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récoltes et semailles

  • Médiamétrie mesurera les audiences d’Amazon et Netflix, qu’ils le veuillent ou non
    https://www.lefigaro.fr/medias/mediametrie-mesurera-les-audiences-d-amazon-et-netflix-qu-ils-le-veuillent-

    Le patron de l’institut de mesure indépendante des audiences des télés, radio et sites internet, tape du poing sur la table. Et il prévient : « Sous deux ans, nous serons capables de mesurer les audiences des plateformes avec autant de précision que celles des télés et de les publier tous les jours, que les plateformes collaborent avec nous ou non ! »

    Yannick Carriou appelle donc les Amazon, Netflix et Disney+ à entamer les discussions pour instaurer cette mesure d’audience. Et même si ces dernières rechignent, elles seront bientôt obligées de faire preuve de transparence et de partager les données avec les annonceurs et les tiers chargés de la mesure d’audience par le Digital Market Act européen. Un autre texte européen, le Media Freedom Act, assurera le pluralisme entre les médias qui ont accès à la publicité ce qui conduira à une obligation de transparence pour une mesure d’audience auditable par des tiers. (…)

    Les annonceurs réclament cette évolution car ils investissent de plus en plus sur les différents médias, et ce d’autant plus que Netflix lancera bientôt son offre avec de la publicité. Enfin, les détenteurs de droits sportifs aussi veulent connaître l’exposition de leur sport sur les différentes plateformes.

    « Notre homologue britannique mesure déjà les audiences des plateformes et les premiers résultats sont surprenants. La consommation sur les plateformes n’est que de 30 minutes par jour contre 3 h 30 en télévision. Cela relativise la puissance des géants américains de la vidéo par abonnement. Ce n’est pas le tsunami annoncé, les médias traditionnels restent très dominants », glisse le PDG de Médiamétrie.

  • Vers une régulation des résolveurs DNS et des VPN au titre de la protection des droits d’auteur ? - Guillaume Champeau sur Twitter
    https://twitter.com/gchampeau/status/1567771476559892482

    Vers une régulation des résolveurs DNS et des VPN au titre de la protection des droits d’auteur ? Canal+ le réclame, la Commission européenne ne dit pas non. (via @ContexteNum)

    • Ils vont bloquer les VPN à la façon des chinois et des russes, mais ce sera pour la bonne cause.
      Puis ils vont nous interdire l’utilisation des résolveurs publics (Google, CloudFlare, Quad9)... et se rendant compte qu’on peut en installer des locaux, ils vont là aussi en empêcher le fonctionnement...
      Comme le dit @stephane sur Twitter, tout cela ne va pas aller dans le sens d’un réseau plus robuste.

    • in the name of maintaining freedoms and for the sake of the economy, but at what price?

      le marché libre et non faussé est un petit animal fragile qu’il faut aider à survivre, miskin

    • L’article scientifique duquel est tiré l’article devrait être celui-ci :
      Outside the Safe Operating Space of a New Planetary Boundary for Per- and Polyfluoroalkyl Substances (#PFAS)

      It is hypothesized that environmental contamination by per- and polyfluoroalkyl substances (PFAS) defines a separate planetary boundary and that this boundary has been exceeded. This hypothesis is tested by comparing the levels of four selected perfluoroalkyl acids (PFAAs) (i.e., perfluorooctanesulfonic acid (PFOS), perfluorooctanoic acid (PFOA), perfluorohexanesulfonic acid (PFHxS), and perfluorononanoic acid (PFNA)) in various global environmental media (i.e., rainwater, soils, and surface waters) with recently proposed guideline levels. On the basis of the four PFAAs considered, it is concluded that (1) levels of PFOA and PFOS in rainwater often greatly exceed US Environmental Protection Agency (EPA) Lifetime Drinking Water Health Advisory levels and the sum of the aforementioned four PFAAs (Σ4 PFAS) in rainwater is often above Danish drinking water limit values also based on Σ4 PFAS; (2) levels of PFOS in rainwater are often above Environmental Quality Standard for Inland European Union Surface Water; and (3) atmospheric deposition also leads to global soils being ubiquitously contaminated and to be often above proposed Dutch guideline values. It is, therefore, concluded that the global spread of these four PFAAs in the atmosphere has led to the planetary boundary for chemical pollution being exceeded. Levels of PFAAs in atmospheric deposition are especially poorly reversible because of the high persistence of PFAAs and their ability to continuously cycle in the hydrosphere, including on sea spray aerosols emitted from the oceans. Because of the poor reversibility of environmental exposure to PFAS and their associated effects, it is vitally important that PFAS uses and emissions are rapidly restricted.

      https://pubs.acs.org/doi/10.1021/acs.est.2c02765

      déjà signalé ici (par @kassem) :
      https://seenthis.net/messages/969610

      #eau_de_pluie #pluie #pollution #produits_chimiques #plastique #eau_potable #composés_perfluorés

  • François Bégaudeau : « Les élections ne relèvent pas de la politique »
    https://elucid.media/democratie/francois-begaudeau-les-elections-ne-relevent-pas-de-la-politique

    Ce qui frappe, dans cette séquence électorale, et à rebours des commentaires éternels sur le « coup de tonnerre », c’est la stabilité des forces en présence. Cette stabilité étant elle-même l’effet d’une donnée essentielle, et qui n’est pas une donnée électorale mais politique, c’est à dire sociale. Les trois blocs qui soi-disant « se dégagent » sont en fait formés depuis très longtemps. Seuls des faux-semblants comme l’existence d’un PS prétendument de gauche les masquaient, avant que la saine clarification produite par le macronisme les dissolve.

    Nous avons donc un bloc bourgeois libéral, invariablement vainqueur en République française, qui représente un quart des votants et 10 % de la population adulte. Un bloc libéral-national (Reconquête + RN), où se côtoient comiquement le pôle décadent de la bourgeoisie catholique réactionnaire, une bourgeoisie en voie de radicalisation néo-conservatrice, des segments du prolétariat blanc, une classe moyenne paupérisée, et les éternels « indépendants et artisans », dont la passion première est de se distinguer des forces sociales. Ces forces-là sont très stables depuis une cinquantaine d’années. Elles sont même pour une part la figuration contemporaine d’oppositions très anciennes. On voit ainsi perdurer la vieille opposition entre le prolétariat des villes, qui vote à gauche ou ne vote pas, et un prolétariat des campagnes (des « périphéries ») qui vote à droite comme la paysannerie votait contre les agitateurs socialistes de Paris sous le Second Empire.

    Ces dernières années, il n’y a pas eu effondrement de la gauche, simplement beaucoup de gens qui se prétendaient à gauche ont franchement épousé la cause du bloc bourgeois auquel ils ont toujours appartenu. En somme le bloc de gauche véritable n’a jamais été beaucoup plus volumineux dans le périmètre électoral qu’il ne l’est aujourd’hui. Il faut peut-être se faire à l’idée que le camp de l’émancipation n’a jamais été plus fourni qu’aujourd’hui, et ne le sera jamais. L’enjeu n’est donc pas d’être majoritaire, ce qui n’arrivera pas, mais d’être forts, ce qui n’est pas la même chose.

    • Une institution, c’est un énorme bloc de marbre. Ça ne se déplace qu’à la faveur d’une situation nouvelle propre à inverser le rapport de forces. Une élection n’est pas une situation. Ou si c’est une situation, elle a été configurée par les dominants, afin de consolider leur domination. Il n’y a rien à espérer d’un jeu dont les règles ont été établies par les adversaires. Les situations, il faut les créer, et en imposer les règles, règles propres à rebattre les cartes.

      Je ne dirai qu’une chose : créez des situations. Quel que soit leur échelle, leur périmètre, elles seront fécondes. Une situation ce peut être classiquement un conflit social ouvert par la colère des travailleurs devant une nouvelle exaction des propriétaires. Une situation ce peut être un collectif d’opposition à la construction de méga-bassines. Un livre aussi crée, à sa manière, une situation. Tout est bon à prendre, de ce qui perturbe le statu quo marchand, de ce qui casse la routine conservatrice.

      Les Gilets jaunes ont su créer une situation. Vous décrétez qu’un rond-point sera un lieu, non de passage, mais d’occupation, de discussion, d’amitié : vous fabriquez une situation. Au passage on aura remarqué que rien de ce mouvement ne s’est répercuté dans la bulle électorale qu’aujourd’hui on dégonfle comme on démonte un chapiteau - il n’en restera qu’un carré d’herbe aplati et dans l’air une vague odeur de crottin. Cette bulle est hermétique à la politique, et en plus elle la suspend. Nous sortons de six mois où les forces vives de la politique ont été comme paralysées, ou pour le moins marginalisées, par cette piteuse et vaine frénésie électorale. Six mois où les militants de l’écologie radicale, entre autres, n’ont pas pu se faire entendre, alors que la principale urgence sociale est là. Maintenant que tout ce cirque est fini, la politique peut recommencer.

    • En 2019, lors d’une émission sur France Culture, il revient sur le fait qu’il se soit abstenu lors du deuxième tour de l’élection présidentielle de 2017, affichant une position politique « anti-capital » (il déteste l’expression « anticapitaliste ») et « antifasciste ». Par ailleurs, lors de cette interview, il se montre critique envers la pratique électorale : « Le geste même de voter est un geste anti-politique. […] Avoir habitué des générations entières depuis deux cents ans, en France, à voter, a probablement beaucoup fait pour la dépolitisation, en tout cas la perte d’un certain nombre de réflexes de réelle citoyenneté ou de réelle activité politique. Le vote a donc une certaine toxicité insidieuse. »

      https://fr.wikipedia.org/wiki/François_Bégaudeau

      il a ptet quand même voté au 1er tour alors ? :-)

  • Chris Dixon thinks #web3 is the future of the internet — is it ? -
    https://www.theverge.com/23020727/decoder-chris-dixon-web3-crypto-a16z-vc-silicon-valley-investing-podcast-i
    via @baroug qui bosse sur les #NFT

    Yes, I know a lot of those people. I understand the argument. We just had Steve Aoki on the show. He is doing NFTs for exactly the reasons you described. Steve is a famous guy; he can just tweet, “I made an NFT,” and people will buy it. The unsigned musician — who is not making any money on Spotify — can go to one of your services if they hit scale, put an NFT up, and may still be in that long tail that does not make any money.

    It is early. I cannot prove a lot of these statements, but I am clearly betting on them. I think this is the chance to finally realize the “1,000 True Fans” visions. Kevin Kelly has a famous blog post from around 2002 where he mentions this great thing about the internet. For people like me, who were around for the first year of the internet, this was always the dream. You could now have someone who is into some kind of niche activity that most of the world does not love, but there are 1,000 people that really love it and are willing to patronize, buy books, and visit when there’s a talk.

    I believe that never happened in Web2. It did not happen because of the nature of the business models. They are very extractive — Facebook is well-known for this — and they will deliberately let you build a big organic reach, then change the algorithm to lower your reach and make you pay to get back there. They are incredibly sophisticated money extraction machines. This is why they are so profitable and so successful.

    (faudrait que je lise tout mais bon)

    • deux passages marrants sur les nft et leur vanité :

      Why do people value wearing fashion — like Supreme T-shirts — or cars? A lot of value in the world is about showing that you are early to something, that you are high-status, and that you have great taste.
      NFT culture is very familiar in the offline world, just applied to the online world.

      Why do you buy the wolf cloak in League of Legends? It’s high status, it’s funny, or it’s cool. You know that in those games, everything is cosmetic. To me, NFTs are very similar.

