• Coronavirus : l’#exode_mondial avant le #confinement

    Près de 4,5 milliards de personnes sont soumises à un confinement dans 110 pays. Cette situation inédite a été précédée d’une autre étape, aussi exceptionnelle.

    Les frontières ont fermé les unes après les autres, les avions sont restés cloués au sol. Du début février à mi-avril, quelque 4,5 milliards de personnes – soit plus de la moitié de l’humanité – ont été soumises à un confinement total dans 110 pays, et le monde s’est figé. Cette situation inédite a été précédée d’une autre étape, tout aussi exceptionnelle, lorsque des millions d’êtres humains à travers la planète ont cherché à regagner leur pays, par leurs propres moyens ou bien par le biais d’opérations de rapatriement.

    A l’intérieur des Etats, des millions de citadins, à New York, Paris, Milan, Madrid ou Istanbul, ont décidé de fuir les grandes métropoles dans l’espoir d’échapper à la contagion du Covid-19 et à la complexité du confinement. Des travailleurs saisonniers ou transfrontaliers, bloqués ou contraints de rebrousser chemin, n’ont pas eu ce choix. Des migrants ont été chassés.

    En Inde, dès l’annonce du confinement immédiat du pays, le 25 mars, des millions de travailleurs pauvres, privés de leurs revenus journaliers, sont partis à pied rejoindre leurs villages. Ces scènes dantesques ont rappelé à l’écrivaine indienne Arundhati Roy celles de la partition, en 1947, des Indes britanniques, qui a abouti à la naissance du Pakistan.

    A l’exception de l’Afrique subsaharienne, où peu de grands mouvements ont été constatés jusqu’à présent, la pandémie de Covid-19 a partout provoqué un exode massif que nul n’avait anticipé. Il existe des projections sur des déplacements de population liés aux conditions climatiques ; des bilans ont été dressés à la suite de catastrophes naturelles ; des cérémonies religieuses ou des fêtes traditionnelles sont l’occasion, en Chine, en Inde ou en Arabie saoudite, de migrations spectaculaires. Cependant, des mouvements simultanés d’une telle ampleur n’avaient jamais été encore observés. « C’est un moment historique » , remarque Catherine Wihtol de Wenden, directrice de recherche au CERI-Sciences Po et spécialiste des migrations internationales, qui se dit particulièrement inquiète quant au sort des migrants, « ceux qui fuient déjà une crise » .

    « Des Européens, interdits d’entrée dans des pays, ont expérimenté ce que c’est de ne pas être les bienvenus. Cela change les perspectives » (François Gemenne, spécialiste des migrations)

    « Il s’agit d’un mouvement mondial totalement inédit , abonde François Gemenne, spécialiste des migrations, professeur à Sciences Po Paris et à l’université de Liège, en Belgique. Autre élément nouveau, les flux habituels de migration ont été bouleversés. L’exode des ruraux a été remplacé par l’exode des citadins, celui des pays en voie de développement par celui des pays industrialisés. La Tunisie et la Mauritanie ont expulsé des Italiens ; des Européens, interdits d’entrée dans des pays, ont expérimenté ce que c’est de ne pas être les bienvenus. Cela change les perspectives. »

    Il est encore trop tôt pour se faire une idée exhaustive de ces mouvements et de leurs répercussions. Mais pour se forger une idée du phénomène, Le Monde a sollicité le réseau de ses correspondants à l’étranger. Sur la base d’éléments collectés entre le début février et le 8 avril (date du déconfinement progressif de la ville chinoise de Wuhan, point de départ de la pandémie), c’est un exode d’avant-confinement hors norme qui se dégage.

    Retour par ses propres moyens

    La crainte de l’isolement, le besoin de se rapprocher de la famille, ou la perte brutale de revenus ont poussé nombre de ressortissants basés à l’étranger à rentrer dans leur pays, le plus souvent par leurs propres moyens. Entre le 15 mars et le 7 avril, 143 000 Ukrainiens ont ainsi quitté la Pologne, selon les gardes-frontières polonais qui ont évoqué un « véritable exode, à une échelle encore jamais vue » . Ils étaient alors encore 11 000 à espérer un retour, selon l’ambassade ukrainienne à Varsovie.

    L’annonce, le 26 mars, de la fermeture des frontières par le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a précipité le mouvement. Sur une population estimée à plus de 1,2 million d’Ukrainiens résidant en Pologne avant la crise sanitaire, 12 % ont quitté le pays. Pour la plupart, il s’agit de travailleurs en situation légale : 90 % ont fui les difficultés économiques du secteur de l’hôtellerie et de la restauration après leur mise à l’arrêt.

    Plus de 200 000 Roumains ont eux aussi rejoint leur pays depuis le début de la pandémie, selon la police des frontières. Au point que les autorités de Bucarest ont appelé la diaspora à ne pas rentrer avant la fin de l’état d’urgence, prolongé jusqu’au 16 mai, par crainte d’un effet supplémentaire de contagion.

    Les effectifs des Danois et des Norvégiens enregistrés sur les listes consulaires à l’étranger ont fondu de moitié. Selon le ministère des affaires danois, ils n’étaient plus que 38 000 le 27 mars, contre 74 000 quelques jours auparavant. Des touristes, surtout, rentrés par leurs propres moyens, à l’instar des 234 000 Norvégiens encore à l’étranger le 12 mars, selon les données des opérateurs Telia et Telenor, qui n’étaient plus que 105 000 le 26 mars. De même, 25 000 à 35 000 Russes, bloqués par la fermeture des frontières, attendaient encore, le 3 avril, de pouvoir rentrer chez eux, en provenance notamment de Thaïlande.

    L’Australie pourrait faire face au plus grand déclin démographique de sa population depuis… 1788.

    Même phénomène en Australie, où plus de 280 000 citoyens et résidents permanents ont regagné l’île-continent depuis le 13 mars, sur 1 million vivant à l’étranger, soit 20 % d’entre eux, selon le ministère des affaires étrangères. Ces arrivées ne compensent pas les départs : 260 000 travailleurs temporaires, étudiants et touristes ont quitté le pays depuis le 1er février et 50 000 autres durant les deux premières semaines d’avril.

    A ce rythme, selon des projections sur l’année qui font état de 300 000 départs supplémentaires, l’Australie pourrait faire face au plus grand déclin démographique de sa population depuis… 1788, selon un expert cité par The Australian . Le 1er février, le premier ministre Scott Morrison avait prévenu que l’entrée du pays serait dorénavant refusée aux non-Australiens ayant voyagé en Chine. L’interdiction s’est ensuite étendue aux Iraniens, aux Sud-Coréens, aux Italiens, puis à l’ensemble de la planète à partir du 20 mars.

    Le gouvernement chilien a annoncé, le 2 avril, le retour de 30 000 de ses ressortissants depuis le 18 mars. En Chine, dans la semaine qui a précédé la quasi-fermeture du ciel chinois, le 29 mars, on comptait 25 000 arrivées quotidiennes. Un chiffre ramené à 3 000 la semaine suivante. En outre, 200 000 étudiants sur 1,6 million résidant à l’étranger sont revenus, selon le ministère de l’éducation (41 000 en provenance des Etats-Unis, 28 000 d’Australie, 22 000 du Royaume-Uni, 11 000 d’Allemagne et de France). Tous ont dû payer leur billet.

    Ces retours sont difficiles à quantifier au Venezuela, plongé dans une grave crise politique et économique depuis 2015 et qui a vu 4,3 millions de ses citoyens s’exiler. Mais des Vénézuéliens vivant dans une grande précarité au Pérou, en Equateur et en Colombie sont revenus – 2 153 recensés les 4 et 5 avril. Nicolas Maduro, président contesté, a ensuite annoncé l’arrivée de 5 800 réfugiés en provenance de Colombie.

    Plus de 20 000 expatriés Libanais reviennent au compte-gouttes, entravés par la situation de leur pays au bord de la faillite. La situation des Palestiniens est particulière. Depuis mi-mars, la quasi-fermeture des passages entre la bande de Gaza et Israël interdit la sortie de 5 000 travailleurs et commerçants palestiniens. Tandis que 70 000 autres, travailleurs légaux et illégaux de Cisjordanie, sont aujourd’hui bloqués en Israël s’ils veulent conserver leur emploi.

    Opérations de rapatriements

    Agnès Thierry, une Française installée depuis quatre ans au Vietnam après plusieurs années passées à Hongkong, songeait déjà, avant la pandémie, à rentrer au pays. Elle a brusqué sa décision. « Là-bas, au Vietnam, les écoles sont fermées depuis janvier, les autorités ont bloqué très tôt les frontières, puis elles ont refusé l’entrée des étrangers, la situation est devenue de plus en plus dure » , raconte-t-elle.

    La difficulté de renouveler son visa tous les trois mois, comme elle le faisait jusqu’à présent, a convaincu cette designer spécialisée dans la céramique de monter, le 27 mars, à bord d’un avion Air France, spécialement affrété – à charge pour les passagers de régler des billets négociés. « Il y a eu deux avions la même semaine, ils étaient pleins à craquer » , témoigne Agnès Thierry. Comme elle, près de 150 000 Français – en majorité des touristes – ont ainsi bénéficié de vols spéciaux depuis le 17 mars.

    En Pologne, le gouvernement a organisé l’opération « Vol à la maison », présentée comme le plus grand plan de rapatriement depuis la seconde guerre mondiale

    Partout, des opérations de rapatriement d’ampleur ont été mises sur pied : 200 000 Allemands coincés à l’étranger ont pu regagner leur pays en l’espace de trois semaines jusqu’au 6 avril, selon le ministère des affaires étrangères (il en restait encore 40 000 en Nouvelle-Zélande, au Pérou et en Afrique) ; 60 000 Italiens ont été évacués par des vols spéciaux ; 9 303 Algériens, selon le ministère de l’intérieur ; 12 000 Brésiliens au 6 avril ; 7 965 Tunisiens à la même date ; 8 432 Mexicains entre le 23 mars et le 3 avril ; 15 000 Turcs, entre mi-mars et début avril ; 14 950 Argentins, entre le 18 et le 30 mars ; 2 400 Norvégiens au 1er avril… La liste est longue. Le 17 avril, la Commission européenne a, pour sa part, évalué à 500 000 le nombre d’Européens rapatriés avec son concours ; tandis que 98 900 autres restent encore bloqués à l’étranger.

    En Pologne, après la fermeture des frontières, le gouvernement a organisé, avec la compagnie aérienne nationale LOT, l’opération « Vol à la maison », présentée comme la plus grande opération de rapatriement depuis la seconde guerre mondiale. Entre le 15 mars et le 5 avril, 360 vols et 44 avions mobilisés ont permis de ramener 54 000 Polonais, principalement de Londres (21 000 personnes), de Chicago (3 100), de Bangkok (2 200) ou encore d’Edimbourg (2 000).

    Fin mars, 300 000 Britanniques attendaient de pouvoir être rapatriés, ce qui a valu pas mal de critiques au gouvernement de Boris Johnson pour sa lenteur. Le 6 avril, seuls 1 450 Britanniques étaient parvenus à quitter la Tunisie, l’Algérie ou le Pérou, selon des chiffres du Foreign Office. Au 10 avril, environ 5 000 autres étaient censés, à leur tour, avoir réussi à quitter l’Inde. De leur côté, 16 812 Marocains n’ont pas encore trouvé de solution pour rentrer chez eux.

    Dans ce paysage chamboulé, seule l’Argentine semble se distinguer. A rebours du mouvement général, 30 000 Argentins ont quitté le pays, le 13 mars, au lendemain d’une allocution du président annonçant le confinement et la fermeture des frontières le 16. Pour quelles destinations ? La question demeure.

    Le retour contraint des migrants

    La question des migrants est celle qui préoccupe le plus les experts. En Iran, qui figure parmi les premiers foyers de contamination, la situation du million de travailleurs afghans présents dans le pays s’est dégradée. Alors que la République islamique s’est enfoncée dans la crise sanitaire, nombre de ces migrants, qui constituent une main-d’œuvre peu qualifiée souvent victime de discriminations, sont rentrés chez eux. Leur nombre exact n’est pas connu, mais mi-mars l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) faisait état du retour de 140 000 Afghans en provenance d’Iran. Cet afflux, parmi le plus important mouvement transfrontalier causé par la pandémie, laisse craindre le pire dans un pays ravagé par près de vingt ans de guerre et de corruption.

    30 000 migrants éthiopiens qui tentaient de rejoindre l’Arabie saoudite se sont retrouvés piégés au Yémen

    L’Arabie saoudite, où les travailleurs étrangers constituent un tiers de la population (80 % dans le secteur privé), a renvoyé chez eux des milliers d’Ethiopiens, y compris certains suspectés d’être contaminés par le Covid-19, en affrétant jusqu’à deux vols quotidiens pour Addis-Abeba. Dans les dix premiers jours d’avril, 2 968 travailleurs éthiopiens ont ainsi été ramenés dans leur pays, selon le Financial Times . Des retours « coordonnés », affirment les officiels saoudiens, alors que l’Ethiopie a demandé l’arrêt de ces déportations durant la pandémie. Dans la même période, 30 000 migrants éthiopiens qui tentaient de rejoindre l’Arabie saoudite se sont retrouvés piégés au Yémen.

    Pour sa part, Ankara a mis un frein à sa politique délibérée de déplacements de migrants vers la frontière grecque, le 13 mars, où plus de 10 000 personnes campaient selon les estimations. Selon le ministère turc de l’intérieur, 5 800 d’entre eux, pour la plupart des Afghans et quelques Syriens, ont quitté cette zone en bus à destination de centres de confinements dans neuf provinces de Turquie.

    Le Mexique a reconduit aux frontières 8 528 Guatémaltèques entre fin janvier et mars, selon l’Institut guatémaltèque de la migration, et expulsé 15 101 Honduriens, d’après le bilan fourni au 8 mars par le ministère des affaires étrangères hondurien. Côté américain, Washington autorise, depuis le 20 mars, les expulsions express – en moins de deux heures – à la frontière mexicaine pour protéger du Covid-19 ses agents. Selon la presse mexicaine, près de 7 000 clandestins mexicains et centraméricains ont ainsi été renvoyés en deux semaines. Au 25 mars, en Thaïlande, ce sont près de 60 000 migrants originaires du Cambodge, du Laos ou de Myanmar, qui ont quitté le pays après la fermeture des commerces.

