very good that the Americans gradually realized the true meaning of ’Narcomvnudel’; they thought their Soviet colleagues were victims of the Narcomvnudel and were ringed about with spies, and that a dictaphone was built into every desk. Of course it would have been even more sound to assume that their hosts were themselves Narcomvnudel agents. My experiences in the college had taught me that all the Soviet Union’s foreign correspondents were coworkers of that organization.

    The Americans took their Soviet colleagues’ silent reserve as indicating their anxiety. This was pretty near, but not quite, the truth. Once the Americans even raised the subject of the ’Soul of the Soviet Man’, but they made the mistake of discussing the soul as such. The Soviet soul is a function of the Soviet reality; it cannot be analyzed in isolation from its milieu.

    Our work in the Control Commission was very instructive. From the very first sittings I realized that the widely held view that a diplomat’s life is easy and carefree was false. In reality it is a devilishly hard, or rather a tedious, occupation. One needs to have the hide of a hippopotamus, the sensitiveness of an antelope, nerves of manila rope and the endurance of a hunter. An English saying has it that it is the highest achievement of good manners to be bored to death without showing it. Now General Shabalin gave his colleagues extensive opportunities to demonstrate the truth of this remark. It was astonishing to see how earnestly earnest people could struggle for hours and days on end with an insoluble problem before they would admit that it was insoluble!

    In selecting their diplomats the British act on the principle that the least suitable of all candidates is one who is energetic and stupid; one who is energetic and clever is not very suitable, and the most suitable of all is a man who is clever and passive. The British prefer to be slow in drawing the right conclusion, and they fear nothing more than precipitate unsound decisions.

    This same rule applies to Soviet diplomats, only in reverse. The ideal Soviet diplomat must be exceptionally energetic and exception-ally stupid. He needs no intelligence, as he may not take any independent decisions in any case. On the other hand, energy is a quality needed by every commercial traveler, whether it is razor blades he is trying to sell, or his master’s policy. General Shabalin was an out-standing example of this type of Soviet diplomat. For that matter, all Soviet diplomats are distinguished by their enormous activity. The Kremlin can be charged with anything rather than passivity.

    Our first encounters in the Control Commission were quite educative. Despite my skeptical attitude to the policy of the western powers, I could not help reaching the conviction that they were genuinely anxious to work together with us for the solution of post-war problems. The creation of the United Nations Organization testified to the western democracies’ desire to secure peace to the world.

    Outwardly, we, too, gave out that we were interested in the same thing and wanted to take the same road. But the very first practical measures proposed indicated that the opposite was the truth. Our readiness for collaboration on the problem of world peace was nothing but a tactical maneuver with the object of maintaining the democratic mask, winning time for the reorganization of our forces, and exploiting the democratic platforms in order to sabotage world public opinion. The very first sittings of the Control Commission opened my eyes to all this.

    I recalled Anna Petrovna’s remark, which had so astounded me, when I was in Moscow. From her words I could only deduce that the Kremlin was thinking of active operations for the Soviet fighting forces in the post-war period. Yet it seemed absurd to think of any kind of war plans when we had only just ended terrible battles, and all the world wished for nothing more urgently and passionately than peace. Now, after those first sittings of the Control Commission it was clear, to me at least, who was neither diplomat nor politician, which the Kremlin had not the slightest desire to collaborate with the democratic West.

    The representatives of the western democracies racked their brains to find an explanation for their eastern ally’s extraordinary conduct. They sought persistently for a modus vivendi with the Kremlin. They sought a key to the enigma of the soul of the East, they turned over the pages of the historical tomes; but it never occurred to them to study the million-copy editions of Lenin’s and Stalin’s works. They attached too much importance to the dissolution of the Comintern. They are not acquainted with the winged words by which the Soviet leaders justify their every deviation from the Party general line: “A temporary deviation is completely justified if it is necessary for reorganization and the accumulation of new strength for the next advance.” The inflexible general line can wind like an adder.