  • Origine du Covid-19 : « Sans informations précises sur ce qui se passait dans le laboratoire de Wuhan, on n’avancera pas ! » | Pour la Science
    https://www.pourlascience.fr/sd/epidemiologie/origine-du-covid-19-sans-informations-precises-sur-ce-qui-se-passait-d


    Le SARS-CoV-2, responsable de la pandémie de Covid-19.
    © NIAID

    Depuis fin 2019, le monde est confronté à la pandémie de #Covid-19. On la doit à un coronavirus, le #SARS-CoV-2, dont l’origine reste mal connue malgré les efforts déployés. Plusieurs hypothèses sont en lice, et toutes sont, à ce jour, plausibles, nous explique le virologue Étienne Decroly.

    très intéressante synthèse sur ce que l’on sait et ce que l’on ne sait pas sur l’origine du SARS-CoV-2

    en accès libre
    en version papier dans le numéro de juin de Pour la Science (où il manque la dernière question et sa réponse, ainsi que les deux dernières phrases de la réponse précédente… peut-être d’autres choses ailleurs, mais c’est moins facile à repérer)

    #must_read !

  • François Bégaudeau : « Mépriser le mépris » (Socialter, 10/03/2022) https://www.socialter.fr/article/francois-begaudeau-mepriser-le-mepris

    On entend beaucoup parler de mépris de classe, ces temps-ci. On pourrait s’en féliciter, songeant que ce succès verbal participe du retour en force, après des décennies de placard, de la catégorie de classes et de la lecture du réel qu’elle outille. Or, dans ce réjouissant tableau d’une pensée sociale réhabilitée, quelque chose fait tiquer. Le succès, justement. Succès veut dire nombre, et dans le nombre il y a de tout. Le nombre est une auberge espagnole où l’on ne croise pas que des amis. Parmi les fieffés rebelles qui dénoncent le mépris de classe, certains n’ont pas du tout la réputation de croire que les classes structurent la société, et encore moins qu’elles sont le moteur de l’histoire, comme aurait dit Marx qu’ils abhorrent. On pense par exemple à cet essai récent s’émouvant du mépris dont les énarques ont jadis couvert le pauvre Sarkozy, qui a grandi dans un ruisseau de Neuilly, et le malheureux François Pinault parti sans rien de sa Bretagne natale comme Bécassine. Ces passages poignants ne sont pas surprenants dans un livre par ailleurs très remonté contre l’égalitarisme et les privilèges des fonctionnaires. Ils doivent être vus comme parfaitement ajustés à la démonstration libérale d’ensemble. À travers eux on réalise que dans « mépris de classe », « mépris » occulte « classe ».

    Gros dossier que le mépris. Zone affective trouble et subtile. Le mépris est plus subtil que la haine. Le mépris infériorise son objet, alors que la haine est toujours un hommage. Le mépris se nourrit du sentiment que l’individu méprisé s’infériorise lui-même. Dans le film nommé Le Mépris (1963), Paul-Piccoli, scénariste, s’est mis lui-même plus bas que terre en se couchant devant un producteur. Dès lors, Camille-Bardot, sa compagne, le regarde de haut. Puis ne le regarde plus. Pour elle, il n’existe plus. Si tu es chômeur et que tu ne cherches pas de travail, c’est parce que tu te complais dans le chômage alors qu’il suffit de « traverser la rue » pour trouver du boulot. Tu ne crois pas en toi, tu as une piètre estime de toi. Regarde-toi, avec ton survêt. Tu te négliges tellement que tu n’as même pas envie de porter une veste. Comment voudrais-­tu qu’on te regarde, alors que tu te planques ? Dès lors, dans une gare, tu fais partie des gens qu’on ne voit pas. Tu n’existes pas.

    Mais le parallèle entre Emmanuel Macron et Brigitte Bardot s’arrête là, en dépit de leur criante ressemblance physique. Si, à leurs yeux, Paul et le chômeur ont perdu toute valeur, ce n’est pas dans le même sens. Pour Brigitte, son amant perd sa valeur parce qu’il n’est plus vaillant. Pour Emmanuel, n’avoir aucune valeur signifie n’avoir aucune valeur sur le marché. Le boutiquier qu’il demeure rabat la valeur sur la valeur marchande. Les chômeurs ne sont rien au sens où ils comptent pour zéro dans la richesse nationale. Loin de rapporter, ils coûtent – « un pognon de dingue ». Ce qui est tout à fait vrai. 

    Malaise français
    Il ne s’agit donc pas de mépris. La formule macronienne emblématique du mépris de classe n’en procède pas. Parlant « des gens qui ne sont rien », Macron expose un fait objectif pour lui et les start-uppers qui l’écoutent religieusement. Ce n’est pas un jugement, c’est une donnée. Cela ne révèle pas la psychologie de ces winners, mais leur représentation de la société. Ce n’est pas de la psychologie, c’est de l’idéologie. Ce n’est pas du mépris de classe, c’est un point de vue de classe ; la sécrétion idéologique d’une position de classe. Le mépris relève de ce lexique médico-psychologique qui infuse aujourd’hui tous les discours et joue un grand rôle dans la dépolitisation générale. L’agora dépolitisée dit qu’une société est malade plutôt qu’injuste ; que la société doit être réparée plutôt que subvertie. C’est en bon conservateur que Marcel Gauchet parle du « malaise français ». La France fait un malaise, appelons le Samu, réanimons-la par massage cardiaque, gardons-la trois jours en observation chambre 232 et la voilà requinquée. Car la France, n’est-ce pas, est résiliente.

    Si le problème est psychologique, il n’est pas social. Si le problème est le mépris de classe, le problème n’est plus la classe mais le mépris. Si on demande juste à Macron de s’amender du mépris qui suinte de son visage glabre, il peut à loisir continuer à arroser de cadeaux le grand capital. Retirez les quelques saillies méprisantes de son quinquennat et le bilan est globalement positif. Que le riche renonce à sa morgue et nous lui laisserons ses privilèges. Est-ce seulement cela que nous voulons ? Que ces gens ravalent leur mépris ? Qu’ils acquiescent en silence quand on leur fait part de doléances ? Qu’ils prennent un air d’écoute attentive ? Qu’ils affectent l’empathie ? La flat tax, on a admis ; la « réforme nécessaire » de l’assurance-chômage, on admettra, mais de Macron on ne peut plus supporter l’absence d’empathie. Alors que sa femme, l’autre Brigitte, en a des kilos à revendre. Hier encore elle répondait personnellement à la lettre d’une jeune myopathe. Emmanuel, lui, ne répondrait même pas à un dyslexique. Moyennant quoi on se demande si en avril on ne va pas lui préférer Valérie Pécresse, femme et donc empathique.

    Ces gens qui n’existent pas
    Psychologiser la politique, c’est l’individualiser. Indivi­dualiser la politique, c’est se déshabituer à penser politiquement et donc socialement les situations. Macron ne souffre pas d’un déficit d’empathie envers les pauvres, il n’est juste pas en position d’exercer cette empathie. Être sensible à la vie d’un individu suppose qu’on soit en contact avec lui. Fils de médecin, passé directement d’un lycée jésuite de province à un lycée d’excellence parisien, puis de l’ENA aux cabinets ministériels en passant par la banque sous Cloche, Macron n’a jamais été en présence d’un prolo. Il ne saurait être plus sensible au sort des précaires que je ne le suis à son lyrisme de banquet militaire. Pour lui, les gens qui n’existent pas n’existent vraiment pas, ils n’ont pas de réalité tangible. Son défaut n’est pas le mépris mais la classe. Et la place qu’elle lui fait occuper. Et l’étroit point de vue sur le monde auquel elle le contraint. Une malencontreuse distraction au moment de l’acquisition a fait que la maison du Touquet a vue sur la mer et non sur une usine.

    Et quand bien même ce mépris existerait, est-ce vraiment un problème, est-ce vraiment le problème ? Si une telle pente psychologique est repérable chez les dominants, mérite-t-elle notre attention, notre indignation ? De quoi souffre le prolétaire : d’essuyer le mépris de classe ou de subir l’oppression de classe ? S’il était donné à une femme de ménage de choisir entre quatre heures de moins par jour sans baisse de salaire et un bonjour poli du DG de la boîte qu’elle croise à 9 h 15 en sortant du bureau qu’elle vient de nettoyer, elle choisirait quoi ? Peut-être que je minimise l’humiliation du mépris social, et que je la minimise parce que mon sillon petit-­bourgeois me l’a épargnée. Peut-être que je serais moins désinvolte sur le sujet si un regard condescendant de patron me laissait une blessure aussi vive que le sourire de Magalie Barrault pour décliner mon invitation à danser un slow au bal du 14 Juillet 1986. Il n’empêche que notre perfectionnement politico-esthétique passe par l’indifférence au mépris des hautes classes. Nous gagnerons à le mépriser, au sens où un individu noble d’âme méprise les honneurs. Nous gagnerons à trouver ce mépris flatteur, étant entendu qu’il n’est rien de plus gratifiant que le mépris d’un méprisable.

  • Au « Canard enchaîné », une cellule syndicale jette un pavé dans la mare (Le Monde, 26/04/2022) https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/04/26/au-canard-enchaine-une-cellule-syndicale-jette-un-pave-dans-la-mare_6123782_

    (…) « Crime de lèse-majesté »

    Si l’entreprise était dans l’obligation légale de se doter d’un CSE depuis le 1er janvier 2018, rien ne laissait présager l’apparition d’une section syndicale. « La direction vit cette cellule comme une déclaration de guerre, assure l’un des nouveaux syndiqués. On dirait qu’on a commis un crime de lèse-majesté. »

    Non seulement elle heurterait la culture d’indépendance du Volatile envers toute obédience, mais l’étiquette choisie par les encartés a du mal à passer. « Le SNJ-CGT, ça nous rapproche du Syndicat du livre, c’est sympa », ironise, aigre-doux, le président des Editions Maréchal, Michel Gaillard. Le SNJ-CGT a beau n’avoir rien à voir avec le syndicat historique des ouvriers de la presse (contrairement à Info’com-CGT et le SGLCE), réputé pour ses coups de force, son existence fait l’effet d’un chiffon rouge au 173, rue Saint-Honoré, dans le 1er arrondissement parisien.

    Le pas a été franchi fin 2021. Un jour, dans la foulée d’une conférence de rédaction, un rédacteur et un directeur se sont volé dans les plumes avec plus de vivacité que d’habitude. Un poing a été levé – qui n’est, heureusement, retombé sur personne. Au cours de la même période, deux salariées « n’ont pas apprécié d’être traitées avec un peu de rudesse », raconte l’un de leurs confrères. « Nous les vieux, on a le cuir épais, décrypte-t-il, en référence au ton souvent « rugueux » des échanges entre les plumitifs. Mais il faut arrêter, et changer cette façon de s’adresser au personnel. »

    Au Canard pourtant, « tout le monde s’entend plutôt bien, il y fait bon et chaud », décrit l’un de ceux qui ont pris leur carte. « Il y a un côté familial », confirme Hervé Liffran, arrivé dans la maison il y a plus de trente ans. « Peut-être trop familial, trop paternaliste, comme cela se passe dans des boîtes à petit effectif », reconnaît Jean-François Julliard, l’un des deux rédacteurs en chef avec Erik Emptaz.

    (…) « Avec la cellule syndicale, on assiste à l’apparition d’un contre-pouvoir au Canard, donc à un tournant de son histoire », assure l’un de ses membres. « Si Le Canard arrive à un tournant, c’est parce qu’une génération s’apprête à partir », rétorquent les non-syndiqués.

    Entré au journal en 1972, administrateur délégué depuis 1991 et directeur de la publication depuis 2017, Nicolas Brimo, 71 ans, prévoit en effet de raccrocher la plume d’ici « un, deux ou trois ans ». Même horizon du côté de son prédécesseur et alter ego, Michel Gaillard, entré en 1966, membre du conseil d’administration depuis 1976, nommé directeur en 1992, puis président en 2017. « Je pense beaucoup, depuis longtemps, à mon départ », assure le vrai-faux retraité de 77 ans. Depuis décembre 2021, il s’interroge : pourquoi les protestataires ne sont-ils pas venus discuter avec lui dans son bureau, plutôt que lui opposer des instances ?

