• « Les négationnistes poursuivent l’œuvre des génocidaires. » Luttes mémorielles juives et rwandaises. Entretien avec Jessica Gérondal Mwiza et Jonas Pardo
    Par Judith Chouraqui et Elvina Le Poul

    Les génocides font systématiquement l’objet de discours les dépolitisant et les remettant en cause. Autour de l’extermination des Juif·ves d’Europe et de celle des Tutsi au Rwanda, des thèses s’insinuent qui nient aussi bien la volonté d’anéantissement guidant les génocidaires que la réalité des massacres qu’iels ont perpétrés. Discussion croisée avec Jessica Gérondal Mwiza, militante afroféministe franco-rwandaise travaillant notamment au sein de l’association Ibuka France, et Jonas Pardo, membre du Réseau d’action contre l’antisémitisme et tous les racismes.
    Cet entretien est issu du dernier numéro de la revue papier Jef Klak, intitulé « Feu follet » et traitant des relations entre les vivant⋅es et les mort⋅es.

    https://www.jefklak.org/%e2%80%85les-negationnistes-poursuivent-loeuvre-des-genocidaires-%e2%80%85

  • Nos morts ne vous sont pas dues. Covid, suprématie validiste et interdépendance
    Par Mia Mingus
    Traduit de l’anglais (É-U) par Unai Aranceta et Elvina Le Poul

    Depuis le début de la pandémie, les malades chroniques, immunodéprimé⋅es, personnes âgées et handicapées sont particulièrement exposé⋅es au danger mortel que représente le covid. Iels doivent en plus affronter les effets indirects que la circulation du virus engendre : isolement, pénurie de personnels soignants, précarité. Pourtant, leurs vies restent perçues comme secondaires et l’écart se creuse avec les personnes valides qui se sentent peu concerné⋅es par les risques. L’autrice et formatrice Mia Mingus travaille sur la justice handie et la justice transformatrice. Elle invite à mettre au centre les personnes handicapées et à envisager la pandémie selon une perspective antivalidiste.

    https://www.jefklak.org/nos-morts-ne-vous-sont-pas-dues

  • Un monument involontaire. Sur l’année pandémique d’Egon Schiele

    Par Stassa Edwards
    Traduit de l’anglais (É-U) par Judith Chouraqui

    Mort à 28 ans de la grippe espagnole quelques jours seulement avant l’armistice de la Première Guerre mondiale, le peintre viennois Egon Schiele a laissé une œuvre témoignant des premières années chaotiques du XXe siècle européen. Partageant les souffrances de ses contemporain⋅es, l’héritier de Gustav Klimt a dû se débattre contre la pauvreté, la guerre, la maladie et la mort de ses proches. À travers l’étude de quelques-unes de ses toiles les plus significatives, retour sur les conditions sociales, matérielles… et sanitaires d’un travail artistique.

    https://www.jefklak.org/un-monument-involontaire

  • Maremme amère Toscane, souffrances et cultures ouvrières. Entretien avec Alberto Prunetti
    Par Thomas Pérès , traduction par Muriel Morelli et Laura Brignon

    Alberto Prunetti a grandi à Follonica, une ville située en haute Maremme, région faisant partie de la Toscane. Dans Amianto 1, il raconte la vie d’ouvrier itinérant que mena son père, sa maladie, due à l’amiante, contractée sur les chantiers où il travaillait, tout en entrecoupant son récit par ses souvenirs d’enfance dans cette cité industrielle. Son livre, à la fois tragique, drôle et tendre, donne une image non tronquée de ce que les économistes appellent complaisamment le « miracle économique italien », dont on occulte toujours le coût humain et environnemental.

    https://www.jefklak.org/maremme-amere

  • « J’espère reprendre la semaine prochaine. ». Entretien de fond pour garder la forme
    Par Xavier Bonnefond et le groupe son de Jef Klak

    Nager 4 km, puis pédaler sur 180 km, avant de finir par… un marathon, forcément, ça ne se fait pas sur un coup de tête. Il faut se préparer, 8 à 12 heures par semaine, redécouvrir son corps, son alimentation, son sommeil et ses limites. Quand Thomas s’est lancé dans cet entraînement, il se doutait bien qu’il allait lever le pied sur la picole, et que son quotidien serait bouleversé par une organisation drastique. Mais à ce point-là…

