Vacarme

Vacarme est une revue trimestrielle publiée sur papier et prolongée en ligne, qui mène depuis 1997 une réflexion à la croisée de l’engagement politique, de la création artistique et de la recherche.

  • Ici : les corps politiques, par Léo Kloeckner, Sandra Lucbert, Flaminia Paddeu & Fanny Taillandier - Vacarme avec @Urbanites
    http://www.vacarme.org/article2866.html

    L’occupation de la place permet à la foule amassée d’imposer sa présence dans l’espace urbain, et de fonder son existence en ville, de la manifester aux yeux de tout le corps social. Mais l’#espace_public n’a pas besoin de la #place de la République pour exister, puisque c’est la réunion, le dialogue ouvert entre des inconnus qui l’instaure en fondant le collectif. C’est le rassemblement d’individus dans l’effort conjugué de l’élaboration d’un sens commun (ce qui ne veut surtout pas dire univoque), qui fait de la place un espace public.

  • entretien avec le fantôme de Maximilien Robespierre, par Sophie Wahnich
    http://www.vacarme.org/article2846.html

    Depuis les attentats du 13 novembre 2015, le mot « guerre » est redevenu prononçable dans l’espace public. Pensez-vous que ce soit une bonne ou une mauvaise chose ?

    Je suis adepte d’un langage de vérité, et il est difficile de cacher plus longtemps cet état de fait. La France fait effectivement la guerre à quantité d’organisations islamiques djihadistes, partout elle envoie des soldats, mais aussi des tueurs ou des drones pour accomplir des assassinats ciblés qui ne sont désormais inconnus que de ceux qui ne veulent pas savoir. Depuis ma condition de fantôme, je l’observe depuis un moment. On pourrait dire qu’enfin les Français prennent conscience qu’une guerre se mène en leur nom.

    Cette méconnaissance vient à mon sens des institutions de votre Ve République. (…)

  • Corse, régionales 2015
    http://www.vacarme.org/article2825.html

    Pendant que sur le continent l’heure était aux « triangulaires », en #Corse se tenait une quadrangulaire dont le résultat fut sans appel : quand le candidat Front national réussissait à perdre des voix entre les deux tours, la liste d’union des nationalistes l’emportait assez largement. De manière d’autant plus nette que le taux d’abstention y à chaque fois été bien inférieur à la moyenne « nationale ». Depuis, Gilles Simeoni a été élu président du Conseil exécutif de Corse et Jean-Guy Talamoni président de l’assemblée. Cette situation, inédite, vient poursuivre la dynamique ouverte par l’élection de Simeoni comme maire de Bastia en 2014, mettant ainsi fin à la quarantaine d’années de mandat de la famille Zuccarelli.

  • Une réaction présidentielle
    http://www.vacarme.org/article2824.html

    Ctrl Z. Confronté à une deuxième vague d’#attentats en un an, le président français a disparu quelques jours pour préparer son intervention devant le Congrès convoqué à Versailles — ce que nous ignorions encore, à cet instant, c’est que ce serait la dernière fois en ce lieu. Incommunicable, cette retraite mystérieuse du chef de l’État annonçait des décisions extraordinaires. « Impossible de prédire si la réponse à ce que nous étions en train de vivre serait un quelconque lynchage organisé ou quelque forme de révolte collective », notait déjà un témoin des explosions de Madrid, dix ans plus tôt. La #France à son tour semblait bien incapable d’imaginer la suite... Du moins jusqu’à ces journées de novembre. Retour sur une possible réaction présidentielle.

  • Lignes de fond en Méditerranée - entretien avec Jocelyne Dakhlia par Zoé Carle (@osezkarl) & Valentin (@vally) Chémery
    http://www.vacarme.org/article2747.html

    Sous nos regards médusés et impuissants, se consolident le « choc des civilisations », le clash des cultures, la nouvelle ligne de front entre monde occidental et monde musulman. Pratiques « médiévales » de l’État islamique, incompatibilité atavique entre islam et démocratie, retour des Maures et des Barbaresques, l’imagerie faussement historique est là pour alimenter fantasmes et passions dangereuses. Pour revenir sur les relations anciennes des sociétés du pourtour méditerranéen et penser leur coalescence, leur interrelation plutôt que leur face à face, nous avons rencontré l’historienne Jocelyne Dakhlia.