  • Ça fait toujours bizarre de lire le jeudi dans la bouche d’un député une partie des propos entendus le mardi en conférence de rédaction (moins l’enthousiasme, puisque la défaite était annoncée).

    https://www.monde-diplomatique.fr/audio/Podcast_diplo/2022-01-Episode_22.mp3

    Sur les limites de la stratégie « Terra Nova » qui cible la jeunesse progressiste de centre-ville et les quartiers populaires plutôt que la France des bourgs, la France Périphérique, François Ruffin : « Jusqu’ici, nous ne parvenons pas à muer en espoir la colère des “fâchés pas fachos” » https://www.liberation.fr/politique/francois-ruffin-jusquici-nous-ne-parvenons-pas-a-muer-en-espoir-la-colere

    Dimanche soir, à la tombée des résultats et l’élimination, malgré les 21,95 %, de Jean-Luc Mélenchon, quel a été votre premier sentiment ?

    D’abord de la fierté, la fierté du chemin parcouru. Je me suis dit : l’histoire continue, le fil n’est pas rompu. Parce que, sans Jean-Luc Mélenchon, sans nous avec lui, après les années Hollande, après sa créature Macron, la gauche pourrait être liquidée, enterrée. Nous avons ramassé un drapeau en guenille, et regardez maintenant comme il brille. C’est cette fierté que j’ai éprouvée pendant toute la campagne, avec des milliers de personnes dans les meetings, des dizaines de milliers dans les marches : nous sommes là, debout. L’espoir demeure. En même temps, ce dimanche à 20 h 01, c’est « caramba, encore raté ! » Je ne veux pas qu’on devienne des perdants magnifiques. L’équipe de France de mon enfance, celle de Platini, Giresse, Tigana et compagnie, elle était pleine de panache, comme nous, elle faisait les plus beaux matchs, comme nous, mais à la Coupe du monde de 82, à celle de 86, deux fois elle échoue en demi-finale, et deux fois contre l’Allemagne. Quand est-ce qu’on va jouer la finale ? Quand est-ce qu’on va l’emporter ?

    Comment jugez-vous la campagne de Jean-Luc Mélenchon ?

    Notre campagne, je l’ai trouvée joyeuse, un peu à contre-courant de l’époque. Parce qu’après deux années de Covid, avec la guerre en Ukraine, ils nous veulent comment ? Abattus, déprimés, résignés, « restez chez vous », etc. Contre ça, Jean-Luc est parvenu à apporter de l’énergie. C’est un peu notre Johnny, qui vient redonner « l’envie d’avoir envie ».

    Lorsqu’on observe les cartes, on voit que Mélenchon est fort dans les grandes villes et les quartiers populaires. Mais beaucoup moins dans la France périphérique.

    Au fond, ça montre l’efficacité de la campagne. Parce que Jean-Luc s’adresse aux Outre-mer, il s’y rend plusieurs fois, et il est élu président de la Guadeloupe, de la Réunion, au premier tour ! Jean-Luc veut la jeunesse progressiste de centre-ville, celle des marches pour le climat, il met le paquet, et il les emporte largement avec lui. Jean-Luc veut les quartiers populaires, il se pose comme l’anti-Zemmour, et la gauche retrouve droit de cité dans les cités. Finalement, tous les paris de la campagne sont gagnés. La France périphérique, en revanche, celle des bourgs, n’apparaît pas comme une priorité. Et quand on regarde les statistiques issues des urnes, c’est là-dedans qu’on plonge : le vote Mélenchon fait 24 % en agglomération parisienne [+8 points comparé à 2017, ndlr]. Mais c’est 14 % dans les communes entre 20 000 et 100 000 habitants [-7 points]. Un coup d’œil à une carte du pays suffit : pour La France insoumise, une zone rouge autour de Paris. Le bleu foncé de Le Pen, en revanche, s’étend sur tout le Nord, le Pas-de-Calais, la Picardie, la Champagne, la Lorraine, 42 départements, et pour beaucoup des terres ouvrières. C’est là qu’on perd. Au-delà même de la gauche, ça pose une question sur l’unité du pays, ces fractures politico-géographiques : comment on vit ensemble ? Comment on fait nation, sans se déchirer ?

    Le tableau est comment dans votre circonscription ?

    Il offre quasiment un cas chimiquement pur. Sur Amiens, Mélenchon devance Macron, presque à égalité : le président domine dans le centre-ville, mais on cartonne dans les quartiers populaires, avec plus de 60 %. Sauf que, dès que tu t’éloignes de la métropole, à Flixecourt par exemple, qui est ouvrier pourtant, c’est la cata : Jean-Luc plonge à 15 %, Marine Le Pen grimpe à 44 %. Je le pensais déjà en 2017, je le disais : si on veut gagner, on doit aller chercher cette France-là. Le mouvement des gilets jaunes en a montré l’importance politique, il a rendu visible, audible, cette France si longtemps muette. Et à ma mesure, durant la présidentielle, je me suis efforcé de parler à ces périphéries, avec des réunions publiques à Carbonne, à Rochefort, à Epinal… mettant en avant des caristes, des auxiliaires de vie, des salariés de la sous-traitance. Mais à l’évidence, jusqu’ici, les « fâchés pas fachos » ne se tournent pas vers nous. Nous ne parvenons pas à muer leur colère en espoir.

    Mais Jean-Luc Mélenchon s’est adressé à eux ces dernières semaines…

    Ça réclame un travail de longue haleine. Pour les quartiers populaires, ça fait des mois, voire des années, qu’on leur parle, avec des thématiques où ils se reconnaissent, parfois clivantes, comme la police par exemple. Les campagnes populaires exigent le même effort, et en vérité, peut-être dix fois plus d’efforts, pour dix fois moins de rendement, parce que l’habitat y est éclaté, parce qu’un vote Le Pen s’y est ancré. C’est pour moi un objectif électoral, mais aussi moral : on ne peut pas les abandonner au Rassemblement national. On ne peut pas, par une ruse de l’histoire, laisser triompher la logique de « Terra Nova ». Je ne sais pas si vous vous souvenez ? En 2011, ce think tank proche du Parti socialiste recommandait une stratégie « France de demain », avec « 1. Les diplômés. 2. Les jeunes. 3. Les minorités ». Tandis que, pour les ouvriers-employés : « Le FN se pose en parti des classes populaires, et il sera difficile à contrer. » Sous-entendu, inutile même d’essayer. Nous devons, nous, essayer. C’est un impératif.

    Comment faire pour les convaincre ?

    D’abord, il faut en faire un objectif commun : est-ce que cette analyse, est-ce que ce constat est partagé ? Est-ce qu’on se dit, l’Union populaire, ce sont les quartiers populaires – qu’il faut garder – et les campagnes populaires – qu’il faut conquérir ? On doit d’abord le poser comme une priorité, ensemble. Sinon, il n’y a pas de stratégie possible. Ensuite, je pense qu’il faut écouter les gens, faire quasiment du recueil des doléances. On ne fait pas de politique en extériorité, sans porosité. Et peut-être que des thèmes inattendus surgiront. Je te donne un exemple : le numérique. Les candidats ne s’en sont pas saisis dans la campagne. Et pourtant, quand je fais mon boulot de reporter, on me cause de ça, spontanément, dans les bistrots, dans les mairies : à la CAF, à Pôle Emploi, aux impôts, il n’y a plus de guichets. Les gens doivent passer des heures à enregistrer des mots de passe sur Internet, à scanner leurs documents. Faire son dossier de retraite, avec la Carsat, c’est devenu la croix et la bannière. C’est ressenti comme une douleur par les habitants, ça les met dans un sentiment d’impuissance.

    Cette impuissance donne quoi concrètement ?

    Je vais utiliser des grands mots pour de petites expériences, mais je crois que pour eux, c’est la République qui s’éloigne, ça les met dans une souffrance anthropologique : ils n’échangent plus en humains avec des humains, mais avec des machines. Quand j’en parle dans mes meetings, aussitôt je suis applaudi. Parce que chacun a éprouvé la solitude du « tapez 1 », « appuyez sur la touche étoile ». Remettre des agents pour les gens, comment on fait un numérique humaniste, c’est une question à porter. Une parmi d’autres. Les déplacements, bien sûr. La valeur du travail. Leurs loisirs, à ne pas juger. Mais il y a un style, aussi, peut-être, au-delà des idées. Dans une étude, je lisais que les travailleurs de la seconde ligne ne se sentaient pas représentés. Peut-être que, en plus des mesures – le smic à 1 400 €, la retraite à 60 ans, le blocage des prix –, peut-être qu’on doit davantage les incarner, qu’ils sentent qu’on connaît leur vie, leurs conditions concrètes d’existence, qu’on sache en parler, que les candidats soient à leurs côtés, parmi eux.

    Faire comme Ruffin, en somme.

    Donc, pour être majoritaire, il faudrait unir dans le même bloc les quartiers populaires et les campagnes populaires ?

    Le débat est construit, évidemment, pour casser le bloc populaire. Entre jeunes et vieux, entre travailleurs et assistés, entre blancs, Arabes, noirs, et maintenant, même, entre vaccinés et non vaccinés. Ma conviction, mon pari, depuis vingt ans maintenant, c’est que la question sociale peut rassembler. Juste une anecdote. Durant mon mandat, la secrétaire d’Etat aux personnes handicapées, Sophie Cluzel, vient à Amiens. J’insiste, très fort, pour qu’elle rencontre des accompagnantes d’enfants en situation de handicap, et la préfecture accepte. On passe une belle heure d’échanges, et comme je connais par cœur, je me mets en écoute flottante. Je roupille à moitié, quoi. Et là, je me dis : ici, il y a Aline, Sandy, Hayat, Assia. Rien que par les prénoms, on perçoit les origines différentes. Ça fait un moment qu’elles causent, ça fait un an que je les filme, à aucun moment elles n’ont discuté de la nourriture à la cantine, de la taille de leurs vêtements, de leurs prénoms français ou pas. Non, elles ont discuté de leur travail, de comment elles peuvent gagner leur vie, de comment apporter un soutien aux enfants. C’est une parabole, à mon avis. Voilà ce qui les rassemble.

    C’est la stratégie à avoir aux législatives pour gagner un maximum de circonscriptions ?

    Franchement, je ne crois pas qu’une telle logique, inscrite dans le paysage, s’inverse en six semaines de campagne. Vraisemblablement, la France insoumise va se renforcer là où elle est déjà forte : dans l’ancienne banlieue rouge, dans les quartiers populaires des métropoles. C’est après qu’il faudra choisir : que vise-t-on ? Des bastions ? Ou se répandre dans les profondeurs du pays ?

    (…)

    • À 10’ du reportage sur la campagne de Ruffin à Flixecourt, ce dernier dit « L’union populaire et Jean-Luc, ils [sic]… » : « Y a pas eu de volonté de regagner la France des ronds-points, la France des gilets jaunes, parce que je pense que dans leur esprit c’était un pari qui était gagnant en plusieurs semaines, en plusieurs mois » https://la-bas.org/la-bas-magazine/reportages/qui-l-eut-cru-la-nouvelle-vraie-gauche-arrive-deja-ruffin-repart-pour-un-tou https://la-bas.org/audio.api/free/aW5sYnM6Ly9mb2xkZXItNDI0MTkvbXAzLTQ3Ni81MzEzMC1wYWRfcmVwb3J0YWdlX2ZsaXhlY291cnRfMl8tX2ludGVncmFsZS5tcDM=/53130-pad_reportage_flixecourt_2_-_integrale.mp3

    • Bompard chez Regards http://www.regards.fr/actu/article/manuel-bompard-une-force-d-alternative-prete-a-gouverner-demain

      Fabien Roussel refuse d’être assimilé à la gauche des métropoles. Il rejoint en partie François Ruffin lorsqu’il dit : « On ne doit pas devenir la gauche des métropoles contre la droite et l’extrême droite des bourgs et des champs. » Est-ce la gauche qui a rompu avec les catégories populaires, ou les catégories populaires qui ont rompu avec la gauche ?
      S’il y a eu une rupture entre la gauche et les catégories populaires, c’est d’abord parce que sa dernière expérience au pouvoir a été vécue comme une trahison. Depuis lors, notre travail a plutôt permis de renouer des liens entre le peuple et la gauche. Jean-Luc Mélenchon est le premier candidat dans les villes les plus pauvres. Il est le candidat des jeunes, des chômeurs, des précaires, et fait des scores plus importants que la moyenne chez les ouvriers et les employés. Pour voir plus loin, il faut commencer par saluer ce bilan et ne pas se tromper sur l’analyse. Quand nous remportons trois circonscriptions en Haute-Vienne, deux en Dordogne, ou encore celle du département de la Creuse, il n’est pas question de métropoles… Et quand l’extrême droite remporte la circonscription des 13e et 14e arrondissements de Marseille, il n’y a pas beaucoup de bourgs et de champs sur ce territoire… La lecture géographique est une vue de l’esprit, qui fait abstraction de l’histoire politique des territoires, de leurs structures sociales comme du travail militant qui y est mené. Oui, le Rassemblement national progresse, et il progresse malheureusement partout. Certains territoires y sont davantage perméables par leur histoire et leur sociologie. Il faut donc le combattre partout. Mais si certains pensent que, pour y parvenir, il faut abandonner les banlieues populaires et renoncer à la dénonciation du racisme ou de l’islamophobie, alors nous avons un désaccord fondamental.