    La fuite hors des villes

    C’est un phénomène connu depuis le Moyen Age : les plus aisés, du moins ceux qui en ont les moyens, fuient les villes menacées et confinées lors des grandes pandémies. « Le phénomène “résidence secondaire” – ceux qui partent vite, loin, et qui reviennent tard – a été observé notamment lors de la grande peste de Marseille de 1720 » , rappelle Isabelle Seguy, de l’Institut national des études démographiques (Ined). Un véritable mur sanitaire avait alors été constitué du Vaucluse aux Alpes, avec guérites et soldats. « Il fallait des autorisations pour passer » , souligne la spécialiste.

    Trois cents ans plus tard, les réflexes perdurent. Une scène, en particulier, est restée dans la mémoire des Italiens, celle des trains de nuit pris d’assaut en gare de Milan dans la soirée du 7 mars. Un brouillon du premier décret de confinement de la Lombardie venait de circuler, provoquant le départ massif, en quelques heures, de jeunes travailleurs pressés de rentrer chez eux, dans le Sud. On estime à 100 000 leur nombre ce soir-là.

    En Turquie, bien avant le 3 avril, jour de l’annonce des restrictions d’entrée et de sortie dans les 30 plus grosses villes du pays, près de 3 millions de citadins sont partis pour leur village d’origine ou leur résidence secondaire. Plus de 1 million de Stambouliotes ont rejoint leur lieu de villégiature sur la côte égéenne. Entre la mi-mars et le début avril, 125 000 Turcs ont par exemple gagné la ville touristique de Bodrum.

    En France, le confinement décrété le 17 mars a engendré de vastes mouvements. Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), entre 1,6 et 1,7 million de personnes ont rejoint leur département de résidence. A contrario, Paris intra-muros a perdu 11 % de sa population. Sur la base de ses propres statistiques, l’opérateur Orange estime qu’entre le 13 et le 30 mars, 1,2 million de Franciliens ont quitté la région, soit 17 % de la population du Grand Paris, tandis que celle de l’île de Ré a augmenté de 30 %.

    A New York, ce fut aussi la ruée hors de la ville. Début mars, « Big Apple » s’est vidée de nombreux habitants, partis se réfugier dans leur villégiature des Hamptons, à l’extrémité chic de Long Island, à l’est de Manhattan, dans la vallée de l’Hudson, au nord, ou sur les rivages du Maine. Aucun chiffre n’a été rendu public, mais des indicateurs confirment la tendance : les quartiers résidentiels de Manhattan sont moins touchés que d’autres par l’épidémie. La collecte d’ordures y a baissé de 5 %, alors que celle des quartiers pauvres (Queens, Staten Island) a au contraire progressé de 10 %. Cet exode des plus favorisés a été suffisamment important pour que la Maison Blanche s’inquiète d’une propagation du virus à Long Island, moins bien dotée médicalement que New York.

    Autre indicateur, à Moscou cette fois. Le vendredi 27 mars au soir, avant le début du confinement annoncé pour le lundi suivant, 750 000 voitures ont quitté la capitale russe, soit une augmentation de 15 % par rapport à la normale.

    Le départ de dizaines de milliers de Madrilènes, le 13 mars, a suscité un flot de réactions dans la presse. Des villes et villages ont érigé des barrières pour empêcher leur arrivée

    En Espagne aussi. Le départ de dizaines de milliers de Madrilènes hors de la capitale, le 13 mars, à la veille du confinement du pays, a suscité un flot de réactions dans la presse sous des titres tels que « ¡ Que vienen los Madrilenos ! » (« Les Madrilènes arrivent ! »), photos d’embouteillages à l’appui. Cette situation a poussé des villes et villages à ériger des barrières pour empêcher leur arrivée. Dans la station balnéaire de Calafell (25 000 habitants), au sud de Barcelone, des blocs de béton ont été installés et des contrôles de police instaurés à l’approche des fêtes de Pâques.

    En Australie, des mesures similaires ont été prises pour limiter les déplacements des citoyens d’un Etat à l’autre. La Tasmanie, le Territoire du Nord, le Queensland, l’Australie-Méridionale et l’Australie-Occidentale ont, durant la seconde moitié de mars, mis en place des mesures de contrôles à leurs « frontières ».

    Que dire enfin des 5 millions d’habitants de Wuhan, partis juste avant la fermeture de leur ville, le 23 janvier ? Etait-ce pour éviter l’enfermement ou pour tenter, malgré tout, de faire un voyage qu’ils avaient projeté à l’occasion du Nouvel An lunaire ? C’est ici que tout a commencé et que le balancier des déplacements repartira en sens inverse. Ou pas.

    https://www.lemonde.fr/international/article/2020/04/17/covid-19-l-exode-mondial-avant-le-confinement_6036919_3210.html
    #exode #émigration #retour_au_pays #mobilité #coronavirus #covid-19 #cartographie #visualisation #chiffres #monde #migrations

  • Le #Liban menacé par une accélération de la fuite des cerveaux
    https://www.lecommercedulevant.com/article/29732-le-liban-menace-par-une-acceleration-de-la-fuite-des-cerve

    Quelque 66 000 Libanais ont émigré en 2019, soit deux fois plus que l’année précédente. Si l’épidémie du coronavirus a momentanément freiné l’hémorragie, l’aggravation de la crise économique en l’absence de mesures spécifiques ne fera que renforcer la tendance.

    #émigration #crise #paywall je n’accède pas à la totalité de l’article

  • Plus de 300 migrants clandestins interceptés au large des côtes algériennes en 24 heures

    Plus de 300 candidats à l’émigration clandestine en Europe ont été interceptés au large des côtes algériennes depuis le début de l’année, selon les chiffres publiés par le MDN.

    Hier vendredi, 151 harragas ont été interceptés par les garde-côtes algériens au large d’#Oran, #El_Tarf, #Chlef et #Tipaza. « Des éléments des garde-côtes et de la gendarmerie nationale ont mis en échec des tentatives d’émigration clandestine de 151 personnes à Oran, El Tarf, Chlef et Tipaza tandis que 21 immigrants clandestins de différentes nationalités ont été interceptés à Tindouf et Djanet », indique le MDN dans un communiqué publié ce samedi.

    Jeudi, 150 autres harrages avaient été arrêtés alors qu’ils tentaient de traverser la Méditerranée à bord d’embarcations de fortune. Cette opération a été menée par des détachements des Garde-côtes au large d’Annaba, El-Kala (wilaya d’El Tarf), Mostaganem, Oran et Ain Témouchent.

    En 2019, l’armée a mis en échec « 3053 tentatives d’émigration clandestine » et sauve « 331 personnes », selon son bilan annuel publié hier vendredi par le MDN.

    https://www.tsa-algerie.com/plus-de-300-migrants-clandestins-interceptes-au-large-des-cotes-algerie
    #Algérie #migrations #émigration #statistiques #chiffres #Méditerranée

  • Il rapporto Istat sull’immigrazione : « Più italiani emigrati, meno arrivi dall’Africa »

    Sono 816mila quelli che si sono trasferiti all’estero negli ultimi 10 anni, in calo del 17% chi viene dal continente africano.

    Gli italiani emigrati
    Nel decennio 1999-2008 gli italiani che hanno trasferito la residenza all’estero sono stati complessivamente 428 mila a fronte di 380 mila rimpatri, con un saldo negativo di 48 mila unità. Dal 2009 al 2018 si è registrato un significativo aumento delle cancellazioni per l’estero e una riduzione dei rientri (complessivamente 816 mila espatri e 333 mila rimpatri); di conseguenza, i saldi migratori con l’estero dei cittadini italiani, soprattutto a partire dal 2015, sono stati in media negativi per 70 mila unità l’anno.

    La regione da cui emigrano più italiani, in valore assoluto, è la Lombardia con un numero di cancellazioni anagrafiche per l’estero pari a 22 mila, seguono Veneto e Sicilia (entrambe oltre 11 mila), Lazio (10 mila) e Piemonte (9 mila). In termini relativi, rispetto alla popolazione italiana residente nelle regioni, il tasso di emigratorietà più elevato si ha in Friuli-Venezia Giulia (4 italiani su 1.000 residenti), Trentino-Alto Adige e Valle d’Aosta (3 italiani su 1.000), grazie anche alla posizione geografica di confine che facilita i trasferimenti con i paesi limitrofi. Tassi più contenuti si rilevano nelle Marche (2,5 per 1.000), in Veneto, Sicilia, Abruzzo e Molise (2,4 per 1.000). Le regioni con il tasso di emigratorietà con l’estero più basso sono Basilicata, Campania e Puglia, con valori pari a circa 1,3 per 1.000.

    A un maggior dettaglio territoriale, i flussi di cittadini italiani diretti verso l’estero provengono principalmente dalle prime quattro città metropolitane per ampiezza demografica: Roma (8 mila), Milano (6,5 mila), Torino (4 mila) e Napoli (3,5 mila); in termini relativi, tuttavia, rispetto alla popolazione italiana residente nelle province, sono Imperia e Bolzano (entrambe 3,6 per 1.000), seguite da Vicenza, Trieste e Isernia (3,1 per 1.000) ad avere i tassi di emigratorietà provinciali degli italiani più elevati; quelli più bassi si registrano invece a Parma e Matera (1 per 1.000).

    Nel 2018 il Regno Unito continua ad accogliere la maggioranza degli italiani emigrati all’estero (21 mila), seguono Germania (18 mila), Francia (circa 14 mila), Svizzera (quasi 10 mila) e Spagna (7 mila). In questi cinque paesi si concentra complessivamente il 60% degli espatri di concittadini. Tra i paesi extra-europei, le principali mete di destinazione sono Brasile, Stati Uniti, Australia e Canada (nel complesso 18 mila).

    Gli spostamenti interni
    Si continua a spostarsi per i lavoro dal Sud verso il Settentrione e il Centro Italia e il fenomeno è in lieve aumento. Secondo il rapporto Istat sulle iscrizioni e cancellazioni anagrafiche della popolazione residente | nel 2018, sono oltre 117 mila i movimenti da Sud e Isole che hanno come destinazione le regioni del Centro e del Nord (+7% rispetto al 2017). A soffrire sono soprattutto Sicilia e Campania, che nel 2018 perdono oltre 8.500 residenti italiani laureati di 25 anni e più per trasferimenti verso altre regioni.

    https://www.repubblica.it/cronaca/2019/12/16/news/il_rapporto_istat_sulle_migrazioni_piu_italiani_emigrati_meno_arrivi_dall_africa_-243613030/?ref=RHPPLF-BH-I0-C8-P2-S1.8-T1

    #chiffres #migrations #émigration #solde_migratoire #statistiques #Italie #2018 #Italie

    voir aussi la métaliste ici sur des statistiques antérieures à 2018 (2014, 2015,2016) et pour 2019 :
    https://seenthis.net/messages/762801

  • Des #pêcheurs pris dans un étau

    « La mer c’est la liberté. Aujourd’hui nous sommes emprisonnés à même l’eau » déplore Slah Eddine Mcharek, président de l’Association Le Pêcheur pour le développement et l’environnement[1] à #Zarzis. Leurs projets sont ambitieux : protection des ressources aquatiques, développement d’une pêche durable et responsable et défense de la pêche artisanale. Mais les obstacles sont de taille : pris entre la raréfaction des ressources halieutiques, les menaces à leur sécurité, la réduction de leur zone de pêche et la criminalisation du sauvetage des migrants en mer, les pêcheurs se retrouvent enserrés dans un véritable étau.

    Au-delà de la petite ville de Zarzis et de ses plages où se côtoient hôtels de luxe, corps de naufragés et pêcheurs en lutte, le récit de Slah Eddine rappelle l’importance de la justice migratoire et environnementale.

    La mer, déchetterie nationale

    Depuis quelques années, un phénomène prend de l’ampleur : les rejets de déchets plastiques envahissent les rives et encombrent les zones où travaillent les pêcheurs. Faute d’un système opérationnel de collecte des ordures ménagères et de sensibilisation aux risques liés à la pollution des eaux par le plastique, ces déchets s’entassent dans les canaux de la ville avant de se disperser dans la mer, au point que les pêcheurs réclament l’interdiction des sacs plastiques.

    Aux déchets ménagers s’ajoute le problème des rejets industriels. Slah Eddine déploie une carte du bassin méditerranéen et pointe du doigt le sebkhet el melah (marais salant) des côtes de Zarzis. Le salin appartient à Cotusal, vestige colonial d’une filiale française qui a exploité pendant longtemps les ressources salines de la Tunisie, dans le cadre de concessions avantageuses qui n’ont pas été renégociées depuis l’indépendance[2]. L’exploitation du sel dans cette région, en plus de saliniser les terres agricoles, rejette des produits de traitement du sel dans la mer. Surtout, les eaux zarzisiennes sont polluées par les rejets du Groupe Chimique Tunisien, notamment le phosphogypse, et par les eaux usées non traitées par l’ONAS (Office National de l’Assainissement). Cette dernière ne remplit pas sa mission de traitement des eaux industrielles et ménagères, notamment sur l’île de Djerba. Une partie des eaux est traitée de manière inefficace et insuffisante, l’autre non traitée du tout.

    Un équilibre écologique rompu

    Pour les êtres vivants qui habitent ces eaux, les rejets industriels mêlés aux déchets et eaux usées ne peuvent faire que mauvais mélange. « La mer est devenue des toilettes à ciel ouvert » s’indigne Slah Eddine, pointant cette fois du doigt deux poissons dessinés sur une affiche. L’un est le loup de mer et l’autre la dorade. « Là où les usines rejettent leurs eaux, ces poissons n’y vivent plus » explique-t-il. La contamination de ces eaux rompt un équilibre essentiel à la survie de la faune et la flore maritimes.

    Dans ces eaux, la reproduction marine est difficile sinon impossible, entraînant la disparition de plusieurs espèces de poissons et notamment les espèces cartilagineuses. Les éponges souffrent quant à elles du réchauffement climatique et présentent depuis quelques années des signes de maladies, au désespoir des familles qui vivent de leur commerce. Ainsi, en 2017, suite à la montée des températures (24°C à 67m de profondeur !), de nombreuses éponges sont mortes, par leur fragilité aux changements du milieu ou par une épidémie favorisée par cette augmentation de température[3].

    L’accumulation des pollutions a fini par asphyxier toute forme de vie dans les eaux proches de Djerba et Zarzis et notamment dans le golfe quasi fermé de Boughrara. Les pêcheurs estiment que 90 % des poissons et mollusques auraient disparu en dix ou vingt ans, privant beaucoup de personnes, notamment des jeunes et des femmes, d’un revenu stable. Mais alors que les pêcheurs de Gabès reçoivent des compensations à cause de la pollution et viennent pêcher sur les côtes de Zarzis, les pêcheurs zarzisiens ne reçoivent rien alors qu’ils sont aussi affectés.