  • L’essentiel n’est pas ce qu’on a fait des musulmans mais ce qu’ils font de ce qu’on a fait d’eux - Vacarme
    http://www.vacarme.org/article2811.html

    Convoquant aussi bien le souffle long de l’histoire que les outils de la psychanalyse qu’il pratique et enseigne à l’Université Paris 7, Fethi Benslama met les pieds là où ça grince. S’occupant de l’islam parce que celui-ci s’est occupé de lui, il n’a de cesse de rappeler combien les conflits du monde musulman contemporain concernent aussi, peut-être d’abord, les modes de subjectivation qui s’y déploient. Reprenant le diagnostic d’une cassure irrémédiable des structures traditionnelles, sa pensée se tisse à partir de l’analyse des processus psychiques induits par les conflagrations politiques et économiques du présent. Car c’est en constante prise avec l’actualité que Fethi Benslama conduit son travail : de sa Déclaration d’insoumission en 2005 à son engagement dans le surgissement révolutionnaire tunisien de 2011, il dissémine sans relâche pour accompagner les forces de liaison porteuses d’un avènement démocratique toujours incertain.

    #islam #fondamentalisme #lumières #colonialisme

  • Voter l’état d’urgence, c’est légaliser l’arbitraire
    http://www.vacarme.org/article2823.html

    Le Parlement français a approuvé la prolongation pour trois mois de l’état d’urgence à la suite des attentats du 13 novembre 2015 à Paris et Saint-Denis. D’où procède cet état d’urgence ? D’une loi votée le 3 avril 1955, préparée sous le gouvernement de Pierre Mendès France, mais votée sous le suivant, dirigé par Edgar Faure. Cet état a été en vigueur trois fois durant la guerre d’Algérie : 1955, 1958 au moment de la crise de la IVe République et en 1961 durant le putsch des généraux. Dès le départ, il y a une ambiguïté dans les termes de cette loi : l’état d’urgence est choisi plutôt que l’état de siège, afin de taire l’existence de la guerre d’Algérie mais aussi de nier le statut de combattants aux nationalistes algériens. Cette ambiguïté demeure aujourd’hui. Source : (...)

    • Je suis parti la France : je me souviens de cette parole saisie il y a vingt ans lors d’une audience du tribunal du 35 bis , au Palais de Justice de Paris.

      J’ai décidé de partir comme on prend un grand coup sa respiration et qu’on saute. J’avais certainement un besoin vital de me surprendre, de me retrouver dans des lieux et des paysages où je ne m’attendais pas. Plus de « Soleil » et de dimanches matin sur le boulevard de Ménilmontant, plus de rue de Belleville (mais, après 14 ans d’absence, je peux encore la redescendre depuis le métro Télégraphe jusqu’à Goncourt les yeux fermés), plus de rendez-vous à la Goutte d’Or ou devant la fontaine de la place Saint-Michel, plus de remontées du canal de l’Ourcq, plus d’occupations d’Assedic et de réunions militantes dans ce local de la Place d’Italie qui appartenait à la SCNF...

  • « La guerre des mondes d’Orson Welles » dans Samedi noir (#France_Culture)
    http://www.franceculture.fr/emission-fictions-samedi-noir-la-guerre-des-mondes-2015-10-31

    En même temps qu’à La Guerre des mondes, mythe radiophonique fondateur, c’est à la #radio elle-même que j’aimerais rendre hommage. La programmation en public de la Maison de la Radio me semble être une occasion propice à saluer, aux côtés du génie d’un homme, le génie d’un art. Celui de sa nature subtile et de ses coup d’éclats, de ses artifices et de ses bouts de ficelle, celui de la manière rusée dont il s’adresse au monde.