      Le PCF pense que la gauche s’est perdue en menant des combats qu’il juge légitimes – lutte contre les discriminations et les violences policières, féminisme, etc. –, mais au détriment du social…
      Je suis convaincu que ce que vous décrivez ici n’est pas l’orientation du PCF, dont de nombreux militants s’investissent dans ces combats. Mais c’est en effet ce que semble penser Fabien Roussel… Cela me paraît être un contresens total : la bataille pour l’égalité des conditions de vie ne peut pas être déconnectée de celle pour l’égalité de tous, quels que soient son genre, sa couleur de peau, sa religion ou son orientation sexuelle. Ce serait une grave erreur : la gauche n’a rien à gagner à mimer le Rassemblement national ou à masquer certaines batailles pour lui complaire. On ne gagne jamais sur le terrain des autres. Nous nous adressons à tous et nous disons : ces tentatives de division agissent comme des diversions. Le RN cherche à faire vibrer la corde identitaire. Nous voulons faire vibrer la corde sociale et convaincre que le problème, c’est celui de ceux qui se gavent !

    • François Ruffin : « La gauche doit être le camp du travail » | L’Humanité 07/09/2022 https://www.humanite.fr/politique/francois-ruffin/francois-ruffin-la-gauche-doit-etre-le-camp-du-travail-762479

      Comme point de départ de votre livre, vous avez choisi cette phrase que vous avez entendue de la bouche de plusieurs citoyens : « Je ne peux pas voter à gauche, je suis pour le travail. » Pourquoi vous fait-elle bondir ?

      Parce que la gauche, c’est le travail. Son histoire et celle du mouvement ouvrier le montrent. Mais chez nombre de gens ordinaires, beaucoup de ceux avec qui j’ai échangé, s’est ancrée l’idée que « la droite c’est le travail, la gauche c’est l’assistanat ». La droite a réussi à récupérer ce qu’ils appellent la « valeur travail », depuis Nicolas Sarkozy jusqu’à Emmanuel Macron. Ils célèbrent le travail pour mieux le malmener, avec l’idée qu’il faut travailler plus, tout en écrasant les salaires. Par ailleurs, pendant les campagnes, le principal obstacle que nous avons eu, ce n’est pas sur l’immigration ou la sécurité mais sur l’argument « moi je bosse et je n’ai le droit à rien, alors que d’autres touchent des aides » . Je ne veux pas qu’on ferme les yeux sur ce ressenti massif. Selon moi, il faut montrer qui sont les vrais assistés, les hyper-riches. Nous avons le devoir, à gauche, de reposer en permanence ce rapport capital-travail. Un clivage dans lequel nous serions dans le camp du travail et des travailleurs.

      Les élus et militants de gauche n’ont pas pour autant abandonné la défense des travailleurs…
      Non, d’ailleurs, dans nos programmes, beaucoup de mesures répondent en partie aux problèmes des salaires, de précarité des contrats, de pénibilité… Mais nous devons nous demander ce qu’il faut mettre en avant, ce qui convainc, rassemble. Je pense par exemple que la gauche ne porte pas assez la fierté du travail. De la même manière qu’elle avait héroïsé les métallos ou les mineurs dans l’après-guerre, dans la période post-Covid, on aurait pu héroïser le cariste, l’auxiliaire de vie sociale. On a un devoir de représentation. Il faut que les gens se disent « c’est eux qui parlent pour nous ». Ça veut dire aussi connaître leurs conditions concrètes d’existence, pour les transformer et que nos propositions trouvent un vrai écho.

      Vous faites dans votre livre un état des lieux des mutations du monde du travail, avec des salaires qui n’augmentent pas, des contrats précaires qui se multiplient, les pressions mises sur les travailleurs… Quelles réponses politiques peuvent être apportées ?
      La question est de savoir si on laisse la main invisible du marché tout régler. Or, elle produit l’écrasement du travail dans la durée. Cela a des effets individuels, avec un sentiment d’injustice pour les travailleurs, et collectifs, avec une désorganisation de la société. Aujourd’hui, nous manquons d’AESH dans les écoles, d’auxiliaires de vie sociale : parce que les gens sont fainéants ou parce qu’ils ne veulent pas travailler pour 700 euros par mois ? La République s’est fondée sur l’école mais on ne trouve plus d’enseignants et on recrute en job dating. Il faut refixer des règles communes sur le marché du travail. Sur les salaires, les conditions de travail, les contrats. Pour que le CDI soit la norme, par exemple, il faut régulariser les intérimaires qui en réalité ont des postes permanents, et décourager le recours aux autres contrats. Un contrat en CDD doit être payé plus cher, comme les heures tôt le matin ou tard le soir.

      Votre livre se conclut par l’idée de bâtir un « nouvel horizon commun », qui serait celui de l’impératif écologique. Quelles en seraient les conséquences pour le travail et les travailleurs ?
      Il nous faut passer du « vivre-ensemble », un peu stagnant, gnan-gnan, au « faire ensemble ». Et faire ensemble face au grand défi climatique, qui réclame beaucoup de travail, qui exige que chacun fasse sa part, trouve une utilité dans cette transformation. Encore une fois, ce n’est pas le marché qui va organiser la rénovation thermique, planter des haies, remettre en état les canalisations d’eau, créer des ateliers de réparation dans chaque canton, pour échapper au cycle de la production de consommation… L’État doit donc définir un certain nombre de besoins auxquels on sait que le marché ne va pas répondre. Puis diriger et canaliser les énergies, les moyens, les savoir-faire. C’est aussi un pari humaniste. Il faudrait presque recenser toutes les compétences qui sont aujourd’hui à notre disposition mais qui sont en déshérence, une richesse humaine qui peut exister dans les quartiers ou dans les campagnes et qui est délaissée. Qui sait bricoler, qui sait réparer, qui sait cuisiner ? Toutes ces compétences doivent pouvoir être utiles à la société. C’est aussi un moyen de créer de la dignité par le travail, ce qui est essentiel.

  • Pendant ce temps, au Chili ...

    La Convention constitutionnelle tente de renforcer les droits de la nature face aux intérêts privés. Carolina Vilches, géographe et militante pour le droit à l’eau, siège dans la commission sur l’environnement. Elle explique les résistances qu’elle rencontre.

    par Mathieu Dejean / Mediapart

    Nous travaillons de la manière la plus ouverte possible, en essayant d’articuler les forces politiques et les mouvements sociaux qui cohabitent dans la Convention. C’est important de comprendre que ce processus est inédit. Nous avons réussi à faire en sorte que les mouvements sociaux débattent à égalité avec les partis politiques, et ça prend du temps, car ils n’avaient jamais eu d’espace de discussion pour arriver au consensus auparavant. Cette Convention est pensée pour qu’aucune force ne puisse s’imposer aux autres. C’est pourquoi il faut un quorum très majoritaire [des deux tiers de l’assemblée plénière – ndlr] pour valider une norme. La possibilité de reconstruire les normes tous ensemble permet d’arriver au consensus.
    [...]
    De manière générale, les médias de masse ont été très superficiels et confus. Les discours qu’ils ont tenus sur la validation des normes correspondent à une construction erronée de ce qui se passe en réalité. Par exemple, quand la commission parlait de mettre en place des autorisations pour l’usage de l’eau, les médias disaient que la Convention voulait exproprier les petits paysans et priver l’agriculture familiale paysanne d’accès à l’eau. En cela, ils ne faisaient que répéter les mots du patronat.
    [...]

    La nouvelle Constitution doit être approuvée le 4 septembre. N’est-ce pas court comme délai, pour un travail aussi ambitieux ?

    Sans doute, le délai est court. Les temps de la Convention sont dignes de marathons. Le 5 juillet, le brouillon de la Convention doit être entre les mains du président du Chili. Mais même si c’est court, nous sommes 154 – moins une trentaine – déterminés à mettre toutes nos connaissances et nos compétences pour respecter les délais et remplir le mandat populaire confié par les communautés à travers le Chili.

    L’arrivée de Gabriel Boric au pouvoir, et celle de Maisa Rojas au ministère de l’environnement, ont-ils changé quelque chose pour vous ?

    Je pense qu’il est encore trop tôt pour évaluer les changements provoqués par l’arrivée de Boric. La Convention est un organe autonome. C’est une conquête du peuple chilien. Et pas nécessairement d’une administration gouvernementale, même si, en l’occurrence, nous savons que nous pouvons compter sur le soutien de celle-ci.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/120422/le-difficile-chemin-du-chili-vers-une-constitution-ecologique

  • Un seen pour tout ce qui concerne le risque Le Pen présidente, donc une police Le Pen, une administration Le Pen, des référendums Le Pen. Quand bien même elle devrait cohabiter, avec un Parlement contre elle (tout contre).

    Dans Le Canard de ce 13/04/2022 :

    « Si la nouvelle Assemblée nous est hostile, nous changerons la loi électorale par un référendum organisé dès l’été prochain, puis la présidente dissoudra l’Assemblée… » annonce au « Canard » Gilles Lebreton, professeur de droit public, député européen RN et membre du « conseil stratégique de campagne » de Le Pen.
    La candidate ne prend pas les électeurs en traître : tout ou presque se trouve déjà écrit dans son programme officiel.
    Le projet frontiste de nouvelle loi électorale figure au titre V : il s’agit d’élire les députés à la « proportionnelle intégrale ». Cette idée assez populaire cache une véritable entourloupe. Car la proportionnelle à la sauce lepéniste attribue « une prime majoritaire de 30 % des sièges à la liste arrivée en tête ». À ce tarif-là, il suffit qu’un parti — au hasard, le RN — profite de la dispersion des voix et remporte le scrutin avec 20 % des voix pour disposer de la majorité à l’Assemblée.

    Profiter de la dispersion, c’est ça. Je ne crois pas trop à la réforme constit par référendum, mais ma foi, tout est possible. Et si je me fais l’avocat du diable (ne sachant pas encore si j’irai à CASTORama, comme dit une amie, mais hésitant déjà davantage qu’en 2017), on peut aussi se dire que ce serait une occasion de se regrouper pour faire face. De tester les contre-pouvoirs au sein comme en dehors de l’État. D’éprouver l’antifascisme réel. Sans y croire. Surtout conscient que je ne serais pas le premier à en payer les conséquences.

    • Machiavélons, polpotons : Les vieux votent quand même massivement à droite et extrême-droite. Donc politiquement, il est intéressant d’avoir une mort massive des plus vieux, en moyenne (peu importe que quelques vieux soient gentils), tout en ayant une forte natalité. Ou plus doucement faut interdire le vote après la retraite pour les votes nationaux (présidentielle, législatives). Non pas parce qu’on ne vivrait plus longtemps, mais juste parce qu’un vote national, c’est pas juste pour 5 ans du tout, ça engage des choix d’avenir sur 50 ans ou plus (lancement de projets nucléaires, destruction de droits sociaux, ou inversement 35h, congés payés, etc), donc c’est clairement pas ces gens là qui en auront les conséquences (néfastes ou bonnes).

    • Le pays a voté massivement facho, que ce soit facho à costard ou facho à Rangers.