    Plus au nord, sur les côtes sfaxiennes, c’est un autre phénomène qui s’est produit deux fois cette année, en juin puis en novembre, notamment à Jbeniana : la mer est devenue rouge, entrainant une forte mortalité de poissons. Le phénomène a été expliqué par la présence de microalgues eutrophisant la mer, c’est-à-dire la privant de son oxygène. Mais la version officielle s’arrête là[4], la prolifération de ces microalgues n’a pas été expliquée. Or, des phénomènes similaires sont connus à d’autres endroits de la planète, notamment dans le golfe du Mexique où la prolifération des algues est due à l’excès d’engrais phosphaté et azoté qui se retrouve dans la mer, ou du rejet d’eaux usées, qui produisent des concentrations trop importantes de matières organiques[5]. Il est donc fort probable que les rejets concentrés en phosphate du Groupe Chimique Tunisien à Gabès et Sfax, d’autres rejets industriels et ménagers et/ou des rejets d’engrais agricoles par les oueds soient à l’origine du phénomène.

    Le coût de Daesh

    Alors que certaines espèces disparaissent, d’autres se multiplient en trop grand nombre. Le crabe bleu, surnommé « Daesh » par les pêcheurs de la région du fait de son potentiel invasif et destructeur, en est le meilleur exemple. Cette espèce, apparue fin 2014 dans le golfe de Gabès[6], a rapidement proliféré au large des côtes, se nourrissant des poissons qui jusque-là constituaient le gagne-pain des pêcheurs du coin. « Daesh détruit tout : les dorades, les crevettes, les seiches …. Tous les bons poissons ! » s’exclame-t-il. La voracité du crabe bleu a aggravé les problèmes économiques de bien des pêcheurs. Si la chair de cette espèce invasive fait le bonheur de certains palais et qu’un marché à l’export est en plein développement en direction de l’Asie et du Golfe, les habitants de Zarzis qui vivent de la pêche artisanale, eux, ne s’y retrouvent pas. « Un kilo de loup ou de dorade se vend 40 dinars. Un kilo de crabe bleu, c’est seulement 2 dinars ! » affirme un pêcheur de l’association.

    Le calcul est vite fait, d’autant plus que les crabes bleus font assumer aux pêcheurs un coût du renouvellement du matériel beaucoup plus important, leurs pinces ayant tendance à cisailler les filets. « Avant l’arrivée de Daesh, nous changions les filets environ deux fois par an, maintenant c’est quatre à cinq fois par ans ! » se désole l’un d’entre eux.

    Bloqués dans un Sahara marin

    Comme le martèlent les pêcheurs, « la zone de pêche de Zarzis est devenue un Sahara, un véritable désert ». Suite au partage international de la Méditerranée, les pêcheurs zarzisiens sont cantonnés dans des eaux côtières, qui se vident de poisson suite aux désastres écologiques et à la surpêche.

    « Avant 2005 et le dialogue 5+5[7] on pouvait accéder à des zones de pêche intéressantes, mais depuis les autres pays ont agrandi leur territoire marin ». En effet, c’est en 2005 que la Libye met en place sa zone de pêche exclusive, interdisant ainsi l’accès aux pêcheurs tunisiens. La Tunisie met elle aussi en place sa zone économique exclusive[8], mais, à la différence de la zone libyenne[9], elle autorise des navires étrangers à y pêcher. Les chalutiers égyptiens sont particulièrement présents, et s’ajoutent aux chalutiers tunisiens (de Sfax notamment) qui ne peuvent plus pêcher dans les eaux poissonneuses libyennes. Il arrive même que ces chalutiers pénètrent dans les eaux territoriales, en toute impunité. En plus des désastres écologiques, les eaux du sud tunisien se vident ainsi de leurs poissons à cause de la surpêche.

    Limites des différentes zones maritimes tunisiennes[10] :

    Or, les frontières officielles ne semblent pas délimiter la zone où les pêcheurs tunisiens peuvent réellement travailler, cette dernière étant manifestement beaucoup plus restreinte et empiétée par la zone libyenne. Sur la carte maritime qu’il a déployée devant lui, Slah Eddine matérialise la zone où les pêcheurs de Zarzis peuvent pêcher de manière effective et montre en resserrant ses doigts l’évolution de la zone de pêche libyenne au détriment de la zone tunisienne. Mais alors, pourquoi ce déplacement de frontière maritime n’apparaît dans aucun texte ou accord international[11] ? Y a-t-il des accords cachés ? Les garde-côtes libyens s’arrogent-ils le droit de pénétrer les eaux tunisiennes ? Ou les pêcheurs tunisiens auraient-ils intégré l’obligation de ne pas pénétrer une zone tampon pour ne pas craindre pour leur sécurité ?

    Les pêcheurs sous les feux des groupes armés libyens

    Au-delà des problèmes économiques auxquels ils doivent faire face, les pêcheurs de Zarzis sont confrontés à de graves problèmes de sécurité dans les eaux où ils naviguent. Alors que les bateaux de pêche libyens ne se gênent pas, selon Slah Eddine, pour venir exploiter les eaux tunisiennes, il n’existe aucune tolérance pour les pêcheurs tunisiens qui s’aventurent en dehors de leur zone. Ces dernières années, le pêcheur ne compte plus les cas d’agressions, de saisies de bateaux, de menaces et prises d’otages, par les groupes armés, et parmi eux les gardes côtes officiels libyens, équipés par les programmes européens de lutte contre la migration non réglementaire.

    En 2012, un pêcheur tunisien mourrait ainsi sous les balles tirées d’une vedette côtière libyenne tandis que les 18 autres membres de l’équipage étaient faits prisonniers à Tripoli[12]. En 2015, quatre bateaux de pêche tunisiens qui avaient pénétré les eaux libyennes étaient également pris en otage par des groupes armés libyens et acheminés au port d’El Zaouira[13]. Les attaques ont eu lieu jusque dans les eaux tunisiennes, comme en février 2016 lorsque treize chalutiers tunisiens avec soixante-dix marins à bord ont été arraisonnés et emmenés dans le même port, la partie libyenne exigeant alors une rançon contre leur libération[14]. L’année suivante, en 2017, des pêcheurs libyens de Zaouira menaçaient de kidnapper tous les marins tunisiens qu’ils rencontreraient en mer en représailles au contrôle d’un chalutier libyen dans le port de Sfax par la garde maritime tunisienne. Depuis, les prises d’otage se multiplient. Enième épisode d’une saga sans fin, la dernière attaque libyenne date de septembre dernier.

    L’insécurité ne touche pas que les pêcheurs de Zarzis, mais tous les pêcheurs tunisiens qui naviguent à proximité des zones frontalières : au Sud-Est, ce sont les feux des groupes libyens qui les menacent ; au Nord-Ouest, ceux de la garde côtière algérienne. Le 31 janvier de cette année, un pêcheur originaire de Tabarka et âgé de 33 ans a été tué par les autorités algériennes alors que son bateau avait pénétré les eaux territoriales de l’Algérie[15]. « Le danger est partout ! », « on se fait tirer dessus ! », s’exclament les pêcheurs de l’Association. Entre deuil et colère, ils dénoncent l’absence de réponse ferme des autorités tunisiennes contre ces agressions et se font difficilement à l’idée qu’à chaque départ en mer leur vie puisse être menacée.

    Les autres damnés de la mer

    Comme tout marin, les pêcheurs de Zarzis doivent porter assistance aux bateaux en détresse qu’ils croisent sur leur chemin. Et des bateaux en détresse, ce n’est pas ce qui manque au large de Zarzis. Le hasard a fait que leur zone de pêche se trouve sur la route des migrants qui fuient la Libye sur des embarcations de fortune et les accidents sont fréquents dans ces eaux dangereuses. Porter secours aux survivants, prendre contact avec le Centre de Coordination des Sauvetages en Mer, ramener les corps de ceux pour lesquels ils arrivent trop tard afin de leur offrir une sépulture digne, c’est aussi cela, le quotidien des pêcheurs de Zarzis. L’effroi et la colère de l’impuissance lorsque des cadavres se prennent dans les filets pêche, l’inquiétude et le soulagement lorsque le pire est évité et que tout le monde arrive à bon port.

    Sauver des vies lorsqu’il est encore temps, c’est avant tout un devoir d’humanité pour ces hommes et ces femmes de la mer. La question ne se pose même pas, malgré les heures de travail et l’argent perdus. Pour être plus efficaces dans leurs gestes et secourir le plus grand nombre, plus d’une centaine de pêcheurs de Zarzis ont suivi en 2015 une formation de 6 jours sur le secours en mer organisée par Médecins sans frontières[16]. Alors que les politiques européennes de criminalisation des ONG menant des opérations de recherche et de secours en mer ont laissé un grand vide en Méditerranée, les pêcheurs tunisiens se retrouvent en première ligne pour les opérations de sauvetage. Aussi, quand ils partent en mer, prévoient-ils toujours de l’eau et de la nourriture en plus, des fois qu’un bateau à la dérive croise leur chemin.

    Des sauveurs que l’Europe veut faire passer pour des criminels

    Au-delà d’un devoir d’humanité, porter secours aux embarcations en détresse est une obligation inscrite dans le droit international maritime et en particulier dans la Convention internationale sur la Sauvegarde de la vie humaine en mer (SOLAS), qui s’applique à tous les navires. Le texte prévoit l’obligation pour tous les Etats de coordonner leurs secours et de coopérer pour acheminer les personnes dans un lieu sûr[17], où la vie des survivants n’est plus menacée et où l’on peut subvenir à leurs besoins fondamentaux.

    Aussi, lorsque l’équipage de Chameseddine Bourrasine croise lors l’été 2018 une embarcation avec 14 migrants à la dérive, c’est sans hésitation qu’il décide de leur porter secours. Mais alors que les rescapés menacent de se suicider s’ils sont ramenés en Tunisie et qu’il ne saurait être question de les livrer aux garde-côtes de Libye où c’est l’enfer des geôles qui les attend, le capitaine décide d’appeler la garde côtière du pays sûr le plus proche, à savoir l’Italie. Après plusieurs tentatives de contact restées sans réponse, il décide alors de remorquer le bateau vers l’Italie pour débarquer les migrants dans un lieu où ils seront en sécurité[18]. Accusé avec son équipage de s’être rendu coupable d’aide à l’immigration dite « clandestine », ce sauvetage coûtera aux 7 marins-pêcheurs 22 jours d’incarcération en Sicile.

    Si le procès s’est résolu par un non-lieu, les pêcheurs de Zarzis restent dans le collimateur des autorités italiennes. « Nous les pêcheurs tunisiens, l’Italie voudrait nous contrôler et encore limiter la zone dans laquelle nous pouvons pêcher » se désole Slah Eddine, « les Italiens nous surveillent ! ». Il évoque aussi la surveillance d’EUNAVFOR Med, également appelée Sophia, opération militaire lancée par l’Union européenne en 2015 en Méditerranée pour, selon les mots de la Commission « démanteler le modèle économique des passeurs et des trafiquants d’êtres humains »[19]. Si l’opération militaire les surveille de près lorsqu’il s’agit du secours en mer, lorsqu’il est question d’attaques par des milices libyennes, Sophia détourne le regard et abandonne les pêcheurs tunisiens à leur sort.

    Les harraga de demain ? [20]

    « On ne peut plus, ce n’est plus possible, il n’y a plus rien », répètent les pêcheurs, acquiesçant les paroles par lesquelles Slah Eddine vient de présenter leur situation. Entre les eaux polluées, les problèmes économiques, le fléau de Daesh, les poissons qui ne se reproduisent plus, les éponges malades, les attaques libyennes, les pressions italiennes et européennes, être un pêcheur en Tunisie, « ce n’est plus une vie ». Leurs fils à eux sont partis pour la plupart, en Europe, après avoir « brûlé » la mer. Ils savent que dans cette région qui vit surtout de la pêche, il n’y a pas d’avenir pour eux.

    Et puis il y a ceux qui, privés de toute autre source de revenus, sont contraints à se reconvertir dans des activités de passeurs. Nés dans des familles où la pêche se transmet de père en fils, ils connaissent la mer, ses vents, tempêtes, marées et courants. Ils savent où se procurer des bateaux. Lorsque ces loups de mer sont à la barre, le voyage est plus sûr pour celles et ceux risquent la traversée vers l’Europe à bord d’un rafiot. Alors que les harragas tunisiens sont de plus en plus systématiquement déportés lorsqu’ils sont arrêtés par les autorités italiennes[21], certains passeurs ont troqué leur clientèle tunisienne pour une clientèle subsaharienne, de plus en plus nombreuse à mesure que leur situation en Libye se dégrade. Faute de voies régulières pour les migrants, la demande de passage vers l’Europe augmente. Et faute de ressources alternatives pour les pêcheurs, l’offre se développe.

    Or ce n’est ni la « main invisible » ni une quelconque fatalité qui poussent ces pêcheurs au départ ou à la diversification de leurs activités, mais le mélange entre le modèle de développement polluant et incontrôlé, l’inaction des autorités tunisiennes en matière de protection de l’environnement, et le cynisme des politiques migratoires sécuritaires et meurtrières de l’Union européenne.

    https://ftdes.net/des-pecheurs-pris-dans-un-etau
    #environnement #sauvetage #Méditerranée #pêche #développement #émigration #Cotusal #pollution #plastique #colonialisme #sel #salines #phosphogypse #Groupe_Chimique_Tunisien #eaux_usées #reproduction_marine #poissons #éponges #Djerba #mollusques #Gabès #Jbeniana #microalgues #phosphate #crabe_bleu #Libye #différend_territorial #zone_économique_exclusive #surpêche #asile #migrations #réfugiés #criminalisation #Chameseddine_Bourrasine #EUNAVFOR_Med #Operation_Sophia #harraga

    #ressources_pédagogiques #dynamiques_des_suds

  • Amérique centrale : le corridor de la sécheresse

    « Nos deux journalistes ont parcouru en septembre le bien nommé « 
    couloir de la sécheresse » en Amérique centrale, du Guatemala au
    Honduras en passant par le Salvador. Parce qu’aux causes entendues et entremêlées de la migration centraméricaine vers le nord — violence, chômage, corruption — s’en greffe une autre, de plus en plus déterminante : la crise climatique, qui frappe de plein fouet le monde rural.