    Sommaire https://seenthis.net/messages/683905
    #anticommunisme #histoire #Berlin #occupation #guerre_froide

  • Littré - crapaude - définition, citations, étymologie
    https://www.littre.org/definition/crapaude

    #crapaude
    (kra-pô-d’) s. f.
    La femelle d’un #crapaud.
    Terme familier forgé par #Voltaire  :
    Demandez à un crapaud ce que c’est que le beau, le to kalon  ? Il vous répondra que c’est sa crapaude, avec deux gros yeux sortant de sa petite tête, une gueule large et plate, un ventre jaune, un dos brun, [Voltaire, Dict. Philos. au mot Beau ]

  • C’est qui Voltaire ? | Négrier ?
    http://societe-voltaire.org/cqv/negrier.php

    Une lettre apocryphe

    C’est la création et la diffusion d’une fausse lettre attribuée à #Voltaire qui va jouer le rôle décisif de catalyseur dans cette substitution des rôles. On la voit apparaître pour la première fois dans l’ouvrage de Charles Levavasseur intitulé Esclavage de la race noire aux colonies françaises, publié en 1840, qui se présente comme une défense argumentée de l’#esclavage et une réfutation de ceux qui ont alors pour projet de l’abolir. Son auteur, armateur, député de 1840 à 1848, fervent opposant à l’abolition, y défend la cause des colonies et des planteurs à l’aide d’un impressionnant déploiement de considérations d’ordre moral, social, économique, géopolitique et anthropologique. Cherchant à montrer l’existence d’un double langage chez les défenseurs de la « race nègre » que sont les abolitionnistes, il en vient à rappeler que Voltaire tenait lui aussi un discours contraire à ses actes. Après avoir cité le passage du nègre de Surinam, il affirme que Voltaire « avait pris une action de cinq mille livres sur un bâtiment négrier armé à Nantes, par M. Michaud », avec à l’appui cette lettre imputée à Voltaire, preuve irréfutable, à l’en croire, puisqu’écrite de sa main même : « Je me félicite avec vous du succès du navire le Congo, qui est arrivé fort à propos sur la côte d’Afrique pour soustraire à la mort tous ces malheureux noirs. Je sais, d’ailleurs, que les nègres embarqués sur vos bâtiments sont traités avec autant de douceur que d’humanité, et, dans cette circonstance, j’ai à me réjouir d’avoir fait une bonne affaire, en même temps qu’une bonne action. »

    Voltaire fut brièvement en correspondance avec Jean-Gabriel Montaudouin de La Touche, membre de la plus importante famille négociante de la ville de Nantes et dont la fortune s’est en partie construite sur la traite des Noirs. En 1768, il avait baptisé l’un de ses navires du nom du philosophe qui, informé, l’en avait remercié. L’échange s’est arrêté là, et aucun élément de sa correspondance n’indique que Voltaire connaissait la famille Montaudouin, encore moins ses activités. L’épisode a sans doute été anecdotique dans la vie de Voltaire, mais l’échange entre les deux hommes a certainement contribué à renforcer l’idée que Voltaire avait investi à Nantes dans la traite et rendu plausible la fausse lettre mentionnée dans l’ouvrage de Levavasseur.

    Si nous ne pouvons pas identifier avec certitude l’auteur de cette lettre apocryphe, il est presque certain que c’est dans le milieu des opposants à l’abolition qu’elle a été fabriquée[9]. Son impact sera suffisant pour émouvoir le camp adverse, puisqu’on en trouve des citations partielles entre 1840 et 1848, année de la seconde abolition, dans les écrits des leaders du courant abolitionniste, comme Victor Schoelcher et Henri Wallon. Ainsi, en ce milieu du XIXe siècle, il paraît déjà naturel d’affirmer que Voltaire a investi dans la traite nantaise, même si cette vérité reste confinée dans le cercle restreint des individus directement concernés par la question politique de l’esclavage, qu’ils soient favorables ou non à l’abolition.

    La fonction des accusations n’est cependant pas la même, car la cible a changé. Ce n’est plus, comme au XVIIIe siècle, la philosophie des Lumières, mais le mouvement abolitionniste que Levavasseur entend mettre face à ses contradictions. Voltaire n’est plus évoqué comme figure majeure et représentant d’une philosophie des Lumières à combattre, mais comme simple métaphore de l’humanisme bon ton et hypocrite dont se parent, d’après lui, les discours abolitionnistes, comme simple instrument au service de la cause esclavagiste.