      Je ne vois vraiment pas quoi ajouter à ça.

      Et ne pas croire que c’est juste un vote de protestation. J’ai fui le bled, parce que c’était de l’adhésion en mode décomplexé, voire revenchard.

      Les gauchos des cambrousses feraient bien de revoir leur projet de vie rapido.

    • La focalisation sur les vieux, c’est fastoche. Bien sur qu’ils sont plus de droite (mais c’est pas nouveau).

      Par contre, idéaliser le vote des jeunes, alors que dans la tranche 18-24, Le Pen arrive deuxième, pas si loin du vote Mélenchon, que dans la tranche 25-34, le Pen arrive encore deuxième, un peu plus loin de Mélenchon (en fait, les 25-34 c’est la seule tranche d’âge où Mélenchon se détache réellement). Clairement la jeunesse n’emmerde pas trop le Front National. Et dans les deux tranches Macron plus Le Pen ça fait déjà 50% des votants. La seule différence c’est que l’absension est énorme (mais j’irais pas mettre ma main à couper sur le vote des clients de Hanouna s’ils se mettaient à voter).

      Et chez les 35-49 ans (généralement considérée comme encore jeunes), et chez les 50-59 ans (pas très vieux) c’est carrément Le Pen nettement devant.

      Sinon, sociologie de l’électorat selon l’âge je veux bien, mais comment ça se corrèle avec le patrimoine et le revenu ? (Puisqu’habituellement, le patrimoine et les revenus augmentent avec l’âge.)

      Sinon, l’idée de pondérer ou limiter le droit de vote parce qu’une partie de la population voterait mal, ah ben pour le coup je suis choqué (alors même que pour ma part je ne suis pas inscrit et je ne vote pas, et surtout pas à la présidentielle). On est à deux doigts de recommander une technocratie, dans laquelle un gouvernement d’experts ne prendrait que de bonnes décisions (puisqu’expert).

    • Bah non ya strictement aucune expertise, les plus jeunes sont pas plus experts que les plus vieux (et même parfois moins si on considère l’expérience). Et peu importe s’ils votent Le Pen a un moment aussi ya aucune idéalisation : c’est juste une histoire de mesures sur le long terme. Tous les votes nationaux engagent des mesures qui durent des décennies, bonnes ou mauvaises (je le remets : nucléaire ou pas, réduction du temps de travail, etc). Donc ceux qui vont en avoir les conséquences le plus longtemps, pourraient possiblement avoir plus de poids que ceux qui ne seront plus là dans quelques années. Si un jeune vote pour le nucléaire, il sait qu’il aura ça sur les bras dans 50 ans encore, alors qu’un retraité de 69 ans non.

    • Ce que je veux dire, c’est qu’à ce train, plutôt que de pondérer un système dont tu expliques qu’il ne fonctionne pas, il vaut mieux militer pour se débarrasser complètement d’un truc qui dans tous les cas ne peut pas être satisfaisant. Notamment l’élection d’un monarque républicain.

      Limiter les pouvoirs de la représentation, limiter l’imposition majoritaire et privilégier la recherche de consensus, légiférer par conseils citoyens formés, etc.

      Outre le fait que ça me semble aussi réaliste (ou irréaliste vue l’ambiance autoritaire du monde), ça me semble nettement plus logique et légitime. (Rester dans un système de représentation majoritaire à la légitimité problématique, mais en sélectionnant qui vote, je trouve pas ça défendable. Genre on aggrave l’illégitimité sans améliorer ce qui justifie un tel système.)

      D’ailleurs Macron a joué au con avec ça : on prétend multiplier les conseils citoyens travaillant sur un temps relativement long (climat, vaccination), pour ensuite tout foutre à la poubelle, mais du coup en ayant initialement légitimé ce mode de fonctionnement. Et en même temps imposer ses décisions jupitériennes à grands coups d’ordonnances. Donc cette question du fonctionnement législatif est déjà connue (évidemment en retenant le pire), et ça me semble plus intéressant que chercher à pondérer un truc qui de toute façon est totalement foireux à la base.

      –----

      Je note d’ailleurs que FI a tout un attirail militant autour du consensus, de la sixième république, de plein d’excellentes idées pour aller vers une démocratie plus réelle, et dans le même temps Méluche en campagne multipliait les coups de menton sur le thème « avec moi ça se passera pas comme ça, moi j’imposerai ceci, moi cela… ».

    • Bah évidemment, si on va par là, on préférerait de encore plus gros changements, genre le système de mandat impératif zapatiste (par le bas, puis ça remonte, et si pas de consensus ça redescend, et ça remonte, jusqu’à trouver la bonne formule, ce qui peut mettre longtemps mais c’est ça la démocratie). Et quand ya besoin de voter, le jugement majoritaire (évoqué plusieurs fois ici notamment pour 2017) :
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Jugement_majoritaire

    • Le #CNRS a lancé une expérimentation sur le #Jugement_majoritaire

      Votez utile, pour la dernière fois !

      Notre #démocratie est malade de son #mode_de_scrutin. Vote utile, vote contre, vote barrage, vote blanc : autant de symptômes d’un système qui dysfonctionne. La recherche Française a conçu un nouveau mode de scrutin, le jugement majoritaire, qui ouvre la voie vers une vie démocratique plus saine.
      Notre but : expérimenter massivement ce nouveau système de vote et ouvrir un débat sur une réforme électorale et les nouveaux modes de scrutins.

      https://mieuxvoter2022.fr

    • j’avais publié ça pour insister sur l’abstention. on en parle souvent comme un vote non réalisé qui ne changerait pas les proportions (si vote obligatoire par exemple). c’est une idée absurde puisqu’elle occulte totalement la manière dont l’abstentionniste se politise, en groupe, dans son coin, en situation (cf les dires relevés par Le Monde à Marseille, par exemple). c’est ignorer l’activité politique (dont le vote est une expression faible).

      je me souviens qu’en 1981, le 10 mai, des foules de réseaux et groupes pas mitterrandistes ou ps, non votants d’habitude, ou votant ailleurs, souvent très hostiles (je cause pas des votes de droite) ont voté pour le gagnant.

      l’échec de LFI, c’est de gagner 500 000 voix en 5 ans là où il en fallait un million, au bas mot (pour le second tour, sortir du monde de la jachère électorale c’était encore une autre paire de manches).
      sauf en terme de style (subvertir la figure du grand homme d’une manière ou d’une autre sous peine d’injurier l’avenir)et de perspective (mettons a minima parmi divers points d’ouverture à une autre réalité : refuser la production pour la production, l’emploi pour l’emploi) , il faut bien prendre le monde de la politique représentative tel qu’on le trouve.
      l’incarnation d’une défense du pauvre a bien marché, c’est donc qu’elle pouvait fonctionner mieux ; coller aux jeunes (précarisés) qui se refusent à être soumis aux conservatismes des boomers a elle aussi fonctionné, plus partiellement.
      le coup du travailleur frontalier ou de la défense de l’emploi, ça suffit pas pour toucher les plus de 35 ans de façon conséquente (ils en ont vu d’autres).
      insister sur la perspective écolo a bien fonctionné dans les grandes villes
      qu’a-t-il manqué ? ou plus fondamentalement qu’est-ce qui pêche ? (et parfois en eux troubles)

      ces graphiques, qui n’occultent ni l’abstention ni les partis non présidentiables en 2022, montrent que les primo-votants (18-24) s’abstiennent moins que ceux qui ont souvent déjà utilisé ce droit (24-35 : ce serait intéressant de voir lesquels ont voté LFI par le passé et pas cette fois), puis les taux d’abstention baissent, avant de remonter après 70 ans. alors sc’usez mais déjà ça rend louche le discours anti vieux, et donc riches, l’abstention est un truc de pauvre, pas seulement de déçus ou de critiques, ou de conviction. tous les vieux ne tournent pas réacs (quoi que, et ça ça demande du travail politique ! tous les vieux ne sont pas riches, et dans les années qui viennent il y aura de plus en plus de pauvres vieux, on verra si ils veulent être défendus « en tant que français » ou si une autre perpective les agrée, au cas où elle se manifeste).

    • une des raisons de l’abstention serait la crainte de se retrouver covidé (900 000 à 1,9 millions de personnes)
      Maître Pandaï

      https://twitter.com/Panda31808732/status/1514350165087371265

      En 2022, il y a eu 2,2 millions d’abstentionnistes en plus par rapport à 2017.

      Dans l’étude de l’Ifop, 15% des abstentionnistes (= 1,9 million de personnes) déclarent que la peur d’être contaminé par le Covid en allant voter a été « déterminante » dans leur choix de ne pas voter (p. 12).
      https://ifop.com/wp-content/uploads/2022/04/118997-Rapport-JDV-PRE22-T1-DET-11.04-1.pdf

      5. Chez BVA, 7% des abstentionnistes (= 900 000 personnes) ont déclaré qu’ils n’étaient pas allés voter par peur d’être contaminés par le Covid.
      https://presidentielle2022.bva-group.com/wp-content/uploads/2022/04/Presidentielle-Sondage-jour-du-vote-BVA-Ouest-France-1

      6. Chez OpinionWay, 13% des abstentionnistes (= 1,7 million de personnes) ont indiqué « qu’il leur semblait risqué d’aller voter à cause du Covid ».
      https://opinion-way.com/fr/component/edocman/opinionway-pour-cnews-et-europe-1-sondage-jour-du-vote-premier-tour/viewdocument/2841.html

  • Voici comment nous avons battu Amazon ! | Angelika Maldonado et Eric Blanc
    https://www.contretemps.eu/syndicat-victoire-amazon-staten-island-exploitation

    Après des décennies de déclin syndical, les travailleurs d’Amazon à Staten Island ont remporté la plus importante victoire syndicale aux États-Unis depuis les années 1930. La campagne de syndicalisation victorieuse à l’entrepôt JFK8 ait été initiée par l’Amazon Labor Union (ALU), une initiative novatrice, indépendante et dirigée par les travailleurs et travailleuses. Pour raconter cette histoire peu de personnes sont mieux placées qu’Angelika Maldonado, la présidente du comité des travailleurs de l’ALU, âgée de 27 ans. Source : Contretemps

    • So, let me tell you a few things about Eastern Europeans and NATO and Russia.

      We see NATO in a completely different, and I dare say much more nuanced way. We are not fans of it, and we can agree with you on many, many reasons to criticise it. But when you say “Fuck NATO” or “End NATO expansion”, what I hear is that you do not care about the safety and wellbeing of my Eastern European friends, family and comrades. You are happy to put my mum at risk for cheap political points you would not even be able to act on, you bastards!

      When you talk about “expansion”, with everything this word implies, really, you are referring to this process in which Eastern Europe, for the reason of other countries making decisions over our heads in 1945, quite literally tip-toed around Russia petitioning it to allow us do what we wanted to do. Eventually, this resulted in Russia signing something called the Founding Act on Mutual Relations, Cooperation and Security between NATO and the Russian Federation. This happened in May 1997 and Russia, finally, agreed to what you are now calling “expansion” provided that certain conditions are met. These conditions effectively made us second-class members of NATO, but hey ho, that is all we could get and we went for it. Poland, Czech Republic and Hungary joined NATO in 1999, the Baltic countries followed in 2004. And for now, I want them to stay there, and it doesn’t have much to do with politics tbh. It is a self-preservation instinct, but this is another thing you will just not get. You talk more about “NATO expansion” than you talk about the fact that you are the funding members of it.

    • Même genre d’analyse à chaud.

      Les explications américano-centrées ne suffisent plus. Lettre à la gauche occidentale https://www.contretemps.eu/gauche-occidentale-ukraine-otan-russie-imperialisme

      (…) Il ne s’agit pas d’accuser la gauche occidentale d’ethnocentrisme, mais de souligner sa perspective limitée. Submergé par le brouillard de la guerre et le stress psychologique, je ne peux pas offrir une meilleure perspective. Je ne peux que demander de l’aide pour appréhender la situation en termes théoriques tout en incorporant les idées de notre coin du monde. Mettre les États-Unis au centre de toutes les explications ne nous aident pas autant que vous ne le pensez. Nous devons également faire un effort pour sortir des ruines du marxisme oriental et de la colonisation par le marxisme occidental. Nous faisons des erreurs sur ce chemin, et vous pouvez nous accuser de nationalisme, d’idéalisme, de provincialisme. Apprenez de ces erreurs : maintenant vous êtes beaucoup plus provinciaux et vous êtes tentés de recourir à un manichéisme simpliste.

