• Contrôler les assistés - Genèses et usages d’un mot d’ordre. Vincent Dubois, Raisons d’agir, 2021, 456 p.
    François Testard, Revue des politiques sociales et familiales 2022/4 (n°145), pages
    https://www.cairn.info/revue-des-politiques-sociales-et-familiales-2022-4-page-121.htm

    Les travaux de recherche du sociologue et politiste V. Dubois, professeur à l’institut d’études politiques (IEP) de l’université de Strasbourg, s’inscrivent dans une approche critique de l’action publique. Dans Contrôler les assistés. Genèses et usages d’un mot d’ordre, il étudie les transformations contemporaines de l’#État_social, en examinant l’évolution et l’impact des politiques de #surveillances et de #sanctions à l’égard des populations les plus #précaires. Dans la continuité de son ouvrage publié en 1999 sur l’analyse du traitement administratif de la misère au sein des guichets des Caisses d’allocations familiales (#Caf), il décrit la montée en puissance d’un nouvel impératif moral, politique, bureaucratique et gestionnaire, en France comme ailleurs en Europe : celui de contrôler les « #assistés », définis comme les « agents sociaux en tant qu’ils sont insérés dans des structures institutionnelles de protection sociale dont ils sont largement dépendants » (p. 13). Par protection sociale, V. Dubois désigne plus particulièrement certaines aides versées par les Caf : allocations de logement, allocations familiales, revenu de solidarité active (RSA). Engagée très tôt dans une politique de contrôle, la Caisse nationale des Allocations familiales (Cnaf) représente ainsi, selon lui, « l’opérateur central du contrôle des assistés en France » (p. 52).

    2 V. Dubois précise qu’avant cet ouvrage, le contrôle des bénéficiaires des #prestation_ sociales n’avait fait l’objet que de très peu de recherches spécifiques, réalisées aux États-Unis, au Royaume-Uni et au Canada principalement . Ces travaux s’inscrivent dans des champs disciplinaires (travail social, criminologie, politiques sociales, etc.) dans lesquels la #sociologie n’est pas toujours au centre de l’analyse et abordent de manière partielle la thématique du contrôle, se concentrant sur les #usagers, leurs expériences, leurs perceptions et leurs réactions, notamment sur leurs modes de résistance. « Les relations au sein des champs politiques et bureaucratiques qui ont présidé à l’élaboration des dispositifs » (p. 41) n’y sont que partiellement traitées. Cette revue de littérature permet à V. Dubois de souligner l’aspect inédit de sa démarche, qui place le contrôle comme objet central d’étude, convoquant différents courants sociologiques , notamment autour de trois dimensions d’analyse : « les évolutions des politiques sociales et des représentations qui leur sont associées, la fabrication des dispositifs et des politiques de contrôle et la manière dont ce contrôle s’exerce en pratique » (p. 41-42).

    Le chercheur met en corrélation l’essor sans précédent des thématiques de « l’#assistanat » et de la #fraude aux prestations sociales, dite « #fraude_sociale », dans le débat public, politique et médiatique depuis les années 1990, et l’évolution des pratiques de contrôle.

    #livre #RSA #APL #AAH

  • Assistanat pour ultra-riches : le CAC40 sous perfusion de l’État
    https://lvsl.fr/assistanat-pour-ultra-riches-le-cac40-sous-perfusion-de-letat

    157 milliards d’euros, soit 6,4 % du PIB. Les montants en jeu sont astronomiques, et augmentent d’année en année. En janvier 2007, un rapport public les évaluait à 65 milliards d’euros par an, dont 90 % financées par l’État et le reste par les collectivités locales et d’autres acteurs publics, pour un montant global équivalent à 3,5 % du PIB1. En juin 2013, un rapport publié par l’Inspection générale des finances nous apprend qu’elles atteignaient 110 milliards d’euros par an2. Puis 140 milliards d’euros en 2018, selon les propos de Gérald Darmanin, alors ministre de l’Action et des Comptes publics. Des chercheurs de l’Ires de l’université de Lille ont réévalué ce montant à 157 milliards d’euros pour l’année 20193.

    Comment se représenter des sommes aussi monstrueuses ? Prenons quelques exemples… 157 milliards d’euros d’aides publiques aux entreprises, c’est :

    – l’équivalent de 6,4 % du PIB,

    – plus de 30 % du budget de l’État,

    – presque 10 milliards d’euros de plus que l’ensemble des aides sociales (allocations familiales, pauvreté, chômage et aides au logement), pourtant régulièrement pointées du doigt et accusées de coûter « un pognon de dingue » à la collectivité4.

  • Loi « plein-emploi » : « La régression sociale attendue est sans précédent depuis des décennies », Jean-Claude Barbier

    Il faut savoir repérer un tournant politique radical quand il est pris. C’est le moment, avec l’adoption de la loi dite « plein-emploi », le 10 octobre. Elle porte une double promesse de sévérité et d’#austérité.
    D’un côté, la loi augmente la discrimination des personnes #pauvres en les stigmatisant comme paresseuses (c’est le discours de la droite classique et des macronistes, comme le député Karl Olive). C’est même en réalité son but principal, politique.

    Les moyens de l’insertion sociale et professionnelle annoncée ne sont en fait pas déployés en contrepartie de l’augmentation radicale des #sanctions et punitions d’un autre âge. De l’autre, le gouvernement déploie des coupes plus ou moins discrètes dans toutes les dépenses sociales. Cette loi est grosse d’effets dévastateurs, bien supérieurs à ceux de la brutale économie sur les allocations logement qui a augmenté la pauvreté en France dès le premier quinquennat Macron (baisse des 5 euros, puis réforme du calcul).

    La régression sociale attendue est sans précédent depuis des décennies, au moment où les effets de la réforme de l’#assurance-chômage affectent, depuis août 2023, de plus en plus d’assurés. Il y a trente-cinq ans, en 1988, un tournant majeur en matière de protection sociale fut l’innovation du RMI [revenu minimum d’insertion]. Ce projet d’insertion républicaine solidaire était porté par un Parlement unanime et s’opposait à la politique punitive britannique, dont le président français Emmanuel Macron s’était d’ailleurs distancié lors de son premier plan contre la pauvreté, en 2018, avec l’aide de son secrétaire d’Etat Olivier Noblecourt.

    Les jeunes et les titulaires des minima sociaux

    Certes, l’idéologie des #coupes_budgétaires est bien ancrée chez le président. L’essentiel de la loi, déjà votée en juillet au Sénat, se situe dans sa disposition phare, les « quinze heures d’activités hebdomadaires », empruntée à Valérie Pécresse ; il s’agit d’économiser en radiant des #allocataires.
    En l’absence de financement des besoins de formation et d’aide à l’insertion, dont les départements ne disposent pas (comme l’indique le rapport de la Cour des comptes de janvier 2022), ce qui reste en exergue, à des fins de communication politique, ce sont les sanctions, et l’inscription obligatoire à Pôle emploi, renommé France Travail.

    Deux populations hétérogènes sont ainsi transformées artificiellement en « demandeurs d’emploi » : les jeunes et les titulaires des minima sociaux, ajoutés aux demandeurs d’emploi classiques. Où les conseillers emploi et les travailleurs sociaux vont-ils trouver les millions d’« heures d’activités hebdomadaires » sans financement autre que la poignée de milliards prévus avec l’instauration de France Travail ? Nul ne le sait. Le ministre, interrogé, n’a pas répondu.

    L’équivalent du « #workfare » américain de Clinton

    Or, plus d’un tiers des personnes pauvres en France sont en emploi… C’est donc que l’essentiel, pour le président de la République, tient en deux choses : adopter une loi faisant des personnes pauvres des boucs émissaires pour consolider son entente avec les Républicains, d’une part ; d’autre part, poursuivre et accélérer la diminution des dépenses sociales, dans la suite de la réforme des #retraites. Ce deuxième but vient de loin.

    Le président l’a énoncé dans son livre Révolution (XO, 2016) avant d’être élu et réaffirmé avec force dans le rapport CAP 2022 qu’il a commandé à son arrivée à l’Elysée et dont l’une des premières applications a été la brutale diminution des allocations logement. Des promesses vides ont été faites : ainsi la lutte contre le non-recours, dont les pouvoirs publics estiment la part à plus de 30 % des ayants droit du #RSA [revenu de solidarité active].

    C’est le triomphe, enfin obtenu, de l’équivalent du workfare américain de Clinton : le travail imposé aux Américains pauvres dans les parcs et jardins pour une allocation de misère, travail forcé que même les travaillistes de Blair refusaient en défendant, avec l’appui des syndicats britanniques, un welfare-to-work plus humain.

    Remis en question par la Défenseure des droits

    Ce tournant s’accompagne de multiples mesures d’économie dans le domaine social. Ainsi d’un nouvel essai d’étrangler, dans une troisième étape, l’assurance-chômage, encore aujourd’hui l’un des fleurons du paritarisme. Ainsi de l’absence de financement de l’#insertion, prévue par la réforme de #Pôle_emploi.
    Pour autant, le gouvernement n’échappera pas à ses responsabilités légales. Il faudra bien répondre à ce que la Défenseure des droits, Claire Hédon, a nommé, le 6 juillet 2023, dans son avis sur la loi, l’« obligation d’insertion sociale et professionnelle qui pèse sur les pouvoirs publics », autrement dit l’obligation constitutionnelle de fournir aux personnes pauvres des ressources d’insertion et des « moyens convenables d’existence », au titre de l’alinéa 11 du préambule de la Constitution.

    Cette obligation ne pourra pas être remplie si la logique de la diminution des dépenses sociales est poursuivie. Le jeu des sanctions et radiations et les quinze heures de prétendues « activités » (non définies par la loi) ne feront pas longtemps illusion face à la question du « reste à vivre » des personnes.

    Boucs émissaires

    D’autant que les nuages continuent de s’amonceler sur les ménages pauvres et modestes, comme le souligne une note du 29 septembre 2023 de la Fondation Jean Jaurès : crise du logement et poursuite des mesures d’économie ; menace d’augmentation du chômage et éloignement de l’objectif de 5 % fixé par le gouvernement – alors que le taux actuel est déjà supérieur à 7 % ; divers rabotages sur le marché du travail (par exemple sur les emplois aidés) ; économies sur les dépenses de santé, etc.

    L’immense majorité des allocataires des minima sociaux, malgré leurs problèmes de santé et de freins à l’emploi (reconnus même par le ministre), voudraient travailler, et ils souffrent de l’inflation. Il n’est pas digne d’en faire des boucs émissaires.

    Lire aussi « Fractures françaises » : malgré les contraintes budgétaires, la critique de l’« assistanat » diminue

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/10/12/loi-plein-emploi-la-regression-sociale-attendue-est-sans-precedent-depuis-de

    • « Fractures françaises » : malgré les contraintes budgétaires, la critique de l’« assistanat » diminue
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/10/09/fractures-francaises-malgre-les-contraintes-budgetaires-la-critique-de-l-ass.

      (...) ils sont moins nombreux qu’auparavant à estimer que « les chômeurs pourraient retrouver du travail s’ils le voulaient vraiment ». Ils sont 65 % à le penser en 2023 (soit 2 points de moins qu’en 2022), une première baisse depuis six ans. De même, le sentiment plus large qu’« il y a trop d’#assistanat en France » atteint un niveau historiquement bas : 56 % des Français partagent cette opinion, contre 63 % en 2022. A l’inverse, près de 44 % des sondés estiment désormais qu’il n’y a pas assez de #solidarité envers les gens qui en ont besoin, soit le plus haut niveau depuis près de dix ans. Données précieuses à l’heure où les débats parlementaires s’intensifient sur le projet de loi « plein-emploi » et sa mesure visant à « accompagner » les allocataires du revenu de solidarité active à travers de quinze à vingt heures hebdomadaires d’activité.

      un signe d’épuisement du sarko-macronisme, toujours bon à prendre

  • Pourquoi les #riches s’enrichissent et les #pauvres s’appauvrissent ? | TV5MONDE - Informations
    https://information.tv5monde.com/economie/pourquoi-les-riches-senrichissent-et-les-pauvres-sappauvrissen

    Janvier 2022

    L’économiste Dominique Plihon, membre du Centre d’Économie de Paris-Nord et professeur émérite à Paris XIII souligne la méthodologie « rigoureuse » utilisée par Oxfam pour ses recherches. « Ce qui est aussi intéressant de noter, c’est que beaucoup de leurs analyses et de leurs chiffrages rejoignent des analyses faites par exemple par des scientifiques ou des académiques », explique-t-il. Pour lui, l’enrichissement des riches est paradoxal, dans la mesure où ils ont profité des #politiques_publiques mises en place lors de la pandémie. Or, ces politiques sont financées par de l’#argent_public.

    • La gauche met en scène ses divisions à la fête de « L’Huma »
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/09/17/la-gauche-met-en-scene-ses-divisions-a-la-fete-de-l-huma_6189812_823448.html

      Les « insoumis » François Ruffin et Clémentine Autain ont exprimé leurs divergences avec Jean-Luc Mélenchon. Lequel a fait huer son rival communiste, Fabien Roussel, lors d’un rassemblement où la reconquête des classes populaires était au centre des débats.

      [...]

      « Populaire », tout le monde a tenté de l’être, lors de cette fête organisée sur l’ancienne base aérienne de Brétigny (Essonne). Fabien Roussel en premier lieu, avec son discours de samedi tourné vers une certaine idée de la classe ouvrière, incomprise du gouvernement, selon lui, alors qu’« elle est belle, elle est grande et elle parle français ».

      (...) « Fabien, dans le monde où l’on vit, tout ce qui est populaire est proscrit », s’est désolée Mme Delga devant l’ex-candidat à la présidentielle, regrettant la fin des fêtes foraines, louant la chasse comme l’un des « derniers espaces de sociabilité en milieu rural ». « On parle la même langue, Carole a mille fois raison », a abondé M. Roussel.

