• Sur la piste des #passeurs

    Lorsque des #cadavres de #migrants sont découverts dans le désert, en mer ou dans des camions porte-containers dépourvus d’air, le discours officiel s’accompagne souvent d’un appel à l’action contre les passeurs. Ainsi, suite à la mort par noyade de plus de 300 migrants qui tentaient de traverser la Méditerranée, la ministre italienne pour l’Intégration Cécile Kyenge a déclaré : « Derrière ces tragédies se cachent des #trafiquants d’êtres humains qui s’enrichissent sur le dos de personnes qui fuient la guerre et la faim », en appelant au renforcement des patrouilles visant les passeurs.

    http://www.irinnews.org/fr/report/99445/sur-la-piste-des-passeurs

    #migration

  • « Pour vraiment contrôler les frontières, il faudrait un policier tous les 100 mètres »

    Les dernières semaines ont été marquées par deux drames qui ont bouleversé l’Europe : le naufrage de Lampedusa qui a fait plus de 360 morts et le décès de près de 100 migrants, au Niger. Directrice de recherche au CNRS, affectée au Centre d’études et de recherches internationales (CERI) à Paris, et spécialiste des questions migratoires, #Catherine_Wihtol_de_Wenden décrypte la mécanique des #flux_migratoires en #Afrique.

    Pourquoi les pays européens et africains n’arrivent-ils pas à mettre un terme à des tragédies commes celles de Lampedusa ou du Niger ?

    On croit qu’en contrôlant les frontières cela va résoudre les choses. Mais si on veut vraiment contrôler, il faut mettre un policier tous les 100 mètres. Or on oublie que la majorité des migrants n’arrivent pas illégalement en Europe et encore moins par la mer. La plupart viennent avec des documents en règle, comme étudiants, travailleurs saisonniers ou touristes et restent ensuite en situation irrégulière.

    Que faudrait-il faire ?

    Il faudrait d’abord plus de volonté politique. Aujourd’hui, on ne parle migrations ni au G8 ni au G20. La gestion ne se fait plus que par l’opinion, à coups de sondages. Or il faut ouvrir les frontières à plus de catégories de gens, car nous sommes dépendants démographiquement et économiquement de l’#immigration. Il faut permettre de voyager tant aux très qualifiés qu’aux peu qualifiés. Les pays ne disent jamais qu’ils ont besoin de ces derniers. Il faut aussi développer la #mobilité_pendulaire. Beaucoup de gens du Maghreb aspirent à ce genre de vie. Mais pour cela, il faut ouvrir l’accès aux titres de séjour de longue durée et à la double nationalité.

    Pourquoi y a-t-il toujours en Afrique cette envie d’émigrer ?

    Les gens qui partent sont issus de pays où l’âge médian est de 25 ans et où la population est de plus en plus scolarisée et urbaine. Mais elle n’a pas de #travail. Du coup, elle est branchée toute la journée sur la télévision, les téléphones portables, et n’a pas de sentiment d’avenir, y compris dans les Etats qui ne sont pas si pauvres.

    Il y a aussi un sentiment de « risque » permanent, environnemental, sanitaire ou politique. Au Maroc, plus de 50 % des jeunes veulent partir à l’étranger. Contrairement aux idées reçues, le développement n’est pas un facteur de stabilisation. Ce ne sont jamais les plus pauvres qui partent, sauf en cas de catastrophe.

    Comment une personne prend-elle la décision de partir ?

    Souvent, il s’agit d’un jeune qui habite la campagne. Il va d’abord à la ville. Il voit que ses amis ont accès à la monétarisation de l’économie. Cela lui crée des #besoins qu’il ne peut assouvir facilement : montre, ordinateur, téléphone, etc. Et très vite, il y a une dépendance à la #migration.

    Dans certaines régions, on sait que la migration crée la migration. Sur les 400 milliards de dollars (296 milliards d’euros) envoyés chaque année par les migrants dans leur pays d’origine, environ 15 % sont pour l’Afrique. Les familles sont très favorables au départ. Elles réunissent de l’argent, mettent en contact avec les passeurs. Depuis les années 1990, les gouvernements ont par ailleurs compris qu’ils avaient intérêt à laisser sortir les gens. Il est donc très facile d’aller chercher un passeport.

    La traversée de la #Méditerranée ne fait-elle toujours pas peur ?