      Vous êtes confrontés au défi de réagir à une guerre qui n’est pas menée par vos pays. Compte tenu de toutes les impasses théoriques auxquelles j’ai fait allusion, il n’existe pas de moyen simple de formuler un message anti-guerre. Une chose reste douloureusement évidente : vous pouvez contribuer à gérer les conséquences de la guerre en apportant une aide aux réfugiés d’Ukraine, quelle que soit la couleur de leur peau ou leur passeport. Vous pouvez également faire pression sur votre gouvernement pour qu’il annule la dette extérieure de l’Ukraine et fournisse une aide humanitaire.

      Ne laissez pas des positions politiques bancales se substituer à une analyse de la situation. L’injonction selon laquelle l’ennemi principal se trouve dans votre pays ne doit pas se traduire par une analyse erronée de la lutte inter-impérialiste. À ce stade, les appels à démanteler l’OTAN ou, à l’inverse, à y accepter qui que ce soit, n’aideront pas ceux qui souffrent sous les bombes en Ukraine, dans les prisons en Russie ou en Biélorussie. Les slogans sont plus nuisibles que jamais. En qualifiant les Ukrainiens ou les Russes de fascistes, vous faites partie du problème et non de la solution.

      Une nouvelle réalité autonome émerge autour de la Russie, une réalité de destruction et de dures répressions, une réalité où un conflit nucléaire n’est plus impensable. Beaucoup d’entre nous n’ont pas vu les tendances qui ont mené à cette réalité. Dans le brouillard de la guerre, nous ne voyons pas clairement les contours du nouveau. Pas plus, semble-t-il, que les gouvernements américains ou européens. Dans cette réalité, nous, la gauche post-soviétique, aurons incomparablement moins de ressources organisationnelles, théoriques, et tout simplement vitales. Sans vous, nous lutterons pour survivre. Sans nous, vous serez plus près du précipice.

    • Autant je comprends que l’on fustige les arguments uniquement fondés sur un impérialisme américain (qu’on ne trouvent pas qu’à gauche, par ailleurs), autant je trouve tout aussi bancale l’idée que la Russie aurait retrouvé une certaine autonomie ou qu’il y aurait une « dynamique propre » qui expliquerait ses actions en Ukraine ou ailleurs. Pour le coup, je ne peux que constater que les échanges théoriques qui ont repris entre l’est et l’ouest ont propagé la confusion bien avant que le brouillard de la guerre ne s’installe.

  • Guerre en Ukraine : Poutine peut-il compter sur le soutien économique de la Chine ? Hubert Testard, Asialyst, 26/02/2022 (v. M. Bulard)
    https://asialyst.com/fr/2022/02/26/guerre-ukraine-poutine-peut-il-compter-soutien-economique-chine

    Au plan pétrolier, Rosneft vient de signer un accord de long terme avec le chinois CNPC pour la livraison de 100 millions de tonnes de pétrole brut sur 10 ans, soit 10 millions de tonnes par an. Cet accord est significatif, mais de portée réduite par rapport au niveau actuel des exportations russes de pétrole, qui était de 230 millions de tonnes en 2021. Le pétrole est par ailleurs un marché mondial beaucoup plus diversifié que le gaz, et le partenariat avec la Chine n’a pas pour la Russie la même importance.

    Au total, le partenariat énergétique russo-chinois offre à la Russie un potentiel de diversification significatif de ses exportations sur le moyen terme, mais ne lui donne pas les moyens de substituer rapidement les clients asiatiques aux client européens.

    (…) Sans être comparables aux liens avec la Russie, ceux de la Chine avec l’Ukraine ne sont pas négligeables. La Chine est le premier partenaire commercial de l’Ukraine. Le commerce bilatéral atteignait 19 milliards de dollars en 2021 selon les statistiques ukrainiennes, à comparer aux 146 milliards de dollars du commerce russo-chinois. Les relations sont importantes dans le domaine agricole et minier – 30 % des importations chinoises d’orge viennent d’Ukraine et 60 % des exportations ukrainiennes de minerai de fer sont destinées à la Chine – qui exporte par ailleurs en Ukraine une large gamme de produits manufacturés.

    L’Ukraine est un des partenaires européens des « Nouvelles routes de la soie », et constitue un hub logistique important entre le continent européen et la Chine, avec notamment une liaison ferroviaire inaugurée depuis peu. Pékin espérait tirer parti de l’accord de libre-échange du pays avec l’Union européenne. Les grandes entreprises chinoises ont investi dans les télécommunications (Huawei est très présent en Ukraine), l’agro-alimentaire avec COFCO et les énergies renouvelables avec quelques gros projets dans l’éolien. La Chine devra d’abord faire face aux destructions provoquées par la guerre, qui vont perturber l’ensemble des flux logistiques, et voudra par la suite rétablir les liens commerciaux antérieurs. L’Ukraine cessera par ailleurs d’être la porte d’entrée vers le marché européen sur laquelle tablaient les entreprises chinoises. La façon dont Moscou tiendra compte des intérêts chinois en Ukraine pèsera sur la coopération entre les deux pays.

    (…) Globalement, l’alliance avec la Chine ne sera pour Vladimir Poutine ni gratuite, ni inconditionnelle, ni suffisante pour échapper aux conséquences du chaos qu’il a décidé de provoquer en Europe et dans le monde.

  • Rencontre avec Jean-Luc Godard : « On ne peut pas parler » (Ludovic Lamant, Jade Lingaard, Mediapart, 3 décembre 2021) https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/031221/rencontre-avec-jean-luc-godard-ne-peut-pas-parler

    (…) Nous nous apprêtons à arrêter les enregistreurs et à quitter Rolle. Mais Godard nous interrompt, une dernière fois, et cette fois-ci nous retient. En début d’entretien, il nous avait parlé de cinq phrases « qui [lui] restent en mémoire, et [qu’il se] répète des fois le soir pour voir [s’il] [s]’en souvien[t] encore ». Mais à ce stade de la rencontre, au bout d’une heure trente de va-et-vient douloureux entre lui et nous, nous n’y pensons plus. 

    Jean-Luc Godard : Je ne vous ai pas dit mes cinq phrases ! Vous oubliez, c’est moi qui dois vous le rappeler… Cela m’aide, si je vous les dis. Ça m’aide, pour voir si je les sais toujours. 

    Au moins, on aura servi à ça.

    D’accord. La première, c’est une phrase de Bernanos, dans Les Enfants humiliés, ou ailleurs. J’en ai fait un petit film, du reste, sur Sarajevo [Je vous salue Sarajevo, en 1993, voir la vidéo ci-dessous – ndlr] : « La peur, voyez-vous, est quand même la fille de Dieu, rachetée la nuit du Vendredi saint, elle n’est pas belle à voir, tantôt éraillée, tantôt médiatique, et pourtant ne vous y trompez pas, elle est au chevet de chaque agonie, elle intercède pour l’homme. » C’est une phrase qui peut tout à fait se rapporter à la France d’aujourd’hui qui a peur. Même CNews peut en parler.

    La deuxième phrase est de Bergson. Elle m’avait été envoyée par un ancien régisseur, je l’avais déjà citée, il me l’a recitée, puis je l’ai fait dire à Alain Badiou dans Film Socialisme. C’est : « L’esprit emprunte à la matière les perceptions dont il fait sa nourriture et les lui rend sous forme de mouvement auquel il imprime sa liberté. »

    Je n’ai jamais bien compris le mot de « perception », les perceptions de la matière. 
     
    La troisième phrase, c’est une phrase de Claude Lefort, qui était un philosophe du temps d’un petit groupement qui s’appelait Socialisme ou barbarie, à l’époque de Sartre et Simone de Beauvoir : « Les démocraties modernes, en faisant de la pensée un domaine politique séparé, prédisposent au totalitarisme. » Et voici l’image d’une jeune fille qui plus tard a écrit des livres sur le totalitarisme.

    À l’époque où elle était amoureuse de Heidegger. Cette image est dans un film d’Anne-Marie [Miéville] que vous ne connaissez pas, qui s’appelle Nous sommes tous encore ici [1996 – ndlr].

    Après, il y a une quatrième phrase. Vais-je me souvenir du nom de l’auteur ? Pour le retrouver, je tape sur mon iPhone le nom d’un livre qui s’appelle Masse et Puissance [publié en 1960 - ndlr].

    Jean-Paul Battagia (son assistant) : Je vais le faire… Elias Canetti.

    J’ai mis cette phrase dans Le Livre d’image - elle est dite par ma femme à ce moment-là. On pourrait la dire à Greta Thunberg : « Nous ne sommes jamais assez tristes pour que le monde soit meilleur. »
     
    Et j’en rajoute une cinquième, qui est une phrase de Raymond Queneau, dont j’ai beaucoup aimé à l’époque les romans. Cet aphorisme est le suivant : « Tous les gens pensent que deux et deux font quatre, mais ils oublient la vitesse du vent. »
     
    Il rallume son cigare.

    Les cinq phrases, pour les cinq doigts, dont je me souviens depuis des années, et que j’essaie de me répéter, comme un vade-mecum. Je le fais mécaniquement, et des fois, j’essaie d’y penser un peu, de rester avec elles. Surtout quand je m’endors, en général. Voilà. Vous avez réussi à me faire parler, hein. Puisque c’est ce que vous vouliez.

    Il se lève du fauteuil pour nous saluer. Nous partons.

  • Poutine le tchékiste - AOC media - Analyse Opinion Critique
    https://aoc.media/analyse/2022/02/28/poutine-le-tchekiste

    Par Emmanuel Droit HISTORIEN

    Pour s’extraire des explications qui attribuent l’invasion de l’Ukraine à la « folie » de Vladimir Poutine, il apparaît essentiel, si nous voulons comprendre son action, de la réinscrire dans un éthos profondément imprégné par le tchékisme, une idéologie de l’action, de la discipline et du service de l’État qui s’enracine dans l’expérience de la guerre civile de la Russie post-tsariste.

    Au moment où une large partie du champ politico-médiatique se penche sur la psychologie de Vladimir Poutine et avance la thèse de la folie (de Libération au Un en passant par le premier ministre néerlandais Mark Rutte, qui parle de « folie des grandeurs ») pour expliquer l’invasion de l’Ukraine, il me paraît essentiel, pour sortir de l’aporie des explications psychologisantes, de mettre en avant son habitus tchékiste – ce que la journaliste Anna Politkovsakaïa, assassinée en 2006, qualifiait de style du « monologue de type militaire ».

    Sans tomber évidemment dans l’excès inverse de surdéterminer la trajectoire existentielle de Poutine en le présentant comme un simple produit idéologique de la défunte Union soviétique, une possible clé de compréhension de son action réside dans son ancrage dans un éthos idéologique qui a constitué la colonne vertébrale des services de sécurité soviétique depuis la naissance de la Tchéka en 1917, à savoir le tchékisme.

    Qu’est-ce que le tchékisme ?
    Le tchékisme est une idéologie de l’action, de la discipline et du service de l’État qui s’enracine historiquement dans l’expérience fondatrice de la guerre civile qui ravagea la Russie post-tsariste. Il est l’enfant d’une violence politique rapidement transformée en socle de valeurs d’ordre, de morale, de sécurité et en une culture mémorielle héroïsant la figure du fondateur de la Tchéka Félix Dzerjinski qui de santé fragile mourut d’épuisement en 1926.

    Cette matrice tchékiste née dans les entrailles de la Révolution bolchévique fut ensuite transférée après 1945 dans les démocraties populaires sous la forme d’un éthos socio-professionnel commun qui servit notamment d’idéologie de remplacement en RDA au patriotisme. Elle peut se résumer d’une formule qu’on prête à Djerzinski selon laquelle un tchékiste, c’est un « homme à la tête froide, au cœur chaud et aux mains propres ».