    L’appropriation de Voltaire par l’histoire révolutionnaire et son héroïsation ont certainement contribué à asseoir sa popularité au XIXe siècle, popularité dont l’intense activité commémorative qui entoure la vie et l’œuvre de l’écrivain tout au long du siècle est un évident symptôme. En façonnant un mythe, elles ont aussi façonné toute une littérature contre-révolutionnaire pamphlétaire d’inspiration catholique qui a pris Voltaire pour cible privilégiée au moment de la Restauration.

    Restait encore à populariser l’idée, à la rendre acceptable par le plus grand nombre, ce qui sera fait dans la seconde moitié du siècle, par l’intermédiaire de pseudo-biographes du philosophe qui se chargeront de diffuser cette « vérité » à grande échelle, au travers de leurs pamphlets, avec une intensité accrue dans les années qui ont entouré le centenaire de sa mort en 1878, fêté en grande pompe par la toute jeune IIIe République. Parmi ces écrivains plus soucieux de l’effet recherché que d’authenticité, les plus connus sont sans doute Jean-Félix Nourrisson, auteur de Voltaire et le voltairianisme, publié en 1896, et Louis Nicolardot avec son Ménage et finances de Voltaire, dans son édition de 1887. Si le premier cite dans son intégralité la fausse lettre attribuée à Voltaire, le second ne fait qu’une vague allusion au fait qu’il soit « intéressé dans la traite des nègres ». Il apporte cependant un témoignage essentiel sur la rapide diffusion de cette idée à la fin du XIXe siècle. En effet, dans une première édition de son ouvrage, datée de 1854, il est bien fait mention de « bénéfices sur des vaisseaux négriers », mais c’est de Raynal et non de Voltaire qu’il s’agit alors. Quelque trente ans plus tard, Raynal a disparu du texte, remplacé par Voltaire, entérinant dans les milieux littéraires, avec un décalage de quelques années, ce qui s’était produit dans le milieu abolitionniste.

  • #Jean_Ehrard, Lumières et esclavage. L’esclavage et l’opinion publique en France au XVIIIe siècle compte-rendu de Alessandro Tuccillo dans Lectures critiques 2010 - printemps 2012
    http://montesquieu.ens-lyon.fr/spip.php?article943