      Sur place, ce n’est pas toujours ceux qui se revendiquaient des classes populaires qui étaient les plus acclamés. Au chef de file du PCF, la jeunesse a préféré d’autres stars ; Jean-Luc Mélenchon d’abord. Vendredi soir, le chef de file de La France insoumise (LFI) ne s’est pas privé de faire huer son rival communiste. « Il y a une personne qui s’en fiche de l’union, elle s’appelle Fabien Roussel », a-t-il lancé, goguenard, devant un public acquis à sa cause. Avant la marche du 23 septembre contre les violences policières, l’ancien candidat insoumis à la présidentielle a justifié d’avoir besoin de « faire du Poutou » pour se faire entendre, en disant « la police tue ». Comprendre : marquer les esprits avec des formules chocs. La salle entière semblait en convenir et scandait : « Tout le monde déteste la police. »

      #chauvin

  • RSA : Elle vit grâce aux aides de la CAF… sur une île paradisiaque !
    https://www.lesecransdeparis.fr/rsa-elle-vit-grace-aux-aides-de-la-caf-sur-une-ile-paradisiaque

    Cette femme a pu profiter d’un train de vie confortable grâce aux fonds versés par la CAF. Cependant, ses fausses déclarations ont finalement été découvertes, mettant fin à sa fraude. Par conséquent, elle devra rembourser les sommes indûment perçues. De plus, les risques de poursuites pénales sont attendus.

    Les failles du système de contrôle des allocations

    Les #fraudes aux aides sociales représentent une perte de plus de deux milliards d’euros pour l’État français chaque année. Malgré les efforts des autorités pour identifier et sanctionner les fraudeurs, certains parviennent toujours à échapper au système de contrôle. Ce qui nous incite à poser des questions sur l’efficacité réelle du système actuellement déployé par la #CAF. Il faut aussi noter que ce cas n’est pas isolé.

    Par ailleurs, les fraudes aux aides sociales peuvent avoir des conséquences néfastes pour les personnes réellement dans le besoin. Cela peut engendrer un climat de suspicion envers les bénéficiaires d’aides. Ce qui n’est décidément pas en faveur des personnes qui dépendent réellement de ces aides sociales. Les #contrôles peuvent par conséquent [wtf !] s’alourdir rendant les procédures longues et difficiles. L’efficacité des politiques publiques en matière d’aides sociales se trouvent aussi critiquées. Ce qui n’avantage toujours pas les bénéficiaires du #RSA ou des aides de la CAF.

    #cépourvotrebien #assistanat #media #pauvres #guerre_aux_pauvres

  • « Le RSA est un échec collectif » : Olivier Dussopt - Agnès Verdier-Molinié, le débat inattendu - L’Express
    https://www.lexpress.fr/economie/politique-economique/le-rsa-est-un-echec-collectif-olivier-dussopt-agnes-verdier-molinie-le-deba

    L’efficacité des politiques publiques de l’emploi interroge. Le ministre du Travail en débat avec l’essayiste libérale Agnès Verdier-Molinié.
    Tout juste sorti de la séquence explosive sur les retraites, le ministre du Travail, du Plein-emploi et de l’Insertion Olivier Dussopt s’attaque à un autre dossier inflammable : la refonte du service public de l’emploi, où cohabite une kyrielle d’opérateurs plus ou moins coordonnés : Pôle emploi, missions locales, Cap emploi, Apec… Un millefeuille administratif qui consterne Agnès Verdier-Molinié, directrice de la Fondation Ifrap et auteure d’une récente charge contre l’obésité de la dépense publique (Où va notre argent ?, Editions de l’Observatoire).

    Dans son dernier livre, Agnès Verdier-Molinié estime que le Revenu de solidarité active (RSA) s’apparente aujourd’hui à « un revenu social sans contrepartie, qui ne mène nulle part ». Qu’en pensez-vous ?

    Olivier Dussopt : Je partage assez ce sentiment. Le premier constat, c’est que les allocataires du RSA ne sont pas tous accompagnés sur le plan professionnel. Seuls 45 % sont orientés vers Pôle emploi et font donc l’objet d’un suivi professionnel. Il y a là une forme d’absence de contrepartie. Globalement, le RSA est un échec collectif. Début 2022, la Cour des comptes a étudié ce que devenaient les allocataires sept ans après leur première inscription : 42 % d’entre eux sont encore au RSA, de manière continue ou ponctuelle, avec des allers-retours vers de l’emploi saisonnier ou de la très grande précarité.

    Agnès Verdier-Molinié : Ces 15 heures de formation, d’accompagnement ou autres vont-elles être efficaces ? Ce qui est sûr, c’est qu’on a fermé les yeux pendant des années sur l’idée qu’on pouvait percevoir le RSA sans devoirs réciproques. Partout, dans le nord de l’Europe, en Allemagne, en Finlande, il y a des fermetures de droits ou des baisses d’allocations, s’il y a des refus de retour à l’emploi. Au Danemark, quand vous êtes chômeur et que vous bénéficiez d’aides, vous devez répondre en 24 heures à une proposition, postuler à deux offres d’emploi minimum par semaine, accepter la première opportunité qui se présente à vous. Il y a vraiment des obligations, ce qui n’a jamais été le cas en France. Plus inquiétant encore, chaque année, entre 23 et 26 % des entrants à l’Allocation aux adultes handicapés (AAH) viennent directement du RSA. Il y a là un sujet de fraude sociale qu’on ne peut pas occulter. Surtout depuis que la déficience psychique permet de toucher l’AAH. Le nombre d’allocataires à l’AAH a doublé depuis les années 1990 pour arriver à presque 1,3 million de personnes. Et le taux d’allocataires par département varie entre 0,4 % et 4,6 %, comme le souligne la Cour des comptes ! De quoi se poser des questions.
    Dans certains départements, il est même conseillé à ceux qui viennent demander le RSA d’aller plutôt monter un dossier pour toucher l’allocation handicapé, parce que c’est l’Etat qui paye, et pas le département. Et parce que l’#AAH est à 971 euros, soit plus que le RSA.
    Et pour le #RSA, combien d’allocataires estiment n’avoir pas assez pour en vivre et travaillent à côté, sans le déclarer ?

    O. D. : Avec 15 à 20 heures d’activité par semaine, ça va devenir plus compliqué.

    A. V.-M. : L’idée s’est installée que le RSA était un droit et qu’à côté on pouvait bosser sans risquer aucun contrôle, ni sanction. C’est quelque chose qui devient insupportable pour beaucoup de nos concitoyens. Cela fait des années que nous demandons, à l’Ifrap, des statistiques anonymisées sur l’ensemble du territoire et que la Cnaf nous les refuse. Impossible aussi de récupérer ces chiffres au niveau des départements. Même les présidents de conseils départementaux n’y ont pas accès ! Finalement, les contribuables locaux financent avec leur taxe foncière des minima sociaux sur lesquels leurs propres élus n’ont pas d’informations.

    A. V.-M. : Vous savez bien que très peu de gens trouvent un emploi grâce à Pôle emploi. C’était 14 % dans les années 2010, c’est tombé à 10 %.
    Depuis 2009, les effectifs de Pôle emploi ont augmenté de 19 %, pour une efficacité qui baisse. On l’a dit, Pôle emploi accompagne peu les personnes au RSA. A chaque fois qu’il y a une crise, on embauche à Pôle emploi. Et quand le chômage baisse, on ne réduit jamais les effectifs. Il serait temps d’y penser. Et d’arrêter ce simulacre de l’accompagnement de tous…

    O. D. : Je vous trouve assez injuste avec Pôle emploi. Ce qu’il faut repenser, c’est l’accompagnement : lorsque vous êtes inscrit, vous êtes catégorisé en fonction de votre capacité à rechercher un emploi. En accompagnement « Suivi », si vous êtes autonome. « Guidé », si vous avez besoin d’un appui régulier. Ou « Renforcé », si vous êtes très éloigné de l’emploi. Sauf qu’une fois que vous rentrez dans l’une de ces catégories, vous n’en sortez plus. Si on considère que vous êtes extrêmement autonome et employable, et que malheureusement, pour plein de raisons, au bout de dix-huit mois, vous n’avez pas trouvé de boulot, vous serez toujours dans la catégorie des autonomes. Alors qu’au bout de dix-huit mois sans rien au bout, vous avez à coup sûr besoin d’un accompagnement.
    Pour ce qui est des effectifs de Pôle emploi, que vous trouvez problématiques, sachez qu’il y a en France 1 conseiller pour 98 demandeurs d’emploi. En Allemagne, c’est 1 pour 38. Après, c’est vrai, pour être indemnisé en Allemagne, il faut avoir travaillé douze mois, et non six comme chez nous, sur les vingt-quatre derniers mois. Et lorsque vous avez travaillé vingt-quatre mois, vous avez droit à douze mois d’indemnités en Allemagne. Nous, c’est dix-huit mois d’indemnités.

    A. V.-M. : J’ajoute que lorsque vous refusez une offre d’emploi, toujours en Allemagne, on réduit votre allocation de 30 %. Ensuite, c’est 60 %. Il y a des sanctions qui n’ont rien à voir avec celles qu’on applique en France. Nous, on a l’ORE, l’offre raisonnable d’emploi…

    O. D. : Oui, et ça ne marche pas. On a entre 200 et 300 demandeurs d’emploi qui sont radiés de #Pôle_emploi chaque année pour avoir refusé deux offres raisonnables d’emploi.

    A. V.-M. : Voilà, c’est rien du tout ! Ça marche au Danemark, au Royaume-Uni, en Finlande. Mais pas chez nous.

    O. D. : La définition de l’#ORE est à revoir.

    Olivier Dussopt est ministre du Travail, du Plein-emploi et de l’insertion. Ancien député socialiste, il est entré au gouvernement en novembre 2017 comme secrétaire d’Etat puis ministre délégué aux Comptes publics.
    Agnès Verdier-Molinié est directrice de l’ifrap, un think tank libéral qui dissèque les politiques publiques et leur rapport coût-bénéfice. Essayiste prolixe, elle a publié en avril Où va notre argent ? (Editions de l’Observatoire).

  • Bruno Le Maire avait le choix entre poser dans le journal à poil avec une plume dans le cul pour faire diversion, ou bien dire que c’est la fautes aux narabes (pour faire diversion). La suite va te surprendre (non).

    La sortie de Bruno Le Maire sur les aides sociales « envoyées au Maghreb » passe mal
    https://www.huffingtonpost.fr/politique/article/la-sortie-de-bruno-le-maire-sur-les-aides-sociales-envoyees-au-maghre

    « Nos compatriotes en ont ras le bol de la fraude », a attaqué le locataire de Bercy. Les prestations sociales, « c’est le contribuable, c’est l’entrepreneur, c’est le salarié » qui les paient, a-t-il énuméré, ajoutant : « Ils n’ont aucune envie de voir que des personnes peuvent en bénéficier, les renvoyer au Maghreb ou ailleurs, alors qu’ils n’y ont pas droit. »

    • Sinon au rayon « diversion fascistoïde », je mettrais la « fuite » de la déclaration de Darmanin, sur le thème « Les Français nous en veulent pour les retraites, mais ils l’ont avalé ».

      Dans la même logique que son « quand j’entends parler des violences policières, je m’étouffe », je ne vois pas comment le double-sens lui aurait échappé. Au contraire, j’y vois un clin-d’œil (dog whistle) vers son fan club masculiniste et raciste.

      C’est exactement comme les dérapages « rigolos » du vieux Pen à l’époque : c’est pas des dérapages, c’est parfaitement assumé et ses partisans en redemandent.

    • plus qu’une diversion, c’est une ligne politique. la dernière prise de parole présidentielle annonce créer 200 gendarmeries (le retour du service public !) dans une phrase qui en même temps mentionne la lutte contre la fraude sociale

      edit et oui à propos de la dernière sortie ’ils l’ont avalé tout va bien se passer’ et d’façon, les zassisté c’est un peu des tarlouzes, l’homme, le vrai, il travaille ! et la femme elle s’occupe de ses enfants, elle balance pas la thune au bled !

      #contrôle #xénophobie #racisme #assistanat #droits_sociaux

    • Et puis Véran, qui récite son petit laïus fascistoïde avec la tête de quelqu’un à qui Darmanin a demandé d’avaler.
      https://twitter.com/cavousf5/status/1648379456464252929
      https://video.twimg.com/amplify_video/1648378316867670016/vid/1280x720/yrjxe5nwWQGMrdyA.mp4

      « Je pense qu’il faut une convention citoyenne sur la question de l’immigration et de l’intégration. Est-ce qu’une loi, même adoptée par le Parlement, peut suffire à répondre aux préoccupations des Français sur ce sujet ? »

  • Nicolas Framont (de @frustration1) promeut le rapport de force, mais, dans le fond, ne perçoit d’issue que dans les isoloirs ; il pense très sérieusement que « la gauche défend les intérêts des classes laborieuses » et, qu’en guise de solution, « il faut travailler à la représentativité des organisations politiques [de la gauche] »...

    Tout cela, naturellement, est à jeter avec rage ou moquerie, comme toutes les chimères réformistes, mais #Nicolas_Framont est probablement intéressant à lire sur la question du parasitisme de la #classe_possédante, qui est l’objet de son dernier bouquin (Parasites) :

    Il décrypte le détournement des politiques publiques au profit des grandes fortunes à l’œuvre ces dernières décennies et pointe les mécanismes de dépossession, d’extorsion des classes bourgeoises avant de s’arrêter sur les moyens de les combattre. Son argumentaire se déploie d’emblée sur la base d’une inversion, celle du stigmate de l’#assistanat. Ne sont pas assistés ceux que l’on croit. Les parasites ce ne sont pas les pauvres mais les bourgeois…

    (Blast)

    #lutte_de_classe #réformisme #grande_bourgeoisie #parasitisme #capitalisme #curious_about

    • « La classe bourgeoise se nourrit du travail des autres pour parvenir à ses fins, l’accumulation de richesses.
      On peut vivre, diriger notre économie sans elle. On est suffisamment forts, intelligents, autonomes, solidaires pour diriger la société sans maître »

      https://video.twimg.com/ext_tw_video/1635004286596726784/pu/vid/540x540/1KT1r_drWrXetr0l.mp4?tag=12

      https://twitter.com/caissesdegreve/status/1635004629359681537?cxt=HHwWgoDTsYeD2rAtAAAA

    • Oui, c’est juste. Et Framont aspire à la renaissance du mouvement ouvrier… Mais, renonçant à porter le moindre espoir dans une révolution prolétarienne victorieuse — qui serait pourtant la seule voie vers l’expropriation de la grande bourgeoisie et la liquidation de son pouvoir sur la société et l’économie — il aspire en des partis de gauche représentatifs élus au gouvernements de la bourgeoisie…

      On trouve un schéma équivalent chez François Ruffin : des dénonciations radicales — en apparence — qui finissent toujours dans les mensonges insupportables de l’électoralisme (et du nationalisme, en ce qui le concerne).