    Ce portrait idéal d’une figure de la vérité et de l’action se doit de garder les « mains propres ». C’était une manière, à l’époque communiste, d’évacuer complètement à travers cette formule euphémisée la terreur de masse dont les premiers tchékistes soviétiques furent les agents et qui fut appliquée à une moindre échelle en Europe centrale et orientale entre 1945 et le début des années 1950.

    Le tchékiste est donc un officier de police incorruptible, discipliné, de grande valeur, rayonnant dans sa pureté idéologique et agissant pour la sécurité de l’État. Or, Vladimir Poutine fut un tchékiste et le resta au-delà du traumatisme de l’effondrement de la RDA, dont il fut un témoin privilégié alors qu’il était en poste à Dresde en novembre 1989.

    L’habitus tchékiste de Poutine
    L’histoire de Vladimir Poutine est donc inextricablement liée à celle de l’URSS et de la police politique. Cette part de tchékisme, qu’il ne faut pas confondre avec une quelconque nostalgie du communisme de type soviétique, Poutine l’a mise en avant dès les premiers mois qui suivirent sa nomination comme premier ministre à la fin des années 1990. Lorsqu’il déclencha la seconde Guerre de Tchétchénie en manipulant une prétendue attaque terroriste et qu’il endossa pour la première fois les habits du chef de guerre, son recours à un langage direct, pour ne pas dire crû – il promettait en 1999 d’aller « buter les terroristes jusque dans les chiottes » – relève de cet éthos tchékiste : un tchékiste n’est pas un homme politique qui négocie, un tchékiste agit.

    Depuis une vingtaine d’années, Poutine n’a cessé de développer un intérêt particulier pour la réécriture de l’histoire russe, au sein de laquelle le tchékisme occupe une place de choix. Celle-ci se manifeste non seulement dans le rapport à l’Ukraine mais aussi dans cette instrumentalisation sélective de l’héritage soviétique : Poutine déteste Lénine qui est accusé d’avoir créé l’Ukraine moderne et Gorbatchev qui a contribué à détruire la puissance russe alors que dans le même temps, il encense Djerzinski et rappelle le rôle positif de Staline dans la Grande Guerre patriotique.

    Dans un premier temps, dans la nouvelle configuration post-communiste, la Tcheka, son fondateur et l’ensemble des polices politiques communistes d’Europe de l’Est firent l’objet d’une entreprise de dénonciation et de démolition la plus matérielle qui soit, symbolisée par la destruction de la statue en l’honneur de Dzerjinski devant la Loubianka en août 1991. Au tout début de la transition démocratique, l’Europe centrale et orientale tout comme l’URSS partagèrent cette ivresse de liberté et ce besoin de décoloniser l’histoire contemporaine, comme l’illustre le remarquable travail de l’ONG Mémorial, aujourd’hui dissoute par Poutine.

    Or, très rapidement, une divergence commença à se creuser, aboutissant à créer aujourd’hui un véritable fossé mémoriel, pour l’heure insurmontable, entre l’Europe post-socialiste et la Russie (à laquelle on peut ajouter la Biélorussie). Au moment où l’Europe réunifiée cherchait progressivement à faire partager les mémoires tragiques du XXe siècle en plaçant en 2009 sur un pied d’égalité l’horreur des crimes nazis et communistes, la Russie et la Biélorussie n’ont eu de cesse depuis une dizaine d’années de commémorer la figure de Dzerjinski et de promouvoir une mémoire officielle de la Tcheka. Ainsi, parallèlement à la valorisation de la Grande Guerre patriotique, Poutine contribua à mettre en place un culte des héros tchékistes destiné à surmonter le traumatisme de l’effondrement de l’État soviétique.

    Cette dissymétrie peut paraître a priori anecdotique à l’aune du basculement dans une guerre ouverte entre la Russie et l’Ukraine, mais elle illustre bien le processus de divergence à l’œuvre entre une Europe libérale et démocratique d’un côté et une Russie engagée sur la voie de l’autoritarisme et l’expansionnisme depuis le début des années 2000.

    Ainsi, le plaidoyer de l’écrivain antifasciste Jorge Semprun prononcé en avril 2005 au théâtre national de Weimar à l’occasion du 60e anniversaire de la libération du camp de concentration de Buchenwald en faveur d’un partage des mémoires tragiques semble déjà appartenir à une autre époque, celle d’une « Europe heureuse » où la convergence avec une Russie sur la voie de la démocratisation était encore envisagée et ardemment souhaitée en Occident.

    Poutine, l’entrepreneur de mémoire tchékiste
    Vladimir Poutine n’est pas seulement un tchékiste de formation. En tant que Premier ministre ou président de la Fédération de Russie, il s’est transformé en entrepreneur de la mémoire tchékiste en s’appuyant sur ce que l’on pourrait appeler un « Poutine collectif », c’est-à-dire un ensemble de collaborateurs proches qui relaient cette culture mémorielle.

    L’une de ses premières mesures en tant que chef du gouvernement fut d’avoir restauré la plaque commémorative à l’effigie de Youri Andropov dans les bâtiments centraux de la Loubianka. L’entreprise de renaissance institutionnelle du tchékisme s’accompagna d’une réhabilitation de la mémoire de Dzerjinski et de la police politique soviétique. Traumatisé par l’effondrement de l’URSS, une partie des élites politiques issues du socialisme tardif propagèrent dans les médias et sur Internet une sorte de « loi de l’histoire » : la Russie n’est forte que lorsque les services de sécurité sont puissants et centralisés. S’ils s’affaiblissent, alors c’est la survie même de la Russie qui est en jeu.

    Ce type d’arguments ne laissa pas indifférent une partie de la société post-soviétique traumatisée par les années 1990. Celle-ci était a posteriori attachée au souvenir d’un principe d’autorité qui prévalait sous le communisme et qui semblait avoir été emporté par la révolution néolibérale et capitaliste. Les paroles d’anciens citoyens soviétiques « ordinaires » tirées des bruits de la rue et des conversations de cuisine et saisies par Svletlana Alexievitch illustrent la profondeur du traumatisme de la transition socio-économique brutale et de la crise de l’État russe au début des années 1990.

    Le retour de la figure du tchékiste s’effectua selon différents canaux et dans différents champs. Les deux principaux furent sans surprise ceux de la culture (littérature et cinéma) et de la politique. Aleksander Mikhaylov, ancien chef du service de presse du FSB, écrivit des romans d’espionnage à succès vantant les exploits des espions soviétiques. Vasily Stavistky, ancien responsable des relations publiques du FSB entre 1999 et 2001, publia une série de recueils de poèmes allant jusqu’à vanter la force spirituelle des services de sécurité. La dimension spirituelle du FSB telle qu’elle était véhiculée par V. Stavitsky était en complète rupture avec le militantisme athée des tchékistes soviétiques.

    Dans le champ cinématographique, le film Countdown réalisé en 2004 par Yevgeni Lavrentyev fut tourné avec le soutien du FSB et plus précisément avec les conseils de son directeur adjoint Vladimir Anisimov. Il mettait en scène un complot visant à discréditer les services de renseignement russes dans le contexte de la seconde guerre de Tchétchénie. Suivirent d’autres films exaltant les valeurs tchékistes comme Code Apocalypse et Liquidation, sortis successivement en 2006 et 2007. Le FSB contribua aussi à produire des films documentaires mettant en avant sa capacité à démasquer les espions occidentaux. Dans Les espions, le réalisateur Marmontov mit en lumière l’activité d’espionnage des Britanniques. En 2008, Plan Caucase défendait l’idée que les États-Unis étaient derrière la première guerre de Tchétchénie.

    Sur le plan politique, Poutine a multiplié ces dernières années les gestes symboliques qui participent du discours présentant Dzerjinski comme un héros national. En septembre 2014, il a signé un décret autorisant une unité d’élite de la police de Moscou à porter le nom de Dzerjinski. Celle-ci était appelée à intervenir sur l’ensemble du territoire de la Russie et plus précisément dans le Caucase du Nord.

    Elle portait depuis 1994 le nom de Division Opérationnelle Indépendante. Ce changement symbolique était justifié par le fait que le nom de Dzerjinski était associé à « l’héroïsme et au courage, à la force et à la bravoure démontrés par le personnel dans les combats menés pour défendre la patrie et les intérêts de l’État dans le contexte de conflits armés. » Le ministère de l’Intérieur russe Vladimir Kolokoltsev participa à la cérémonie au cours de laquelle il attacha un ruban en l’honneur de Dzerjinski sur la bannière de cette unité spéciale. Il insista dans son discours sur la continuité de l’esprit qui caractérisait cette division.

    Dans ce champ, le pouvoir est même soutenu par le parti communiste russe. En septembre 2014, à l’occasion du 137e anniversaire de la naissance de Dzerjinski, des militants avaient brièvement dressé sur la place de la Loubianka une statue en plâtre du fondateur de la Tcheka. Dès 2002, lors d’une visite dans le village natal de Dzerjinski, l’ancien chef du FSB, Nicolai Patrouchev, avait promis qu’un jour la statue de « Félix le Fer » reviendrait sur la place de la Loubianka.

    Cette « promesse » fut suivie en 2003 d’une première tentative formulée par l’ancien maire de Moscou, Youri Loujkov. Ce dernier suggéra l’organisation d’un référendum local au sujet de la réinstallation de la statue. Inquiet pour sa réélection, Loujkov espérait marquer des points au niveau de l’électorat tout en se faisant bien voir par Poutine. La tenue de la consultation fut finalement reportée sine die, dans la mesure où le Kremlin considéra à l’époque ce projet comme « inopportun ».

    Le parti communiste relança le projet de Loujkov en 2015 en démarrant une campagne de pétition en faveur de la tenue d’un référendum. Il obtint rapidement un nombre suffisant de signatures mais renonça finalement à déposer la demande auprès de la commission électorale de la ville de Moscou en raison du coût excessif de l’organisation du vote. Selon l’institut de sondage indépendant Levada, une enquête de 2015 avait montré que 51% des Moscovites étaient favorables au retour de la statue, 25% y étaient opposés et 24% n’avaient pas d’avis sur le sujet.

    Deux ans plus tard, Guennadi Ziouganov, le chef du parti communiste demanda à nouveau à Vladimir Poutine de rétablir la statue de Dzerjinski sur la place Loubianka de Moscou, arguant du rôle décisif joué par le fondateur de la police politique soviétique dans la création et l’établissement de l’URSS : « Nous sommes convaincus que le retour du monument à l’homme qui est devenu un symbole d’honnêteté et d’abnégation contribuerait à la formation de repères moraux de valeur dans notre société[1]. »

    Depuis le début de l’ère Poutine, l’État continue de commémorer le « Jour des Tchékistes » et à l’occasion du 100e anniversaire de la Tcheka, un nouvel insigne d’honneur fut même présenté sur le site internet du FSB. Une telle politique illustre la volonté du Kremlin d’établir une continuité historique entre l’URSS et la Russie post-soviétique. La Tcheka est présentée comme une institution qui a protégé les citoyens soviétiques et qui d’une certaine manière rappelle que la sécurité représente un élément clef indispensable à la continuité de l’État.

    En décidant, à l’occasion du 90e anniversaire de celui-ci en 2017, de rendre une visite « surprise » mais médiatisée à son ancien chef du renseignement soviétique en RDA, Lazar Matzeev, le message de Vladimir Poutine est clair : cet hommage vient s’inscrire dans une logique de restauration de la puissance de l’État russe, de manière à montrer que la page du « trou noir » des années 1985-2000 est définitivement tournée.

    À côté de Vladimir Poutine, l’actuel directeur du FSB, Alexandre Bortnikov, endosse publiquement l’habit d’entrepreneur de mémoire, s’inscrivant dans la tradition de Iouri Andropov consistant à défendre dans l’espace public le visage « humaniste » des services de sécurité.