    (…)

    Pour une grande partie de la population de ces trois pays — encore
    largement ruraux — qui forment le « triangle du Nord », le sentiment
    est prégnant qu’il y a peu ou pas d’espoir de s’en sortir en restant
    là. « Tout le monde veut partir », entendrons-nous dire partout, tout
    le temps. Et tout le monde semble connaître quelqu’un ou quelqu’une qui est parti.

    (…)

    Insécurité et absence de perspectives d’emploi : maux connus et
    profonds. S’y superpose aujourd’hui une sécheresse qui dure depuis au moins cinq ans et dont peu doutent qu’elle soit aggravée par le
    dérèglement climatique. Aussi, cette météo dérangée est devenue une cause majeure de la migration en milieu rural, sinon de la migration tout court. De l’insécurité alimentaire à la migration, la corrélation est claire. »

    Source : Le Devoir, 13 décembre 2019.

    https://www.ledevoir.com/documents/special/19-12_arpenter-corridor-secheresse/index.html

  • Educated Germans leave home to earn more money abroad, for a while

    The majority of German emigrants are well-educated young people who find better pay abroad, a new study shows. Many of them, however, choose to return.

    Germans living abroad earn on average €12,000 ($13,200) more than they do back home, according to a representative study published Wednesday.

    The Federal Institute for Population Research and the University of Duisburg in Essen interviewed 10,000 German-born people to find out why they emigrated and what effect leaving Germany had on them.

    “Over 60% of respondents reported that their net household income abroad was ’better’ or ’much better’ than their income the year prior,” said the Institute’s Andreas Ette. For women or people with lower levels of education, the contrast was even greater.

    Around 180,000 German citizens emigrate every year, while another 130,000 return. About 76% of emigrants have a university degree.

    Switzerland is the most popular destination for Germans, with one in five emigrants moving there, followed by Austria, the United States, and Great Britain.

    Read more: Where Germans like to emigrate

    Career is the number one reason for Germans to move abroad, followed by a desire for a different way of life. Some 37% said their partner’s career was the reason for their move. One in five moved to study.

    Brain drain? Not quite

    The interview subjects were between the ages of 20 and 70 and had either emigrated out of or returned to Germany between July 2017 and June 2018.

    Most German emigrants are young, between the ages of 20 and 40, with an average age falling between the ages of 36 and 37.

    Read more: Emigration more worrying than immigration for many Europeans, says ECFR study

    “There are certainly retired people that emigrate as well, but that is not the typical group. Instead, it’s normal that people will go abroad shortly after the end of their studies to begin their career and seek new experiences,” said Marcel Erlinghagen from the Institute for Sociology at the University of Duisburg in Essen. “It’s important to note, however, that we see a relative remigration. That means the highly qualified people are coming back. You can’t call it a long-term loss.”

    Rather than characterize this movement as a “brain drain”, or departure of well-educated people from the country, the study’s authors call it a “#brain_circulation.”

    The best come and go

    Despite the high departure rate among highly educated Germans, researchers said more than enough qualified people immigrate to Germany from other countries.

    “The best leave, but the best also come,” they write.

    Currently, 5% of Germans live abroad, putting Germany third in terms of emigration among OECD countries behind Poland and Great Britain. The annual number of German emigrants has risen gradually the 1980s.


    https://www.dw.com/en/educated-germans-leave-home-to-earn-more-money-abroad-for-a-while/a-51535494

    #Allemagne #émigration #migrations #statistiques #chiffres #fuite_de_cerveaux

  • Italy counts the cost of its brain drain

    The young and talented are leaving the country in search of professional opportunities.

    Every summer I spend a delicious stint in Maremma on the coast of Tuscany with a law professor and a magistrate from Florence with whom I have been friends for 30 years. It’s all pine clusters, azure waters, and melon and parma picnics. It is the perfect life, evidence to many Italians that their country is the most beautiful place on earth in which to live.

    But new 2018 emigration data reveals that it is also a place people are leaving in droves. Nearly 10 per cent of Italian nationals live overseas, and emigration rates are rising. Even worse, most of the leavers in recent years, are educated professionals in the prime of their working life. Although the Italian economy has recovered since the financial and eurozone crises, that hasn’t added up to optimism for the future. Quite the opposite.

    My friends Chiara and Francesco, both in their late 40s, have prestigious public sector posts. Competition for such jobs for life is fierce in a still unstable economic climate. Chiara has scaled the academic hierarchy and would like to reach the top rank, full professor, and change universities. She has taught in a city several hours away from Florence for 15 years. Switching would be bureaucratic and fraught with favouritism towards her local rivals, but she believes it is within her reach. The younger Italians she teaches, however, don’t have even that hope.

    “The most talented young students are all fleeing academic careers,” she says. “They know the career path is incredibly long. There is no money for research funding or doctorates. Even if you’re brilliant and get national accreditation to teach in a university, it’s rare that a tenure job will open.”

    Waiting used to be part of the Italian middle-class’s caricature of itself. But something has shifted since 2008 and is accelerating. Confidence in any prospect of change is diminishing, reinforced by disillusionment with politics and the government. Italian universities are among the country’s most sclerotic institutions. But the rest of the public sector is also in need of renewal, and the situation is worsening as the populist coalition government undoes recent reforms.

    Of the more than 5m Italians currently living abroad, most of them left in the past 10 years. While half of all emigrants are from Italy’s much poorer southern region, the number of northerners leaving the country’s much wealthier industrial provinces has more than doubled, and is growing every year. While Sicily was the top source of emigrants in 2007, last year Lombardy and Veneto, home to Venice, led the list of provinces with the highest number of departures. Yet Lombardy and Milan within it are the province and the city with Italy’s highest salaries.

    There are few other places where the contrast is so stark between the enviable quality of life and the expectation of professional and personal prospects. For many Italian emigrants, the decision to leave is less about poverty or unemployment than about the growing conviction that it’s not a place where the well-educated and ambitious can build a successful life. By contrast, a recent survey shows that a third of Spanish leavers said they were moving because they were unemployed, more than were seeking to advance professionally or try new experiences. Nearly half of Italian leavers in the same survey cited better business opportunities or education as their reason for departure.

    In 2017, one-third of the Italian citizens who moved abroad had university degrees, up 41.8 per cent since 2013.

    Chiara’s two sons are still in primary school, but she is already grappling with conflicting instincts. She and Francesco have gone beyond deploring the dire state of national politics and the ambient decadence — a national sport in Italy that’s always coexisted with a pleasant inertia and even a certain pride in endurance through dysfunction — to wanting a different future for their children.

    Chiara wishes she could reproduce the close knit Florentine family in which she grew up. But she believes that she would be condemning her children to small choices and smaller lives if she didn’t start seeding them with the idea that they will need to leave mamma and Italy behind.

    https://www.ft.com/content/dc95fcc0-009d-11ea-b7bc-f3fa4e77dd47?desktop=true
    #brain_drain #émigration #Italie #migrants_italiens #brain-drain #migrations #jeunes

    ajouté à cette métaliste sur l’émigration d’Italiens :
    https://seenthis.net/messages/762801

  • The Eritrean National Service. Servitude for “the common good” and the Youth Exodus

    Gives voice to the conscripts who are forced to serve indefinitely without remuneration under the ENS in a powerful critical survey of its effect from the #Liberation_Struggle to today.

    The #Eritrean_National_Service (ENS) lies at the core of the post-independence state, not only supplying its military, but affecting every aspect of the country’s economy, its social services, its public sector and its politics. Over half the workforce are forcibly enrolled into it by the government, driving the country’s youth to escape national service by seeking employment and asylum elsewhere. Yet how did the ENS, which began during the 1961-91 liberation struggle as part of the idea of the “common good” - in which individual interests were sacrificed in pursuit of the grand scheme of independence and the country’s development - degenerate into forced labour and a modern form of slavery? And why, when Eritrea no longer faces existential threat, does the government continue to demand such service from its citizens?
    This book provides for the first time an in-depth and critical scrutiny of the ENS’s achievements and failures and its overarching impact on the social fabric of Eritrea. The author discusses the historical backdrop to the ENS and the rationales underlying it; its goals and objectives; its transformative effects, as well as its impact on the country’s defence capability, national unity, national identity construction and nation-building. He also analyses the extent to which the national service functions as an effective mechanism of transmitting the core values of the liberation struggle to the conscripts and through them to the rest of country’s population. Finally, the book assesses whether the core aims and objectives of the ENS proclaimed by various governments have been or are in the process of being accomplished and, drawing on the testimony of the hitherto voiceless conscripts themselves, its impact on their lives and livelihoods.


    https://boydellandbrewer.com/the-eritrean-national-service-hb.html
    #livre #service_national #émigration #asile #migrations #réfugiés #Erythrée #Gaim_Kibreab

    • Le même auteur a écrit aussi cet article :
      Sexual Violence in the Eritrean National Service

      Claims of sexual violence against female conscripts by military commanders abound in the Eritrean national service (ENS). Hitherto there has been no attempt to subject these claims to rigorous empirical scrutiny. This article is a partial attempt to fill the gap. Using data collected through snowball sampling from 190 deserters (51 females and 139 males) in the United Kingdom, Switzerland, Norway, South Africa, Kenya and Sweden, supplemented by data from systematically selected key informants, it examines the extent to which female conscripts serving in the ENS are subjected to sexual violence and harassment by their commanders. The extensive data based on the perceptions and experiences of respondents who served on average about six years before deserting; imply that sexual abuse is rampant in the ENS

      https://openresearch.lsbu.ac.uk/item/8701z
      #viol #culture_du_viol #violences_sexuelles

  • The Millions Who Left

    Since German reunification, millions of people have left the East, triggering a demographic crisis. Data now shows exactly what happened – and why there’s cause for hope.

    –-> les cartes et le graphique montrent comment il y a eu à partir de la chute du mur et pendant quelques années une forte #émigration de l’Allemagne de l’Est à l’Ouest, les flux ont diminué petit à petit à partir de la fin des années 90. Et en 2017, changement : il y a eu plus de personnes qui ont immigré en Allemagne de l’Est depuis l’Allemagne de l’Ouest que de personnes qui ont fait l’inverse.

    https://www.zeit.de/politik/deutschland/2019-05/east-west-exodus-migration-east-germany-demography

    #Allemagne #migrations #évolution #histoire #flux_migratoires #visualisation #cartographie #flux_inversés #réunification #chute_du_mur #Allemagne_de_l'Est #Allemagne_de_l'Est #préjugés #invasion #ouverture_des_frontières #frontières_ouvertes

    ping @reka @fil @simplicissimus

  • Dall’altra parte del mare, cosa spinge i tunisini a partire

    Anche i tunisini cantano #Bella_ciao. Era una delle canzoni che suonavano nei giorni della rivoluzione dei gelsomini. H’biba ciao non parla di partigiani né di guerra o di mondine, ma di migranti. L’ha scritta #Bendirman, un musicista che è stato un simbolo per i giovani rivoluzionari che nel 2011 chiedevano la fine dello “stato di polizia” e del regime di Zine el Abidine Ben Ali.

    https://grandecomeunacitta.org/index.php/articoli/dall-altra-parte-del-mare-cosa-spinge-i-tunisini-a-partire

    #musique_et_politique #chanson #Tunisie #Hbiba_Ciao #émigration

    Une interprétation contemporaine de la célèbre Bella Ciao... Cette version ne parle pas de partisans de la seconde guerre mondiale, mais de #migrations...

    “Domani, quando ti sveglierai, non mi troverai, bella ciao. Metti Rai Uno, forse mi vedrai saltellare in terra italiana”, dice la canzone. “Sia che vediamo quel paradiso coi nostri occhi – bella ciao – sia che affoghiamo e moriamo senza sepoltura, la mia anima tornerà da te a nuoto”

    –-> traduction rapide « Demain, quand tu te réveilleras, tu ne me trouveras pas, bonjour. Allume Rai Uno, tu me verras peut-être sauter sur le sol italien », dit la chanson. « Que nous voyions ce paradis avec nos yeux - bonjour - ou que nous nous noyions et mourions sans être enterrés, mon âme nagera jusqu’à toi ».

    https://www.youtube.com/watch?v=iDAqx81xJjg

    ping @sinehebdo @_kg_

  • El clima cambiante obliga a emigrar a los guatemaltecos desesperados

    Eduardo Méndez López alza la vista al cielo esperando ver nubes cargadas de lluvia.

    Tras meses subsistiendo casi exclusivamente a base de tortillas de maíz y sal, sus ojos y sus mejillas parecen hundidos, y solo una piel fina se extiende sobre el hueso. La mayoría de sus vecinos tienen ese mismo aspecto.

    Es el punto álgido de la estación lluviosa en Guatemala, pero en la aldea de Conacaste, Chiquimula, las precipitaciones llegaron meses más tarde y, a continuación, se detuvieron. Los cultivos de Méndez López se marchitaron y murieron antes de poder producir maíz. Ahora, con un suministro de alimentos menguante y sin fuentes de ingresos, se pregunta cómo podrá alimentar a sus seis hijos pequeños.

    «Es la peor sequía que hemos tenido», afirma Méndez López, tocando la tierra seca con la punta de la bota. «Lo hemos perdido absolutamente todo. Si las cosas no mejoran, tendremos que emigrar a otra parte. No podemos seguir así».

    Guatemala suele aparecer en la lista de los 10 países más vulnerables del mundo a los efectos del cambio climático. Los patrones climáticos cada vez más erráticos han provocado pérdidas de cosechas año tras año y la disminución de las oportunidades laborales en el país, haciendo que cada vez más personas como Méndez López piensen en la emigración como medida desesperada para huir de los niveles disparados de inseguridad alimentaria y pobreza.

    De media, en la última década, 24 millones de personas al año se han visto desplazadas por los fenómenos meteorológicos en el mundo y, aunque no está claro cuántos desplazamientos pueden atribuirse al cambio climático antropogénico, los expertos prevén que esta cifra seguirá aumentando.

    Cada vez más, los desplazados intentan trasladarse a otros países como «refugiados del cambio climático», pero existe un problema: la Convención sobre el Estatuto de los Refugiados de 1951, que define los derechos de las personas desplazadas, aporta una lista de elementos de los que deben huir las personas para que se les garantice asilo o refugio. El cambio climático no figura en la lista.