      Le problème, c’est de se donner les moyens de sa révolte. Si celle-ci est saine et franche, et pose l’enjeu du renversement des rapports sociaux, on n’attend strictement rien de politiciens, même sincères, à la gestion de l’appareil d’État de la bourgeoisie (ni de directions syndicales réformistes, du reste). Et on se pose la question de la manière dont la classe ouvrière pourra enfin se doter du parti révolutionnaire qui lui permettra de s’emparer du pouvoir.

      Et cela se fera par les armes et la violence, pas avec un bulletin de vote.

    • Je te trouve quand même bien dur mon cher Recriweb ! Le comparer à Ruffin et dire qu’il ne voit que de salut par les isoloirs, c’est quand même un peu mal honnête. Évidemment, on peut souligner ce qui ne joue pas en la faveur de Nicolas Framont, et ce qui d’ailleurs explique son ton, ses points de vues : à savoir qu’il est ancien attaché parlementaire LFI, sociologue, journaliste, qu’il fait du conseil pour des syndicats... Assurément, on est face à quelqu’un qui à bien des égards est très intégré au système bourgeois. Mais reconnaître et avoir conscience d’où il parle et de ce qu’il est ne devrait pas faire mettre si rapidement à la poubelle ce qu’il raconte et donc ce qu’il semble penser. Je veux dire par là que les arguments du style qu’il serait « équivalent [à] Ruffin » ou qu’il aspire à des bons gouvernements élus – je me répète – c’est un poil fort de café… Parce que ce n’est pas le fond de son discours il me semble et je me demande sur quoi tu te bases pour affirmer ça.

      Car vers la fin de son livre, « il aspire [bel et bien] à la renaissance du mouvement ouvrier » (je te cite) et il donne à plusieurs reprises des débuts de réflexion intéressante : lutte des classes ; l’importance pour les travailleurs de s’organiser à la base ; importance pour les travailleurs d’avoir un parti à eux, géré par eux et non pas par des diplômés petits-bourgeois de Science po ; il parle très clairement de « dépassement du capitalisme » par un processus révolutionnaire… Alors, oui : il n’utilise jamais le mot communisme ; oui, il a cette manie classique à gôche de sortir la brosse à reluire pour Ambroise Croizat ; oui, il fait les raccourcis classiques « les syndicats = les travailleurs » ; oui, il se dit proche de Révolution permanente ; oui, il va citer Bernard Friot ; oui, il est assez confus avec son « classe laborieuse » ; oui, il met en avant des méthodes de lutte assez burlesques parfois ; et tout ça dit beaucoup de lui et fait assurément grincer les dents. On peut donc voir toutes ses limites mais ça n’est pas pour autant qu’on ne peut pas être honnête et précis dans les critiques qu’on lui adresse.

      Framont a le mérite, au moins, de pouvoir permettre à ceux qui s’intéressent à lui de commencer à penser un peu, ce qui peut (je pense) ouvrir sur des discussions très intéressantes par la suite !

      (J’aurais aimé faire une réponse mieux construite et plus étayée, mais ça prendrait trop de temps !...)

    • Ta réponse est très bien et, à vrai dire, je la partage. Et ce d’autant mieux que tu énonces mes propres réserves.

      Mais remarque toutefois que mon post d’origine visait à promouvoir son bouquin. Que c’est donc une personne que j’écoute et respecte en dépit des réserves que l’on peut avoir envers tous ceux et celles qui croisent, sans voir la contradiction, renaissance du mouvement ouvrier et « représentativité » (?) de masse des partis bourgeois de gauche.

      Ruffin est un bonimenteur de foire qui répand du poison, Framont un activiste que je lis avec intérêt : d’accord pour modérer l’amalgame. Reste que l’un comme l’autre ne sont pas révolutionnaires. J’ai même en tête à ce propos un portrait de Libé, je crois, où il moquait un brin des espoirs de révolution prolétarienne.

      Mais peut-être change-t-il au contact du courant gramscien RP…

    • Merci pour ta réponse !

      C’est intéressant que tu parles de « gramscien » parce que Framont a un petit côté « bataille contre l’hégémonie culturelle » quand même. Ça se ressentait notamment avec son livre La guerre des mots.

      À voir comment il continuera d’évoluer : avec le temps on pourra vraiment apprécier la sincérité (ou non) de ses prises de positions et de son engagement ! :)

  • La gangrène de l’#assistanat

    Face à cette perspective [#crise_de_l’énergie], le plan d’aide de 10 milliards d’euros annoncé par l’#Etat ne suffira pas, selon le collectif.

    Le collectif [pro-patronal] souhaite donc que l’Etat intervienne afin de contenir le #prix_de_l'électricité à son niveau de la fin 2021, ce qui assurerait le retour à une énergie compétitive.

    L’exécutif devra revoir à la hausse le montant des #aides allouées. On ne pourra pas éviter de mettre quelques dizaines de milliards d’euros supplémentaires.

    Le collectif pro-industrie estime souhaitable d’instaurer, comme pendant la #crise_sanitaire, un rendez-vous régulier qui leur délivre une information fiable et transparente. Au-delà, il appelle l’Etat à mobiliser d’urgence la #commande_publique afin de soutenir l’activité de l’#industrie hexagonale.

    [Les Échos] #patronat #subvention

  • Apprentissage : les aides de l’État ciblent-elles les bonnes formations ?
    https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/carriere/formation/alternance/apprentissage-les-aides-de-l-etat-ciblent-elles-les-bonnes-formations_5
    https://www.francetvinfo.fr/pictures/5XZiWWlzbJjhzpKJyagDf8XXVzM/1500x843/2022/10/11/phpvdV2gd.png

    En cinq ans, le nombre d’apprentis a bondi. Toutes les filières sont séduites par la formation en alternance, car les aides de l’État sont conséquentes. La Cour des comptes dénonce des abus et demande à l’État d’être plus sélectif.

    Longtemps cantonnée à la formation des bouchers, des garagistes ou des coiffeurs, l’alternance explose dans l’enseignement supérieur. Mais derrière ce succès, la facture devient incontrôlable pour l’État, selon la Cour des comptes. L’argent public finance-t-il les bonnes formations ? Le nombre d’alternants est passé de 438 000 à 798 000 en cinq ans. Mais cette hausse profite surtout aux plus diplômés, et non aux populations les plus éloignées de l’emploi. Les niveaux Bac et CAP n’accueillent que 30 % d’élèves en plus, contre +100 % pour les Bac +2 à Bac +5. 

    La facture s’envole

    "La forte augmentation de l’apprentissage est, à 90 %, due à des Bac +3, Bac +4, Bac +5, donc des jeunes qui étaient quand même à l’université, qui étaient dans la formation et qui n’étaient pas assurés de trouver un emploi à l’issue de leur formation, mais il y avait une probabilité très forte d’en trouver", explique Éric Heyer, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). La facture s’envole, car l’État doit payer 8 070 euros par alternant aux écoles en moyenne, et 8 000 euros aux entreprises qui accueillent un alternant. Le déficit devrait atteindre 5,9 milliards d’euros en 2022. Une dépense inacceptable pour la Cour des comptes, qui pointe dans un rapport "un financement inadapté", un "déficit comptable préoccupant" et une "impasse financière".

    #travail #enseignement_supérieur #assistanat #apprentissage

  • Un capitalisme sous perfusion. Mesure, théories et effets macroéconomiques des aides publiques aux entreprises françaises - IRES
    http://www.ires.fr/index.php/etudes-recherches-ouvrages/etudes-des-organisations-syndicales/item/6572-un-capitalisme-sous-perfusion-mesure-theories-et-effets-macroeconomiques-d

    Avec la pandémie apparue à l’hiver 2019-2020, les aides publiques aux entreprises ont atteint des niveaux historiques. Du fait de la mise sous cloche de la société pour combattre la propagation du virus et épargner autant que faire se peut les capacités hospitalières, l’économie s’est retrouvée à l’arrêt, et les pouvoirs publics ont cherché à compenser les conséquences négatives pour les entreprises et les ménages de la mise en coma artificiel de l’activité. Les pouvoirs publics ont fait preuve d’un réel volontarisme pour voler au secours des entreprises et préserver leurs capacités à rebondir une fois la situation épidémique maîtrisée. Parmi le lot de mesures de soutien aux entreprises, cinq semblent se dégager : l’instauration de prêts garantis par l’État pour sécuriser au mieux la gestion de trésorerie des entreprises touchées ; la mise en place d’un fonds de solidarité pour indemniser les secteurs économiques les plus atteints ; l’abondement au financement du chômage partiel, l’État contribuant ainsi au maintien dans l’emploi de salariés dont l’activité était empêchée ; la prise en charge des coûts fixes des entreprises pour leur permettre de tenir le choc dans une période où les chiffres d’affaires contraints par les fermetures administratives ne suffisaient plus à les amortir ; le report ou l’annulation de certains prélèvements obligatoires.

    Les montants en jeu sont colossaux. D’après le ministère de l’Économie, des finances et de la relance, les prêts garantis par l’État représentaient un montant de plus de 140 milliards d’euros à fin novembre 20212. Le fonds de solidarité a entraîné le versement de plus de 38 mds € avec une aide qui a surtout été à destination du secteur de l’hôtellerie-restauration (13 mds €). Le dispositif d’activité partielle représentait 27,1 mds € en 2020 et encore 10 mds € en 2021, ce qui aurait permis, selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), de préserver 1,4 million d’emplois en équivalent temps plein en 2020 et encore 500 000 emplois en 2021. Toujours selon l’OFCE, les reports de cotisations sociales et de dette fiscale se montaient à respectivement 24 et 3 mds €. L’accumulation de ces chiffres le montre : la puissance publique a très largement endossé le coût de la crise économique liée à la pandémie, le creusement du déficit public (à - 9,2 % du PIB selon l’Insee) reflétant fidèlement l’ampleur de la récession (à - 7,9 % en 2020 toujours selon l’Insee).

    Si la période du Covid-19 a souligné avec une acuité spectaculaire le rôle des aides publiques pour maintenir sur pied les entreprises, il ne s’agit que d’une partie seulement d’un processus plus ample et plus ancien de développement de dispositifs de soutien à destination des entreprises par l’État depuis maintenant plusieurs décennies. Les mesures d’urgence pour pallier les effets de la pandémie sur l’activité ne sont en fait que le dernier chapitre en date d’une tendance plus structurelle de l’État à apporter un soutien financier aux entreprises.

    Depuis 1993 et la mise en place d’exonérations de cotisations sociales employeurs pour les salariés proches du Smic, plusieurs dispositifs d’aide aux entreprises ont en effet été instaurés, avec parmi les plus récents le Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en 2013, le Pacte de responsabilité en 2015 et la transformation du CICE en baisse de cotisations sociales employeurs en 2019.
    Compte tenu de l’ampleur du CICE, l’évaluation de son efficacité s’est vite imposée comme un impératif. La question de l’évaluation de la sensibilité – « l’élasticité » – de l’emploi au coût du travail s’est donc reposée avec acuité au coeur des débats, au sein des études empiriques portant sur les effets microéconomiques et macroéconomiques des politiques d’aide aux entreprises (en particulier les travaux du Laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques, LIEPP, de l’Institut des politiques publiques, IPP, de l’OFCE et les rapports de France Stratégie). Le titre d’une note du Conseil d’analyse économique (CAE) semble même indiquer que les gouvernements successifs auraient pu aller trop loin dans les politiques de baisse de cotisations, notamment en cessant de les cibler sur les seuls bas salaires.

    La présente étude propose de se pencher sur cette question des aides publiques aux entreprises. Plus précisément, nous proposons d’examiner la question en plusieurs étapes. Le questionnement qui sera poursuivi est constitué de quatre grandes questions transversales qui structurent l’ensemble de nos investigations : combien ? Pourquoi ? Pour quels effets ? Enfin, pour terminer, à quelles conditions ?

    #assistanat #entreprises #riches

  • La gauche toujours à la recherche de son peuple - Rémi Lefebvre, AOC media

    Entre Fabien Roussel et Sandrine Rousseau, à gauche, les polémiques s’enchaînent : deux semaines sur les mérites et démérites du barbecue, puis dix jours sur l’abandon de la valeur travail. Ces petites phrases affirment en creux la déliquescence de la base électorale de la gauche. L’identité de classe, jadis primordiale, a été éclipsée par de nouvelles formes d’identification. Entre gilets jaunes et racisés, ubérisation et chômage, la gauche peine à trouver un programme commun. Pourtant, cette division de la classe ouvrière a déjà existé dans l’histoire, se résolvant sur une revendication commune : l’égalité.

    La rentrée de la Nupes a été dominée et parasitée par des controverses et des petites phrases qui radicalisent les positions des uns et des autres. Elles simplifient à outrance des questions qui méritent pourtant d’être approfondies et clarifiées. Gauche « barbecue » ou « des allocations », « valeur travail », tyrannie de la gauche « morale » : la gauche rassemblée aux élections législatives, toujours fragile, donne en pâture des oppositions caricaturales dont les médias se repaissent. La guerre des clashs assure le buzz à ceux qui s’y livrent.