    Accompagnés de sept musiciens et de six comédiens, nous reconstituerons au studio 105 la facétie de Welles à travers un ensemble de techniques qui ont fait l’histoire de notre pratique : du quatuor à cordes au sampleur, de la bande magnétique aux technologies numériques en passant par les bruitages, nous parcourrons une histoire qui, aussi mouvante soit-elle, s’est voulue depuis son origine capable d’agir et d’influer sur notre imaginaire pour rendre compte et transformer notre réalité.

    #Alexandre_Plank [réalisateur]

    http://rf.proxycast.org/1090803620305182720/11496-31.10.2015-ITEMA_20830412-0.mp3

    #Orson_Welles #H.G.Wells #audio #radio #fiction_radiophonique #création_radio

  • Vacarme signe une nouvelle formule parce que c’est le printemps. Pas très visible comme ça, puisque c’est la rentrée, et qu’on est en automne et que surtout les temps politiques en France, en Europe et dans le monde sont plutôt à l’hiver. Nouvelle formule donc, pour formuler le désir de se faire entendre, encore, toujours ; on ne désarme pas, on est là.

    http://www.vacarme.org/article2803.html

  • Ne rentrons pas dans le rang ! - Vacarme 73 - Chantier « Rentrer hors des clous » - Ouverture http://www.vacarme.org/article2802.html

    La plupart des rentrées ne sont que des rappels à l’ordre, comme des sortes de déclinaisons infinies du mot que Marcel Jouhandeau aurait adressé, suivant la légende, aux manifestants de Mai 68 : « Rentrez chez vous ! Dans vingt ans, vous serez tous notaires ». Misère perpétuée de cette espèce d’essence pure de la pensée réactionnaire : rien ne sert de sortir car chacun finira par rentrer dans son lieu, dans sa classe, dans l’immuable ordre du monde. Ô toutes ces foutaises et tous ces mensonges : rentrée des classes, rentrée économique, rentrée littéraire — toujours enjoindre chacun à revenir à ce qui doit se penser, s’entreprendre, s’écrire. Même la rentrée sociale est devenue une blague : « cette année, ça va chauffer », eh oui, ça va chauffer — et puis rien. Dans les faits, la situation est toutefois un peu plus ambivalente. Cet été, on n’a pas seulement demandé à la Grèce, et à tous les pays susceptibles de l’imiter, de rentrer dans le rang, on lui a demandé de rentrer dans des clous où il est impossible de vivre jusqu’à ce qu’elle en sorte pour de bon. Et c’est pareil avec tous les migrants : on les enjoint comme jamais à rentrer chez eux, et en même temps on les place dans des conditions où il est impossible de rentrer. Tandis qu’on demande toujours de partir à nos propres pauvres — ça s’appelle la flexibilité.

    Voilà ce qui mérite d’être interrogé : il y a aujourd’hui une violence symétrique dans l’injonction à rentrer et dans l’injonction à sortir qui laisse chacun hagard, dans un in-between state où il n’y a plus ni sens, ni orientation, ni projet commun. Alors on fait comment pour subvertir tout cela, pour rentrer mais hors des clous ?

  • l’universel a-t-il jamais été abstrait ? FAQ, par Sophie Wahnich
    http://www.vacarme.org/article2740.html

    Abandonner l’#universel. Leitmotiv des discours politiques depuis la Révolution française. Abstrait, inutile, réactionnaire, il aurait masqué les hommes réels. Quelle place pour les esclaves, les femmes, les pauvres, les colonisés, les immigrés, les gays… ? Retraçant la généalogie de ses détracteurs, Sophie Wahnich réaffirme au contraire la nécessité de revendiquer la force émancipatrice de l’universel pour forger un idéal politique à même de mobiliser vers un au-delà utopique. Loin d’être une abstraction vide et mortifère, il permet au contraire de faire surgir dans le présent des avenirs qui ne sont pas encore.