    Cette création sonore a été concoctée par Jef Klak lors de la préparation du cinquième numéro de la revue papier, « Course à pied », encore disponible en librairie, et vient finir sa course de fond auprès des autres pièces sonores de ce même numéro.

    https://www.jefklak.org/jespere-reprendre-la-semaine-prochaine-2

  • L’année du wombat. Pour un communisme du soin
    Par Madeline Lane-McKinkey
    Traduit de l’anglais (É-U) par Unai Aranceta et Violaine Lamouret

    Au tout début de l’année 2020, ce n’est pas encore à la chauve-souris et aux zoonoses que l’on s’intéresse mais au destin des animaux pris au piège dans les énormes feux de forêt en Australie.

    Parmi les millions d’êtres vivants qui périssent dans les flammes ou dont l’habitat est ravagé, le wombat fait peu à peu parler de lui. Petit marsupial ressemblant vaguement à un ours, il creuse et vit dans des terriers à l’intérieur des forêts montagneuses d’Australie. Au cœur du danger, il n’hésite pas à accueillir d’autres congénères et d’autres espèces au sein de ses galeries.

    Madeline Lane-McKinkey, rédactrice pour Commune et l’une des fondatrices de Blind Field : A Journal of Cultural Inquiry fait ici le pont entre l’expérience des désastres (sanitaire comme écologique) et l’instinct du wombat pour évoquer les luttes du collectif Moms 4 Housing à Oakland, en Californie.

    https://www.jefklak.org/lannee-du-wombat

  • Les cartes magiques de Jef. Micropolitique d’une revue

    Par Jef Klak
    Dessins : Maya Mihindou et Céline Picard

    Comment fonctionnent les rôles implicites et récurrents que chacun·e endosse tour à tour dans les collectifs ? Pour le sixième numéro de sa revue papier, « Pied à terre », Jef Klak a dressé un inventaire non exhaustif de ces fonctions, assumées ou subies, jouées ou évitées, qui circulent sur ses différents terrains : salles de réunion, lieux de résidences, fêtes de soutien, fils de mails ou réseaux sociaux.

    https://www.jefklak.org/les-cartes-magiques-de-jef

  • Un terrain favorable
    Par Raphaëlle Efoui-Delplanque

    « Il y a un terrain qui est à ma grand-mère qui est morte, voilà. Il fallait que je vous le dise dès le début parce que plus j’y réfléchis, moins je sais l’expliquer. »
    Jef Klak republie ici un texte extrait du sixième numéro de sa revue papier, « Pied à terre », encore disponible en librairie, issu du partenariat avec le Master de création littéraire de Paris 8.

    https://www.jefklak.org/un-terrain-favorable

  • La recherche s’aventure en terres indigènes. Perspectives maories sur l’exploration scientifique coloniale

    Par Linda Tuhiwai Smith
    Traduit de l’anglais par Samuel Lamontagne et Elvina Le Poul.

    Extrait du chapitre « Research Adventures on indigenous lands » de Decolonizing Methodologies. Research and Indigenous Peoples (Zed Books ldt / University of Otago Press, 1999).

    Que ce soit James Cook dans le Pacifique ou David Livingstone en Afrique australe, les récits des aventuriers européens des XVIIIe et XIXe siècles ont largement contribué à modelé le regard occidental sur les territoires et les corps qu’ils ont parcourus. Professeure d’Études indigènes maorie, Linda Tuhiwai Smith lutte contre l’invisibilisation des perspectives indigènes et la colonialité inhérente à la production du savoir scientifique 1. À partir de l’expérience maorie, elle remet en cause les méthodes et le rapport aux sources fondés sur la désappropriation, et l’imposition d’un partage entre celleux qui font de la recherche et celleux qui en sont l’objet.