    Le 19 décembre 2017, il avait donné une interview au journal Rossiïskaya Gazeta à l’occasion du centenaire des services de sécurité russes. L’entretien était intitulé « Le FSB met les points sur les i » et visait à déconstruire une série de « légendes noires ». Tout en reconnaissant les « excès » des organes de sécurité dans les années 1930, Alexandre Bortnikov entendait assumer pleinement l’héritage soviétique du renseignement russe et défendre la culture du secret : « Renoncer au terme de tchékiste, c’est comme reléguer aux oubliettes toute une génération de nos prédécesseurs. » Il construisait une ligne de continuité entre la Tcheka et le FSB en écartant l’héritage tsariste de l’Okhrana.

    Une telle posture débouche sur la production d’un discours anhistorique présentant les missions et les conditions d’exercice des services de sécurité, et surtout elle permet de souligner la nécessité de se défendre face aux opérations de déstabilisation qui seraient conduites par les services secrets étrangers. En mobilisant le thème classique de la forteresse assiégée, Alexandre Bortnikov inscrit la Russie poutinienne dans un héritage tchékiste qui lui permet de dresser un parallèle entre la période de la guerre civile au cours de laquelle des « puissances étrangères ont porté atteinte à notre Patrie » et les menaces actuelles qui pèseraient sur la sécurité russe.

    Bortnikov développait donc dans cet article un discours conspirationniste reposant sur l’idée que la « destruction de la Russie reste pour certains une idée obsessionnelle ». Il n’hésitait pas à produire un discours mensonger sur « les efforts faits par la Grande-Bretagne et les États-Unis pour pousser Hitler à étendre la guerre vers l’Est. » En insistant sur le rôle clé du FSB dans la défense des frontières, il cherchait à toucher une corde sensible de la société russe. L’expression qu’il utilise – « la frontière est sous clé » – illustre cette volonté de refonder l’identité russe post-soviétique autour d’une idéologie de la fermeture.

    La Russie post-soviétique n’est pas la seule à réhabiliter l’héritage tchékiste. La Biélorussie a conservé de nombreuses traces du passé tchékiste. Le point culminant du pays (345m de haut) porte le nom de Dzerjinski (Dzyarhzhynskaya Hara) depuis 1958 et il ne fut pas débaptisé après l’indépendance en 1991. Dans la région de Minsk, une ville continue à porter le nom de Dzerjinski tout comme une subdivision territoriale biélorusse (le raïon).

    À une cinquantaine de kilomètres de Minsk, au milieu de la forêt de pins de Naliboki, à proximité du village de Piatylavitchy qui abrite la « coopérative agricole de la patrie de Dzerjinski », le président Loukachenko a fait reconstruire de toutes pièces la demeure de la famille Dzerjinski et l’a érigée en musée. Inaugurée en octobre 2004, une semaine avec les élections présidentielles, en présence du chef du FSB Nikolaï Patrouchev, ce manoir-musée propose une version édulcorée de la vie du fondateur de la Tchéka. Djerzinski est présenté comme une source d’inspiration pour le pays, un idéaliste, un homme qui a rétabli l’ordre dans le pays et qui s’est engagé pour les millions d’enfants orphelins après la guerre civile.

    Au final, loin de sombrer dans la folie, Vladimir Poutine fait apparaître au grand jour sa véritable nature, celle d’un tchékiste décidé quoi qu’il en coûte à restaurer la puissance russe en manipulant l’histoire, en feignant de négocier et en violant le droit international de la manière la plus brutale.

    Depuis près de vingt ans, il a produit un discours politique et mémoriel valorisant l’héritage tchékiste de la Russie contemporaine en évacuant la dimension criminelle et communiste des services de sécurité.

    Aujourd’hui, avec l’invasion de l’Ukraine, Poutine agit comme un tchékiste et justifie cette action comme un tchékiste. Ce que l’on perçoit comme une perte de contact avec la réalité – les références à un génocide ou au nazisme pour discréditer les responsables politiques ukrainiens – n’est en fait que l’expression de cette culture tchékiste du repli sur soi, de l’action militaire et d’un vaste complot destiné à menacer la Russie.

    Emmanuel Droit
    HISTORIEN, PROFESSEUR D’HISTOIRE CONTEMPORAINE À SCIENCES PO STRASBOURG

  • Écologie et pouvoir – Entêtement
    https://www.entetement.com/ecologie-et-pouvoir%ef%bf%bc

    Notes sur le Mémo sur la nouvelle classe écologique de Bruno Latour et Nikolaj Schultz

    La parution du Mémo sur la nouvelle classe écologique mérite notre attention. À l’heure où une immensité des personnes entre en rupture avec l’économie, celle-ci étant incompatible avec la vie, certains gourous de l’écologie politique, comme Andreas Malm ou Baptiste Morizot, en bons stratèges, posent les rails théoriques qui devraient mener l’écologie au pouvoir. C’est l’État qui pourra éviter la catastrophe, nous disent-ils. Si Malm propose un léninisme vert, pour Morizot le moment n’est pas pour des distances enfantines, ni avec la banque, ni avec la République. Ce sont les partis écologiques qui devraient occuper la place d’une gauche périmée. Le texte de Bruno Latour co-écrit avec Nicolas Schultz est d’une extrême exemplarité, non seulement pour sa participation au nouvel avatar du réformisme, mais surtout en tant qu’opération qui vise à mettre toutes les forces qui sont en rupture, dans les rangs. C’est pour rendre lisible ce mouvement que nous avons choisi de présenter chacune des dix sections du livre.

    ping @thibnton

    #écologie #État #livres

  • La guerre nucléaire qui vient - AOC media - Analyse Opinion Critique
    https://aoc.media/opinion/2022/02/27/la-guerre-nucleaire-qui-vient-2

    Lors de la conférence de presse qui a suivi sa rencontre avec Emmanuel Macron le 7 février à Moscou, Vladimir Poutine a fait allusion au risque d’escalade nucléaire, ce que la presse française n’a pas vraiment bien traduit, évoquant une menace plutôt qu’une mise en garde. Cela n’a pas échappé au philosophe Jean-Pierre Dupuy, dont nous avions publié, il y a tout juste trois ans, cet article important qu’il nous a semblé essentiel de reprendre aujourd’hui.

    Le (presque) non-dit de la crise actuelle est que nul ne peut écarter le risque d’escalade jusqu’à l’extrême, c’est-à-dire une guerre nucléaire. Poutine y a fait allusion pour la première fois lors de la conférence de presse qui a suivi sa rencontre à Moscou avec Macron. La presse française, négligence ou post-vérité, a très mal traduit ce qu’il a dit alors, qui ressemblait moins à une menace qu’à une mise en garde. En voici une traduction littérale : « Bien sûr, les potentiels de l’organisation conjointe de l’OTAN et de la Russie ne sont pas comparables. Nous le comprenons, mais nous rappelons également que la Russie est l’une des principales puissances nucléaires, et en termes de modernité de certains composants, elle est même en avance sur beaucoup d’autres. Il n’y aura pas de vainqueurs, et vous vous retrouverez entraînés dans ce conflit contre votre volonté. Vous n’aurez même pas le temps de cligner des yeux lorsque vous allez mettre en œuvre l’article cinq du traité de Rome. » [Avec une belle confusion, distraction ou voulue, entre le traité de Rome et celui de Washington qui régit l’OTAN.]

    Il y a exactement trois ans, le mardi 26 février 2019, AOC publiait mon premier article pour ses colonnes sous le titre « La guerre nucléaire qui vient ». J’y réagissais à un double événement très important pour la stabilité de l’Europe : la dénonciation par Trump le 1er février 2019, et le lendemain par Poutine, du traité dit INF (pour « Intermediate-Range Nuclear Forces », soit forces nucléaires de portée intermédiaire) datant de 1987, par lequel les États-Unis et l’Union soviétique s’engageaient à éliminer tous leurs missiles de croisière et balistiques lancés depuis le sol et ayant une portée se situant entre 500 et 5 500 km. Beaucoup d’experts considèrent que ce traité, signé par Gorbatchev et Reagan, a contribué à assurer la paix en Europe pendant toute cette période (donc, de 1987 à 2019).

    5 500 km : Poutine peut atteindre de Moscou le nord de l’Écosse et le Portugal. La dénonciation du traité INF n’a pas fait grand bruit il y a trois ans. Aujourd’hui, nous pressentons ce qu’il comporte de menaces terrifiantes.

    Jean-Pierre Dupuy, le 26 février 2022

    #Guerre #Nucléaire

  • Ça fait pas envie. « La tête dans le métavers : Arte nous a embarqués pour un concert » https://www.liberation.fr/economie/medias/la-tete-dans-le-metavers-arte-nous-a-embarques-pour-un-concert-20220208_G

    « J’n’ai qu’un cœur pas assez de place », chante-t-il, imperturbable. Devant les lettres néon orange du logo Arte, seul son buste flotte, avec un air de Génie évadé. Et, dans Horizon Worlds, c’est comme ça pour tout le monde. Pas forcément un problème pour les plus de 16 000 membres du groupe Facebook « Horizon Worlds Community ». Ces fidèles du jeu ne s’arrêtent d’ailleurs pas non plus à ses designs cartoonesques, similaires – au choix – à ceux d’un Pixar ou d’un bad trip difficile de rave party. Entre cours virtuels de yoga et rencontres en ligne, ils inondent le réseau de selfies radieux de demi-avatars.

    A défaut de pouvoir sortir son meilleur jeu de jambes, Timothée Joly se rattrape avec des mouvements fluides des bras. Et franchement, on s’amuse. Les lèvres du chanteur suivent plus ou moins bien les paroles, les eye contacts avec le public font « réels ». Si, on n’avait pas conscience que des membres de l’équipe technique nous observent IRL (In Real Life), on se trémousserait bien. Le morceau s’achève sur un dernier couplet à l’écho, lui aussi, particulier : « Le futur c’est pas loin, le futur c’est demain. »

    (…) Aurélie, qui a géré l’installation du son, nous explique. Une pédale disposée aux pieds du chanteur lui permet de choisir le morceau à lancer. Le reste fonctionne en boucle : sa voix n’est pas directement transmise à l’oreille des spectateurs. Elle passe en régie, est remixée en direct et envoyée dans Horizon Worlds avec une meilleure qualité. Pour l’instant, pas d’instruments : « On a voulu garder une installation la plus simple possible pour tester », précise-t-elle. En ajoutant : « C’est expérimental ».

    Expérimental. On l’oublierait presque tant le terme de « métavers » est dans toutes les bouches depuis les annonces de Zuckerberg. Chanel dans la mode, Alpine dans l’automobile, Disney dans le divertissement… Les entreprises ouvrent toutes, les unes après les autres, leurs portefeuilles au projet. Estimé à 30,7 milliards de dollars en 2021, le marché du métavers devrait atteindre 280 milliards de dollars d’ici à 2025, avance même un rapport de Strategy Analytics, entreprise spécialisée en conseil et études de marché. Difficile à anticiper lorsque l’on sait qu’en 2019, encore, une étude du CNC et de l’Ifop soulignait que seuls 7% des foyers français possédaient un casque VR…

  • A Woman Is Cured of H.I.V. Using a Novel Treatment

    She’s the third person ever to be cured. Researchers announced that the new approach holds the potential for curing more people of racially diverse backgrounds.
    https://www.nytimes.com/2022/02/15/health/hiv-cure-cord-blood.html

    The woman, who also had leukemia, received cord blood to treat her cancer. It came from a partially matched donor, instead of the typical practice of finding a bone marrow donor of similar race and ethnicity to the patient’s. She also received blood from a close relative to give her body temporary immune defenses while the transplant took.

    Researchers presented some of the details of the new case on Tuesday at the Conference on Retroviruses and Opportunistic Infections in Denver, Colo.

    The sex and racial background of the new case mark a significant step forward in developing a cure for H.I.V., the researchers said.

    “The fact that she’s mixed race, and that she’s a woman, that is really important scientifically and really important in terms of the community impact,” said Dr. Steven Deeks, an AIDS expert at the University of California, San Francisco who was not involved in the work.

    #sante #vih