    Los datos de la Oficina de Aduanas y Protección Fronteriza de los Estados Unidos muestran un gran aumento de la cantidad de inmigrantes guatemaltecos, sobre todo familias y menores no acompañados, interceptados en la frontera estadounidense a partir de 2014. No es una coincidencia que este repunte haya tenido lugar junto con la aparición de condiciones graves de sequía relacionadas con El Niño en el Corredor Seco de Centroamérica, que se extiende por Guatemala, Honduras y El Salvador.

    Para entender la tendencia alcista en la emigración de esta región, un gran estudio interinstitucional dirigido por el Programa Mundial de Alimentos (PMA) de la ONU ha entrevistado a familias de distritos fundamentales del Corredor Seco acerca de las presiones que les obligan a marcharse. El principal «factor impulsor» identificado no fue la violencia, sino la sequía y sus consecuencias: falta de alimento, de dinero y de trabajo.

    Sus hallazgos sugieren una relación clara entre la variabilidad climática, la inseguridad alimentaria y la migración, y aportan una perspectiva alarmante de lo que está por venir al empezar a observar efectos reales del cambio climático en el mundo.
    ¿Un país en crisis?

    Para Diego Recalde, director de la FAO en Guatemala, la tendencia actual de migración masiva ante la inseguridad alimentaria y la sequía supone un claro indicador de que el país lleva un tiempo acercándose a una crisis inducida por el cambio climático.

    Las condiciones climáticas adversas en Guatemala afectan a la seguridad alimentaria reduciendo la producción agrícola tanto en la agricultura comercial como en la de subsistencia, limitando las oportunidades laborales en la agricultura que también suponen una parte importante de la economía nacional. Las crecientes tasas de pobreza y el hundimiento de los indicadores sociales pintan una perspectiva funesta para el país, que posee el cuarto nivel más alto de desnutrición crónica en el mundo y el más alto en Latinoamérica. Según el Programa Mundial de Alimentos, se considera que casi el 50 por ciento de los niños menores de cinco años sufren desnutrición crónica en Guatemala, porcentaje que alcanza el 90 por ciento o más en muchas zonas rurales.

    Para los agricultores de subsistencia como Méndez López, que dependen de las precipitaciones para producir los alimentos que comen, solo hacen falta unos pocos meses de patrones climáticos erráticos para limitar u obstaculizar por completo su capacidad de poner comida sobre la mesa. Con el aumento de la frecuencia y la gravedad de las sequías, a Recalde le preocupa que, en el caso de los sectores de población más vulnerables, lo peor esté aún por llegar.

    «Es un desastre nacional», afirma. «Debería haber banderas rojas por todas partes».

    Los científicos atribuyen las inusuales sequías que comenzaron en 2014 y que han acelerado el éxodo de familias hacia el norte a los efectos de El Niño, parte de un ciclo climático natural conocido como El Niño-Oscilación del Sur (ENOS), que provoca oscilaciones entre periodos más fríos y húmedos y otros más cálidos y secos en todo el mundo.
    La erupción del volcán Fuego cubre Guatemala de ceniza y roca

    Este tipo de variabilidad climática natural ha afectado a Guatemala y a otros países Centroamericanos durante cientos —si no miles— de años, llegando a desempeñar un papel en las sequías que acompañaron al derrumbe de la antigua civilización maya.

    «El clima siempre ha sido muy variable aquí», explica Edwin Castellanos, director del Centro para el Estudio del Medio Ambiente y la Biodiversidad en la Universidad del Valle en Guatemala. «Ahora, el problema es que El Niño y La Niña se han vuelto más fuertes e intensos, pero también más erráticos».
    ¿Es culpa del cambio climático?

    Aunque puede parecer que el cambio climático es el impulsor de estas bruscas oscilaciones meteorológicas, es importante distinguir los periodos de variabilidad climática y las modificaciones a largo plazo del cambio climático. Este último se convierte enseguida en una cuestión de política, negociaciones internacionales y reclamaciones por daños y pérdidas según el Acuerdo de París.

    Aunque los científicos saben que El Niño contribuye a los aumentos de la temperatura global, todavía no está claro si el cambio climático antropogénico hace que El Niño se intensifique y ocurra con más frecuencia.

    «Por definición, el cambio climático debería modelarse en periodos de 50 años. Pero lo que los modelos dicen que debería ocurrir en 2050 ya ocurre ahora», afirma Castellanos, refiriéndose a las alteraciones de los patrones de precipitaciones y los niveles de aridez en Guatemala. «La pregunta es: ¿es la variabilidad más alta de lo normal?».

    La falta de datos meteorológicos históricos hace que sea más difícil demostrar la existencia de un vínculo claro entre el cambio climático antropogénico y un aumento de la variabilidad climática. Sin embargo, Castellanos, uno de los principales expertos en cambio climático de Guatemala, cree que es complicado ignorar la transformación que ha visto de primera mano a lo largo de su vida.

    «Todavía nos queda mucho camino por recorrer antes de concluir científicamente que lo que observamos ahora está fuera de lo normal. Pero si sales al campo y preguntas a cualquiera si esto es normal, todo el mundo te dice que no».

    Ya se atribuya a El Niño o al calentamiento global, la situación en Guatemala pinta una perspectiva vívida de las vulnerabilidades que quedan expuestas cuando las sociedades carecen de la capacidad para hacer frente y adaptarse al clima cambiante.
    Economía vulnerable, aldeas vulnerables

    En años anteriores, las familias afectadas por un mal año de cosechas buscaban trabajo como temporeros en explotaciones comerciales y ganaban el dinero suficiente para comprar alimentos básicos como maíz y judías. Pero este año no hay trabajo. Hasta las explotaciones agrícolas comerciales consolidadas se han visto afectadas por la sequía de este año, un presagio de que surgirán mayores problemas a medida que los cultivos sensibles al clima que componen la mayor parte de las exportaciones agrícolas fundamentales (y del mercado laboral nacional) de Guatemala sufren los efectos del aumento de las temperaturas y los desastres vinculados al clima, cada vez más frecuentes.

    Hoy, hacia el final de otra «estación lluviosa» que no ha traído lluvias, muchas comunidades rurales parecen estar atrapadas en una vorágine catastrófica vertiginosa. Años de meteorología errática, cosechas perdidas y una escasez crónica de oportunidades de empleo han erosionado poco a poco las estrategias que las familias guatemaltecas habían conseguido usar para hacer frente a uno o dos años de sequías sucesivas y cosechas perdidas. Pero ahora, aldeas enteras parecen estar derrumbándose desde dentro a medida que cada vez más comunidades se quedan aisladas, a horas de la ciudad más cercana, sin alimento, trabajo o forma de buscar ayuda.

    «No hay transporte. La gente se ha quedado sin dinero para pagar las tarifas, de forma que los autobuses ya no pasan por aquí», afirma José René Súchite Ramos de El Potrerito, Chiquimula. «Queremos irnos, pero no podemos».

    Muchos describen la situación actual como la más desesperada que han vivido nunca. En el asentamiento de Plan de Jocote, Chiquimula, los cultivos de Gloria Díaz no han producido maíz.

    «Aquí, al 95 por ciento nos han afectado las sequías que comenzaron en 2014, pero este año lo hemos perdido todo, hasta las semillas», afirma Díaz. «Nos hemos quedado atrapados, sin salida. No podemos planificar la segunda cosecha y nos hemos quedado sin los recursos que teníamos para poder comer».

    Como otros miembros de su comunidad, Díaz ha recurrido a buscar raíces de malanga en la naturaleza en un intento por mantener a raya el hambre, pero estas también escasean. Sin una fuente fiable de agua potable, los brotes de diarrea y sarpullidos son cada vez más habituales, sobre todo entre los niños.

    En el departamento vecino de El Progreso, la hermana Edna Morales pasa muchos días recorriendo en burro las montañas secas que rodean la pequeña localidad de San Agustín Acasaguastlán en busca de niños desnutridos cuyas familias son demasiado pobres o estén demasiado débiles para buscar ayuda. En la actualidad, el centro de alimentación nutricional que dirige funciona a plena capacidad.

    «Estos niños tienen muchos problemas de salud que se ven agravados por una grave desnutrición crónica. Se les cae el pelo o son incapaces de caminar», explica. «Cuando vives aquí, se oye hablar de muchos casos de niños que mueren de desnutrición. Ni siquiera aparecen en las noticias».

    No son solo los niños quienes sufren las consecuencias de la grave escasez de alimento y la pobreza aplastante. En Chiquimula, Díaz muestra una antigua fotografía de grupo de la organización comunitaria que preside, la Asociación de Mujeres Progresistas del Sector Plan del Jocote. Señala una por una a las mujeres que han fallecido o que están muriendo lentamente por causas evitables que la pobreza extrema y la desnutrición han vuelto intratables.

    Cuando los agricultores de subsistencia pierden sus cosechas, se ven obligados a comprar los alimentos básicos que acostumbran a cultivar —normalmente a precios muy inflados— para dar de comer a sus familias. Sin una fuente de ingresos, este gasto adicional deja a muchos sin los recursos económicos para permitirse otras necesidades básicas como las medicinas o el transporte a centros médicos.

    A medida que el hambre obliga a padres desesperados a recurrir a medidas desesperadas para alimentar a sus familias, los robos y los ataques violentos se han disparado.

    «Gente de nuestra propia comunidad empieza a robar a otras personas porque es la única opción que tienen», afirma Marco Antonio Vásquez, líder comunitario de la aldea de El Ingeniero en Chiquimula.
    Migraciones masivas

    Muchos consideran la emigración la última opción, por sus enormes riesgos para la seguridad personal y las consecuencias impensables si son incapaces de completar su viaje.

    «Mucha gente se marcha, mucha más que nunca», afirma Vásquez. «Se van a Estados Unidos en busca de un nuevo futuro, llevándose consigo a los niños pequeños porque tienen la presión de arriesgarlo todo».

    Quienes tienen casas o pequeñas parcelas de tierra las usan como aval para pagar a los contrabandistas humanos conocidos como «coyotes» entre 8.800 y 13.000 euros a cambio de tres oportunidades para atravesar la frontera hacia Estados Unidos. Pero familias de las regiones más pobres del país suelen verse obligadas a escoger la opción con las mínimas garantías y los mayores riesgos: ir solos, normalmente con niños pequeños a cuestas.

    En Ciudad de Guatemala, dos o tres aviones aterrizan cada día en la base de la Fuerza Aérea guatemalteca, cada uno con unos 150 ciudadanos guatemaltecos que han sido deportados o interceptados mientras intentaban cruzar a Estados Unidos. Muchos huyen del hambre y la pobreza extrema de su país natal.

    Ernesto, que nos pidió que cambiáramos su nombre, parecía agotado mientras esperaba en la fila para recoger una pequeña bolsa que contiene las pertenencias que le arrebataron cuando le interceptaron en la frontera estadounidense: sus cordones, un teléfono móvil maltrecho y una pequeña biblia. Su familia en Guatemala había puesto en juego su hogar y su subsistencia con la esperanza de que lograra cruzar y encontrara trabajo en Estados Unidos, lo que le permitiría apoyar a su familia. Era la segunda vez que lo deportaban.

    «Me queda una oportunidad. Si no lo consigo, estaré en graves problemas».

    https://www.nationalgeographic.es/medio-ambiente/2018/10/el-clima-cambiante-obliga-emigrar-los-guatemaltecos-desesperados

    #climat #changement_climatique #migrations #émigrations #Guatemala #réfugiés_climatiques #réfugiés_environnementaux

  • ’Updata-ing’ the narrative about African migration

    Migration has become a staple of the news in many countries, filled with images of desperate Africans fleeing an impoverished continent, poised to descend on the West. These reports are not necessarily false, and they can be valuable in highlighting the human stories of migration but they are not a good basis for helpful action.

    Politicians push myths and half-truths to score points but policymakers interested in addressing the complex issues around migration need data that can help them understand who, where, and why and therefore what an appropriate and targeted response might look like. Surely migration is not the same in Malawi and Morocco?

    In addition to official figures, one source of useful data is ordinary Africans – the source, after all, of all African migration. In its Round 7 public-attitude surveys (2016/2018), the research network Afrobarometer asked more than 45,000 Africans in 34 countries how they see and think about migration.

    Engaging with the data and scratching beneath the surface of existing narratives are essential if we are to move beyond ’stronger borders’ and other simplistic, one-size-fits-all ’solutions’. While statistical data help to reposition the discussion on migration and to cool down debates about ’mass migration’, perception data contribute to understanding intentions and motivations. Together they form a strong basis for informing areas for policy action.

    This co-authored research paper showcases the main findings of Afrobarometer research and the latest facts and figures of the Mo Ibrahim Foundation report “Africa’s youth: jobs or migration?”

    http://afrobarometer.org/fr/publications/updata-ing-narrative-about-african-migration

    #Rapport en pdf:
    http://afrobarometer.org/sites/default/files/publications/Publications%20conjointes/partenaires/afrobarometer-moibrahim-updata-ing-the-narrative-about-african-migrat

    #émigration #chiffes #statistiques #migrations #réfugiés #Afrique #émigration #cartographie #visualisation

  • #Fatou_Diome : « La rengaine sur la #colonisation et l’#esclavage est devenue un fonds de commerce »

    L’écrivaine franco-sénégalaise s’exprime sans filtre sur son enfance, l’immigration, le féminisme, ou la pensée « décoloniale » qui a le don de l’irriter…

    Fatou Diome écrit comme elle parle, avec fougue et sensibilité. Que ce soit dans ses romans ou dans ses prises de paroles publiques, l’auteure franco-sénégalaise use avec habileté de cette langue piquante qui frôle parfois la satire. Dans son premier roman à succès, Le Ventre de l’Atlantique (éd. Anne Carrière, 2003), elle donnait la parole à cette jeunesse sénégalaise piégée dans le désir d’Europe et ses mirages tragiques. Les œuvres de Fatou Diome offrent aussi une voix aux femmes, héroïnes du quotidien quand les maris migrent (Celles qui attendent, éd. Flammarion, 2010) ou disparaissent tragiquement, comme dans son nouveau roman, Les Veilleurs de Sangomar (éd. Albin Michel), en librairie le 22 août.

    Installée à Strasbourg depuis vingt-cinq ans, Fatou Diome observe et critique sa société d’origine et son pays d’accueil. En vingt ans de carrière, elle a publié une dizaine de romans, de nouvelles et un essai remarqué en 2017, Marianne porte plainte ! (éd. Flammarion), véritable pamphlet contre les discours identitaires, racistes, sexistes et islamophobes. Dans cet entretien, Fatou Diome s’exprime sans filtre sur son enfance aux marges, l’immigration, le féminisme, ou la pensée « décoloniale » qui a le don de l’irriter…
    D’où vient votre nom, Diome ?