    Dans son livre Decolonizing Methodologies. Research and Indigenous Peoples, paru en 1999 mais à ce jour inédit en français, elle renverse la perspective posée par les récits de voyage des explorateur⋅ices européen⋅nes en terres maories, investiguant ce qui se jouait dans l’ombre de ces chroniques romanesques dans un contexte où la recherche scientifique était indissociable des activités coloniales.

    https://www.jefklak.org/la-recherche-saventure-en-terres-indigenes

  • « Une fourche, un mouchoir, et tu te débrouilles. » La fabrique des colons en Nouvelle-Calédonie. Entretien avec Isabelle Merle

    Par Xavier Bonnefond

    Au milieu du XIXe siècle, la montée en puissance du secteur industriel et la concentration urbaine modifient en profondeur la société française. Les laissé·es pour compte sont de plus en plus nombreux·ses dans les faubourgs, et les vols font la une des journaux. Pour se débarrasser de ce « trop-plein » et résoudre une question sociale de plus en plus pressante, l’État décide d’établir en terres australes une petite France à l’antipode de la métropole  : la Nouvelle-Calédonie. Pour leur plus grand malheur, les Kanak voient leur île se transformer en une colonie pénitentiaire et résidentielle, sur laquelle le pouvoir colonial attribue des bouts de terres spoliées aux ex-bagnards et aux colons libres, dans l’espoir d’en faire des paysans laborieux. L’historienne Isabelle Merle 1, auteure d’Expériences coloniales. La Nouvelle-Calédonie. 1853-1920 2, revient avec nous sur le rôle et l’évolution de ces rouages de l’entreprise coloniale.

    Cet article est initialement paru dans le sixième numéro de la revue papier Jef Klak, « Pied à terre », toujours disponible en librairie.

    https://www.jefklak.org/une-fourche-un-mouchoir-et-tu-te-debrouilles

  • Difé. Bananes, chlordécone, cancers

    Par Némo Camus

    Samedi 27 février 2021, des milliers de manifestant·es se sont rassemblé·es en Martinique, en Guadeloupe et à Paris pour protester contre le déni de justice vécu par les victimes de l’empoisonnement au chlordécone.

    Les tribunaux renâclent à établir les responsabilités et la plainte déposée en 2006 est menacée de prescription. Le pesticide, dont la toxicité est connue depuis le début des années 1960, a pourtant été épandu dans les bananeraies de Martinique et de Guadeloupe pour lesquelles il a bénéficié de multiples autorisations dérogatoires jusqu’au milieu des années 1990. Polluant organique persistant et perturbateur endocrinien, il a contaminé les sols, l’eau et les corps – 90 % de la population est touchée – entraînant notamment une explosion du nombre de cancers.

    Dans cette pièce sonore , réalisée pour le disque Terre de feu qui accompagne le septième numéro de Jef Klak, résonnent les sonorités du travail agricole de femmes et d’hommes qui approvisionnent en bananes les marchés des pays occidentaux. De la polyphonie nocturne des grenouilles hylodes de Basse-Terre surgit un appel pour sortir de la grande nuit : Difé, difé limanité ki la, difé 1 !

    https://www.jefklak.org/dife

  • C’est la route qui compte. Portrait de Jef Klak en travailleur⋅se du son

    Par le groupe son de Jef Klak

    En février 2020 et dans la continuité de l’autoenquête travaillée dans notre numéro « Pied à terre », le groupe son de Jef Klak était invité au festival « Longueur d’ondes » à Brest. À plusieurs voix, nous sommes revenu⋅es sur les pratiques collectives du son en dressant un panorama de nos recherches et expérimentations de différents modes de productions et de collaborations. Au delà du plaisir et de l’enjeu de fabriquer ensemble, comment produire des œuvres, des objets culturels sans avoir de chaînes de hiérarchie entre nous ?

    Discussions et écoute d’extraits de nos différentes créations sonores pour faire entendre nos tentatives et nos réflexions, et entrer ainsi dans la fabrique collective du collectif…

    https://www.jefklak.org/cest-la-route-qui-compte

  • Les lacrymos, une arme de guerre civile. Comment les gaz devinrent le poison favori des suprémacistes blancs

    Par Anna Feigenbaum . Traduit de l’anglais (États-Unis) par Unai Aranceta, Ferdinand Cazalis et Elvina Le Pou l

    Texte original : « How Tear Gas Became the White Supremacist’s Favorite Poison », Mother Jones, 8 juin 2020.