    • Mais la Déclaration des droits de 1789 fait ses preuves car elle ne se contente pas de déclarer l’humanité une, elle affirme le droit de résistance à l’oppression en le fondant sur le principe de la liberté réciproque. Là encore l’hypothèse d’une humanité une permet de fonder ce droit. Dans son exposition raisonnée des droits de l’homme qui précède la rédaction du texte, Sieyès affirme « Tous ayant un droit découlant de la même origine, (…) il suit que le droit de chacun doit être respecté par chaque autre, et que ce droit et ce devoir ne peuvent pas ne pas être réciproques. Donc le droit du faible sur le fort est le même que celui du fort sur le faible. Lorsque le fort parvient à opprimer le faible, il produit effet sans produire obligation. Loin d’imposer un devoir nouveau au faible, il ranime en lui le devoir naturel et impérissable de repousser l’oppression. C’est donc une vérité éternelle, et qu’on ne peut trop répéter aux hommes, que l’acte par lequel le fort tient le faible sous son joug, ne peut jamais devenir un droit ; et qu’au contraire l’acte par lequel le faible se soustrait au joug du fort est toujours un droit, que c’est un devoir toujours pressant envers lui-même. »

      La violence du droit ce n’est pas n’importe quelle violence, c’est la violence qui permet de sortir de l’esclavage, pas la violence qui réduit en esclavage.

    • Les conflictualités politiques sont forcloses au profit d’une défense de l’Occident face à l’Orient. Pourtant il faudrait défendre la liberté de conscience et la liberté de penser pour retrouver un espace commun. Chacun peut croire mais personne ne peut au nom des croyances transformer l’espace de liberté commune. Liberté de porter le voile et liberté de blasphémer, liberté de vivre même en communautés distinctes mais sans que cela fasse appel à un droit différent. Maintenir l’horizon commun du droit et la possibilité pour chacun de ne pas être assigné à résidence par sa seule naissance…

      Bien sûr cela ne résout pas les inégalités sociales, car le droit n’est pas le tout de la politique et l’universel relève à la fois du droit et de l’horizon utopique. Entre les deux il y a le cambouis des luttes.

    • alors Laurent, tous ces grands principes ne vont pas s’appliquer à moi c’est ça ? tu combats l’injustice mais quand j’ai besoin d’un mot de ta part pour m’aider quand je me retrouve dans une procédure pour avoir défendu des enfants qui se faisaient taper par un flic saoul, tu ne m’aides pas ?

  • retour des ruines
    http://www.vacarme.org/article2717.html

    Le XXIe siècle s’invente sur les #ruines du XXe siècle, dans un goût pour la décrépitude qui confine parfois au ruin porn. Mais cette esthétique qui se veut celle d’un monde d’après, post-apocalyptique, post-moderne, n’est jamais que la réactualisation d’une fascination ancienne pour les mondes perdus sous la forme d’une nostalgie réactionnaire occidentale. La mise en scène de la ruine vise à cacher la misère du monde : elle dévoile en fait les ressorts d’une idéologie en béton armé.

  • Aux dirigeants du Louvre Abu Dhabi
    http://www.vacarme.org/article2787.html

    Partant du principe que les libertés des artistes sont liées aux droits des travailleurs qui construisent et entretiennent les espaces d’expositions, le collectif Gulf Labor Coalition interpelle, dans une lettre que nous reproduisons, les responsables engagés dans la réalisation du « premier musée universel du monde arabe ».

    http://gulflabor.org

  • Mort de Jack Goody, anthropologue britannique
    http://lemonde.fr/disparitions/article/2015/07/17/mort-de-jack-goody-anthropologue-britannique_4687627_3382.html

    Grand anthropologue britannique, doyen des études africaines en Angleterre, Jack Goody est mort le jeudi 16 juillet, à quelques jours de ses 95 ans.

    En 2009, Stany Grelet, Éric Guichard & Aude Lalande s’entretenaient avec lui.