    Fatou Diome Au Saloum, région située sur la côte sud du Sénégal, les Diome sont des Sérères-Niominkas, des Guelwaar. Il est dit que ce peuple était viscéralement attaché à sa liberté.
    Pourtant, écrivez-vous dans Le Ventre de l’Atlantique, votre nom suscitait la gêne à Niodior, votre village natal…

    Oui, car je suis née hors mariage d’un amour d’adolescents. A cette époque, j’étais la seule de l’île à porter ce nom car mon père est d’un autre village. Enfant, je ne comprenais pas pourquoi la simple prononciation de mon nom suscitait le mépris. J’ai compris plus tard que ce sentiment de gêne diffuse que je ressentais autour de moi venait du fait que j’étais supposée être « l’enfant du péché ».

    Cette ostracisation était d’autant plus injuste que l’idée « d’enfant illégitime » n’existait pas chez les Sérères animistes jusqu’au milieu du XIXe siècle et la domination des religions monothéistes. Jusque-là, au contraire, avoir un enfant des fiancés avant le mariage était le meilleur moyen de s’assurer que le prétendant était fertile. C’était même une tradition dans l’aristocratie sérère notamment, où la lignée était matrilinéaire. « Domou Djitlé », qui signifie « enfant illégitime », est une expression wolof, qui n’existe pas en sérère.
    Comment enfant affrontiez-vous cette marginalisation ?

    En renonçant à ceux qui me calomniaient. Cette indépendance m’est venue des conseils de mon grand-père maternel, un marin qui, dans l’Atlantique, devait sans cesse trouver des solutions. Je l’accompagnais souvent en mer. Quand le vent soufflait trop fort et que je pleurais, il me lançait : « Tu crois que tes pleurs vont nous ramener plus vite au village ? Allez, rame ! » C’est une leçon que j’ai retenue : les jérémiades ne sauvent de rien.
    A quel moment vous êtes-vous réappropriée votre nom ?

    A l’école. L’instituteur, qui était lui-même marginalisé car étranger, m’a expliqué le sens du diome : la dignité. C’était énorme ! La « bâtarde du village » était donc la seule à s’appeler dignité ! (Rires)

    Et puis un jour, j’ai rencontré mon père. C’était un homme adorable, un sculptural champion de lutte ! Ma mère avait eu de la chance d’aimer cet athlète magnifique ! Porter son nom est une fierté. Je suis le fruit d’un amour absolu, un amour souverain qui n’a demandé nulle permission aux faux dévots.
    Etre une enfant illégitime, c’était aussi risquer de ne pas survivre à la naissance…

    Oui et je dois la vie sauve à ma grand-mère maternelle, qui m’a accueillie au monde, dans tous les sens du terme. C’est elle qui a fait la sage-femme. Elle aurait pu m’étouffer à la naissance comme le voulait la tradition, mais elle a décidé de me laisser vivre et de m’élever. Elle me disait souvent que je n’étais pas illégitime mais légitimement vivante, comme tout enfant.
    Cette jeune grand-mère vous a allaitée. Quelle fut votre relation avec elle ?

    Très forte. Elle était et restera ma mamie-maman. Jusqu’à sa mort, je l’appelais Maman. Enfant, je dormais avec elle. Plus tard, j’insistais pour faire la sieste avec elle lors de mes visites. Comme un bébé, je gardais une main sur sa poitrine. Ma grand-mère, j’en suis convaincue, était la meilleure mère possible pour moi. Pardon pour l’autre dame…
    Votre mère…

    Oui. Avec elle, j’avais étrangement une relation de grande sœur. Et plus tard, je l’ai prise sous mon aile car j’étais plus combative et plus indépendante qu’elle. J’ai choisi ma vie, elle non. Et c’est pour cette raison que j’ai dit dans Le Ventre de l’Atlantique que « j’écris, pour dire et faire tout ce que ma mère n’a pas osé dire et faire ». Elle a par exemple subi la polygamie, une maladie que je n’attraperai jamais.
    Qu’aviez-vous à dire quand vous avez commencé à écrire à 13 ans ?

    Ecrire était une nécessité. Il me fallait comprendre pourquoi, par exemple, telle tante me câline devant mes grands-parents puis me traite de « bâtarde » en leur absence. L’écriture s’est imposée à l’âge de 13 ans, lorsque j’ai quitté le village pour poursuivre mes études en ville. Pour combler ma solitude, je noircissais des cahiers. Une fois, j’ai même réécrit Une si longue lettre de Mariama Bâ. Dans ma version vitaminée, les femmes n’étaient plus victimes de leur sort, mais bien plus combatives. J’aime celles qui dansent avec leur destin, sans renoncer à lui imposer leur tempo.

    Vous épousez ensuite un Alsacien et vous vous installez à Strasbourg. En France, vous découvrez une autre forme de violence, le racisme. Comment y avez-vous survécu ?

    En m’appropriant ce que je suis. J’ai appris à aimer ma peau telle qu’elle est : la couleur de l’épiderme n’est ni une tare ni une compétence. Je sais qui je suis. Donc les attaques des idiots racistes ne me blessent plus.
    Etre une auteure reconnue, cela protège-t-il du racisme ?

    Reconnue ? Non, car la réussite aussi peut déchaîner la haine. On tente parfois de m’humilier. C’est par exemple ce policier des frontières suspicieux qui me fait rater mon vol car il trouve douteux les nombreux tampons sur mon passeport, pourtant parfaitement en règle. Ou ce journaliste parisien qui me demande si j’écris seule mes livres vus leur structure qu’il trouve trop complexe pour une personne qui n’a pas le français comme langue maternelle. Ou encore cette femme qui, dans un hôtel, me demande de lui apporter une plus grande serviette et un Perrier… Le délit de faciès reste la croix des personnes non caucasiennes.
    La France que vous découvrez à votre arrivée est alors bien éloignée de celle de vos auteurs préférés, Yourcenar, Montesquieu, Voltaire…

    Cette France brillante, je l’ai bien trouvée mais on n’arrête pas de la trahir ! Il faut toujours s’y référer, la rappeler aux mémoires courtes. Cette France, elle est bien là. Seulement, les sectaires font plus de bruit. Il est temps que les beaux esprits reprennent la main !
    Qui la trahit, cette France ?

    Ceux qui lui font raconter le contraire de ce qu’elle a voulu défendre. Pour bien aimer la France, il faut se rappeler qu’elle a fait l’esclavage et la colonisation, mais qu’elle a aussi été capable de faire la révolution française, de mettre les droits de l’homme à l’honneur et de les disperser à travers le monde. Aimer la France, c’est lui rappeler son idéal humaniste. Quand elle n’agit pas pour les migrants et les exploite éhontément, je le dis. Quand des Africains se dédouanent sur elle et que des dirigeants pillent leur propre peuple, je le dis aussi. Mon cœur restera toujours attaché à la France, et ce même si cela m’est reproché par certains Africains revanchards.

    Vous vivez en France depuis 1994. Les statistiques officielles démontrent la persistance de discriminations en matière de logement ou de travail contre notamment des Français d’origine africaine dans les quartiers populaires. Que dites-vous à ces jeunes Noirs ?

    Qu’ils prennent leur place ! Vous savez, au Sénégal, un jeune né en province aura moins de chance de réussir que celui issu d’une famille aisée de la capitale. La différence, c’est qu’en France, cette inégalité se trouve aggravée par la couleur. Ici, être noir est une épreuve et cela vous condamne à l’excellence. Alors, courage et persévérance, même en réclamant plus de justice.
    Cette course à l’excellence peut être épuisante quand il faut en faire toujours plus…

    Si c’est la seule solution pour s’en sortir, il faut le faire. Partout, la dignité a son prix. On se reposera plus tard, des millénaires de sommeil nous attendent.

    Vous avez suivi une formation en lettres et philosophie à l’université de Strasbourg avec un intérêt particulier pour le XVIIIe siècle. Que pensez-vous des critiques portées par le courant de pensée « décoloniale » à l’égard de certains philosophes des Lumières ?

    Peut-on éradiquer l’apport des philosophes des Lumières dans l’histoire humaine ? Qui veut renoncer aujourd’hui à L’Esprit des lois de Montesquieu ? Personne. Les Lumières ont puisé dans la Renaissance, qui s’est elle-même nourrie des textes d’Averroès, un Arabe, un Africain. C’est donc un faux débat ! Au XVIIIe siècle, la norme était plutôt raciste. Or Kant, Montesquieu ou Voltaire étaient ouverts sur le monde. Ils poussaient déjà l’utopie des droits de l’homme. On me cite souvent Le Nègre du Surinam pour démontrer un supposé racisme de Voltaire. Quel contresens ! Ce texte est une ironie caustique. Voltaire dit à ses concitoyens : « C’est au prix de l’exploitation du nègre que vous mangez du sucre ! »

    Par ailleurs, chez tous les grands penseurs, il y a souvent des choses à jeter. Prenez l’exemple de Senghor. Sa plus grande erreur d’emphase et de poésie fut cette phrase : « L’émotion est nègre, la raison hellène. » Cheikh Anta Diop, bien qu’Africain, était un grand scientifique quand Einstein était doté d’une grande sensibilité. Cette citation est donc bête à mourir, mais devons-nous jeter Senghor aux orties ?

    On constate tout de même une domination des penseurs occidentaux dans le champ de la philosophie par exemple…

    Certaines choses sont universelles. Avec Le Vieil Homme et la mer, Hemingway m’a fait découvrir la condition humaine de mon grand-père pêcheur. Nous Africains, ne perdons pas de temps à définir quel savoir vient de chez nous ou non. Pendant ce temps, les autres n’hésitent pas à prendre chez nous ce qui les intéresse pour le transformer. Regardez les toiles de Picasso, vous y remarquerez l’influence des masques africains…
    Vous estimez donc que le mouvement de la décolonisation de la pensée et des savoirs, porté par un certain nombre d’intellectuels africains et de la diaspora, n’est pas une urgence ?

    C’est une urgence pour ceux qui ne savent pas encore qu’ils sont libres. Je ne me considère pas colonisée, donc ce baratin ne m’intéresse pas. La rengaine sur la colonisation et l’esclavage est devenue un fonds de commerce. Par ailleurs, la décolonisation de la pensée a déjà été faite par des penseurs tels que Cheikh Anta Diop, Aimé Césaire, Léopold Sédar Senghor ou encore Frantz Fanon. Avançons, en traitant les urgences problématiques de notre époque.
    A l’échelle de la longue histoire entre l’Afrique et l’Occident, ce travail de décolonisation de la pensée, débuté il y a quelques décennies, n’est peut-être pas achevé ?

    Je pense, comme Senghor, que nous sommes à l’ère de la troisième voie. Nous, Africains, ne marchons pas seulement vers les Européens ; eux ne marchent pas que vers nous. Nous convergeons vers la même voie, la possible conciliation de nos mondes. La peur de vaciller au contact des autres ne peut vous atteindre quand vous êtes sûr de votre identité. Me concernant, ce troisième millénaire favorise la rencontre. Je sais qui je suis, je ne peux pas me perdre en Europe car, non seulement je récite mon arbre généalogique, mais je séjourne régulièrement dans mon village.

    Après tous les efforts de Senghor, Césaire, Fanon, en sommes-nous encore à nous demander comment nous libérer de l’esclavage et de la colonisation ? Pendant ce temps, où nous stagnons, les Européens envoient Philae dans l’espace… L’esclavage et la colonisation sont indéniablement des crimes contre l’humanité. Aujourd’hui, il faut pacifier les mémoires, faire la paix avec nous-mêmes et les autres, en finir avec la littérature de la réactivité comme le dit si bien l’historienne Sophie Bessis.
    Cette histoire dramatique, loin d’être un chapitre clos, continue pourtant de marquer le présent des Africains et les relations avec d’anciennes puissances coloniales…

    Pour moi, il y a plus urgent. La priorité, c’est l’économie. Faisons en sorte que la libre circulation s’applique dans les deux sens. Aujourd’hui, depuis l’Europe, on peut aller dîner à Dakar, sans visa. Le contraire est impossible ou alors le visa vous coûtera le salaire local d’un ouvrier. Pourquoi attendre une forme de réparation de l’Europe, comme un câlin de sa mère ? Pourquoi se positionner toujours en fonction de l’Occident ? Il nous faut valoriser, consommer et, surtout, transformer nos produits sur place. C’est cela l’anticolonisation qui changera la vie des Africains et non pas la complainte rance autour de propos tenus par un de Gaulle ou un Sarkozy.
    On sent que ce mouvement vous irrite…

    Je trouve qu’il y a une forme d’arrogance dans cette injonction et cette façon de s’autoproclamer décolonisateur de la pensée des autres. C’est se proclamer gourou du « nègre » qui ne saurait pas où il va. Je choisis mes combats, l’époque de la thématique unique de la négritude est bien révolue.
    Votre roman Le Ventre de l’Atlantique (2003) a été l’un des premiers à aborder le thème de la migration vers l’Europe. Que dites-vous à cette jeunesse qui continue de risquer sa vie pour rejoindre d’autres continents ?

    Je leur dirai de rester et d’étudier car, en Europe aussi, des jeunes de leur âge vivotent avec des petits boulots. Quand je suis arrivée en France, j’ai fait des ménages pour m’en sortir, après mon divorce. J’ai persévéré malgré les humiliations quotidiennes et les moqueries au pays.

    Si je suis écrivain, c’est parce que j’ai usé mes yeux et mes fesses à la bibliothèque. J’ai toujours écrit avec la même rigueur que je nettoyais les vitres. Aux jeunes, je dirai que l’école a changé ma vie, elle m’a rendue libre.
    La tentation est grande de partir vu le manque d’infrastructures dans de nombreux pays africains. Comment rester quand le système éducatif est si défaillant ?

    La responsabilité revient aux dirigeants. Ils doivent miser sur l’éducation et la formation pour garder les jeunes, leur donner un avenir. Il faudrait que les chefs d’Etat respectent plus leur peuple. Il n’y a qu’à voir le silence de l’Union africaine face au drame des migrants. Quand les dirigeants baissent la tête, le peuple rampe.
    Quel regard portez-vous sur le durcissement de la politique migratoire européenne ? Dernier acte en date, le décret antimigrants adopté par l’Italie qui criminalise les sauvetages en mer…

    L’Europe renforce sa forteresse. Mais qui ne surveillerait pas sa maison ? Les pays africains doivent sortir de leur inaction. Pourquoi n’y a-t-il pas, par exemple, de ministères de l’immigration dans nos pays ? C’est pourtant un problème majeur qui touche à l’économie, la diplomatie, la santé, la culture. Si l’Afrique ne gère pas la situation, d’autres la géreront contre elle. Elle ne peut plus se contenter de déplorer ce que l’Europe fait à ses enfants migrants.