    Non, il n’y a pas d’hésitations. En général, les #passeurs logent les migrants dans des baraquements en attendant que la mer soit bonne. La plupart des gens ont droit à trois tentatives. Il suffit qu’un seul réussisse pour que tous les autres pensent qu’ils ont leur chance. Beaucoup se disent : « Si je ne meurs pas en mer, je suis de toute façon mort chez moi. »

    Comment les #réseaux_de_passeurs se sont-ils construits ?

    On trouve parmi eux beaucoup de « ratés » du passage. Des gens qui ont échoué plusieurs fois. Ils ont pu être reconduits dans leur pays d’origine ou dans un pays par lequel ils avaient transité. Là ils sont devenus des spécialistes du voyage. Les passeurs peuvent aussi être en uniforme. Beaucoup de douaniers sont corrompus. Mais on trouve aussi beaucoup de #pêcheurs qui ont perdu leur travail et ont vu là une opportunité lucrative.

    Combien coûte une traversée de la Méditerranée ?

    Entre 3 000 et 4 000 euros. Cela peut être les réserves d’une famille entière. Cela coûte moins cher quand le passeur n’emmène pas la personne jusqu’en Europe et qu’elle s’arrête en route, pour travailler et gagner de l’argent. C’est ainsi que des pays comme la Tunisie, la Turquie ou la Mauritanie sont devenus malgré eux des pays d’immigration « sas », avec toute une population qui ne sait plus très bien si elle veut rester ou continuer la route. C’est dans ce contexte que le #Maroc a annoncé, il y a peu, une grande opération de régularisation.

    Quelles sont les principales routes migratoires du continent ?

    Pour l’Afrique de l’Ouest, il y a deux voies. La première passe par #Nouadhibou, en #Mauritanie. Ceux qui l’empruntent espèrent aller jusqu’au Maroc pour franchir la frontière de l’enclave espagnole de #Ceuta et #Melilla. L’autre voie passe plus à l’est, par le #Niger (#Agadez). De là, les migrants entrent en #Libye. Certains tentent de rejoindre l’île italienne de #Lampedusa, tandis que d’autres préfèrent faire le tour par la #Grèce.

    Pour l’Afrique de l’Est, les Somaliens, les Erythréens passent surtout par le #Soudan, qui est aussi un pays d’émigration, avant de gagner la Libye ou l’#Egypte. Enfin, il y a ceux qui se dirigent directement vers le #Yémen ou les #pays_du_Golfe.

    Ces routes ont-elles évolué récemment ?

    Oui, car elles sont de plus en plus contrôlées. Jusqu’au début des années 2000, l’un des principaux points de passage était le détroit de Gibraltar. Mais depuis l’arrivée de #Frontex et de #SIVE , cet endroit est devenu très verrouillé. Les gens ont donc rallongé leurs trajets. Les #Sénégalais, qui migraient avant vers l’#Espagne en passant par la #Mauritanie puis le Maroc, font désormais des milliers de kilomètres pour passer par les #îles_Canaries. L’autre voie de contournement est la #Turquie. Beaucoup de gens se concentrent désormais à #Istanbul avant de tenter leur chance. Cela fait de très longs voyages, de quelques mois à plusieurs années.

    Ce #verrouillage des frontières a-t-il modifié les migrations intra-africaines ?

    Non, pas particulièrement. L’Afrique a ses propres pôles migratoires où le facteur d’attractivité qui prévaut est le dynamisme économique. C’est le cas de l’Afrique du Sud, du Nigeria, du Maroc, et, plus récemment, de l’Angola. Ce sont des pays qui demandent beaucoup de main-d’oeuvre, notamment dans le tourisme, la construction ou l’agriculture. La seule chose qui a évolué, c’est que le Golfe est devenu la troisième zone de migration au monde. Beaucoup d’Africains s’y rendent. Il est relativement facile d’y accéder. Mais les droits y sont très peu protégés et il n’y a pas de possibilité de regroupement familial.

    Quel a été l’impact des « #printemps_arabes » ?