    Jumeaux-rivaux de l’ère des réseaux sociaux, Fabien Roussel et Sandrine Rousseau sont les enfants paradoxaux du transgressif Manuel Valls. Outsiders comme lui en son temps, ils cultivent la stratégie de la scandalisation et de la triangulation. Rétrécie, la gauche mérite mieux que ces saillies. Le débat incontournable des contours du « peuple » à mobiliser et à défendre appelle mieux que ces approximations et raccourcis langagiers. La gauche a évité la catastrophe en se rassemblant aux élections législatives mais le dernier cycle électoral a confirmé des faiblesses sociologiques anciennes.

    La gauche fédère les diplômés urbains, une partie des jeunes, les français de culture musulmane mais peine, en dépit même d’un discours plus radical sur le plan économique, à mobiliser une large partie des catégories populaires qui se réfugient dans l’abstention et dans le vote d’extrême droite[1]. Le clivage trop binaire rural/urbain ne doit pas être durci à l’excès mais il faut aussi garder à l’esprit que les grandes métropoles (qui correspondent à ce qui reste de l’implantation militante et partisane de la gauche) sont toutes partagées entre la Nupes et Ensemble aux élections législatives. La tentation d’abandonner une partie des milieux populaires dans une sorte de réflexe Terra Nova inversé est réelle quand l’objectif de reconquérir « les fâchés pas fachos » semble intenable.

    La gauche doit prendre le temps d’un débat contradictoire et raisonné sur ses limites électorales et sociologiques qui ne doit pas être instrumentalisé par des logiques d’appareil ou des ambitions individuelles. François Ruffin l’esquisse dans son dernier ouvrage[2] qui apporte un éclairage à enrichir. Il montre à partir de son expérience de terrain (socialement situé) que la gauche est perçue par une partie des citoyens qui votent pour l’extrême droite comme « le camp des assistés ».

    Ce vécu subjectif doit être pris en compte mais ne doit pas conduire à abandonner d’autres luttes et d’autres groupes sociaux. Pour prétendre être majoritaire et unifier les classes populaires dans leur diversité et les classes moyennes, les forces de gauche, au-delà de leurs clientèles spécifiques, doivent sortir de fausses oppositions (le social vs le sociétal, les milieux populaires traditionnels vs les minorités, la France des bourgs vs la France urbaine…).

    Il s’agit de dégager les contours d’une coalition sociale majoritaire qui soit le produit d’une analyse commune de la société. Elle fait largement défaut : un des principaux chantiers intellectuels de la Nupes est donc sociologique. Traditionnellement le socle de la gauche était fondé sur une alliance des catégories populaires et des classes moyennes intellectuelles. Le « peuple de gauche » pour parler comme dans les années 1970 scellait l’alliance des ouvriers, des employés, des enseignants et classes moyennes intellectuelles. Cette alliance est plus difficile à construire désormais et doit intégrer de nouveaux clivages socio-politiques.

    Le cœur de l’électorat de gauche, quelles que soient ses sensibilités, s’est déplacé vers les classes urbaines diplômées et/ou déclassées. La gauche doit par ailleurs intégrer les intérêts de catégories sociales dont les formes de domination font l’objet d’une attention nouvelle (les femmes, les groupes « racisés », les minorités sexuelles discriminées…). Mais cette alliance entre minorités et classes populaires est souvent présentée (à tort) comme impossible.

    Face à une droite qui cherche à diviser le salariat, à opposer les catégories les unes contre les autres, la gauche doit promouvoir de nouveaux intérêts collectifs et construire de nouveaux compromis redistributifs entre catégories sociales. L’alchimie est difficile : il s’agit de remobiliser les milieux populaires dans leur hétérogénéité sans s’aliéner les classes moyennes intellectuelles tout en prenant en compte les nouvelles attentes de reconnaissance et d’égalité des « minorités ».

    L’hétérogénéité des milieux populaires

    La reconquête des milieux populaires passe par une analyse fine et non simpliste de leurs transformations, de leur fragmentation et de leurs contradictions. Les catégories populaires constituent un groupe de plus en plus hétérogène. Quoi de commun entre la France périurbaine, rurale et déclassée des gilets jaunes et les habitants des « quartiers » relégués, les « petits-moyens » cultivant la valeur travail et ceux qu’ils dénoncent comme des « assistés », les « petits Blancs » « identarisés » et les jeunes « racisés » ?

    La situation des catégories populaires est paradoxale, comme l’a bien analysé Olivier Schwartz[3]  : on observe bien une « extension du domaine du désavantage social » (individus exposés à la précarité et au chômage de plus en plus nombreux, accroissement des inégalités…) mais dans le même temps la conscience subjective de classe a décliné. Les conditions de vie des employés et des ouvriers se rapprochent de plus en plus sans qu’une conscience commune, politiquement constituée, émerge. L’impression trompeuse d’une « disparition » ou d’une évaporation des milieux populaires provient des transformations internes du groupe. C’est à la gauche de produire un discours qui puisse unifier des rapports au travail devenus plus hétérogènes (les classes sociales ne sont pas le pur produit du système économique, elles existent aussi à travers une offre de discours politiques et symboliques et d’identifications sociales).

    Le discours de l’« assistanat » porté à droite prend d’autant plus dans ces milieux qu’il s’appuie sur la « tripartition de la conscience sociale dans les catégories populaires » bien analysée par Olivier Schwartz. La conscience du monde social d’une partie des milieux populaires n’est pas bipolaire (le haut-le bas, nous-eux) mais triangulaire  : se développe le « sentiment d’être lésé à la fois par les plus puissants et par les plus pauvres », ces assistés « pour qui l’on paie », et ce d’autant plus que les riches apparaissent inaccessibles et la remise en cause de leur richesse improbable, comme le rappelle bien François Ruffin dans son dernier livre.

    La critique des « assistés » sur le mode de la valorisation du travail et de l’effort permet à des individus déclassés de « construire une image positive de leur parcours et plus largement de se vivre comme les acteurs de leur propre histoire[4] ». En reprenant cette thématique, Fabien Roussel légitime un discours de droite (les mots comptent en politique…) et, alors qu’il se drape du « réel », ne prend pas en compte la réalité sociale. Comme le montre bien le sociologue Nicolas Duvoux[5], la frontière est en effet poreuse entre « assistés » et « salariés pauvres » (qui touchent par exemple la prime d’activité).

    Chaque année, un tiers des allocataires du RSA sort du système. C’est justement cette proximité qui rend les salariés sensibles à la rhétorique de l’assistanat (ils ne veulent pas y basculer). Mais il est possible de valoriser le travail (sa juste rémunération, ses bonnes conditions…) et prendre en compte la demande de respectabilité et de dignité associée au travail sans promouvoir les termes de l’adversaire et sans fétichiser la valeur « travail » (le travail n’est pas le seul mode de réalisation de soi surtout quand il se raréfie et se dégrade).

    La question des « minorités »

    La question des minorités complexifie l’équation électorale et sociale à gauche. Les sources d’identité dans la vie des individus sont devenues plus hétérogènes. L’appartenance au salariat ne suffit plus à déterminer l’identité des individus, leurs comportements et leurs attentes. L’expérience vécue de la domination ne passe plus aujourd’hui uniquement par la classe. Les individus se définissent de façon croissante, mais non exclusive, à partir de référents ethno-raciaux ou d’identités sexuées ou sexuelles. Elles sont sans doute plus visibles et faciles à mobiliser que les identités de classe, devenues floues.

    Ces identités produisent des causes « nouvelles » ou réinventées qui se sont multipliées ces dernières années sur l’agenda politique et qui régénèrent les mobilisations sociales (féminisme[6], LGBT, antiracisme, lutte contre les violences policières et les discriminations…) et sont disqualifiées par la droite et une partie de la gauche dans la catégorie « wokisme ». Elles sont pourtant progressistes. L’affaire « Quatennens » montre que la question des violences sexuelles et sexistes est désormais incontournable.

    Or la gauche est historiquement un projet de classe. La droite et certains intellectuels ironisent : les minorités seraient la nouvelle classe sociale de substitution ou « les nouveaux damnés de la terre » ? La gauche doit-elle privilégier l’émancipation des minorités au risque de délaisser le thème de la redistribution alors que la droite nationaliste s’est engouffrée dans la demande de sécurité, d’ordre, de souveraineté ?

    Cette opposition binaire (opposer classes populaires et minorités) a-t-elle un sens ? Certains à gauche balaient du revers de la main ces questions qu’ils jugent secondaires et se retranchent derrière l’universalisme (celui-là même qu’avaient brandi les opposants à la parité à la fin des années 1990…). Mais le discours « républicain » et « universaliste » sonne de plus en plus creux aux oreilles de ceux qui sont ségrégués socialement et territorialement ou discriminés et qui n’y voient qu’une incantation justifiant le statu quo et l’inertie.

    Une double fable à gauche s’est développée souvent en lien avec des thèses développées aux États-Unis sur la politique des identités[7] : l’idée que, quand la gauche était au pouvoir en France, elle aurait privilégié le « sociétal » au détriment du « social » et que les classes populaires « blanches » auraient été délaissées par les partis de gauche à cause d’une attention trop soutenue aux minorités, est infondée. François Hollande n’a en rien compensé sa politique de l’offre par une politique antidiscriminatoire solide. Le programme de la France insoumise montre que l’on peut concilier redistribution sociale, féminisme et lutte contre les discriminations.

    Penser de nouvelles alliances de classe

    Comment la gauche peut-elle agréger les catégories populaires dans leur diversité, y compris « racisées », et les classes urbaines diplômées ? La gauche est confrontée à la fragmentation de la société et du monde du travail. Mais cette situation est-elle véritablement nouvelle et est-elle indépassable ? L’historien du mouvement ouvrier Jean-Numa Ducange le rappelle : « Quand le socialisme est né, il n’y avait pas de classe ouvrière unifiée, la majorité des gens travaillait dans le monde artisanal et rural et le niveau d’éclatement du monde social était très important. » Uber n’a rien inventé, l’emploi à la tâche existait à la fin du XIXe siècle…

    Les milieux populaires ne sont pas naturellement de gauche ou droite. Ils ne l’ont jamais été. S’ils se sont alignés pendant quelques décennies sur la gauche, c’est le résultat d’un travail politique immense… que la gauche ne mène plus. La désagrégation des milieux populaires n’est pas un phénomène qui s’impose à la gauche. Elle y a concouru, notamment en dévalorisant la figure de l’ouvrier au sein de sa représentation et de son personnel politiques. C’est à la gauche intellectuelle, militante et partidaire de produire de nouvelles représentations de la société et une proposition politique autour de l’égalité qui puisse fédérer ces divers intérêts.

    Aujourd’hui c’est l’absence d’une perspective émancipatrice partagée portée par la gauche qui ne permet pas de dépasser les divisions internes de la société. Cela suppose un immense travail politique de solidarisation et d’unification symbolique. Il est très complexe à développer. Il y a bien « un déficit de travail politique visant à faire tenir ensemble les destins individuels, en particulier ceux des dominés économiques, objectivement semblables (précarité, exposition au risque, désaffiliation…) mais subjectivement enfermés dans une vision individualisée de leur destin[8] ».

    Comment rassembler les Nuit debout, les attentes de justice sociale des gilets jaunes, #MeToo et les luttes contre les violences policières ? Derrière chacune de ses mobilisations il y a des convergences sur lesquelles la gauche peut s’appuyer : l’égalité et une démocratisation de la démocratie (qui a été au cœur à la fois de Nuit debout et des gilets jaunes à travers la remise en cause de la démocratie représentative et la mise en avant du référendum d’initiative populaire).

    Les classes moyennes diplômées sont soumises aujourd’hui à des logiques de déclassement (le diplôme ne garantit pas la réussite) qui peuvent les rapprocher des milieux populaires. Elles sont soumises elles aussi à la précarisation ou à la hausse vertigineuse du coût du logement et désormais de l’énergie. Le désavantage social dans la société progresse par le bas de la société et remonte[9], et les inégalités entre classes moyennes et classes supérieures se creusent.

    Les mobilisations antiracistes sont souvent réduites à des entreprises séparatistes, « communautaristes » et identitaires alors même qu’elles s’inscrivent dans des revendications d’égalité. Il n’y aucune raison d’opposer le « social » et le « sociétal » que la revendication d’égalité peut souder (l’égal accès aux moyens matériels et sociaux nécessaires à une vie épanouie). C’est ce que montre bien Erik Olin Wright[10] : la valeur de l’égalité constitue une base potentielle pour construire une unité politique à travers des identités diverses.

    Se détourner des questions minoritaire et raciale pour se concentrer sur la seule question sociale condamne la gauche à être… minoritaire. La démarche politique de Bernie Sanders aux États-Unis montre bien que l’on peut défendre de concert les diverses revendications d’égalité. Si la gauche propose un programme de rupture avec l’ordre économique, à même de séduire les milieux populaires « traditionnels », elle pourra d’autant plus prendre en compte les revendications des « minorités ».

    Cette coalition ne peut pas seulement être constituée au moment d’une campagne électorale, elle présuppose un travail politique plus structurel que doivent mener les organisations partisanes en amont des élections. Unifier et faire converger les causes multiples et progressistes qui régénèrent la société et convaincre les classes populaires traditionnelles qu’elles ne seraient pas nécessairement les perdantes de politiques plus favorables aux minorités n’est pas qu’une question d’offre politique, c’est aussi affaire de travail militant.

    Les partis ont vocation à produire et articuler les intérêts sociaux qu’ils sont censés défendre par un travail politique et organisationnel. Or les partis de gauche sont de plus en plus affaiblis ou « gazeux » et l’idée que la gauche puisse faire l’économie de la forme partisane se développe. C’est un autre chantier de la Nupes : repenser l’action organisée et militante, réinventer les partis politiques, en faire des instruments de politisation et de constitution d’une majorité sociale et électorale.

    [1] Frédéric Faravel, « Élections législatives de 2022 : entre approfondissement et contradictions, une nouvelle étape de la crise démocratique », Institut Rousseau, juillet 2022.

    [2] François Ruffin, Je vous écris du front de la Somme, Paris, Les liens qui libèrent, 2022.