    Armes de « contrôle des foules » par excellence, les gaz lacrymogènes semblent être devenus l’un des outils privilégiés du maintien de l’ordre contemporain. Leur usage dans le cadre de manifestations publiques s’est systématisé ces dernières années, au point que l’image de rassemblements noyés sous les gaz semblent être devenue la norme. Aux États-Unis, la répression des mouvements Black Lives Matter a apporté une nouvelle illustration de l’usage disproportionné que la police fait de ses armes, en particulier lorsqu’il s’agit d’étouffer les revendications des groupes les plus discriminés. Mais alors que l’expérience des effets des gaz est de plus en plus partagée, leur histoire, qui plonge ses racines dans la Première Guerre mondiale puis dans la gestion coloniale, reste souvent méconnue.

    https://www.jefklak.org/les-lacrymos-une-arme-de-guerre-civile

  • American gods stories. Migrations forcées, cultes détournés
    Par Bruno Thomé

    Dans American Gods (2001), le romancier et scénariste de comics Neil Gaiman décrit les déboires de dieux et déesses de l’Ancien Monde débarqué·es en Amérique du Nord avec leurs fidèles. En mal d’adorateurs et d’adoratrices et en prise avec l’arrogance des nouvelles divinités du capitalisme, leur parcours fait écho à celui de millions de personnes ayant eu un jour à faire des États-Unis leur chez-soi. Seize ans plus tard, les scénaristes de la série adaptée du roman ont voulu prolonger ce parallèle jusqu’à l’ère Trump, insistant sur le continuum multimillénaire de l’histoire des migrations vers le sol américain. Anatomie comparée.

    https://www.jefklak.org/american-gods-stories

  • Pour ne plus taire les jours où Parole à voix nue et ses résonances

    Par Aude Rabillon

    Le mouvement #Metoo, et de façon saillante certaines prises de parole, celles d’Adèle Haenel et, plus récemment de Camille Kouchner, comme mille autres récits d’abus, de viols, ont modifié l’écoute sociale envers les oppressions sexuelles. En s’intéressant aux feux qui couvent, le disque Terre de feu, qui accompagne le septième numéro de la revue papier Jef Klak, s’en fait chambre d’écho. L. s’est emparée du dispositif d’écoute et d’enregistrement que lui a tendu Aude Rabillon pour penser, énoncer, l’inceste qu’elle a subi. Elle perce les couches de silence et fait entendre la violence qui se propage en elle, et qui nous est impartie.

    https://www.jefklak.org/pour-ne-plus-taire-les-jours-ou

  • Covid-19 : la technologie ne nous sauvera pas Technosolutions pour détourner l’attention
    Par le collectif Unit

    Traduit de l’italien par Cabiria Chomel, Lucile Dumont et Claire Feasson

    Alors qu’en cette rentrée, les dernières illusions de sortie de crise sanitaire s’évanouissent, chacun⋅e est invité⋅e à reprendre travail, école et loisirs. Qu’importe si les capacités de tests et de soin restent insuffisantes, et si les directrices d’école et les chefs d’entreprise espèrent ne pas avoir bientôt à déclarer un nouveau cluster. Pour (un peu) se rassurer, il faudrait compter sur la nouvelle grammaire numérique testée à grande échelle pendant le confinement : visioconférences, téléconsultations, applis de traçage, etc. Un collectif de hackers italien⋅nes passe en revue quelques-uns des écrans de fumée digitaux qu’on nous sert sur un plateau.

    https://www.jefklak.org/covid-19-la-technologie-ne-nous-sauvera-pas

  • « La clé de cette grève des loyers est de l’étendre là où on ne l’attend pas. » Entretiens autour des mobilisations de locataires et de la grève des loyers aux États-Unis (3/3)
    Par Lucile Dumont

    Partout dans le monde, la pandémie de Covid-19 agit comme un puissant révélateur des inégalités sociales. Aux États-Unis elle s’articule notamment à la crise du logement que connaît le pays depuis de nombreuses années : la spéculation immobilière, la gentrification et la flambée des loyers ont conduit à une explosion du nombre de sans-abri ces dernières années. La crise sanitaire et les pertes d’emploi qu’elle a entraîné a mis de très nombreux⋅ses locataires dans l’impossibilité de payer leur loyer. Face à des mesures insuffisantes de la part des pouvoirs publics, les appels à la grève des loyers se sont multipliés, et les mobilisations autour des questions de logement ont nourri la dynamique existante des syndicats de locataires dans plusieurs grandes villes.
    Entretien avec Lexie Cook, de l’université Columbia à New York, et avec Lenora Hanson, de l’université de New York (NYU).