    « La matière des idées »
    http://www.vacarme.org/article1814.html

    (…) Jack Goody a diversifié ses objets. Mais sa conception de l’écriture trace une ligne qui parcourt tout son travail : d’un côté, combat pied à pied contre l’ethnocentrisme, d’un livre à l’autre (non, l’Occident n’a pas inventé l’amour porté aux enfants, non, il n’est pas le seul à avoir connu une Renaissance) ; de l’autre, refus d’un relativisme qui nie les plus beaux progrès de l’humanité : à l’échelle macro-historique comme dans l’histoire d’une vie, l’invention, l’apprentissage et la maîtrise de certaines techniques, l’écriture en premier lieu, cela change tout. Égalité des intelligences, différences d’outillage : voilà l’universalisme goodien.

  • En sortant du Louxor, métro Barbès-Rochechouart. À propos de « L’Ombre des femmes » (Garrel) & « Trois souvenirs de ma jeunesse » (Desplechin), par Arthémis Johnson (@artemis1)
    http://www.vacarme.org/article2783.html

    Dans les deux derniers films de Garrel et Desplechin, en compétition à Cannes, cette année, les femmes ne sont pas comestibles. D’abord, on n’a pas du tout envie de manger une ombre. On préfère plutôt quand « ça consiste », même si cette « Ombre » débute, par les hasards de la typo, par une majuscule. Ensuite, on n’a pas du tout envie de digérer une trajectoire amoureuse, aussi majestueusement racontée soit-elle, quand elle est seulement vécue par un héros qui se réjouit, frontal, que la femme qu’il aime ait une « intelligence qui ne l’écrase pas » (Desplechin).

    La réplique est malheureuse, malheureuse... d’autant plus qu’elle survient alors même que cette chérie, bien mignonne au demeurant, lui dit qu’elle n’est rien sans lui, rien de rien, et qu’elle se trouve surtout très bête, comparée à lui. Ne vous inquiétez pas, concernant le motif féminin, on n’a même pas encore atteint le sommet du film. A cela, rajoutons que le héros fait des études d’anthropologie à Paris et que la fille demeure fille de tailleur à Roubaix et tout est dit. Ou presque.

    C’est dur d’être une femme au cinéma.

  • Régis Debray, l’Éducation nationale et les immigrés
    http://www.vacarme.org/article2782.html

    Monsieur Régis Debray, mesdames et messieurs les responsables éditoriaux de La République expliquée à ma fille, mesdames et messieurs les concepteurs de sujet d’éducation civique du Diplôme national du Brevet 2015,

    On savait que les temps étaient à la confusion et l’on ne s’en réjouit pas. On entend bien que les approximations de vocabulaire sont légion. Une partie de notre métier consiste au demeurant à définir et expliquer des termes dont les usages sont devenus si peu rigoureux que certaines de nos séances d’histoire-géographie et d’éducation civique peuvent être consacrées à démêler l’écheveau d’amalgames savamment entretenus par les discours publics. Il n’empêche que c’est avec une certaine stupéfaction que nous avons pris connaissance du texte proposé aux élèves pour la partie d’éducation civique du Diplôme national du Brevet 2015. Extrait de La République expliquée à ma fille, déclinaison d’une série éditoriale à succès, celui-ci est de la plume de Régis Debray. On sait sa parole écoutée et relayée – notamment sur les questions scolaires depuis son rapport de 2002 consacré à l’enseignement laïque du fait religieux. Il a été au demeurant auditionné en mai par la commission sénatoriale sur le service public de l’éducation. Par ailleurs, invité lors de la matinale de France Inter en avril dernier, il déclarait « ne pas vouloir d’une école qui reproduirait les vices du monde extérieur ». Soit. Mais c’est tout le contraire qui a été donné à lire : le texte est en effet emblématique des flottements sémantiques à l’œuvre de manière insistante depuis des années. Nos élèves n’y échappent pas tant ils boivent ce qui partout circule. Nous nous permettrons donc une petite leçon à l’attention des destinataires de ce billet, en pointant seulement les dernières lignes afin de nous contenter de l’essentiel comme l’institution nous y invite si souvent…