    [3] Olivier Schwartz, « Peut-on parler des classes populaires ? », La Vie des idées, 13 septembre 2011.

    [4] Camille Peugny, Le Déclassement, Paris, Grasset, 2009.

    [5] Nicolas Duvoux, « Il n’y plus de séparation claire entre le monde du travail et celui des prestations sociales », Le Monde, le 16 septembre 2022.

    [6] Les femmes sont-elles une minorité ? Elles sont une moitié dominée de l’humanité.

    [7] Mark Lilla, La Gauche identitaire. L’Amérique en miettes, Paris, Stock, 2018.

    [8] Christian Le Bart, L’Individualisation, Paris, Presses de Sciences Po, 2008.

    [9] Camille Peugny, Le Destin au berceau. Inégalités et reproduction sociale, Paris, Seuil, 2013.

    [10] Erik Olin Wright, Stratégies anticapitalistes pour le XXIe siècle, La Découverte, 2020.

     

    NDLR : Rémi Lefebvre a récemment publié Faut-il désespérer de la gauche ? aux Éditions Textuel.

    https://aoc.media/analyse/2022/09/27/la-gauche-toujours-a-la-recherche-de-son-peuple

    https://seenthis.net/messages/950566

    #gauche #Fabien_Roussel #Nupes #classes_populaires #précarité #minorités

    • « Contrairement à ce qu’affirme [après Lionel Jospin en 1998, ndc] Fabien Roussel, il n’y a plus de séparation claire entre le monde du travail et celui des prestations sociales », Nicolas Duvoux
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/09/14/contrairement-a-ce-qu-affirme-fabien-roussel-il-n-y-a-plus-de-separation-cla

      Le discours fracassant de Fabien Roussel opposant, lors de la Fête de L’Humanité, « la gauche du travail » à « la gauche des allocations » a créé une intense polémique. Inspirées par la rhétorique conservatrice de la critique du « cancer de l’assistanat » (Laurent Wauquiez) ou de la valorisation, symétrique et inverse, de « la France qui se lève tôt » (Nicolas Sarkozy), ces déclarations sont destinées à réarmer moralement des classes populaires laborieuses et menacées. Elles ont cependant le tort d’être fondées sur une idée fausse : contrairement à ce qu’affirme le dirigeant communiste, il n’y a plus de séparation claire entre le monde du travail et celui des prestations sociales.

      En opposant « la gauche du travail » à « la gauche des allocations [et] des minima sociaux », Fabien Roussel occulte en effet un phénomène majeur : la porosité croissante entre le monde du travail et celui de l’assistance. Masquée par les positionnements volontairement clivants et binaires des discours politiques, cette réalité est aujourd’hui l’un des traits saillants de notre organisation sociale.

      Depuis le début des années 2000, la dichotomie entre ce qui relève de l’assistance et ce qui relève du soutien au travail – notamment au travail précaire et mal rémunéré – ne tient plus. Avec la création de la prime pour l’emploi, en 2001, l’Etat a pris acte du fait que nombre de travailleurs et surtout de travailleuses modestes ne parvenaient plus à joindre les deux bouts malgré les salaires qui leur étaient versés par leurs employeurs privés ou publics : ils avaient du mal à acquitter ce que l’on appelle aujourd’hui leurs dépenses contraintes – le logement ou la facture d’électricité, par exemple.

      Profondes dynamiques

      Pour pallier cette difficulté, l’une des lignes directrices de la politique sociale française a consisté à soutenir le revenu des travailleurs modestes – ce qui a eu pour conséquence d’entremêler le monde du travail et celui des allocations [mais quel décerveleur ! la sociologie vaut ici le journalisme ndc] . En faisant de la prestation sociale un complément de salaire pour les salariés rémunérés jusqu’à un smic et demi, cette politique a peu à peu effacé la frontière entre ce qui tient du travail salarié et ce qui relève des prestations sociales. Créé en 2008, le revenu de solidarité active (RSA), qui a pérennisé les possibilités de cumul de revenus d’activité et de solidarité, et qui les a étendues à des emplois à temps très partiel, a renforcé ce phénomène.

      En apportant un complément de revenu aux salariés modestes, la prime d’activité instaurée huit ans plus tard, en 2016, a contribué, elle aussi, à nourrir ce rapprochement entre le monde du travail et celui de l’assistance. Si elle a permis de soutenir des personnes en difficulté, elle a, en concentrant l’effort de redistribution sur les moins pauvres d’entre les pauvres, institutionnalisé une perméabilité grandissante entre l’univers des salariés et celui des allocataires des prestations.

      Ces politiques publiques ont profondément modifié la réalité sociale : souvent dépeint, dans les discours politiques, comme un ensemble homogène et immobile, le monde des allocataires du RSA est aujourd’hui marqué par une forte volatilité – et une forte hétérogénéité. Selon une étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques de 2021, un quart des bénéficiaires de cette prestation, qui est accusée d’entretenir une atavique culture de l’assistanat, sortent du dispositif chaque année. Cette réalité, qui entraîne un coût de gestion immense, montre que ces espaces sociaux que l’on croit figés sont en fait traversés par de profondes dynamiques.

      Ultime recours contre la misère

      Une partie significative des allocataires de cette prestation emblématique qu’est le RSA circulent en effet constamment entre l’assistance et le travail salarié, souvent dans des conditions précaires et dégradées. Pour certains, ces prestations constituent un soutien ponctuel, un ancrage pour une reconversion professionnelle ou une manière de pallier une séparation. Pour d’autres, elles sont un ultime recours, souvent de longue durée, contre la misère – raison pour laquelle les stigmatiser est aussi indécent que politiquement contre-productif. Plusieurs publics et plusieurs problématiques sociales coexistent donc dans ces dispositifs perçus à tort comme homogènes.

      C’est paradoxalement cette proximité entre le monde du travail et celui des « allocs » qui attise aujourd’hui les déclarations polémiques – et trompeuses – comme celles de Fabien Roussel. Parce que les classes populaires fragilisées sont objectivement proches des seuils d’éligibilité aux prestations sociales, [comme le savaient déjà les socialistes des années 80 et 90, ndc] elles luttent activement pour s’en démarquer : elles sont d’autant plus tentées d’adhérer au discours critique de l’assistanat que la précarité de leurs conditions de vie les rapproche de plus en plus de la « chute » redoutée dans l’assistance. C’est finalement la perméabilité de ces espaces sociaux et le risque de réversibilité des situations acquises qui constituent le soubassement social et moral de la défense acharnée de la frontière entre travail et assistance.

      Le sociologue Olivier Schwartz a documenté cette « conscience sociale triangulaire » : les ménages modestes ont aujourd’hui le sentiment d’être soumis à une double pression – l’une « venant du haut » (les classes moyennes et supérieures), l’autre « venant du bas » (les fractions précaires des classes populaires). Parce que les « privilégiés d’en bas » semblent bien traités, ils jouent le rôle de repoussoir : quand les fondements d’une vie sociale intégrée sont menacés, le rejet des « assistés » structure les comportements et la revendication d’une existence qui ressemble à celle des « autres ». Dans les classes populaires laborieuses, la mise à distance du monde de l’assistance est en fait une demande de respectabilité – et elle s’exprime d’autant plus violemment que la proximité sociale encourage la distance symbolique et morale.

      Loin des discours simplistes, le travail et la protection sont désormais entremêlés sous des formes nouvelles et complexes. Si l’on veut refonder une protection sociale qui apporte aux populations modestes et précarisées la sécurité dont elles ont besoin, il faut les affronter avec détermination – sans s’appuyer sur des idées fausses.

      #Travail #précarité #assistanat #assistance

    • jouer sur ces tension subjectives internes à un populaire fragmenté par l’économie, c’était déjà le travail politique de la gauche gestionnaire (plaignons Lefebvre...), et c’est de ce travail politique là qu’ont découlé ses « réponses sociales » au précariat (avant même celle que fut le RMI). nul besoin pour ces acteurs politiques de « désirer le fascisme » après lequel nombre d’entre eux passent leur temps à courir (à la LFI aussi) pour lui ouvrir la voie, non pas seulement au plan électoral, mais comme poison des existences et des comportements (cf. la pandémie radicalement dépolitisée, désocialisée, par le « haut » et par le « bas »). L’exemple Jospin ("je préfère une société de travail à l’assistance", assemblée nationale, janvier 1998) vient en son temps relayer les déclarations socialistes contres les OS arabes grévistes de l’automobile en 1982 (saboteurs séparatistes, comme on ne le disait pas encore, de la performance économique de l’entreprise France). Les politiciens s’affaire à casser tout front populaire qui ne soit pas strictement électoral (c’est-à-dire impuissanté).

      Les déclarations d’un Mélenchon prétendant l’inverse (façon : la force d’un gouvernement de gauche dépendra de celle des mobilisations populaires) allient réalisme (l’histoire a tranché la question à maintes reprises) et lyrisme. Faux semblant spectaculaire (le fonctionnement même de ces orgas le montrent au quotidien).

      #militants_de_l'économie #cassos

  • Fabien Roussel, le communiste préféré du Figaro.

    Le communiste Fabien Roussel dit ne plus vouloir de « la gauche des allocations »
    https://www.lefigaro.fr/politique/le-communiste-fabien-roussel-dit-ne-plus-vouloir-de-la-gauche-des-allocatio

    « Pour être rescapé, il a fallu que j’entende... Il y a des discours (à gauche) qui ne passent pas » auprès des électeurs, a souligné Fabien Roussel. Ainsi, « les Français nous parlent d’assistanat en nous disant qu’ils travaillent et que eux (les bénéficiaires de minima sociaux, NDLR), ne travaillent pas », a-t-il ajouté. Selon le communiste, « la gauche doit défendre le travail et le salaire et ne pas être la gauche des allocations, minima sociaux et revenus de substitution ». « Je ne suis pas pour une France du RSA et du chômage », a-t-il insisté.

  • MACRON 2 ou la violence légitimée. BiBi
    https://www.pensezbibi.com/categories/pensees-politiques/macron-2-ou-la-violence-legitimee-22348


    On les retrouvera, plus violents qu’avant.
    1. Qu’on en soit persuadé : ces images ne sont rien en comparaison de ce qui nous attend.

    2. Rappel à ceux qui voulaient me persuader que la Police sous Mélenchon aurait été semblable en violence en tous points à celle de Darmanin . Bien sûr, il s’agit d’une croyance contre une autre croyance. Sauf que. Sauf qu’un certain 19 mars 2021, les Insoumis n’ont pas défilé à l’invitation d’ Alliance , syndicat néo-fasciste de la Police. Au contraire des autres partis de Gauche.
    Et cela est un fait. Pas une croyance.

    3. Peu importe de chercher à savoir qui sera le vainqueur de ces élections : le MEDEF est déjà le grand gagnant de ces élections. Ses réformes liberticides auront toute la légitimité électorale d’un Macron 2. Avec toute la violence qui va avec pour les imposer.

    4. On a tort de ne pas souligner le rôle de cette racaille de Sarkozy . Il a continué à animer ses réseaux pendant cette campagne.
    1. Pour placer Pecresse (qu’il n’a pas soutenue) à la tête de son Parti, sachant que la pov’ candidate ne serait pas suivie par ses adhérents et par ses votants habituels.
    2. En sachant que ces derniers iraient défendre Macron . Ce qui fut fait et bien fait, Macron ayant ainsi pu siphonner les voix LR .

    5. A Tourcoing , soi-disant « fief » de Darmanin , la population lui a envoyé sa réponse.


    A retenir :
    1. L’abstention est à 26,31 % des inscrits.
    2. Le vote pour Roussel (PCF) représente 2,31 % des inscrits.
    3. L’écart entre Mélenchon et Marine Le Pen est de 1,20% (soit 421.420 voix).

    6. Jérôme Fourquet (ce collaborateur de Jérôme Cahuzac pour l’écriture d’un livre sur « l’euro » et l’Europe) d’ IFOP Opinion était l’invité de France Inter ce lundi à 13 h. Bien entendu, cet enfoiré de sondeur ne dira pas que son dernier « rolling » (on ne dit plus « sondage ». Rolling c’est plus chic) donnait Mélenchon à 16% et que ses foutues fabrications quotidiennes de l’opinion n’ont jamais situé l’ EELV de Jadot à 4,5 % et le LR de Pécresse à 4 %.


    Le dernier rolling d’IFOP

    7. Le problème avec certain(e)s camarades du PCF , c’est qu’ils argumentent le déni de leur désastre électoral ( 2,31 % ) par une accusation contre les Insoumis : ils se plaignent que ces derniers les insultent. Cette superbe place de _ « victime d’ insultes  » _ est aussi très recherchée par les écologistes de Jadot.

    8. Il faut en rire ? Bien sûr ! Rire des pleurnicheries conjuguées de Pécresse et de Jadot qui vont devoir faire appel aux dons des Français pour renflouer les caisses de leurs Partis respectifs. Voilà qui me fait, perso, beaucoup rire, s’agissant de personnes qui n’ont cessé de culpabiliser-mépriser-hurler contre ces satanés pauvres qui ne foutent rien et qui vivent d’ assistanat . On attendra leurs inserts publiciataires d’appels aux dons dans ces trois journaux.


    9. Dans La Dépêche du Midi , la « journaliste » Christelle Bertrand écrit : «  La candidate du RN, elle, peut compter sur une partie de l’électorat de Jean-Luc Mélenchon  ». Les sources ? Elles sont bien entendu introuvables. Le «  pas une voix à Marine LePen  » du leader des Insoumis n’a pas été entendu. Fallait le redire encore une fois, Jean-Luc ! Cinq fois n’est pas assez pour ces dures de la feuille (de chou).

    10. Ces élections seront l’image parfaite du Paradoxe  : on entrera dans une » Macronie 2 » pour cinq terribles années supplémentaires alors que Macron reste le président le plus détesté de tous les présidents et qu’il suscite une haine incroyable dans les couches populaires.


    11. Un communiste dépose un tweet en soulignant la «  magnifique campagne  » de Roussel . Pas de doute : le camarade inclut dans les «  Jours Heureux  » ce 10 avril 2022 où les 2 % de son candidat ont manqué à Mélenchon pour passer la rampe du second tour.