    https://www.jefklak.org/la-cle-de-cette-greve-des-loyers-est-de-letendre-la-ou-on-ne-lattend-pas/#fnref-9216-2

  • Garlic Lady vs. Draculords : résister aux propriétaires-vampires Entretiens autour des mobilisations de locataires et de la grève des loyers aux États-Unis (2/3)
    Par Lucile Dumont

    Partout dans le monde, la pandémie de Covid-19 agit comme un puissant révélateur des inégalités sociales. Aux États-Unis, elle s’articule notamment à la crise du logement que connaît le pays depuis de nombreuses années : la spéculation immobilière, la gentrification et la flambée des loyers ont conduit à une explosion du nombre de sans-abris. La crise sanitaire et les pertes d’emploi qu’elle a entraînées ont mis de très nombreux⋅ses locataires dans l’impossibilité de payer leur loyer. Face à des mesures insuffisantes de la part des pouvoirs publics, les appels à la grève des loyers se sont multipliés, et les mobilisations autour des questions de logement ont nourri la dynamique existante des syndicats de locataires dans plusieurs grandes villes.

    Entretien avec Corine Ombongo-Golden, locataire d’un appartement dans le Bronx à New York, membre de Right to Counsel et North West Bronx Community and Clergy Coalition (NWBCCC).

    https://www.jefklak.org/garlic-lady-vs-draculords-resister-aux-proprietaires-vampires

  • « L’arme la plus puissante des locataires est de ne pas payer leur loyer. » Entretiens autour des mobilisations de locataires et de la grève des loyers aux États-Unis (1/3)
    Par Lucile Dumont

    Partout dans le monde, la pandémie de Covid-19 agit comme un puissant révélateur des inégalités sociales. Aux États-Unis, elle s’articule notamment à la crise du logement que connaît le pays depuis de nombreuses années : la spéculation immobilière, la gentrification et la flambée des loyers ont conduit à une explosion du nombre de sans-abris. La crise sanitaire et les pertes d’emploi qu’elle a entraînées ont mis de très nombreux⋅ses locataires dans l’impossibilitéde payer leur loyer. Face à des mesures insuffisantes de la part des pouvoirs publics, les appels à la grève des loyers se sont multipliés, et les mobilisations autour des questions de logement ont nourri la dynamique existante des syndicats de locataires dans plusieurs grandes villes.

    Entretien avec Rob Wohl, qui participe à la campagne Stomp Out Slumlords à Washington, et Julian Francis Park, membre du Tenant and Neighborhood Councils à Oakland, dans la baie de San Francisco.

    https://www.jefklak.org/larme-la-plus-puissante-des-locataires-est-de-ne-pas-payer-leur-loyer

  • Que faire de la police ? Les fonctions du maintien de l’ordre social en question

    Par Jef Klak

    Lamine Dieng, Babacar Gueye, Adama Traoré… La liste est longue des personnes racisées tuées par la police en France. Impunité des forces de l’ordre, contrôles au faciès, insultes répétées, omerta au sein des services de police… Les pléthoriques injustices à l’œuvre dans le « maintien de l’ordre » sont avérées par de nombreuses études. Maintenir un ordre social injuste, telle est la doctrine de la police ; et partout l’on supprime des postes (dans la santé, l’éducation, le travail social), pendant que les moyens alloués au ministère de l’Intérieur ne font qu’augmenter. La logique est claire dans l’histoire néolibérale des quarante dernières années : transférer les budgets pour la prévention et l’émancipation dans les secteurs de la répression et de l’enfermement. C’est contre ce choix de société que nombre de citoyen·nes des États-Unis se battent en faveur d’une abolition de la police. Et c’est pour un autre modèle social qu’est né le mouvement « Defund the police » (« Couper les vivres à la police ») à la suite du crime policier qui a tué Georges Floyd en mai 2020. L’allocution du sociologue d’Alex S. Vitale (auteur de The End of Policing, Verso, 2017) traduite ici rappelle ce travail de base des militant·es abolitionnistes pour changer de modèle. Plutôt que budgétiser une police contre la population et d’essayer de rendre sympathique celles et ceux qui sont payé·es pour terroriser, nous devrions refuser la légitimité de leur fonction et rediriger l’argent public dans des missions sociales : le logement, le soin, l’entraide. Jef Klak a décidé d’accompagner ce texte de la traduction d’un tableau réalisé par le groupe Critical Resistance pour détailler les mesures qui ne font qu’élargir les pouvoirs de la police sous couvert de réformes humanistes, au lieu de repenser en profondeur une organisation sociale au service des plus riches et du racisme systémique.