    Vous avez écrit sur la condition féminine, le rapport au corps de la femme au Sénégal et la fétichisation dont vous avez été victime en France en tant que femme noire. Vous sentez-vous concernée par le mouvement #metoo ?

    Je comprends ce combat, mais je considère qu’Internet n’est pas un tribunal. Les femmes doivent habiter leur corps et leur vie de manière plus souveraine dans l’espace social et public. Il faut apprendre aux jeunes filles à s’armer psychologiquement face aux violences, par exemple le harcèlement de rue. Il faut cesser de se penser fragiles et porter plainte immédiatement en cas d’agression.
    La lutte contre les violences faites aux femmes revient aussi aux hommes…

    En apprenant aux femmes à habiter leur corps, à mettre des limites, on leur apprend aussi à éduquer des fils et des hommes au respect. Le féminisme, c’est aussi apprendre aux garçons qu’ils peuvent être fragiles, l’agressivité n’étant pas une preuve de virilité, bien au contraire. Me concernant, malgré la marginalisation à laquelle j’ai été confrontée, je ne me suis jamais vécue comme une femme fragile, ni otage de mon sexe, mes grands-parents m’ayant toujours traitée à égalité avec les garçons.
    Vous sentez-vous plus proche du féminisme dit universaliste ou intersectionnel ?

    Je me bats pour un humanisme intégral dont fait partie le féminisme. Mon féminisme défend les femmes où qu’elles soient. Ce qui me révolte, c’est le relativisme culturel. Il est dangereux d’accepter l’intolérable quand cela se passe ailleurs. Le cas d’une Japonaise victime de violences conjugales n’est pas différent de celui d’une habitante de Niodior ou des beaux quartiers parisiens brutalisée. Lutter pour les droits humains est plus sensé que d’essayer de trouver la nuance qui dissocie. Mais gare à la tentation d’imposer sa propre vision à toutes les femmes. L’essentiel, c’est de défendre la liberté de chacune.

    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/08/25/fatou-diome-la-rengaine-sur-la-colonisation-et-l-esclavage-est-devenue-un-fo

    #interview #féminisme #racisme #approche_décoloniale #post-colonialisme #décolonialisme #pensée_décoloniale #xénophobie #migrations #émigration #discrimination #décolonisation_de_la_pensée #Afrique #Senghor #Césaire #Fanon #libre_circulation #anticolonisation #féminisme #humanisme_#intégral #relativisme_culturel #droits_humains #liberté

    • Quelques perles quand même:

      L’Europe renforce sa forteresse. Mais qui ne surveillerait pas sa maison ?

      Il faut apprendre aux jeunes filles à s’armer psychologiquement face aux violences, par exemple le harcèlement de rue. Il faut cesser de se penser fragiles et porter plainte immédiatement en cas d’agression.

      déçu...

    • @sinehebdo, j’ajouterais :

      C’est une urgence pour ceux qui ne savent pas encore qu’ils sont libres. Je ne me considère pas colonisée, donc ce baratin ne m’intéresse pas. La rengaine sur la colonisation et l’esclavage est devenue un fonds de commerce. Par ailleurs, la décolonisation de la pensée a déjà été faite par des penseurs tels que Cheikh Anta Diop, Aimé Césaire, Léopold Sédar Senghor ou encore Frantz Fanon. Avançons, en traitant les urgences problématiques de notre époque.

      Mais celle-ci par contre est selon moi au coeur des politiques xénophobes que l’Europe et les pays qui la composent mettent en oeuvre :

      La #peur de vaciller au contact des autres ne peut vous atteindre quand vous êtes sûr de votre #identité.

  • #Murales à #Santo_Stefano_di_Cadore, province de Belluno

    L’on y voit des scènes de la #vie_quotidienne d’antant...

    ... une vie dans ces vallées alpines qui comportait aussi des moments d’#émigration, souvent siaisonnière :


    La figure de l’#émigrant, qui semble sortir aussi du murales... avec une valise en main et des habits chauds, cette personne semble presque s’enfuir... trop triste le départ ?

    En lien avec cela, cette « Rue de l’émigrant » à Palazzolo dello Stella... qui n’est sommes toutes pas très loin de là où a été peint ce murales :


    https://seenthis.net/messages/797311

    Et cette chanson que j’aime tant de #Davide_Van_de_sfroos, et dont j’ai fait un petit lieu-dit pour le site de la Revue de géographie alpine :
    Le Carnaval de Schignano : un dernier salut aux émigrants


    https://journals.openedition.org/rga/1401
    (photo d’@albertocampiphoto)

    La chanson :
    https://www.youtube.com/watch?v=Ra37RtuP9-s


    (ça intéresse peut-être @sinehebdo)

    #Alpes
    #street-art #art_de_rue

    ping @reka

  • Oro e acqua minerale

    C’è una piccola regione in Australia, nella zona centrale dello stato di Victoria, che è molto ticinese. C’è un paese che si chiama Hepburn dove i cognomi degli abitanti sono Rodoni, Vanzetta, Scheggia, Vanina, Tinetti, Righetti, Crippa, Perini, Respini... Non parlano italiano, non parlano dialetto ticinese e sono veramente australiani.

    I loro antenati emigrarono in Australia dal Ticino, attorno al 1850, quando scoppiò la febbre dell’oro. Facevano i cercatori d’oro, ma piano piano si insediarono in quella regione e crearono una comunità molto unita, che presto diventò la loro nuova patria.

    https://www.rsi.ch/la1/programmi/cultura/storie/Oro-e-acqua-minerale-10879319.html
    #film #documentaire #émigration #Tessin #Australie #histoire #Suisse #Biasca #sureau #eau_minérale #Hepburn #or #ruée_vers_l'or #extractivisme #colonisation #châtaigniers #mines
    #Welcome_Stranger, une #pépite_d'or :


    https://fr.wikipedia.org/wiki/Welcome_Stranger
    #nugget

    –---

    Quelques commentaires :
    « L’Australia non ha una lunga storia, solo un paio di secoli »
    –-> dit un habitant de Melbourne qui a acheté une maison à Hepburn construite par une Scheggia, un émigrant tessinois autour de 1815...
    Et la présentatrice en commentaire après le documentaire :

    «La storia dell’Australia è molto molto giovane, lo si diceva nel documentario, 2 secoli di storia o poco più»

    ... comme si les #peuples_autochtones n’existaient pas avant l’arrivée des Européens, comme si l’histoire n’est écrite que depuis leur arrivée... Il y a un sacré besoin de décoloniser l’histoire...

  • Quando eravamo noi i migranti: mille storie italiane in un archivio da rileggere e rivivere

    Nasce ’Italiani all’estero, i diari raccontano’ (http://www.idiariraccontano.org). Un sito per navigare, anche attraverso una mappa, storie piccole e dimenticate di discriminazioni, dolore, coraggio e forza di ripartire.

    Ci sono i transatlantici entrati nella storia della navigazione e le banchine di porti che oggi vedono solo container. C’è il coraggio di partire e c’è la voglia di raccontare come, alla fine, si è riusciti a farcela, a garantire un futuro a sé stessi e ai propri figli. C’è sofferenza e disperazione, ma anche speranza e spregiudicatezza. Ci sono generosità ed egoismo, amore e violenza.

    Sono mille storie di italiani che al di là dei confini della penisola hanno cercato un po’ di quel benessere che in patria non trovavano. O che hanno soddisfatto il loro desidero di aiutare il prossimo, di vivere un’avventura, di arricchire il proprio bagaglio di esperienze.

    Mille storie che da oggi, lunedì 10 giugno, sono a disposizione di tutti su un sito dal titolo semplice e diretto: “Italiani all’estero. I diari raccontano”. Si tratta di un sito nato dalla collaborazione tra un ministero e un luogo dove da decenni si conservano i diari, le memorie e le lettere che, a oggi, novemila italiani hanno deciso di non tenere per sé ma di mettere a disposizione di chi voglia conoscere, attraverso i percorsi individuali, pezzi di storia del nostro paese.

    Il ministero è quello degli Affari esteri, la Farnesina, in particolare la direzione generale che si occupa degli italiani all’estero e delle politiche migratorie. Il luogo dei diari è l’Archivio diaristico di Pieve Santo Stefano fondato nel 1984 dal giornalista Saverio Tutino, per dieci anni inviato di Repubblica.

    Aprendo il sito, ma verrebbe da chiamarlo scrigno per il senso di intimità e di preziosità trasmesso dai testi che contiene, ci si imbatte subito in quello che è senz’altro il principale strumento di navigazione. La carta geografica del mondo cosparsa di tanti pallini verdi che sono le chiavi per entrare nelle mille storie dello scrigno. Centinaia in Europa e Sud America. Poi il Canada e gli Stati Uniti, l’Australia, l’Estremo oriente, l’Africa, non solo i paesi occupati nel passato dall’Italia, ma anche Congo, Ruanda, Burundi. E ancora: Yemen, Arabia Saudita, Turchia, India, Pakistan…

    Per iniziare ci si può lasciar guidare, nel viaggio di scoperta che si inizia aprendo “I diari raccontano”, dalla densità delle storie. Si arriva subito nel cuore dell’Europa, nel quadrilatero più famoso e più dolente dell’emigrazione italiana: Francia, Belgio, Germania e Svizzera. I brani selezionati tra migliaia e migliaia di pagine conservate a Pieve raccontano le partenze in treni speciali dopo aver fatto tutta la trafila burocratica necessaria per ottenere un posto di lavoro.

    Una volta arrivati si annotano le discriminazioni subite, le piccole e grandi umiliazioni. Ma anche i successi che a molti hanno consentito di tornare a casa meno poveri. Si annotano sul quaderno o solo dentro di sé per ritirarle fuori anni dopo, quando si deciderà di scrivere la storia della propria vita.

    Poi le miniere, il sentiero di sudore e sangue che ha unito l’Italia alle viscere dei paesi ricchi di carbone. Prima di tutto il Belgio, il sentiero più recente, e di cui è emblema la tragedia di Marcinelle, la miniera in cui, nel 1956, morirono, tra gli altri, 136 immigrati italiani. Ludovico Molari era lì e racconta quando si trova davanti alla bara del fratello “dove in un biglietto sopra il coperchio c’è il nome di Molari Antonio riconosciuto per la mancanza della prima falange del dito anulare della mano sinistra e dall’abbigliamento”.

    Quasi 50 anni prima un’altra miniera e altri morti, al di là dell’Atlantico, a Cherry, Illinois, Stati Uniti d’America. Antenore Quartaroli ha seguito il sentiero del carbone ed è lì nel novembre del 1909 quando un incendio nelle gallerie uccide 259 minatori tra cui 73 italiani, per buona parte emiliani come Antenore che è arrivato nell’Illinois dalla provincia di Reggio Emilia. Antenore resta sepolto vivo per otto giorni e racconta così il suo ritorno alla vita: “Sempre all’oscuro si siamo incaminati di nuovo fatto una cinquantina di metri vi era una volta via e arrivati in quella posizione con gran gioia abbiamo scoperto che vicino al pozzo d’usita vi era Gente che lavorava... il primo che io conobi fu mio Cognato Giulio Castelli che quel giorno era a lavorare nel lavoro di Salvattaggio”.

    Lasciarsi trasportare dai pallini verdi della mappa dei “Diari raccontano” porta anche ai giorni e ai luoghi segnati nel calendario della storia. A piazza Tienanmen il giorno della rivolta contro il regime. In Kuwait nei giorni dell’invasione irachena. A Bruxelles quando i tedeschi la invadono nel 1914. In Francia il 10 giugno del 1940 quando gli italiani che lavoravano là da amici diventano, in un minuto, i “nemici”. In Vietnam con la divisa della Legione straniera. Ma anche più indietro nel tempo. Tutto da leggere il racconto di un garibaldino nato a Vicenza che si imbarca per gli Stati Uniti e combatte la guerra di secessione americana in un reggimento di cavalleria.

    La storia di emigrazione più antica conservata a Pieve è quella di Angelo Rebay, nato sulla riva del lago di Como nel 1788. Di lui non ci sono fotografie ma un ritratto fatto da una nuora. Per 11 anni, dal 1800 al 1811 cercò fortuna in Germania insieme a suo fratello per poi tornare a vivere nel suo paese, Pognana Lario.

    Prima di “Gli italiani all’estero. I diari raccontano”, ideato da Nicola Maranesi e di cui chi scrive è consulente editoriale, l’archivio di Pieve Santo Stefano aveva realizzato, con L’Espresso e i quotidiani locali del gruppo, un sito che ne è sicuramente il genitore, o il prototipo: “La Grande Guerra 1914-1918”.

    E così come quello dedicato alla guerra anche questo dà il via a un progetto aperto. Utilizzando un’apposita pagina del sito si potrà arricchirlo inviando le testimonianze di emigrazione personali o di propri antenati. Testimonianze che verranno pubblicate ed entreranno a far parte del patrimonio dell’archivio diaristico di Pieve Santo Stefano.

    https://www.repubblica.it/cronaca/2019/06/10/news/quando_eravamo_noi_i_migranti_mille_storie_italiane_in_un_archivio_da_ril

    #quand_eux_c'était_nous #Italie #émigration #histoire #i_diari_raccontano #migrations
    ping @albertocampiphoto @wizo

  • Boom di lavoratori italiani in Spagna, secondi solo a romeni e marocchini

    Strappata ai cinesi la terza posizione. L’incremento è stato del 71% in 10 anni.

    Il numero di italiani che lavorano in Spagna è cresciuto del 71% negli ultimi 10 anni e ha strappato alla Cina la terza posizione nella classifica che vede i nostri connazionali preceduti sono da romeni e marocchini.

    Sono più di 46.000 gli italiani arrivati a lavorare in Spagna dal 2008, concentrandosi soprattutto in Catalogna, a Madrid, sulle isola canarie e nella Comunidad Valenciana, per un totale oggi di 110.691 associati alla Seguridad Social (la copertura sanitaria spagnola, indispensabile per avere un lavoro).