    12. Un autre communiste écrit que « _ les pourcentages ne s’additionnent pas. Derrière les candidats, il y a des dynamiques de campagne qui autrement n’auraient pas existé ¨ ». Aveuglement et déni : les dynamiques, si elles avaient été unies derrière Mélenchon auraient entraîné, en 2022, un élan exponentiel et donc probablement gagnant. Comme pour l’élan 2017 et cette dynamique qui porta le leader Insoumis – AVEC le concours du PCF – à 19,58 %.

    13. Portons le regard sur la fascisation rampante d’En Marche s’alignant sur les positions nauséabondes de la fachote de Marine Le Pen  :


    14. Les crevards de Paris-Match  :
    1. Avant le 10 avril, ils dédiabolisaient Marine Le Pen et s’émerveillaient de son beau sourire pour la porter au second tour.
    2. Après ce 10 avril, Marine Le Pen redeviendra la méchante, très méchante fachote et notre bon Macron ne perdra pas une minute pour nous chanter à nouveau le refrain du barrage à l’extrême-droite.

    15. Le barrage Macron 2017 a entraîné la naissance puante d’un Eric Zemmour et un gain de voix de Marine-la-fachote. Tout ça avec la complicité des Médias et des amis de Macron. Par exemple, ce Xavier Niel qui ouvrit ses colonnes du Monde à Marine Le Pen en très joli blouson gestapiste, à la rubrique « Mode » . Sans oublier le trio ci-dessus Bolloré, Drahi et Lagardère (entre autres).

    #Assistanat, #communiste, #darmanin, #dépêche_du_Midi, #EnMarche, #Ifop, #Insoumis, #jadot, #jérôme_Fourquet, #Jour_Heureux, #macron, #marine_lepen, #MEDEF, #Mélenchon, #PCF, #pécresse, #police, #rolling, #roussel, #sarkozy, #sondage, #sondages, #tourcoing, #xavier_niel, #zemmour

  • Assurance-chômage : « Une réforme inefficace, injuste et punitive »

    Tribune. Une centaine d’économistes, parmi lesquels Thomas Piketty, Aurélie Trouvé ou Dominique Plihon, dénoncent l’entrée en vigueur le 1er octobre de la réforme de l’assurance-chômage.

    Le gouvernement s’obstine à mettre en œuvre la réforme de l’assurance-chômage, deux fois suspendue par le Conseil d’Etat, qui vise à fortement diminuer les droits des chômeurs. Le régime d’assurance-chômage a pourtant pleinement joué son rôle de stabilisateur automatique durant la crise en maintenant un revenu aux personnes privées d’emploi grâce à l’indemnisation chômage et à l’activité partielle, que l’Unédic [ l’association paritaire qui pilote le système d’indemnisation des demandeurs d’emploi] a financée pour un tiers. En tant qu’économistes, nous nous opposons fermement à la mise en œuvre de cette réforme que nous jugeons inefficace, injuste et punitive.

    Cette réforme va toucher de très nombreux allocataires de l’assurance-chômage, en diminuant drastiquement le montant des allocations dans un contexte de crise sans précédent. Tous ceux ayant eu deux périodes d’emploi non contiguës verront leur indemnité réduite. Plus de 1 million d’indemnisés seront ainsi touchés par la réforme du salaire journalier de référence (SJR), soit 40 % des allocataires.

    Un parti pris idéologique

    Le nouveau mode de calcul se base sur la moyenne des salaires perçus au cours de la période comprise entre le premier et le dernier jour d’emploi dans les vingt-quatre derniers mois. En plus des jours travaillés, les jours non travaillés sont pris en compte. Cela induit une baisse du montant de l’allocation pouvant aller jusqu’à 43 %. Pire, selon la répartition des périodes travaillées et non travaillées, le montant des allocations pourrait varier fortement, à rémunération et nombre d’heures travaillées identiques.

    L’argument selon lequel les chômeurs « gagnent plus quand ils sont au chômage qu’en travaillant » est mensonger. L’allocation d’assurance-chômage représente entre 57 % et 75 % du salaire journalier de référence, elle ne peut donc être supérieure au salaire antérieur. En cas de reprise d’une activité (réduite), le cumul de l’allocation-chômage avec le salaire issu de cette activité ne peut être supérieur au salaire antérieur. Si ce seuil est dépassé, l’indemnisation est suspendue.

    Rappelons que l’indemnisation moyenne s’élève à 910 euros par mois et que seuls 40 % des demandeurs d’emploi perçoivent une allocation-chômage. Loin de la caricature du « chômeur optimisateur », la réalité des chômeurs est la méconnaissance des droits et la difficulté à calculer leur indemnité, ainsi que cela a été démontré par plusieurs équipes de chercheurs.

    Selon ces travaux, ce que recherchent avant tout les chômeurs, c’est un emploi pérenne. La thèse que la dégradation des règles de l’assurance-chômage aurait des effets favorables sur l’emploi est un parti pris idéologique. L’effet d’une telle dégradation serait de contraindre les chômeurs à accepter n’importe quel emploi au plus vite, à bas salaire et aux mauvaises conditions de travail, au mépris de l’efficacité économique et sociale (« Emploi discontinu et indemnisation du chômage. Quels usages des contrats courts ? », par Mathieu Grégoire [coord.], Olivier Baguelin, Julie Dulac, Ji Young Kim, Delphine Remillon et Claire Vivès, https://hal-cnam.archives-ouvertes.fr/hal-03234720 « Rapport d’études » n° 4, Dares, mai 2021 ; « Le recours à l’activité réduite : déterminants et trajectoires des demandeurs d’emploi », par Sabina Issehnane [coord.], Fabrice Gilles, Léonard Moulin, Leïla Oumeddour et Florent Sari, rapport de recherche, Etudes et recherches, n° 8, Pôle emploi, août 2016 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02306056).

    Le mythe des emplois vacants non pourvus

    Selon Elisabeth Borne, ministre du travail, le système de cumul permis par l’assurance-chômage inciterait les chômeurs à accepter des contrats courts, ce qui pousserait les employeurs à les utiliser massivement. Cet argument est surprenant. C’est oublier que la flexibilité accrue de l’emploi provient des réformes du marché du travail menées par ce gouvernement et les précédents, et que la relation salariale est une relation de subordination.

    Le rapport de force est particulièrement défavorable aux travailleurs lorsque le chômage est élevé. Le chômeur n’a donc guère le choix d’accepter ou non un emploi qu’on lui propose. Si le gouvernement désire réellement réduire l’utilisation des contrats courts, il doit supprimer les possibilités de proposer des contrats courts offertes par les lois successives. La modulation de la cotisation d’assurance-chômage en fonction de l’utilisation des contrats courts, quant à elle, est renvoyée à septembre 2022…

    Le troisième argument invoqué par ce gouvernement est celui de la reprise économique et des difficultés de recrutement dans certains secteurs d’activité. Le mythe des emplois vacants non pourvus est une antienne bien connue. Il ne suffit malheureusement pas de traverser la rue pour trouver un travail. L’enquête « Activité et conditions d’emploi de la main-d’œuvre » (Acemo) du ministère du travail comptabilise 265 000 emplois vacants.

    De son côté, Pôle emploi comptabilise 300 000 offres d’emploi non pourvues, ce qui est très peu face aux 6,7 millions de demandeurs d’emploi. Dans un tiers des cas, l’employeur retire son annonce car le besoin a évolué ou disparu. Dans d’autres, l’offre demande des compétences inexistantes sur le marché, ou les conditions de travail et de rémunération ne sont pas acceptables.

    Un chômage qui perdure

    Le gouvernement a introduit dans son décret du 30 mars deux dispositions dites « clauses de retour à meilleure fortune » : si l’on enregistre 130 000 chômeurs en moins sur six mois consécutifs et 2,7 millions d’embauches de plus d’un mois sur quatre mois consécutifs, il faudra avoir travaillé au moins six mois sur les vingt-quatre derniers mois pour bénéficier de l’assurance-chômage au lieu des quatre mois auparavant nécessaires. Près de 500 000 chômeurs pourraient ainsi ne pas ouvrir de droits ou n’être indemnisés que bien plus tard en raison du durcissement de ces règles. La dégressivité pour les hauts salaires sera alors effective à partir du septième mois, et non plus à partir du neuvième.

    Il reste que le chômage perdure à un niveau particulièrement élevé avec plus de 3,8 millions de chômeurs au deuxième trimestre 2021. Les demandeurs d’emploi de catégorie A ont certes légèrement diminué, mais le nombre de demandeurs d’emploi toutes catégories confondues reste stable.

    Les demandeurs d’emploi en formation (catégorie D) et en emploi aidé (catégorie E) sont plus nombreux, en raison du plan de formation des chômeurs. Quant aux premiers concernés par la réforme, les demandeurs d’emploi en activités réduites (catégories B et C), leur nombre s’est fortement accru pour atteindre plus de 2 millions.

    Rien ne justifie la mise en œuvre de cette réforme. Elle a pour seul objectif de faire des économies – plus de 2 milliards d’euros – au prix d’une augmentation de la pauvreté des chômeurs et de leurs familles.

    Cette tribune a été signée par plus de 100 économistes français, dont Anne Eydoux, Sabina Issehnane, Thomas Piketty, Thomas Porcher, Dominique Plihon et Aurélie Trouvé. Voir la liste complète des signataires.

    https://www.lemonde.fr/emploi/article/2021/09/30/assurance-chomage-une-reforme-inefficace-injuste-et-punitive_6096533_1698637

    #chômage #droitauchômage #précaires #société_punitive

    • je comprends pas ce pli systématique de la gauche qui d’une part critique l’attaque libérale contre un #revenu susceptible de favoriser une « préférence pour le chômage » en disant que ce n’est pas le cas et, de l’autre, proclame que des allocs faibles ou inexistantes exercent une contrainte à l’emploi dégradé et sous payé. j’y vois une énième manifestation de mépris des chômeurs.

      #chômeurs #emploi #emploi #emploi #travail #travail #travail

    • La réforme de l’assurance-chômage, un symbole politique pour Emmanuel Macron
      A sept mois de l’élection présidentielle, (...)

      Après avoir défendu cette mesure phare de son quinquennat, en février 2018, comme un élément de sécurité face à la précarité du marché de l’emploi – en contrepartie à la flexibilité offerte par les ordonnances travail –, le locataire de l’Elysée la présente désormais comme une manière d’inciter les chômeurs à la reprise du travail. (...) M. Macron a réaffirmé sa conviction pour défendre la mise en œuvre de cette réforme. « Il faut s’assurer qu’il n’est jamais plus rentable de ne pas travailler que de travailler » [si on à 900 balles de chomdu alors que des emplois à 6 ou 800 cherchent preneurs ? si on sort de taffs à 2000 avec une alloc de 1500 alors qu’il y a masse d’emploi à 1200, et qu’on pourrait en créer d’autres pour les futurs licenciés et fin de contrat ? ndc], a-t-il lancé, le 16 septembre, lors d’un discours devant la principale organisation des indépendants – artisans, commerçants, professions libérales – à la Maison de la mutualité. Avant de poursuivre : « Nous devons réengager la nation tout entière dans cette culture du travail et du mérite, c’est un combat culturel. »

      Une manière d’envoyer un signal à l’opinion, surtout sa frange la plus conservatrice, particulièrement sensible au thème de la lutte contre « l’assistanat ». « Il y a une arrière-pensée électorale de la part d’Emmanuel Macron, qui s’inscrit dans sa stratégie plus générale de capter l’électorat de droite, analyse Jérôme Fourquet, directeur du département opinion à l’IFOP.
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/10/01/la-reforme-de-l-assurance-chomage-un-symbole-politique-pour-emmanuel-macron_

      #idéologie_du_travail #assistanat

    • Un très critique édito du Monde : la réforme est « mal née », et on la comprend pas bien.

      Assurance-chômage : une réforme déséquilibrée
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/10/02/assurance-chomage-une-reforme-desequilibree_6096853_3232.html

      Présenté comme un outil pour lutter contre la précarité et comme une source d’économies, le nouveau mode de calcul des indemnités risque d’aboutir à fabriquer de nouveaux pauvres, alourdissant, in fine, d’autres dépenses publiques. [ pour l’édification d’échafauds ?]

      Contestée, reportée, amendée [contrairement au Conseil de défense], la réforme de l’assurance-chômage a connu un parcours des plus chaotiques. Presque deux ans après le début de sa mise en œuvre, elle franchit une étape supplémentaire, avec l’entrée en vigueur, vendredi 1er octobre, des nouvelles règles relatives à l’indemnisation des demandeurs d’emploi. Cet aboutissement dans [vers ?] la douleur est loin de clore le débat sur un texte mal né, dont les effets restent à démontrer [pour qui ’a pas regardé les prévisions de chute et d’absence massive de droits réalisées par l’Unédic] et qui, ne sachant pas convaincre sur le bien-fondé de ses modalités d’application [un gâchis ! alors même que la CFDT et d’autres sont prêts à négocier le poids des chaines et la couleur des galetas, et la prochaine date de réunion des partenaires sociaux], se trouve sous la menace d’une décision du Conseil d’Etat [dont on sait d’expérience le but avoué : faire capoter autant de plans des militants du capital que possible].

      Les intentions sont légitimes. Le principe consiste à lutter contre la précarité [une lutte devenue depuis les stages Barre un devoir sacré de la nation] et la multiplication des contrats de travail de courte durée [dont abusent les chômeurs tant et plus, pensez donc ! ils sont un million sept cent mille à être "en activité à temps réduit" ]. Constatant une recrudescence spectaculaire du phénomène de la « permittence », c’est-à-dire l’alternance de CDD ou de missions d’intérim avec des périodes de chômage plus ou moins brèves [et parfois jusqu’à 4 mois d’allocs avant de cesser d’être indemnisés,], le gouvernement souhaite inciter les entreprises comme les demandeurs d’emploi à s’orienter vers des contrats plus pérennes [qu’on trouve en traversant la rue]. Toute la difficulté réside dans le mode d’incitation choisi [on ne discutera jamais assez des variantes de la trique, le progrès humain est à ce prix depuis que l’homme est le capital le plus précieux].