    https://www.jefklak.org/que-faire-de-la-police

  • Devant Moria 2/2 « Je n’ai même pas fait mes valises. »

    Par Clément Aadli, Adrien Chevrier et Amélie Perrot

    Ouvert en 2013 sur l’île de Lesbos en Grèce sur le site d’une ancienne base militaire, le camp de Moria accueille et retient les réfugié·es qui cherchent à rejoindre l’Europe. L’un des cinq centres d’enregistrement et de contrôle situés en mer Egée, il se double d’un centre de détention, témoignant d’une gestion sécuritaire et d’une criminalisation de ces migrations. Coercition, détention arbitraire, expulsions, refoulements massifs et violations des droits fondamentaux sont au rendez-vous. Prévu pour loger 3 000 personnes, on dénombre en janvier 2020 plus de 20 000 personnes vivant à l’intérieur du camp et à ses abords.

    En septembre 2018, Clément Aadli, Adrien Chevrier et Amélie Perrot mettent en place des ateliers de radio hébergés dans un accueil de jour situé en marge du camp. Emportant des enregistreurs avec elles et eux, les participant·es des ateliers racontent, interviewent d’autres habitant·es, captent la vie du camp et inventent leur radio (voir à ce sujet la première partie de cette publication, « Une radio face au camp de réfugié⋅es de Lesbos »). À l’heure où la crise du coronavirus et le défaut de protection sanitaire les vulnérabilisent encore davantage, retour sur le parcours de quatre réfugiés de Moria, partis d’Iran, du Cameroun ou d’Afghanistan. Portraits.

    https://www.jefklak.org/devant-moria-2-2

  • Devant Moria. Une radio face au camp
    Par Clément Aadli, Adrien Chevrier et Amélie Perrot
    Photographies par Ahmad Ebrahimi

    Ouvert en 2013 sur l’île de Lesbos en Grèce sur le site d’une ancienne base militaire, le camp de Moria accueille et retient les réfugié·es qui cherchent à rejoindre l’Europe. L’un des cinq centres d’enregistrement et de contrôle situés en mer Egée, il se double d’un centre de détention, témoignant d’une gestion sécuritaire et d’une criminalisation de ces migrations. Coercition, détention arbitraire, expulsions, refoulements massifs et violations des droits fondamentaux sont au rendez-vous. Prévu pour loger 3 000 personnes, on dénombre en janvier 2020 plus de 20 000 personnes vivant à l’intérieur du camp et à ses abords.

    En septembre 2018, Clément Aadli, Adrien Chevrier et Amélie Perrot mettent en place des ateliers de radio hébergés dans un accueil de jour situé en marge du camp. Emportant des enregistreurs avec elles et eux, les participant·es des ateliers racontent, interviewent d’autres habitant·es, captent la vie du camp et inventent leur radio. Retour en deux parties sur cette expérience radiophonique à l’heure où la crise du coronavirus et le défaut de protection sanitaire vulnérabilisent encore davantage les réfugié·es de Moria.

    https://www.jefklak.org/devant-moria

  • Virus global, misère locale. La pandémie et la rue à Strasbourg
    Par Justine Partout

    « Restez chez vous ! » Deux mois que le mot d’ordre est asséné par les médias à destination des foules prétendument irresponsables. Mais comment faire quand de chez soi, justement, on n’en a pas, ou quand il ne permet pas de mettre en œuvre les gestes barrières les plus élémentaires ? À Strasbourg comme ailleurs, les sans-abri et les habitant⋅es de squats sont rendus encore plus vulnérables par les mesures de confinement, qui les privent d’accès au droit, à l’eau, à l’hygiène la plus élémentaire. Dépassées, incapables de penser des solutions à long terme pour les plus fragiles, les municipalités laissent le virus creuser des inégalités pourtant déjà criantes.

