Ces derniers jours, lire la presse ou regarder la tĂ©lĂ© nous replonge presque en Union SoviĂ©tique ou sous lâAncien RĂ©gime, tant le contenu est outrageusement favorable au nouveau Premier Ministre, glorifiant jusquâau ridicule des dirigeants pourtant largement dĂ©testĂ©s par les français.Dans un article du journal #LeMonde, Ă propos de la rĂ©volte agricole de ces derniers jours, câest un Ă©loge gluant de Gabriel Attal qui sâĂ©tale dans les colonnes. Le Premier Ministre y est dĂ©crit comme Ă©tant « rĂ©putĂ© pour son art oratoire et ses nuits sans sommeil ». Notre jeune guide ne dort jamais, peut-ĂȘtre mĂȘme marche-t-il sur lâeau et se nourrit-il de lumiĂšre !
Attal, tel le hĂ©ros dâune grande Ă©popĂ©e, doit selon Le Monde « apaiser en quelques heures le malaise paysan » par la seule force de sa persuasion. Pourquoi pas rĂ©gler le problĂšme en quelques minutes !
Probablement dans une transe confuse, la journaliste Ă©crit : « ses Ă©quipes espĂšrent un HĂ©micycle debout, pour applaudir le plus jeune premier ministre de lâhistoire de la Ve RĂ©publique ». Sans prĂ©ciser que ce gouvernement nâa mĂȘme pas la majoritĂ© et ne dirige plus que par 49.3 et grenades, et que Gabriel Attal nâa aucun autre mĂ©rite autre que les rĂ©seaux des beaux quartiers parisiens quâil nâa jamais quittĂ©.
Gabriel Attal, comme le personnage principal dâun film dâaction, « avale les notes que lui transmettent les Ă©lus de terrain, rencontre lâensemble des syndicats, pĂšse et soupĂšse les options » et va se « se porter au chevet » des paysans, comme un bon pĂšre face Ă ses enfants.
Le Monde ose mĂȘme, Ă propos dâun discours devant les agriculteurs : « Ont-ils Ă©tĂ© Ă©tourdis par celui qui est considĂ©rĂ© comme un as de la communication ? » Allons plus loin, ils ont sans doute Ă©tĂ© « Ă©blouis par son sourire lumineux ».
Le rĂ©cit termine par les « remerciements » dâun agriculteur au Premier Ministre, tel un gueux se prosternant devant la gĂ©nĂ©rositĂ© de son seigneur. Le Monde oublie de prĂ©ciser que cet agriculteur est membre de la FNSEA et proche du gouvernement.
Faire reluire le pouvoir, câest une affaire de famille. La cheffe du service politique du journal le Monde se nomme Ivanne Trippenbach, et elle est en couple avec un conseiller de Gabriel Attal, Rayan Nezzar. On trouve donc Ă la tĂȘte du grand quotidien « de rĂ©fĂ©rence » une personne qui est dans le premier cercle affectif du chef du gouvernement. En toute indĂ©pendance.
Le site ArrĂȘt sur Images Ă©voquait des « remous » au sein du Monde aprĂšs la nomination de Rayan Nezzar comme « conseiller, chef du pĂŽle action et comptes publics » auprĂšs du Premier ministre. Sauf que Rayan Nezzar travaillait dĂ©jĂ avec Gabriel Attal lorsquâil Ă©tait ministre de lâĂducation nationale.
MĂ©diapart racontait un dĂ©but de fronde au sein du journal, certains salariĂ©s pointant le conflit dâintĂ©rĂȘt, entraĂźnant la tenue dâune « rĂ©union du comitĂ© dâĂ©thique et de dĂ©ontologie du groupe Le Monde afin de rĂ©soudre la crise ».
Suite Ă cette mobilisation, Ivanne Trippenbach annonçait samedi soir quâelle changeait de service devant « lâĂ©moi suscitĂ© ». Sauf quâelle rejoint « le service des grands reporters », un autre poste stratĂ©gique. Pas vraiment une mise au placard.
Cette consanguinitĂ© organique entre les mĂ©dias et le gouvernement sâillustre aussi du cĂŽtĂ© de la Ministre de lâĂducation, AmĂ©lie OudĂ©a-CastĂ©ra. Venue de la haute bourgeoisie, elle est hĂ©ritiĂšre dâun couple composĂ© du boss de Publicis, une agence de comâ proche du pouvoir, et dâune DRH, Dominique Duhamel. Elle est de la mĂȘme famille que les cĂ©lĂšbres animateurs tĂ©lĂ© Nathalie Saint-Cricq, Patrice Duhamel ou Benjamin Duhamel, prĂ©sentateur chez BFM TV. Le monde est petit.
Elle est aussi mariĂ©e Ă lâancien patron de la SociĂ©tĂ© GĂ©nĂ©rale, qui est aujourdâhui Ă la tĂȘte de Sanofi, multinationale du business pharmaceutique. Comme par hasard, on apprenait ce matin que lâamie dâenfance dâAOC est, depuis des annĂ©es, administratrice “indĂ©pendante” de la SociĂ©tĂ© GĂ©nĂ©rale. Le hasard fait bien les choses.
Ces gens cumulent le capital Ă©conomique, les rĂ©seaux, et les relations sentimentales voire familiales au sein de mĂ©dias qui fabriquent lâopinion. Câest beau, cet esprit de famille.