      Pour ces « permittents », la réforme modifie le calcul de leurs indemnités -[et, là, c’est des maths, c’est complexe, une affaire de #salaire divisé non plus par le nombre de jours travaillés mais par le nombre de jours travaillables sur une longue, longue période précédant l’inscription au chômage. faites polytechnique, on en reparle après], qui, pour beaucoup, vont sensiblement chuter, tout en allongeant [afin de protéger de la précarité, comme on vous l’a dit] la période d’affiliation permettant l’ouverture de droits à l’assurance-chômage [ce qui permet d’augmenter le nouveau diviseur qui s’applique au salaire pour calculer le montant de l’alloc, m’enfin, si par égard pour les traditions on doit transitoirement parler encore de salaire, au moment ou le travail indépendant représente l’avenir de la jeunesse de France, c’est pas sûr que la croissance puisse redémarrer]. Le gouvernement cherche à « encourager le travail » [à se faire exploiter]- au détriment du versement d’allocations devenues moins protectrices [et plus souvent qu’actuellement, inexistantes, comme c’est déjà le cas pour la moitié des chômeurs]. Parallèlement, il s’agit d’instaurer une modulation [à la flûte] de la cotisation patronale à l’assurance-chômage visant à pénaliser les entreprises qui ont un taux de ruptures de contrats de travail excessif.

      Un rendez-vous manqué

      Si l’effet incitatif du mécanisme reste à prouver, son impact immédiat sur les demandeurs d’emploi les plus précaires ne fait pas de doute [si vous êtes un peu juste avec tous vos frais et cherchez une femme de ménage, un jardinier, une nounou, soyez patients une seconde, ça va bien se passer]. Présentée comme une source d’économie, la mesure risque d’aboutir à l’effet inverse en fabriquant de nouveaux pauvres [bheurk, et en plus du dégoût ça ouvre à une question embêtante, est-ce que ça risque pas de Giléjauner quelque chose quelque part ?], qu’il faudra ensuite orienter [on reste disposés pour les aider, c’est certain, regarder comment les distributions alimentaires marchent bien ces derniers mois] vers d’autres dispositifs d’accompagnement [que ces pauvres gens ne connaissant pas malgré la nécessité] comme le revenu de solidarité active (RSA) [auquel ils n’accéderont malheureusement qu’en fonction du revenu du ménage - la vie est mal faite, c’est le déficit des comptes publiques, comme les pauvres payent pas assez de TVA avec leurs achats d’écrans, on a du mal à en sortir] ou la prime d’activité [à condition qu’ils prennent le genre de taff qui se trouve, pas trop payé, l’État ne peut pas tout, et même parfois pas grand chose, la bienveillance ne suffit pas, on doit aussi savoir rester humbles dans certains domaines]. En clair [tadadam !], l’allégement des charges de l’Unédic pourrait [on en est pas sûrs] déboucher sur une augmentation de celles assumées par les collectivités publiques. A l’arrivée se profile un jeu à somme nulle [assomme qui ?combien ? on me dit dans l’oreillette que certains comprennent pas]– ou presque – pour le contribuable-cotisant [qui se sait déjà pressuré sans que sa sécurité soit garantie, malgré les efforts faits pour remplacer des emplois de profs et de soignants par d’autres de policiers, et des lits d’hostos par des blindés légers, des grandes, des LBD et des munitions].

      La réforme fait d’autant moins consensus que, si pour les chômeurs le nouveau système entre en vigueur dès maintenant, les entreprises, elles, ne se verront appliquer le bonus-malus que dans un an [quand Macron sera réélu et leur aura fabriqué de nouvelles marges de manœuvre]. Par ailleurs, celui-ci ne concernera qu’un nombre limité de secteurs d’activité, donnant l’im-pre-ss-ion [mdr] que c’est surtout sur les épaules des demandeurs d’emploi que reposent les efforts [à moins que ce soit sur leurs pieds, s’ils dépassent, tellement ils auront la tête sous terre ?].

      De cette réforme ressort le sentiment [un peu triste, mais bientôt il y a les Fêtes de Noël] d’un rendez-vous manqué. Il est [extrêmement très] frappant de constater que les partenaires sociaux, pas plus que le gouvernement, n’ont été capables d’établir un di-ag-no-stic partagé sur le fonc-ti-on-ne-ment du ré-gi-meuh d’assurance-chômage. Ils se sont accusés mutuellement de malhonnêteté intellectuelle [on a rien à voir, l’objectivité, c’est plus intelligent que ça !] en brandissant le travail d’économistes qui eux-mêmes ne sont pas arrivés à s’accorder sur l’efficacité des mesures [comme si la démocratie, qui est en danger de Zobi, d’anti vax et tout ça, pouvait se le permettre !]. Les chiffres de l’Unédic, géré par les premiers, sont venus contredire ceux de Pôle emploi, structure pilotée par l’Etat.

      Ce dialogue de sourds a accouché d’une réforme d’autant plus mal née qu’elle n’a pas été annoncée telle quelle en début du quinquennat [et là, quand même, on se retient de poser la question, mais disons, en hommage à une femme qu’on ne citera pas (et paix à son âme), une telle grossesse non désirée, on doit pouvoir l’interrompre ? oui ; non ; nsp]. Alors qu’Emmanuel Macron s’était toujours opposé à la dégressivité des allocations [comme à leurs augmentation], c’est ce que retiendront surtout les demandeurs d’emploi [qui ont des allocs dont les montants sont assez élevées pour être concernées par la dégressivité telle qu’elle a été actée, comme nous] sans garantie d’échapper à terme à la précarité.

      mon diagnostique à moi, pour pleurer le manque d’entente et de dialogue sans arriver à en dire les raisons ,et l’irréductibilité, ces couillons ont lu du Habermas lors des cursus de matrixage de cerveau qui les ont préparé à leurs fonctions

      #cadres #précarité_des_cadres

  • LVMH poursuit son vaste programme de formation d’apprentis
    https://www.bfmtv.com/economie/lvmh-poursuit-son-vaste-programme-de-formation-d-apprentis_AD-202010230166.ht

    LVMH a recruté entre janvier et fin août 2020 plus de 2.200 stagiaires, 540 apprentis et 495 jeunes diplômés. Fin 2020, le groupe comptera 1.200 apprentis, a détaillé le groupe.

    L’employeur perçoit des primes de 5000 à 8000 € par embauche d’apprenti (suivant le niveau), ce qui rend l’apprenti quasi gratuit.
    À 6500 € en moyenne par apprenti de primes d’état, cela fait 7 800 000 € pour #LVMH. De quoi être ravi y compris pour les « non-imposables » de payer la TVA.

    #travail #assistanat_aux_entreprises #apprentis #apprentissage

  • Pour la rentrée, Jean Castex offre au patronat ce qu’il a demandé - Page 1 | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/260820/pour-la-rentree-jean-castex-offre-au-patronat-ce-qu-il-demande

    Le premier ministre a réservé ses premières annonces au Medef. Baisse de l’impôt de production, prolongement d’assouplissements de normes décidés durant l’état d’urgence, absence de mesures sur l’écologie.

    Une rentrée politique, c’est une mise en scène destinée à donner du sens à un discours et une action. Mercredi 26 août, Jean Castex, le premier ministre, a choisi en toute conscience de s’adresser aux chefs d’entreprise en priorité.

    D’abord, par la magie de la programmation radiophonique, le matin sur France Inter, où il était l’invité de la matinale quelques minutes après Geoffroy Roux de Bézieux, le président du Medef. L’après-midi en se rendant à l’ouverture de l’université d’été de l’organisation patronale, intitulée cette année la REF (Renaissance des entreprises françaises).

    Au sein du chic hippodrome de Longchamp, au cœur du bois de Boulogne, où chacun peut se régaler d’une coupe de champagne offerte sur la belle pelouse verte, le premier ministre a longuement, et lentement, présenté sa politique et divulgué quelques éléments du plan de relance. Son dévoilement a été reporté d’une semaine pour cause de rentrée sous la menace d’une reprise active de l’épidémie.

    Dans ce contexte, le gouvernement a d’ailleurs imposé le port du masque dans toutes les entreprises, provoquant l’ire du Medef devant cette annonce « un peu brutale », selon les mots du patron de l’organisation patronale.

    Message reçu à Matignon avec la saisine du Haut Conseil de la santé publique par le ministère du travail pour évaluer les possibles adaptations et la confirmation par Jean Castex lui-même que rien n’est encore figé. « Je crois pouvoir vous dire qu’il y aura la place pour des solutions pragmatiques », a-t-il concédé, s’attirant ainsi quelques applaudissements.

    Tout au long de son discours, ils seront d’ailleurs discrets, jusqu’à l’acmé du propos et la liste de l’ensemble des mesures de relance pour « faire en sorte que l’on retrouve d’ici à la fin du quinquennat le niveau de richesse de 2019 ».

    Et la liste est longue des annonces qui confirment cette politique pro-entreprises caractérisant le mandat d’Emmanuel Macron. Lors de son discours de politique générale, à la mi-juillet, Jean Castex avait d’ailleurs inscrit la sienne dans ce sillon macroniste. « La priorité va donc au soutien assumé à l’offre et au soutien productif. [...] Le plan opérera d’abord par l’offre et l’investissement. »

    Pas d’ambivalence donc devant le Medef : l’essentiel des 100 milliards d’euros ira directement en soutien aux entreprises puisque, selon le premier ministre, la consommation des Français se porte bien et que, visiblement, les inégalités sociales et la pauvreté peuvent attendre. À peine est évoquée la question de la participation pour l’ensemble des salariés « sans obligations nouvelles ». De salaires, jamais il n’est question.

    De la transition écologique non plus. Jean Castex, autopromu champion de l’écologie depuis une tribune intitulée « Tous écologistes ! », n’a pas une seule fois fait allusion à ce qui devait pourtant être la priorité des priorités du gouvernement. Rien sur le réchauffement climatique, rien sur la réduction des gaz à effet de serre, rien sur une probité en matière de transport, rien sur le rôle des entreprises en termes de rénovation thermique des bâtiments. Rien.

    À la plus grande joie intérieure des dirigeants du Medef, dont le président avait auparavant, et comme une ritournelle bien connue, indiqué que « la décroissance n’est pas une option » et évoqué les « problèmes de coûts, les problèmes d’efficacité, les problèmes de normes ». Juste avait-il insisté sur un dialogue nécessaire avec les ONG... Bien peu pour changer la donne.

    En revanche, pour relancer l’économie, tout est bon à prendre aux yeux des patrons réunis, et Jean Castex est venu les bras chargés de cadeaux. Confirmation de la baisse de l’impôt sur le revenu, diminution des impôts de production de 10 milliards d’euros dès le 1er janvier 2021 – tout en restant très flou sur la compensation envers les collectivités territoriales –, et « davantage de simplifications », selon ses mots.

    Concernant cette dernière annonce, il s’est fait plus précis, indiquant que nombre de mesures prises durant l’état d’urgence sanitaire sur le droit du travail et l’urbanisme notamment seront prorogées et même « amplifiées ». Sans surprise, il confirme que le provisoire dure souvent en matière de régression des droits sociaux et de l’environnement. Ce sera donc le cas, par exemple, pour la précarisation des contrats courts qui autorise les employeurs à déroger aux règles habituelles régissant les CDD.

    Quelques minutes auparavant, Geoffroy Roux de Bézieux avait rappelé au bon souvenir du premier ministre la vieille demande du Medef sur le « travailler plus ». « Depuis, j’ai cru entendre certains responsables politiques, et pas des moindres, parler de travailler davantage [...] », s’est-il réjoui.

    Grand promoteur des accords collectifs de performance – qui permettent à des entreprises d’augmenter le temps de travail tout en diminuant les salaires sous prétexte de sauver l’emploi –, Jean Castex a fait un pas en direction du Medef sur ce sujet. Aucune annonce mais une formule : « Pour réussir il n’y a pas de secret, il faut travailler. »

    Il en appelle à l’implication de toutes et tous pour relever le pays par le travail, s’arrogeant même le droit de réécrire la devise nationale en « Liberté, égalité, fraternité, responsabilité ».

    Dans les coursives et à l’abri des tentes des exposants, les participants portent pour un certain nombre de faux panamas, chapeaux élégants distribués gratuitement par l’organisation. On parle affaires et état du monde. Parfois vacances au bord de la mer. Le premier ministre vient d’annoncer que la casse des droits sociaux n’est pas terminée.

    Obscène...

    #patronat #caniches #casse_sociale #capitalisme

  • Un an après, la galère des anciens députés Caroline Fontaine - 3 aout 2018 - maris patch
    https://www.parismatch.com/Actu/Politique/Un-an-apres-la-galere-des-anciens-deputes-1567013

    Seuls 25 % des élus de l’Assemblée nationale ont survécu au raz-de-marée En marche !. Parmi les battus, une grande majorité de socialistes. Leur difficulté à retrouver un emploi signe la fin de « l’ancien monde ».