    https://www.jefklak.org/virus-global-misere-locale

    • La semaine du 17 mars, la première du confinement, une femme âgée de 59 ans, habitante du squat Bugatti et présentant des symptômes, se rend deux fois à l’hôpital. Son état ne suscitant pas d’inquiétude, elle est renvoyée « chez elle ». Elle sera finalement hospitalisée le dimanche 22 mars, de même qu’un autre résident du squat. Toustes deux seront testé·es positif·ves au Covid-19. Au moins deux autres personnes seront hospitalisées les jours suivants. Parmi elles, un homme, père de 9 enfants vivant au squat, mourra début avril des suites du coronavirus.

      Le 25 mars, un homme, qui a été brièvement hospitalisé et testé positif au Covid-19 est ramenée en ambulance au squat. Il n’y restera que quelques heures, mais son retour suscite colère et anxiété. « J’ai très peur. Si quelqu’un est malade, pourquoi l’inviter là où il y a beaucoup de personnes qui essayent de se protéger ? », interroge un résident.

      Sur place, l’ennui monte aussi. Un résident raconte : « Ça me rend fou de rester assis à rien faire ». Certain·es font des allers-retours en ville, notamment pour se rendre aux rares distributions alimentaires maintenues et à la rencontre des maraudes qui se mettent en place pour pallier la fermeture de presque tous les accueils de jour.

      Une opération menée du 26 au 28 mars au squat Bugatti par Médecins du monde, qui était prévue avant les premières hospitalisations, permet de détecter douze cas supplémentaires 2. Comme seules les personnes jugées vulnérables et présentant des symptômes ont été testées, de nombreux cas ont échappé au diagnostic. Parmi les personnes qui ne sont pas considérées comme à risques et qui n’ont pas été dépistées, celui qui joue le rôle de référent du squat, qui distribuait les masques livrés par l’ONG, les repas et colis apportés par les associations et qui détenait le thermomètre utilisé pour le suivi quotidien des personnes, tombera très malade début avril.

      C’est pas la première ligne, c’est malades pour rien, par négligence des autorités, par pauvreté et promiscuité. Lien vers cette question d’une société qui accepte d’avoir des maillons faibles par manque d’humanité et manque de compréhension de ce qu’est la santé publique.

    • @seenthis on avait déjà noté (avec @sombre) que modifier un commentaire long entraînait le renvoi vers la page d’accueil. Mais depuis quelques semaines quand on revient depuis la page d’accueil sur la page du com’, on a la vieille version de la page qui s’affiche sans le com, il faut la mettre à jour et ça demande un clic de plus pour pouvoir modifier le com en question.

  • Milan, guide rouge

    Mode, précarité et biosyndicats

    Par Ferdinand Cazalis

    https://www.jefklak.org/milan-guide-rouge

    Enquêter sur cette petite bourgeoisie déclassée permet d’en apprendre beaucoup sur la forme moderne de l’exploitation, car c’est en passe de devenir la forme majoritaire du travail, dans une universalisation de la précarité. Aujourd’hui, tu passes ta vie dans la précarité, pas seulement ta jeunesse. Ce n’est plus le triste sort de quelques malchanceux, ou de paresseux, c’est au contraire le modèle, la matrice de l’emploi contemporain, expérimenté dans les secteurs les plus immatériels, mais ensuite décliné à l’ensemble de la production. Si l’on n’arrive pas à penser ce problème, on ne peut pas développer une politique et un parcours d’émancipation.

    En effet, on ne peut plus faire démarrer l’analyse sur l’ancienne classe ouvrière, ça ne veut presque plus rien dire. Ma fille par exemple a commencé en travaillant comme réalisatrice de film il y a 20 ans et elle gagnait le double par rapport à maintenant. Il y a eu une énorme dégradation des salaires, et si l’on veut gagner le minimum pour vivre, on doit faire des journées de travail de 14 à 15 heures pour gagner 150 euros. La concurrence permet d’expliquer cela, avec la saturation des candidats dans ce secteur, bien sûr, mais c’est surtout que les gens sont de plus en plus disposés à travailler pour rien. C’est assez incroyable. Ils ne parviennent pas à se regrouper, à se fédérer…