  • Pour une approche matérialiste de la question raciale. Une réponse aux Indigènes de la République
    http://www.vacarme.org/article2778.html

    Les Indigènes de la République ont contribué à rendre visible un racisme de gauche, appuyé sur le racisme intégral consubstantiel à la société française, mais seraient-ils prisonniers de ces enjeux ? Une analyse systématique des champs de force qui s’exercent sur les plus précarisés permet de sortir de l’ornière : une critique conséquente de l’invisibilisation des questions raciales et de genre, échappant au grand jeu identitaire de l’extrême droite, ancrée dans la critique de l’économie politique.

    Lire aussi l’entretien que nous a accordé Houria Bouteldja dans le numéro 71 (printemps), « Revendiquer un monde décolonial »
    http://www.vacarme.org/article2738.html

    Le Parti des indigènes de la République, a adopté depuis longtemps un objectif de dénonciation de la racisation opérée en France. Il clive la gauche antiraciste. Notre sentiment est qu’il convient d’éclaircir la connaissance de cette formation à un moment où ses positions politiques heurtent notre logique aussi bien tactique que stratégique face à la montée des périls : puissance de l’extrême droite, de l’intégrisme identitaire et religieux, de l’antisémitisme et de l’islamophobie. Il nous semble dans ce contexte d’autant plus important d’être capable de nous parler, ne serait-ce que pour que chacun sache à qui il parle et mesurer les profonds désaccords qui nous séparent, certains irréconciliables, d’autres non.

    • Vacarme critique les Indigènes : la faillite du matérialisme abstrait
      http://indigenes-republique.fr/vacarme-critique-les-indigenes-la-faillite-du-materialisme-abst

      Le trio adopte l’idée anticapitaliste la plus classique selon laquelle le capitalisme aurait entraîné, au gré des besoins de l’accumulation, divers processus de racialisation (je ne m’attarderai pas sur sa tendance à appuyer lourdement sur l’origine sociale de la race comme sur une trouvaille brillante – dans un débat sur le PIR cela revient, en termes de pertinence, à rappeler que l’eau mouille ou que le soleil chauffe). Or il n’est pas absurde, dans une perspective décoloniale, de formuler exactement l’hypothèse inverse : c’est le capitalisme qui naît du racisme . J’ai évoqué plus haut la conquête des Amériques. L’étape historique suivante, celle de la traite transatlantique, est ici décisive. Ce ne sont pas de nébuleuses « dynamiques actuelles » qui lient le racisme aux échanges économiques globaux : il en va ainsi depuis le XVIe siècle ! Les remarques de CLR James selon lesquelles les plantations de la Caraïbe préfigurent les usines de l’ère industrielle sont aujourd’hui bien connues. L’historien Marcus Rediker va plus loin encore dans ses recherches sur le navire négrier qui, selon lui, fut « l’élément central d’un ensemble de bouleversements économiques profonds et interdépendants qui furent essentiels à l’essor du capitalisme »[5]. En effet, le négrier, liant intimement accumulation et répression, était à la fois une factory, c’est-à-dire un établissement commercial itinérant, et la première forme de prison moderne, en un temps où elle n’existait pas encore sur la terre ferme.