    L’Italia è passata quindi dall’ottava alla terza posizione, anche se gran parte della forza lavoro italiana è di origini argentine o uruguaiane. La Romania conta 333.406 occupati in Spagna, mentre il Marocco ne conta 253.018. La Cina è scivolata in quarta posizione, ma comunque in rialzo rispetto alla sesta occupata nel 2018.

    https://www.agi.it/estero/lavoratori_emigrati_italiani_in_spagna-5630198/news/2019-06-10
    #émigration #Italie #migrants_italiens #Espagne #chiffres #statistiques #migrations #travail #travailleurs_étrangers

    Ajouté à la métaliste:
    https://seenthis.net/messages/762801

  • الكيان يعتبرها تهديدًا إستراتيجيًا : تنامي ظاهرة هجرة الأدمغة الإسرائيليّة وتزايد كبير بنسبة هجرة المُستوطِنين المتعلِمين إلى الخارج | رأي اليوم
    https://www.raialyoum.com/index.php/%d8%a7%d9%84%d9%83%d9%8a%d8%a7%d9%86-%d9%8a%d8%b9%d8%aa%d8%a8%d8%b1%d9%87

    A partir de sources israéliennes, un article très intéressant sur l’émigration des cerveaux israéliens. 4 départs pour une arrivée, et le Portugal est devenu récemment une destination prisée. Sont concernées les professions de la santé et la technologie.

    #israël #émigration

  • Les Français, ces migrants dont on parle peu

    Qui sont les Françaises et les Français qui partent s’installer, pour des durées variables, dans un pays du #Maghreb ?

    Alors que le langage courant les qualifie tour à tour de « #retraités », d’« #expatriés », d’« #entrepreneurs » ou de « #binationaux », les spécialistes des migrations internationales s’y intéressent peu. Cela est particulièrement vrai en France où le champ d’études s’est constitué autour du « problème de l’immigration », en se concentrant longtemps sur la figure emblématique du « travailleur immigré » comme le rappelle le sociologue Abdelmalek Sayad.

    Or les recherches que nous menons depuis plusieurs années au sein du programme Mobilités Nord-Sud montrent que la majorité des expériences individuelles de migration se situent à la croisée de logiques économiques, identitaires, hédonistes ou sentimentales.

    Des migrations peu connues

    Sous couvert d’une « mobilité » banalisée parce que privilégiée, l’estimation fiable de ces déplacements est difficile. Les sources statistiques locales ne sont pas systématiquement mises à jour et les chiffres fournis par les services consulaires français restent lacunaires. Les plus récents font état de 119 147 Français inscrits en Afrique du Nord dont 23 324 en Tunisie, 41 780 en Algérie et 54 043 Maroc. Plus des deux tiers seraient des bi-nationaux selon le dernier Rapport du Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères.

    En raison du caractère facultatif de l’inscription auprès de représentations nationales à l’étranger, ces données ne sont qu’indicatives. Au Maroc, par exemple, le nombre de ressortissants français non-inscrits oscillerait entre 25 000 et 40 000 selon les sources ou comme le rapporte la sociologue Chloé Pellegrini.

    Concernant les parcours de ces individus, une enquête effectuée en 2013 par la Direction des Français à l’étranger a montré que 6 % des 1 610 000 individus inscrits au registre mondial des Français établis hors de France résident dans l’un des trois pays du Maghreb. Si pour les autres destinations, la durée moyenne de résidence est comprise entre 1 à 5 ans, 42 % des Français présents au Maghreb y vivent depuis au moins 10 ans.

    Par ailleurs, si 48,7 % indiquent séjourner en Afrique du Nord pour des raisons familiales ou personnelles, seulement 28,7 % le font pour des raisons professionnelles. Or, nos enquêtes mettent plutôt en garde contre la séparation du personnel et du professionnel, attirant l’attention sur les points de convergence entre l’un et l’autre.
    Expatriation, tourisme, retour : des catégories réductrices

    Derrière l’opacité statistique se donne à voir l’hétérogénéité et le dynamisme de ces mobilités. Les catégories traditionnellement utilisées – expatriation, tourisme, retour – montrent ici leurs limites. Non seulement ces termes demeurent le plus souvent approximatifs, mais aussi, dans certains cas, stigmatisants.

    Ainsi en est-il, par exemple, du mot « expatrié », dit familièrement « expat ». Sur le plan juridique, il s’agit de professionnels missionnés par leur État de tutelle, ou par une entreprise, qui leur assure un système de protection spécifique et des ressources matérielles conséquentes dans l’exercice d’une fonction à l’étranger (voir la définition du Larousse, les sites service-public et diplomatie.gouv.fr).

    Dans le langage courant, l’expression « expatrié » ne désigne toutefois pas uniquement ces professionnels, mais s’étend à tout ressortissant français vivant au Maghreb, et, plus largement, à toute personne issue d’un pays du « Nord » qui réside au « Sud ».

    Un imaginaire chargé de connotations négatives

    Il faut ajouter que l’imaginaire qui accompagne ce terme est à tel point chargé de connotations négatives, convoquant d’emblée le privilège, l’entre-soi, le désintérêt, voire le mépris pour la société locale, que bon nombre d’individus tiennent à s’en distancier.

    Sophie, 38 ans, installée professionnellement en Tunisie depuis trois ans et dont le mari et les deux enfants sont restés vivre en France, fait par exemple valoir l’authenticité de son rapport à la société locale :

    « Pour moi, l’idée ce n’est pas de vivre dans une tour d’ivoire, ce n’est pas ma façon d’être. Et si j’ai fait le choix d’être proche de la vraie vie, d’aller au marché trois fois par semaine, ce n’est pas juste pour le fun, c’est pour vivre sur le terrain, vivre avec la population, comprendre aussi la situation du pays. C’est même le choix aussi d’habiter à l’Ariana plutôt que dans les quartiers aisés au nord de Tunis. J’ai eu l’occasion de rencontrer des gens qui sont là depuis 10, 15 ans, qui sont dans des administrations françaises, qui ont une vision… Moi je préfère être dans des quartiers plus populaires, loin des plages ».

    On retrouve les mêmes limites terminologiques à propos de ces Françaises et de ces Français qui passent la période hivernale dans les stations balnéaires ou les villes du Maroc et de Tunisie.

    Le terme de « touriste » est difficilement applicable à celles et ceux qui, dans le cadre de logiques résidentielles plus autonomes, passent des saisons entières dans ces mêmes stations, voire s’y installent durablement pour ne plus faire que de brefs séjours dans leurs pays d’origine.

    « La médina, c’est pour les touristes »

    C’est aussi le cas des « camping-caristes », expression qui connaît d’année en année un succès grandissant au Maroc, ou plus largement des nombreux retraités qui choisissent, plus ou moins durablement, de s’implanter dans la rive sud de la Méditerranée.

    La question de la durée et de la fréquence du déplacement, conjuguée à celle des formes d’installation, appelle ainsi à réinterroger la catégorie du tourisme et à penser ses continuums avec la migration. Au Maroc, par exemple, de nombreux Français s’installent dans le prolongement d’un séjour touristique, qui fut parfois très bref. Si les Marocains les appellent parfois « les touristes qui vivent ici », ces Français ne se reconnaissent pas comme tels et revendiquent bien être des « installés ».

    Anne, gérante de café à Essaouira explique :

    « J’ai visité un local hier qui m’a bien plu, où je pourrais faire de la cuisine, dans un autre quartier, à Azlef, où il y a beaucoup de résidents. Je ne veux plus être dans la médina, c’est pour les touristes ! Et, nous, les résidents, nous venons peu ici, même presque jamais. Je vise une clientèle de résidents, maintenant ».

    Les « binationaux » en question

    La mobilité des descendantes et descendants d’immigrés maghrébins en France – couramment appelé·e·s « binationaux » –, installé·e·s à divers titres dans le pays des origines de la famille, renvoie à une autre aporie des flux vers le Maghreb.

    Régulièrement et maladroitement qualifié de « retour », ce type de mobilité est ramené d’office à l’expérience migratoire des parents, que les enfants parachèveraient en décidant de franchir le pas inverse.

    Or, les acteurs démentent cette lecture circulaire et mettent plutôt en avant des logiques qui leur sont propres. Neila, journaliste sur la trentaine, habite à Alger depuis un an et demi au moment de notre rencontre. Fille d’un couple mixte franco-algérien, elle explique :

    « J’ai fait ce choix-là mais j’avais jamais mis les pieds en Algérie avant de débarquer en avril 2012 donc c’est pas un retour ! Beaucoup me disent “tu es retournée en Algérie” mais vu que je ne connaissais pas le pays, ce n’est pas du tout un retour, c’était une vraie découverte. Bon, j’y suis partie pour plusieurs raisons. D’abord parce que j’avais ce projet en tête depuis longtemps, je voulais connaître l’Algérie. Et je me suis dit que je ne voulais pas connaître l’Algérie juste de passage parce qu’on raconte tellement de choses, tellement d’images, tellement de vécu… Et donc je me suis dit, la meilleure façon de connaître ce pays, c’est d’exercer mon métier de journaliste. Parce que ça m’ouvrirait, voilà, je connaîtrais la société, plusieurs milieux… donc j’ai cherché du travail. Parce qu’aussi j’arrivais à la fin d’un contrat et j’avais aucune opportunité sérieuse en France. »

    Pour cette catégorie d’individus, il est clairement question d’une imbrication de facteurs où l’opportunisme professionnel rencontre éventuellement le souhait de mieux connaître ses origines et, plus rarement, de dépasser les situations de racisme et de discriminations vécues dans l’hexagone.
    Ajustements et nouveaux caps

    La situation de départ initiale fait parfois l’objet d’ajustements qui dessinent un nouveau cap. Sébastien, 37 ans, avait été envoyé à Alger en tant que salarié d’un groupe français détaché en Italie. Les possibilités du marché conjuguées à une qualité de vie somme toute agréable l’ont poussé à revoir son installation et à créer sa propre société.

    D’autres se heurtent à des phénomènes de précarisation, dont les formes, très variables, imposent parfois un retour en France ou un départ vers un autre ailleurs. C’est le cas d’Alice, 19 ans, qui vit au Maroc depuis un an au moment de l’entretien. Elle travaille dans une boutique tenue par une Française pour un salaire marocain (2 500 dh soit 250 euros par mois) et ne sait pas si elle pourra rester, n’ayant pas les moyens de créer sa propre entreprise.

    Le renouvellement des opportunités professionnelles, une rencontre amoureuse, l’appartenance à un réseau d’interconnaissances, l’amélioration de la qualité de vie, ou encore le sentiment de pouvoir accéder à une mobilité sociale ascendante constituent autant de facteurs susceptibles de reconfigurer (positivement) les parcours migratoires.

    S’intéresser à ces expériences permet d’interroger les trajectoires maghrébines des Françaises et des Français au-delà des stéréotypes et des idées reçues qui les devancent et au sein desquels l’assignation à la dimension du privilège s’impose le plus souvent.

    https://theconversation.com/les-francais-ces-migrants-dont-on-parle-peu-116384
    #émigration #France #migrations #vocabulaire #terminologie #mots #migrations_nord-sud #catégories #catégorisation #imaginaire #tourisme

    ping @reka @sinehebdo

  • A #Oran, les #jeunes_Algériens remettent à plus tard leur projet de migration

    Les côtes oranaises sont habituées, depuis les années 2000, à voir de nombreux jeunes partir clandestinement à bord d’embarcations de fortune pour tenter de rejoindre l’Europe. Depuis le début du #soulèvement_populaire en Algérie, le phénomène de la #harraga est cependant presque à l’arrêt, signe que les candidats au départ commencent à croire qu’ils ont un avenir dans leur pays natal.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/260419/oran-les-jeunes-algeriens-remettent-plus-tard-leur-projet-de-migration?ong

    #espoir #Algérie #migrations #migrants_algériens #révolution #avenir #jeunes

    • Cette semaine dans une réunion, j’ai entendu (encore) : « Depuis le début du hirak, il n’y a plus de harraga ». Comme c’est venu d’un acteur associatif a priori bien informé, je me suis dit qu’il était temps de réagir.

      1. D’abord, c’est faux :) Depuis le 22 février , le MDN a annoncé avoir intercepté 578 personnes qui tentaient de quitter le territoire par la mer. La terminologie utilisée par le MDN permet d’affirmer qu’il parle de personnes algériennes.

      (NB : Ce chiffre vient de la compilation des communiqués du MDN. L’armée harmonise ses chiffres à la fin de chaque semestre, dans un bilan publié par El Djeich. Donc possible légère évolution du chiffre)

      (NB2 : Ces chiffres, ce sont les personnes arrêtées. Ça n’inclut pas ceux qui ont réussi à passer. Donc le nombre de départ est toujours supérieur. Mais ça donne une idée de la tendance)

      2. Vous allez me dire : oui, mais ça a quand même beaucoup diminué. Exact. Du 22/02 à aujourd’hui, le MDN a arrêté moitié moins de personnes que dans le seul mois de décembre 2018.

      Mais, désolée de vous décevoir, en liant cette baisse des départs au mouvement, vous oubliez un facteur essentiel de la harga : la météo. Et il a fait sacrement moche aux mois de janvier, février, mars et avril.

      Indice :
      Octobre : 544 arrêtés.
      Novembre : 532.
      Décembre : 929.
      Janvier : 77.

      (Pas de manifestation en janvier).

      Autre facteur important, qui peut expliquer le ralentissement des départs : le travail des forces de sécurité. Plusieurs passeurs ont été arrêtés et jugés en janvier/février. Mais cela a peu d’impact sur la « volonté de départ », un facteur de migration complexe.

      Revenons à la météo. Avril, temps pourri, 0 arretés. Mai, timide retour du soleil, 269 arrêtés. Juin (jusqu’à aujourd’hui), 128 arrêtés. Les jeunes qui partent expliquent qu’il faut 2 jours de beau temps au départ et à l’arrivée pour décider de lancer le bateau.

      3. Je m’arrête là avec une idée supplémentaire. Si vous pensez que le mouvement redonne de l’espoir, en tout cas suffisamment d’espoir pour repousser un projet de départ, pensez aux milieux d’où viennent ceux qui partent et à leurs problèmes quotidiens.

      Vous visualisez ces problèmes ? Maintenant, demandez vous, de quelle amélioration ont ils bénéficié depuis le 22 février ? Voilà, vous avez compris :) Je sais que c’était pourtant romantique comme idée, désolée de faire la rabat joie :/ Fin du thread.

      https://twitter.com/LeilaBeratto/status/1142476231918727168?s=19

      #fact-checking #émigration #Leïla_Beratto