    Dans le pre­mier cha­pi­tre (« Les #Lumières en pro­cès »), J. Ehrard entame son dis­cours en pre­nant posi­tion sur le « pro­cès aux Lumières », c’est-à-dire sur les atta­ques que les phi­lo­so­phes du XVIIIe siè­cle ont subies tan­tôt de la part du monde catho­li­que, tan­tôt de la part des milieux anti­co­lo­nia­lis­tes. D’ailleurs, dès son intro­duc­tion, J. Ehrard déclare vou­loir écrire « un plai­doyer en défense, un essai de réponse au réqui­si­toire anti-Lumières » (p. 17). Cette défense du patri­moine des idées des Lumières, à rai­son, ne se confronte pas avec les cri­ti­ques réac­tion­nai­res qui vou­draient revi­ta­li­ser les posi­tions anti­ré­vo­lu­tion­nai­res du XIXe siè­cle. Le dia­lo­gue serait impos­si­ble. Elle s’adresse plu­tôt aux cri­ti­ques d’ori­gine marxiste ou sen­si­bles aux dis­cours des écoles de Francfort et de Foucault qui voient dans l’#uni­ver­sa­lisme des Lumières la racine cultu­relle de l’#impé­ria­lisme et de sa rhé­to­ri­que de la civi­li­sa­tion. Cette accu­sa­tion était déjà pré­sente dans les études fon­da­men­ta­les de #Michèle_Duchet (Anthropologie et his­toire au siè­cle des Lumières, 1971 ; rééd. Albin Michel, 1995) et de #Carminella_Biondi (Ces escla­ves sont des hom­mes. Lotta abo­li­zio­nista e let­te­ra­tura negro­fila nella Francia del Settecento, 1979). Dans les livres de #Pierre_Pluchon (Nègres et juifs au XVIIIe siè­cle. Le racisme au siè­cle des Lumières, 1984) et de #Louis_Sala-Molins (Le Code noir ou le cal­vaire de Canaan, 1987 et Les Misères des Lumières. Sous la rai­son, l’outrage, 1992), cette accu­sa­tion se trans­forme, d’après J. Ehrard, en sim­ple déni­gre­ment ten­dan­cieux. C’est donc « à contre-cou­rant d’une mode récente de déni­gre­ment du siè­cle de Voltaire » (p. 17), qui nie tout lien entre la pen­sée #anties­cla­va­giste des Lumières et l’#abo­li­tion de l’escla­vage de 1794, que Jean Ehrard réaf­firme l’impor­tance de l’« héri­tage des Lumières » : bien que la conjonc­ture révo­lu­tion­naire ait été essen­tielle pour le décret de plu­viôse, la « convic­tion idéo­lo­gi­que » des dépu­tés de la Convention natio­nale « n’a pu tom­ber du ciel, sinon du ciel de la rai­son des Lumières » (p. 15). L’élaboration de la culture cri­ti­que anties­cla­va­giste au XVIIIe siè­cle ne pou­vait être sans hési­ta­tions puis­que cette cri­ti­que devait bri­ser une lon­gue tra­di­tion de légi­ti­ma­tion théo­ri­que de l’escla­vage qui, aupa­ra­vant, n’avait jamais été mise en ques­tion en ces ter­mes. Selon J. Ehrard, ceux qui sou­li­gnent avec stu­pé­fac­tion les ambi­guï­tés des phi­lo­so­phes face à l’escla­vage rai­son­nent « comme si les Lumières étaient un état, non un mou­ve­ment ; comme si leurs pro­mo­teurs n’avaient pas eu à sou­le­ver et réin­ven­ter le monde pour inven­ter les droits de l’homme » (p. 16). Un contexte hos­tile expli­que aussi les pro­po­si­tions gra­dua­lis­tes des abo­li­tion­nis­tes qui ne peu­vent être inter­pré­tées comme des ten­ta­ti­ves de reforme de l’ins­ti­tu­tion vouées, de fait, à la conso­li­da­tion de l’ordre escla­va­giste (c’était la thèse, entre autres, de M. Duchet). Ce gra­dua­lisme par­ti­cipe du dis­cours civi­li­sa­teur, uni­ver­sa­liste et cos­mo­po­lite du XVIIIe siè­cle auquel Ehrard ne fait pas mys­tère de vou­loir reconnai­tre sa « noblesse » (p. 16). La nier signi­fie­rait défor­mer l’ana­lyse sur la base des cri­mes de la colo­ni­sa­tion du XIXe siè­cle.

  • Marie Leca-Tsiomis, « #Jean_Ehrard, Lumières et esclavage. L’esclavage colonial et l’opinion publique en France au XVIIIe siècle », Recherches sur Diderot et sur l’Encyclopédie [En ligne], 43 | octobre 2008, mis en ligne le 26 novembre 2008, consulté le 23 février 2018. URL : http://journals.openedition.org/rde/3812