    C’est le premier signe d’un changement d’importance : ils ne décrochent plus leur téléphone aux premières sonneries. D’ailleurs, ils ne le décrochent plus du tout. Et ils ne rappellent pas. Difficile pour eux, qui ont tant aimé prendre la lumière, d’annoncer qu’ils ne s’en sortent pas. Les élections législatives de 2017 ont laissé 434 sortants sur le carreau, dont environ deux tiers sont PS ou écologistes. Un an après, leur reconstruction personnelle et professionnelle est, pour beaucoup, loin d’être achevée. Digérer l’humiliation de la défaite – certains n’ont pas passé le premier tour – a pris du temps. « Pendant les cinq ans de mon mandat, je me suis investi à 110 %, confie Philippe Baumel, ancien élu socialiste de Saône-et-Loire. Mon échec m’a semblé profondément ingrat. J’ai vécu pendant six mois une forme de tétanisation. J’ai eu beaucoup de mal à tourner la page. »

    Six mois, c’est le temps qu’il a fallu à Véronique Massonneau, ex-députée écolo de la Vienne, pour ne serait-ce que sortir de chez elle : « J’avais du mal à supporter la compassion des gens. » Idem pour Catherine Lemorton, ancienne présidente PS de la commission des Affaires sociales, qui avait vendu sa pharmacie pour se consacrer à son travail d’élue. « Après le choc », elle a flirté avec les abîmes : « J’ai flanché. Ne plus me sentir utile a été très violent pour moi. » « On a eu peur qu’elle se suicide », glisse une de ses anciennes camarades. « La politique est une drogue dure », s’excuse Alexis Bachelay, ex-député socialiste des Hauts-de-Seine et porte-parole de Benoît Hamon pendant la campagne de la primaire. Tous sont habités par un profond sentiment d’injustice : s’ils n’ont pas été réélus, ce n’est pas leur faute, non, mais celle de François Hollande et de son gouvernement. « J’avais un seul défaut circonstanciel, celui d’être socialiste », dit Catherine Lemorton. Un an après, les plaies ne sont pas encore toutes cicatrisées.


    Notre enquête révèle leur difficulté à trouver un emploi malgré leur réseau et leur expérience
    Un sevrage violent, voilà donc le premier enseignement de notre enquête. Pour tous, même pour les 225 qui ont fait valoir leurs droits à la retraite. « J’avais le sentiment de n’avoir pas démérité », confie Dominique Raimbourg, ancien patron socialiste de la commission des Lois à l’Assemblée. Mais eux, au moins, savent qu’à leur manière, ils ont eu « de la chance », selon les mots de Patricia Adam, son homologue PS à la Défense : « Je suis un privilégié dans le sens où je suis vieux ! » s’amuse Raimbourg. Leur téléphone sonne beaucoup moins, mais, grâce à leur pension, ils ont pu rester actifs – en s’impliquant dans des associations, des think tanks ou des fondations – sans crainte du lendemain. « Ça aide », confirme Jean-Christophe Cambadélis, ancien patron du PS et ex-député de Paris. Pour les autres, pour ceux qui, comme le dit Véronique Massonneau, ont eu « la mauvaise idée de n’avoir “que” 59 ans », notre enquête révèle leur difficulté à trouver un emploi malgré leur réseau et leur expérience. Une première.

    « J’ai réalisé qu’on paraissait obsolète », s’attriste Véronique Massonneau
    « Autrefois, les députés avaient des carrières longues, explique Emile Blessig, président du Groupe des anciens députés. S’ils perdaient leur siège, ils gardaient leur mairie, leur conseil général… » Désormais, l’interdiction du cumul des mandats les prive de cette possibilité de rebond. Autre changement, l’accession au pouvoir d’Emmanuel Macron a signé la fin de l’alternance, ce balancier qui garantissait un retour dans l’hémicycle : après la droite, la gauche et ainsi de suite. Résultat, beaucoup se sont retrouvés sans rien. « Je ne suis plus une personne publique, je n’ai plus à m’exprimer », coupe Sandrine Mazetier, ancienne vice-présidente socialiste de l’Assemblée nationale. « Je n’ai rien à vous dire. Je suis redevenu un citoyen ordinaire », prétend Kader Arif, autrefois plus bavard dans sa vie d’élu de Haute-Garonne ou de ministre délégué de François Hollande. « Certains ont pris de tels coups sur la gueule qu’ils ne veulent plus entendre parler de rien », décode Catherine Coutelle, présidente de l’Association des anciennes députées. Et ce d’autant moins que la poignée d’anciens députés qui ont raconté leurs difficultés ont récolté sur les réseaux sociaux une volée d’insultes, sur le thème : « Mais pour qui se prend ce privilégié ? » Alors ils préfèrent se taire.
     « Avant, une entreprise pensait qu’un politique pouvait lui apporter des marchés, analyse Jean-Christophe Cambadélis. Aujourd’hui, elle se dit qu’il va lui valoir des emmerdes »

    « La vague a touché beaucoup de monde, rappelle Véronique Massonneau. Il y a d’anciens ministres, des vice-présidents de l’Assemblée nationale sans emploi. Et comme on cherche tous dans les mêmes domaines – porte-parole de fondation, dans les relations institutionnelles –, les places sont rares. » Alors même que leur image s’est dégradée : « Avant, une entreprise pensait qu’un politique pouvait lui apporter des marchés, analyse Jean-Christophe Cambadélis. Aujourd’hui, elle se dit qu’il va lui valoir des emmerdes ! » Catherine Coutelle opine : « Elles n’ont pas envie de s’encombrer avec des gens battus et dévalués dans l’opinion. » De surcroît s’ils viennent du PS. Alexis Bachelay raconte : « J’ai passé quelques entretiens. Mon étiquette politique est complètement démonétisée. Dans l’ancien monde, on était recruté parce que, cinq ans plus tard, on allait être à nouveau au pouvoir. Là, on est tricard. » Tricard et ringardisé par les jeunes loups macronistes. « J’ai réalisé qu’on paraissait obsolète », s’attriste Véronique Massonneau. Un « retour au réel » d’autant plus dur que certains « ont pris de mauvaises habitudes, admet Jean-Christophe Cambadélis. Ils ne veulent pas perdre leur position sociale. Ils cherchent donc des emplois plus élevés dans la hiérarchie que ceux qu’on leur propose. » Leurs difficultés n’avaient pas été anticipées. Rien n’a été prévu par l’Assemblée. Ici, aucun accompagnement pour les aider dans leur reconversion.

    En juillet 2017, 97 ex-députés touchaient l’allocation de retour à l’emploi
    Même pour les fonctionnaires – un quart des sortants –, le retour au bureau s’est révélé compliqué. « Vous n’êtes pas toujours le bienvenu, rappelle Catherine Coutelle. Une directrice de recherche a été déclassée de trois échelons. Une autre mise au placard… » Alexis Bachelay a travaillé onze ans dans la fonction publique territoriale : « Ils me reprenaient à leurs conditions. Ce n’étaient pas les miennes. » Au terme de six mois de congé parental à 370 euros par mois, il s’est mis en disponibilité – sans droits au chômage – pour créer, comme tant d’autres, sa société de conseil. « Ce n’est pas très original, mais, quand vous avez été parlementaire, vous n’avez pas 50 000 possibilités de reconversion ! »

    En juillet 2017, 97 ex-députés touchaient l’allocation de retour à l’emploi (contre 44 après les législatives de 2012). Un an après, ils sont encore 70 à la percevoir. Et certains, comme Alexis Bachelay ou Véronique Massonneau, qui a obtenu de son précédent employeur une rupture conventionnelle, n’y ont pas droit. En 2007, Guillaume Bachelay, ancienne figure montante du PS, député battu en 2017, publiait un livre au titre toujours d’actualité : « Désert d’avenir ? Le Parti socialiste, 1983-2007 ». Sollicité pour cette enquête, il n’a jamais donné suite à nos appels. Tout comme d’anciens ténors du PS – Christophe Borgel, François Lamy, Pascal Cherki… Signe que la nouvelle vie de ces ex-piliers de la Rue de Solferino doit être encore en construction. Un an après la défaite.

    #députés #députées #PS #politicards #chômage #chômeurses #chômeurs #précarité #assurance-chômage #crise #pauvreté #politique #exclusion , retour de bâton , subir les lois qu’ils/elles ont voté #tricard #ringard #réel #solferino #assistanat #galère

    • C’est poignant, tant de misère humaine ...

      Les 26 députés qui ont voté contre l’état d’urgence

      François Asensi (GDR) Alain Bocquet (GDR) Marie-George Buffet (GDR) Jean-Jacques Candelier (GDR) Patrice Carvalho (GDR) André Chassaigne (GDR)Jacqueline Fraysse (GDR)

      Laurence Abeille (non inscrit) Pouria Amirshahi (non inscrit) Isabelle Attard (non inscrit) Danielle Auroi (non inscrit) Michèle Bonneton (non inscrit) Sergio Coronado (non inscrit) Cécile Duflot (non inscrit) Noël Mamère (non inscrit) Philippe Noguès (non inscrit) Jean-Louis Roumégas (non inscrit)Eva Sas (non inscrit)

      Jean-Frédéric Poisson (LR)

      Fanélie Carrey-Conte (SRC) Linda Gourjade (SRC) Jean-Luc Laurent (SRC) Denys Robiliard (SRC) Barbara Romagnan (SRC) Gérard Sebaoun (SRC)Suzanne Tallard (SRC)
      Les 4 députés qui se sont abstenus

      Jean Lassalle (non inscrit)

      Nicolas Sansu (GDR)Gaby Charroux (GDR)

      Jean-Patrick Gille (SRC)

    • Erratum : la liste ci-dessus est la liste de ceux qui n’ont pas voté pour le reconduction de l’état d’urgence.
      Voici la liste des six qui n’ont pas voté l’état d’urgence :
      L’élu socialiste Pouria Amirshahi avait pour sa part annoncé son intention de voter contre. Deux autres socialistes, Barbara Romagnan et Gérard Sebaoun, l’ont également fait. Ainsi que les écolos Sergio Coronado, Noël Mamère et Isabelle Attard. La députée PS Fanélie Carre-Conte s’est pour sa part abstenue.

      Tout ça pour dire que le déconvenue aurait pu être plus douce en s’affirmant.

      Qu’en sera t-il pour les députés godillots de la tribu des DRH (futurs gestionnaires de camps) de LREM ?

    • Je ne me fous pas spécialement de leur gueule, c’est juste que je sais qu’il est facile de taper sur la gueule d’une partie de la population quand on a l’assurance de ne jamais se retrouver dans sa situation. Donc, le chômage, c’est toujours pour les autres, quand on veut, on peut, utilise ton foutu réseau et tu auras un boulot…
      Là, avec une réseau qui n’a rien à voir avec celui d’un chômeur en fin de droits, ils sont triquards.

      J’aimerais bien que ça les fasse réfléchir à ce qu’ils ont infligé aux autres.
      Cela dit, je me souviens quand on avait les anciens cadres qui arrivaient sur Actu>chômage. En fait de prise de conscience, on avait le droit à « pourquoi moi ? ».
      Désespérant.

    • Mais moi je me marre et sans aucune forme de honte. Ces gens là ils n’ont pas vocation à être député à vie non plus ou alors faut clairement aller en Chine et faire partie des pontes du PC chinois. Et ils viennent pleurer après…
      Ça me rappelle une entrevue entre le maire d’une petite ville de la banlieue de Lille avec des amis qui essayaient de mettre en place une mosquée et à qui le maire mettait des bâtons dans les roues régulièrement. Pendant la conversation le maire ne parlait qu’en terme de possession personnelle des ressources municipales : mon terrain, mes parkings etc Mon ami lui a alors dit « On ne va pas se mentir Monsieur X, on sait tous ici que vous êtes en CDD ». Le maire a rougi et n’a plus rien dit.
      Cerise sur le gâteau du texte : Cambadelis comme porte-parole, franchement ! Le gars il a été condamné plusieurs fois et il incarne la corruption et les magouilles du monde politique à lui tout seul.

  • L’assistanat des riches nous coûte un « pognon de dingue » ! Jean Gadrey, Alternatives Economiques
    https://www.alternatives-economiques.fr/jean-gadrey/lassistanat-riches-coute-un-pognon-de-dingue/00085130

    L’aide sociale et les minima sociaux coûtent environ 70 milliards d’euros par an aux finances publiques, soit 3 % du produit intérieur brut (PIB). Ces prestations contribuent de façon décisive à réduire la pauvreté et les inégalités.

    Face à cela, le coût de « l’assistance aux plus riches » pourrait être de l’ordre de 150 milliards d’euros par an hors fraude et évasion fiscales, et de l’ordre de 250 à 300 milliards au moins en incluant ces deux derniers coûts, comme le développait un billet de blog récent. Avec comme impact certain un creusement des inégalités et en particulier un enrichissement devenu indécent des très riches : les 500 individus les plus riches gagnent en moyenne 1 670 fois plus que la moyenne des plus pauvres. Je précise : 1 670 fois plus, après impôts.

    Le coût de « l’assistance aux plus riches » pourrait être de l’ordre de 150 milliards d’euros par an hors fraude et évasion fiscales Twitter

    On peut retenir trois grands postes de « cadeaux » aux plus riches. Chacun d’eux a été développé et amplifié par étapes depuis le milieu des années 1980. C’est aussi depuis ce moment que les inégalités, qui avaient nettement reculé depuis 1900 et au cours des « Trente Glorieuses », ont repris une tendance à la hausse. Cette dernière s’est certes avérée moins forte qu’aux Etats-Unis, mais elle est néanmoins nette, comme l’indique entre autres constats l’évolution de la part du revenu des ménages « accaparée » par les 1 % les plus riches :

    Niches fiscales et niches sociales
    Une fiscalité de plus en plus douce
    Fraude et évasion fiscale, 100 à 150 milliards par an

    #inégalités #riches #assistanat

  • L’assistance aux riches : « un #pognon_de_dingue » à plus de 300 milliards par an ? | Debout ! | #Jean_Gadrey | Les blogs d’Alternatives Économiques
    https://blogs.alternatives-economiques.fr/gadrey/2018/06/16/l-assistance-aux-riches-un-pognon-de-dingue-a-plus-de

    #assistanat

    L’ensemble des aides sociales, incluant « l’action sociale » (c’est-à-dire le financement de l’activité des agents publics remplissant ces missions) est chiffrée par la DREES à 69 milliards d’euros, chiffre pour 2013. De son côté, Henri Sterdyniak, expert sur ces questions depuis longtemps, indique un chiffre de 70 milliards. On est à peine au-dessus de 3 % du PIB (2.230 milliards en 2016)

    Qu’en est-il de « l’assistance aux riches » ? L’ordre de grandeur est de 300 milliards d’euros par an, 4,3 fois plus que les aides sociales qui nous coûtent paraît-il « un pognon de dingue ». Voici les principaux postes.