    • La philosophie des Indigènes cherche à s’épargner deux écueils, qui prennent la forme de deux injonctions. D’un côté, l’alliance de la contrainte et de l’essence (« Reste ce que tu es ! »), et de l’autre la contrainte d’être sans essence (« Deviens rien ! »). Le #PIR envisage une essence sans contrainte, c’est-à-dire la reconnaissance des attachements, des croyances dans lesquelles sont pris les individus et les groupes, la finitude de leur mémoire. Mais aussi la connaissance du fait que ces attachements eux-mêmes peuvent devenir mortifères, et ne méritent jamais d’être pris pour des fins en soi. Les temps, les circonstances changent, et il peut être nécessaire de se détacher, d’abandonner ce qu’autrefois l’on a cru ; mais il n’y a pas de révolution mémorielle. La transformation est possible, pas le devenir rien. Frantz Fanon comparait ce processus à l’émergence de la maturité. L’adolescent rêve d’échapper à toutes les règles, de tout tenir de lui-même. Mais l’erreur serait de s’imaginer, au contraire, que devenir adulte revient à suivre des règles définies, à savoir se conformer. En vérité, être adulte c’est connaître son héritage, mais savoir qu’il est possible de le trahir, c’est-à-dire d’enfreindre les règles pour en établir de nouvelles, pour faire advenir le mieux. Faire vivre son essence, c’est-à-dire sa mémoire, sans jamais en être l’esclave, voilà une position #décoloniale. La politique indigène, comme le souligne Sadri Khiari, ne vise pas l’homogénéité [21].

      Ce passage me rappelle l’ouverture du chantier #race du numéro 71, « la race n’existe pas, mais elle tue »
      http://www.vacarme.org/article2736.html

      Autre passage :

      Cette gauche-là hait le PIR parce qu’il existe. Sa rancune ne procède pas du mal qu’il lui fait, mais elle ne lui pardonne pas de ne pas lui vouer l’admiration qui lui fait tant défaut. Sa pratique religieuse et incantatoire de la politique se trouvant dans l’impasse, elle cherche des coupables. Or son erreur est d’avoir pris ses principes, sa morale généreuse, fondée sur la défense de tous les opprimés en vrac (prolos, femmes, homos, indigènes, etc.), pour une perspective et un projet politique. Cet idéalisme s’étant révélé impraticable sur le terrain, ceux qui le prônent en sont réduits à persifler sur quiconque privilégie la cohérence plutôt que l’orgueil. Cette frange de la gauche française crache sur le PIR comme elle retweet sur Podemos : pour oublier qu’elle ne peut pas. Au lieu de faire des Indigènes l’objet de sa colère, elle devrait chercher les causes de sa propre impuissance.

      Je ne sais pas si @Vacarme est cette « gauche qui hait le PIR » : les auteures de la réponse controversée ne sont pas membres du CR, et tout commence tout de même par un long entretien avec l’une de ses porte-paroles (histoire de nuancer l’accusation faite de "verrouiller le débat")… mais en tout cas, spécialiste de l’impuissance politique, c’est très clair !

      Cf. « Yes we can’t »
      http://www.vacarme.org/article2275.html

      cc @pguilli @caroiza @vally @baroug

  • Les gouines of color sont-elles des indigènes comme les autres ? À celles et ceux qui nous reprochent de diviser la classe des femmes
    http://www.vacarme.org/article2776.html

    La vie, combien de dimensions ? On n’est jamais seulement femme, contre d’autres identités possibles. De même qu’on n’est jamais seulement noire, ou arabe, ou d’origine musulmane. Il est politiquement heureux de pouvoir penser qu’un sujet est toujours un autre, qu’il a toujours la possibilité d’être un autre. C’est ce qu’une militante, possiblement lesbienne, possiblement féministe, possiblement blédarde, possiblement of color, possiblement racisée, possiblement ce que son être désirant veut qu’elle soit, ou qu’elle combatte, expose à Vacarme.

  • kung-fu & cruauté
    http://www.vacarme.org/article2770.html

    Le wing chun est un art martial aux prises avec la cruauté, cette part inconvertible de la violence. Un art qui la réfléchit dans une négociation entre la force et le droit. Art de contrôle non pas seulement de la violence mais bien de la cruauté. Pas de contre-attaque efficace, sans un moment moral, intellectuel et politique d’anti-violence. À programmer dans la pluridisciplinarité des collèges, car nous avons besoin du wing chun comme nous avons besoin de philosophie.