    Cela a engendré un pic, car des points de passage traditionnels comme #Zarzis, sur la côte tunisienne, n’étaient plus contrôlés comme du temps de Ben Ali. Pour autant, ceux qui sont partis avaient, pour la plupart, déjà le projet de migrer. Les « printemps arabes » n’ont pas donné envie de migrer à toute la population, au contraire. Ce qui a changé, en revanche, c’est la façon dont sont appliqués les #accords_bilatéraux que l’#Italie avait signés avec la Tunisie et la Libye. Il y a moins de zèle de la part des nouveaux régimes car ces accords sont mal vus par leurs opinions.

    Y a-t-il une évolution des profils des migrants ?

    Oui et non. Certains pays comme le Cameroun fournissent traditionnellement plutôt des élites. Le Sénégal et l’Egypte envoient, eux, plutôt des flux mixtes, tandis que le Mali et la Mauritanie laissent partir une main-d’oeuvre moins qualifiée. Mais il y a aussi de plus en plus de pays du Sahel ou de la Corne de l’Afrique qui sont des viviers de migrants. C’est en partie lié à l’évolution des transports, à la multiplication des réseaux de passeurs et aux conflits. L’autre nouveauté, c’est la #féminisation_des_flux et l’arrivée de #mineurs.

    Les vieux schémas migratoires de l’Afrique vers l’ancienne puissance coloniale sont-ils en train de changer ?

    En partie. Les flux traditionnels vers l’Europe continuent, mais les schémas migratoires se sont diversifiés pour aller, par exemple, vers des pays qui se découvrent riches, comme l’Angola. La carte des conflits a aussi beaucoup changé. Plus de 15 millions d’Africains se sont installés dans un autre pays du continent, en 2010, et un Africain sur deux migre aujourd’hui vers un pays qui n’est pas en Europe.

    http://www.lemonde.fr/societe/article/2013/11/27/pour-vraiment-controler-les-frontieres-il-faudrait-un-policier-tous-les-100-

    #migration #frontière #politique_migratoire #pêcheurs_tunisiens

  • Canada’s snubbing of asylum-seekers spurs human smuggling : Harvard study

    OTTAWA — A new Harvard Law School study paints a scathing portrait of Canada as a country that’s increasingly slamming its doors on asylum-seekers and thereby unwittingly contributing to the human smuggling crisis.

    http://www.ctvnews.ca/canada/canada-s-snubbing-of-asylum-seekers-spurs-human-smuggling-harvard-study-1.15

    #asile #réfugié #migration #Canada #passeurs #trafiquants

  • #Hein_de_Haas | Le #trafic de #migrants est la conséquence des #contrôles_migratoires… et non pas la cause

    Les politique qui visent à « combattre la #migration_illégale » sont vouées à l’échec car elles sont parmi les causes du phénomène qu’ils prétendent « combattre ». Il est troublant de voir comment les gouvernements utilisent des termes tels que « #combattre » et « #lutter » pour décrire leurs tentatives de #stopper les migrants et #réfugiés à arriver sur le territoire européen. Cependant, le vrai scandale réside dans le fait que les gouvernements et les agences de migration tels que #Frontex utilisent sans aucune honte ces tragédies pour augmenter les #dépenses permettant de « combattre la migration illégale », alors que ces mesures ne feront qu’augmenter la dépendance vis-à-vis des #passeurs, empêcher l’accès des réfugiés à une #protection et entrainer encore plus de #morts aux #frontières .

    http://www.asile.ch/vivre-ensemble/2013/11/12/hein-de-haas-le-trafic-de-migrants-est-la-consequence-des-controles-migratoire

    #migration #asile

  • Hein de Haas: Smuggling is a reaction to border controls, not the cause of migration

    http://heindehaas.blogspot.co.uk/2013/10/smuggling-is-reaction-to-border.html

    Signalé par Elisabeth Vallet

    Smuggling is a reaction to border controls, not the cause of migration
    The disaster of the sinking of a boat on 3 October off the coast of Lampedusa, which cost the life to hundreds of refugees and migrants, has already led to calls for a ’smuggling crackdown’ among governments and international organisations. Over the past decade, this has been the usual reaction when such tragedies happen on the southern coasts of Europe.

    However, such reasoning is turning the causality of things upside down. It is the border controls that have forced migrants to take more dangerous routes and that have made them more and more dependent on smugglers to cross borders. Smuggling is a reaction to border controls rather than a cause of migration in itself. Ironically, further toughening of border controls will therefore force migrants and refugees to take more risks and only increase their reliance on smugglers.

    #murs #frontières #méditerranée #europe #passeurs