    Que l’on puisse lire, dans le Guide vert de Bretagne , que #Voltaire a eu « une part de 5000 livres dans un négrier nantais », sans qu’aucune preuve soit fournie d’une telle allégation, pourrait simplement faire hausser les épaules. Mais que, dans une étude à ambition historique, comme celle de #Nelly_Schmidt, se trouve répété, sans davantage de preuve, que Voltaire « investit dans la traite nantaise » ; que #Christiane_Taubira proclame avec une assurance tout aussi peu fondée qu’il « détenait des actions dans des sociétés de commerce négrier » ; que L. #Sala-Molins, de son côté, après avoir naguère dénoncé en #Montesquieu « un négrier », avance désormais sans l’ombre d’une preuve que #Diderot et #Raynal, touchaient « les dividendes de la traite », il est devenu clair alors que cette série d’attaques – jointes à quelques autres dont l’ouvrage d’Ehrard donne le détail – procède d’un « révisionnisme multiforme » dont les #Lumières sont la cible et qui, comme toutes les calomnies, trouve un public crédule : faire passer l’#antiesclavagisme des philosophes pour mensonge ou cynisme, accuser d’indifférence ou de soutien à l’#esclavage ceux-là même qui, les premiers, le dénoncèrent, on voit bien ce qu’un tel discours semble offrir de séduisant par son iconoclastie même, et comment sa véhémence rusée peut paraître novatrice, voire roborative. Face à ce qui n’est pourtant qu’un tissu de contrevérités, souvent énoncées au conditionnel, mode idéal de la lâcheté, et relayées servilement par la grande presse – ici, un chroniqueur au Monde , là, au Nouvel Observateur – Jean Ehrard a enquêté : après avoir en vain demandé leurs preuves aux différents accusateurs, l’historien a entrepris de comprendre, et éventuellement de répondre : point d’indignation académique ici, le propos d’Ehrard n’est évidemment pas de rétorquer à la haine des Lumières par leur hagiographie : « Refuser symétriquement les procès en sorcellerie et la facilité d’une idéalisation conventionnelle implique un retour aux textes », écrit-il, et il use donc des seuls outils de l’historien : la précision, l’exactitude, l’analyse, la confrontation des documents. L’ouvrage passionnant qui en résulte est un tableau de l’évolution de ce siècle qui a eu « le mérite de poser le problème de l’esclavage, enfin, et de le mûrir » : à la fois réexamen de l’anthropologie des Lumières, de la réflexion juridique et philosophique sur l’esclavage, évocation des grands débats impliqués par le commerce, le luxe, analyse précise des textes – ces pages sur le sucre, devenu avec Montesquieu, Voltaire puis #Hélvetius, « une obsession de la littérature des Lumières. Par sa valeur antithétique : tant de douceur au prix de tant de barbarie ! » ­­La première vertu de cette enquête est de replacer d’abord la question dans son contexte social et historique, et dans « l’opinion publique en France au XVIIIe siècle ». La perception de l’esclavage, qui est alors, pour la plupart, une réalité « lointaine et à demi abstraite », doit être pensée à l’intérieur de la société d’Ancien régime, société « habituée aux pires violences » : supplices et exécutions publics, par exemple, mais aussi pratique légale du fouet auquel matelots et soldats sont exposés, « ni plus ni moins que les Noirs des Antilles ». Et pas plus que les Planches de l’#Encyclopédie, représentation d’une « idylle technologique », n’accordent de place à la peine des travailleurs en Europe, elles n’en réservent à l’humiliation et à la souffrance des esclaves aux colonies. Au milieu du XVIIIe siècle le #servage est loin d’être aboli en Europe, et il faut lire les réflexions sur « servage » et « esclavage » donnés pour synonymes dans la langue courante d’époque et que Boucher d’Argis sera un des premiers à distinguer dans l’Encyclopédie. « Toute la culture des contemporains de Voltaire était esclavagiste », souligne Ehrard. Et c’est bien dans ce contexte que la rencontre de Candide et du nègre de Surinam prend sa véritable force.

  • Christian Albertan, « #Jean_Ehrard, Lumières et esclavage. L’Esclavage colonial et l’opinion publique en France au xviiie siècle », Annales historiques de la Révolution française [En ligne], 359 | janvier-mars 2010, mis en ligne le 17 mars 2011, consulté le 23 février 2018.
    URL : http://journals.openedition.org/ahrf/11508

    Pour le reste, l’auteur établit de manière irréfutable que les philosophes des #Lumières, dont la pensée reste naturellement entachée par certains préjugés d’époque, ont condamné sans appel le #racisme. Ils rejettent de manière tout aussi ferme l’#esclavage en martelant que les hommes sont égaux à la naissance et qu’aucun homme ne peut appartenir à un autre individu. Le commentaire précis de textes de #Montesquieu, de #Buffon, de #Voltaire, d’#Helvétius, de #Condorcet, l’analyse d’extraits tirés de l’#Encyclopédie et de l’Histoire des Deux-Indes ne laissent subsister aucun doute à cet égard.

    Mais l’auteur, avec une grande honnêteté, ne s’en tient pas à ces positions de principe et pousse plus loin son enquête, en se penchant sur ce qui pourrait être qualifié de #double_discours des philosophes. L’audace théorique des philosophes ne débouche, en effet, sur aucune conséquence pratique. Montesquieu en « réformiste timoré » est incontestablement #antiesclavagiste, mais il ne propose nulle part l’#abolition de l’esclavage (p. 157). Les #Encyclopédistes admettent même par moments l’existence de l’ « #odieux_commerce » comme un moindre mal (p. 179). Quant à #Raynal, l’auteur de la célèbre Histoire des Deux-Indes , il finit par se rallier à Malouet et à juger l’esclavage conforme à la philosophie et aux lois l’humanité (p. 205). Seul Condorcet milite timidement en faveur de l’affranchissement.